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Promener

Définitions de « promener »

Trésor de la Langue Française informatisé

PROMENER, verbe

I. − Empl. trans.
A. − [Le suj. désigne une pers.] Mener dehors pour prendre l'air, pour distraire, pour voir des choses, pour flâner.
1. Qqn1promène qqn2.C'est moi qui suis chargé de promener les étrangers dans Paris et de leur détailler les beautés de la capitale (Meilhac, Halévy,Vie paris., 1867, i, 7, p.9).MmePichon promenait Lilitte, alors âgée de dix-huit mois, dans une petite voiture d'osier (Zola,Pot Bouille, 1882, p.62).Il me promenait avec lui dans Paris, en me tenant par la main, lui vieux garçon coureur et sanguin, moi petit gamin qui en avais grand peur (Léautaud,In memor., 1905, p.215).
Loc. verb. [Le compl. d'obj. désigne un attribut de qqn1] Synon. de parcourir.Promener sa personne. Nous promenions nos pas dans les sentiers solitaires de ces forêts inconnues (Crèvecoeur,Voyage, t.1, 1801, p.82).En France, en Allemagne, en Angleterre, en Amérique, j'ai promené ma carcasse d'un bout du monde à l'autre (Zola,Travail, t.2, 1901, p.247).
P. anal. Emmener dehors. Une grosse poule gloussante promenait un bataillon de poussins (...) à travers le petit jardin (Maupass.,Contes et nouv., t.2, Reine H., 1883, p.831).
2. Qqn promène un animal. Il y avait du monde, sur les bancs, (...) des flâneurs qui regardaient les navires, (...) des vieilles femmes qui promenaient en laisse leur compagnon à quatre pattes (Van der Meersch,Empreinte dieu, 1936, p.245).
Promener un cheval. Faire marcher lentement un cheval soit en le montant, soit en le tenant par la bride. L'aga déjeunait. Ses esclaves promenaient ses chevaux (Lamart.,Voy. Orient, t.2, 1835, p.64).
B. −
1. [L'agent se déplace] Faire aller (d'un côté, de l'autre); déplacer, emmener avec soi (d'un endroit à un autre).
a) Qqn1promène qqn2.C'était Marcoux. Du matin au soir, il promenait des gens à travers les services (Péladan,Vice supr., 1884, p.206).Il avait l'héroïsme court; promener Andrée dans les réunions, plutôt mourir (Montherl.,J. filles, 1936, p.956).
Empl. factitif. Il est encore fréquent, dans les [mairies des] villes importantes, de promener les gens de guichet en guichet, d'étage en étage (Fonteneau,Cons. munic., 1965, p.133).
Au fig. Emmener avec soi par l'imagination. Ce genre de poésie est vénéneux (...). Le volume commence par l'érotisme pour finir par le suicide, et promène le lecteur de la sensualité oublieuse au désespoir morne (Amiel,Journal, 1866, p.57).Le Londres de Shakespeare, où l'action nous promène de Westminster à Whitehall (Morand,Londres, 1933, p.13).
b) Qqn promène qqc.
[Qqc. désigne un inanimé concr.] On se contente, dans les grands logis comme dans les églises, de promener un chariot de feu, chargé d'une braise de charbon de bois (Faral,Vie temps st Louis, 1942, p.161):
1. ... un professeur de cosmographie, pour expliquer à des enfants la rotation de la terre autour du soleil, promène une orange autour du poêle central de la classe, qui représente le soleil, il reconstitue à sa façon le mécanisme réel... Ruyer,Esq. philos. struct., 1930, p.237.
En partic. [Qqc. désigne une partie, un attribut de qqn sur lequel on attire l'attention] Roubaud promène entre les tables son petit ventre rondelet (Colette,Cl. école, 1900, p.197).Après leur tour de chant, ces dames doivent promener leur grâce et leur sourire dans le jardin ou autour des tables où sautent les bouchons de champagne (G. Leroux,Roul. tsar, 1912, p.82).La servante ne s'éveillait que deux heures après s'être levée. Elle promenait sa voix de somnambule par toute la maison. Mithridate. −«Mithridate est mort», criait-elle (Jouhandeau,M. Godeau, 1926, p.145).
[Qqc. désigne un inanimé abstr.] Ce vetéran de la fatuité va de boudoir en boudoir promener d'insipides hommages que plusieurs jeunes femmes écoutent encore par respect pour la mémoire de leurs grand'mères (Jouy,Hermite, t.3, 1813, p.83).Elle promène tous les petits racontars de son quartier de maison en maison (Larbaud,Barnabooth, 1913, p.159).
En partic. [Qqc. désigne un affect de qqn] Je promenais partout ma peine vagabonde (Gautier,Comédie mort, 1838, p.44).Parvenu à son grade à coups de rengagements, de larmoiements et de platitudes, il promenait à travers la vie l'âpre conscience de sa non-valeur (Courteline,Train 8 h 47, 1888, 1repart., ii, p.16).Son train était à neuf heures. Où promener jusque-là sa mélancolie? (Benjamin,Gaspard, 1915, p.105).
c) P. métaph. Qqc. promène qqc.2[Qqc.2désigne une partie de qqc.1]Les scènes calmes et splendides où la lune promenait ses lueurs au-dessus des eaux et des neiges (Lamart.,Confid., 1849, p.300).
2. [L'agent ne se déplace pas] Laisser aller, déplacer (d'un côté et d'autre).
a) Qqn promène qqc.
[Qqc. désigne un obj. concr. auquel on imprime un mouvement] Un vieillard qui promenoit régulièrement sur une espèce de guitare, garnie d'une seule corde de crin, un archet grossier (Nodier,J. Sbogar, 1818, p.103).Il en avala de dépit la couleur du pinceau qu'il promenait sur une aquarelle (Goncourt,Ch. Demailly, 1860, p.242).Il promena le rasoir sur sa joue gauche (Aymé,Jument, 1933, p.248).
En partic. [Qqc. désigne une partie du corps de qqn] Promener ses regards. Elle promenait machinalement ses lèvres sur le tissu satiné de ses bras fins et dodus (Rolland,J.-Chr., Antoinette, 1908, p.837):
2. Mademoiselle de Balder était tout heureuse d'avoir provisoirement la jouissance d'un piano; depuis que Bastien était parti, elle s'était assise devant l'instrument et n'avait cessé de promener ses belles mains sur le clavier, répétant tous les morceaux qui lui rappelaient son enfance. Ponson du Terr.,Rocambole, t.1, 1859, p.326.
b) P. métaph. Qqc.1promène qqc.2[Qqc.2désigne une partie de qqc.1]L'Eurotas promenoit son cours tortueux dans cette riante solitude (Chateaubr.,Martyrs, t.2, 1810, p.187).La vallée a pris dès lors la forme et les proportions d'un grand cirque. La Seine y promène ses méandres (Vidal de La Bl.,Tabl. géogr. Fr., 1908, p.131).
C. − Au fig., vieilli. Duper par des promesses vaines. Mener enfin la vie des grandes plumes du temps, avoir des créanciers et les payer aussi peu que possible, promener mes éditeurs (Reybaud,J. Paturot, 1842, p.68).Mon oncle (...) lui avait donné rendez-vous pour régler son compte... −Voilà six mois que vous me promenez, aujourd'hui je comptais sur votre parole (Malot,R. Kalbris, 1869, p.70).
II. − Empl. pronom.
A. −
1. [Le suj. désigne une pers.] Aller dehors pour prendre l'air, se distraire, flâner. À peine étions-nous descendus de voiture pour nous promener à pied, que nous apercevons un jeune homme (Sénac de Meilhan,Émigré, 1797, p.1555).Nous nous promenons, nous jasons, nous allons au hasard; nous sommes bien quand nous sommes ensemble (Senancour,Obermann, t.2, 1840, p.211).Ce soir, pour la première fois, je me promène avec plaisir au Quartier Latin (Renard,Journal, 1906, p.1031).
Allez vous promener, va te promener! [Manifestation d'humeur adressée à quelqu'un] (Dict. xixeet xxes.). V. envoyer promener (infra III B).
[Comme réaction à une situation présentée (par l'énonciation de va te promener) comme pénible] Synon. malheureusement, hélas, va te faire fiche (pop.).J'avais repris mon petit train-train. Et puis va te promener, voilà ma femme qui tombe malade! (Barrière, Capendu,Faux bonsh., 1856, iv, 2, p.149):
3. La vieille crut qu'on voulait se moquer d'elle, et (...) tomba sur le héros à coups de parapluie. Tartarin, un peu confus, se défendait de son mieux, parait les coups avec sa carabine, suait, soufflait, bondissait, criait: −«Mais Madame... mais Madame...» Va te promener! Madame était sourde, et sa vigueur le prouvait bien. A. Daudet,Tartarin de T., 1872, p.74.
2. P. anal. [Le suj. désigne un animal] Circuler, déambuler. Vals, forêts, marécages où se promènent les buffles et les hérons (Quinet,Ahasvérus, 1833, 2ejournée, p.157).Dans une mare immobile (...) des insectes à grandes pattes se promenaient sur la feuille des nénuphars (Flaub.,Champs et grèves, 1848, p.254).
B. − [Le suj. désigne une pers.] Se déplacer d'un côté, d'un autre, en marchant. J'allais dans sa chambre (...) pendant qu'il se promenait de long en large, toujours vif, animé, tantôt s'arrêtant, tantôt précipitant le pas (Renan,Souv. enf., 1883, p.252).Il m'arrive quelquefois de me promener dans la bibliothèque de la Chambre des députés (Barrès,Cahiers, t.6, 1908, p.340).
C. − P. anal. ou au fig.
1. Littér. Se déplacer, avancer avec lenteur.
a) [Le suj. désigne un inanimé concr.] La rivière (...) paraît plus limpide, plus paresseuse: elle se promène (Gozlan,Notaire, 1836, p.97).Une vieille lune usée se promène dans le bas du ciel (Colette,Naiss. jour, 1928, p.32).
Empl. pronom. Un roman est un miroir qui se promène sur une grande route. Tantôt il reflète à vos yeux l'azur des cieux, tantôt la fange des bourbiers de la route (Stendhal,Rouge et Noir, 1830, p.357).
b) [Le suj. désigne un inanimé abstr.] Où est donc ce niveau de la loi qui, dans une république, se promène également sur toutes les têtes? (Desmoulinsds Vx Cordelier, 1793-94, p.236).
2. SPORTS, p.iron. [Le suj. désigne une pers.] Gagner avec facilité, sans faire d'efforts. À Monaco Fangio a gagné en se promenant (Trintignant,Pilote de Courses, 1957ds Petiot 1982).
III. − Empl. intrans.
A. − Synon. (vieilli) de se promener.J'ai fait ma toilette en attendant le dîner, et après nous avons été promener dans la ville (Maine de Biran,Journal, 1816, p.205).Alors, ne reste pas dans ce trou sans air, qui pue la colle... va promener un peu! (Martin du G.,Thib., Été 14, 1936, p.717).
B. − [À l'inf., après les verbes faire, laisser, mener] Se promener. Madame de Pontcarré nous menait promener et jouer chez sa mère, qui avait un appartement au rez-de-chaussée et un jardin (Sand,Hist. vie, t.2, 1855, p.383).Les colonnes de pâles lycéens, en uniformes de prisonniers, que des surveillants d'internat mal nourris mènent encore promener, les jeudis et les dimanches dans les clairières suburbaines (J.-R. Bloch,Dest. du S., 1931, p.125).Mon boulot consistait encore, d'autre part, avant l'heure des cours, à faire promener et pisser les chiens de garde du magasin (Céline,Voyage, 1932, p.128).
Envoyer promener qqn. V. envoyer I B 1.
REM.1.
Pourmener (se), verbe pronom.,arch. plais., synon. de se promener.Je me pourmène en canot avec Achille (Flaub.,Corresp., 1844, p.150).
2.
Promener, subst. masc.,hapax. Histoire qui m'est demeurée des lectures de mon enfance et qui me revient dans mes promeners solitaires (E. de Guérin,Journal, 1838, p.234).
3.
Promenette, subst. fém.Nom donné à plusieurs systèmes différents utilisés dans l'apprentissage de la marche aux bébés; en partic., petit véhicule à roulettes à l'intérieur duquel on place le bébé qui peut alors se déplacer seul grâce à ses jambes. Ceintures à bretelles, dite promenette, pour bébé no1. On met cette ceinture aux petits enfants pour les soutenir et les empêcher de tomber, alors qu'on leur apprend à marcher seuls (La Poupée modèle, avr. 1880, p.118).
Prononc. et Orth.: [pʀ ɔmne], (il) promène [-mεn]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist.A. Trans. 1. 1365 «mener, faire aller en différents lieux» (Psautier lorr., éd. Fr. Apfelstedt, 79, 1: qui moinnes et promoinnes Joseph comme une berbis); 2. 1587 promener la haine (Fr. de La Noue, Discours pol. et milit., 75 ds Littré); 3. 1639 [éd.] «déplacer, faire aller et venir quelque chose» (Mairet, Le Grand et dernier Solyman, I, 3, Paris, A. Courbé, p.12); 1668 (Boileau, Satire, VIII, éd. A. Cahen, p.115, 288: il promene sa veuë). B. Pronom. 1. a) ca 1485 «aller d'un lieu à un autre (pour se détendre, prendre l'air ou sans intention définie)» (Myst. du V. Testament, éd. J. de Rothschild, indication scénique suivant le vers 42157); b) α) 1656 Qu'il se promène (Molière, Le Dépit amoureux, IV, 2, 1193, éd. E. Despois, t.1, p.481); β) 1665 envoyer promener (Id., Dom Juan, IV, 5, t.5, p.179); γ) 1676 allez vous promener (Mmede Sévigné, Lettre du 1erjuin ds Corresp., éd. R. Duchêne, t.2, p.306); 2. 1600 [éd.] «s'attacher successivement à (en parlant du regard, de la pensée)» (O. de Serres, Théâtre d'agriculture, Paris, Jamet Métayer, p.17: les yeux s'y [és montaignes] promenans à l'aise); 3. 1674 «aller çà et là (en parlant d'une chose)» (Boileau, Art poétique, chant I, 167, éd. Ch. H. Boudhors, p.86). C. Intrans. 1530 «se promener» (Palsgr., p.770b). Réfection, d'apr. les nombreux verbes commençant par pro-, de l'anc. verbe pourmener «mener, faire aller en différents endroits» (ca 1150, Thèbes, éd. Raynaud de Lage, 2763), formé à partir de pour-* et de mener*. On trouve, en 1640, dans Oudin Ital.-Fr., s.v. spasso: le François dit envoyer paistre, envoyer pourmener. Fréq. abs. littér.: 7858. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 11460, b) 15034; xxes.: a) 12007, b) 8358. Bbg. Quem. DDL t.14, 30.

Wiktionnaire

Verbe - français

promener \pʁɔ.mə.ne\ transitif 1er groupe (voir la conjugaison) (pronominal : se promener)

  1. Mener, conduire, faire aller quelqu’un de côté ou d’autre, soit pour l’amuser, soit pour qu’il prenne de l’exercice.
    • Promener un enfant, un vieillard, un malade.
    • Promener des étrangers par la ville, dans la ville, La leur faire parcourir, la leur faire voir.
    • Promener un cheval, le faire marcher doucement, soit en le tenant par la bride, soit en le montant.
    • Promener un chien.
  2. (Figuré) Faire aller ; porter de côté et d’autre.
    • Celui qui, au sommet de l’Etna promène à loisir ses yeux autour de lui, est principalement affecté par l’étendue et par la diversité du tableau. — (Edgar Poe, Eureka, 1848, traduction de Charles Baudelaire,)
    • Je commande un pastis, et je promène mon œil dans la salle. Rien que de très ordinaire : au bout du comptoir, un client quelconque joue au 421 avec une brune au décolleté vertigineux. — (Roger Borniche, L'indic, Grasset, 1977, chap.11)
    • Une dizaine de mioches assis sur une natte en raphia ânonnaient en chœur l'alphabet hébraïque dessiné sur une planche en bois d’arar (thuya) sur laquelle le rabbin promenait son doigt. — (Ami Bouganim, Vers la disparition d'Israël?, Seuil, 2012)
    • Promener son esprit, son imagination, ses pensées sur divers objets.
    • Ce romancier promène ses lecteurs dans toutes les parties du monde.
    • Il promène en tous lieux son inquiétude, son chagrin, son ennui, son oisiveté.
  3. (Figuré) (Familier) Abuser, lasser par des délais, par des promesses vaines, mener en bateau.
    • Promener quelqu’un.
    • Au lieu de me payer ce qu’il me doit, voilà six mois qu’il me promène.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

PROMENER. v. tr.
Mener, conduire, faire aller quelqu'un de côté ou d'autre, soit pour l'amuser, soit pour qu'il prenne de l'exercice. Promener un enfant, un vieillard, un malade. Promener des étrangers par la ville, dans la ville, La leur faire parcourir, la leur faire voir. Il m'est venu de province des parents que j'ai promenés par tout Paris, dans tout Paris. Promener un cheval, Le faire marcher doucement, soit en le tenant par la bride, soit en le montant. Promener un cheval échauffé avant de le mettre à l'écurie. On dit aussi Promener un chien.

PROMENER s'emploie aussi figurément et signifie Faire aller, porter de côté et d'autre. Promener sa vue, ses yeux, ses regards sur une assemblée. Promener son esprit, son imagination, ses pensées sur divers objets. Ce romancier promène ses lecteurs dans toutes les parties du monde. Promener ses rêveries. Il promène partout ses ridicules. Il promène en tous lieux son inquiétude, son chagrin, son ennui, son oisiveté. Fig. et fam., Promener quelqu'un, L'abuser, le lasser par des délais, par des promesses vaines. Au lieu de me payer ce qu'il me doit, voilà six mois qu'il me promène.

SE PROMENER signifie Marcher, aller à pied, à cheval, en voiture, etc., pour faire de l'exercice ou pour se divertir. Il se promène dans son jardin. Je me suis promené deux heures. Allons nous promener sur les boulevards. J'ai été me promener ce matin. Se promener à pied, à cheval, en voiture, en bateau. Se promener sur l'eau. Par impatience, par humeur, Allez vous promener se dit à une Personne dont on est mécontent, dont on veut se débarrasser. On dit de même : C'est un sot, un importun, qu'il aille se promener. Je l'ai envoyé promener. Dans cette dernière phrase, on sous-entend le pronom se.

SE PROMENER s'emploie aussi figurément, en parlant des Choses qui cheminent, qui errent. Un ruisseau qui se promène lentement dans la prairie. Mes regards se promenaient sur ces riches campagnes. Son esprit, son imagination se promène d'un objet à l'autre, Il change, elle change à tout moment d'objet.

Littré (1872-1877)

PROMENER (pro-me-né ; du temps de Chifflet, Gramm. p. 98, on disait également pourmener et promener. La syllabe me prend un accent grave quand la syllabe qui suit est muette : je promènerai) v. a.
  • 1Mener, faire aller en différents lieux. Thespis fut le premier qui, barbouillé de lie, Promena par les bourgs cette heureuse folie [la comédie naissante], Boileau, Art p. III. Le diable enfin qui toujours me promène Me fit partir ; le diable me ramène, Voltaire, Enf. prod. III, 3. Ne le promenez point dans les cercles, dans les brillantes assemblées, Rousseau, Ém. IV. Après avoir vécu familièrement avec le maréchal de Noailles, qui l'appelait son philosophe, il [Dumarsais] avait été longtemps promené sous ce titre dans plusieurs sociétés distinguées, Duclos, Œuv. t. x, p. 69.

    Fig. C'est promener la main d'une femme, et dire aux gens : la voulez-vous ? Marivaux, Sec. surpr. de l'am. II, 4.

  • 2Particulièrement, faire aller quelqu'un d'un endroit à un autre comme amusement ou comme exercice. Promener un enfant, un vieillard. Quatre bœufs attelés, d'un pas tranquille et lent, Promenaient dans Paris le monarque indolent, Boileau, Lutr. II.

    Promener des étrangers par la ville, dans la ville, la leur faire parcourir pour la satisfaction de leur curiosité.

  • 3Promener un cheval, le faire marcher doucement, soit en le tenant par la bride, soit en le montant. Il est au bout de la rue qui promène mon cheval, Hamilton, Gramm. 9.

    On dit de même : promener un chien.

    Promener un cheval en main, le promener sans être monté dessus.

    Promener un cheval dans la main et dans les talons, le gouverner avec la bride et l'éperon.

    Promener un cheval entre les deux talons, le mener au pas en le menant droit entre les deux talons.

  • 4 Fig. Faire aller çà et là. Promener ses pas, son regard, sa pensée. …Mes lieutenants ont encor depuis peu Promené dans son camp et le fer et le feu, Mairet, Soliman, I, 3. Ceux qui caressent également tout le monde, qui promènent leurs civilités à droite et à gauche, et courent à tous ceux qu'ils voient avec les mêmes embrassades et les mêmes protestations d'amitié, Molière, Impromptu, 3. Pour peu qu'un père de famille ait été absent de chez lui, il doit promener son esprit sur tous les fâcheux accidents que son retour peut rencontrer, Molière, Fourber. II, 8. Et promenait sur lui d'étincelants regards, Deshoulières, Poés. t. II, p. 38. Au milieu de Paris il promène sa vue, Boileau, Sat. VIII. Rions, chantons, dit cette troupe impie ; De fleurs en fleurs, de plaisirs en plaisirs, Promenons nos désirs, Racine, Ath. II, 9. Celui-ci [Caracalla] allait promener sa fureur dans tout l'univers, Montesquieu, Rom. 16. Qu'il est beau de le voir de dînés en dînés, Officieux lecteur de ses vers nouveau-nés, Promener chez les grands sa muse bien nourrie ! Gilbert, Le XVIIIe s. Je promène mes jours Du loisir au travail, du repos à l'étude, Delille, Dithyr. sur l'immort. de l'âme.
  • 5Faire aller çà et là l'idée d'un autre. Ce romancier promène ses lecteurs dans toutes les parties du monde, Dict. de l'Acad. Il me promène après de terrasse en terrasse, Boileau, Art p. I. Il promène l'attention sur de curieuses antiquités, Hamilton, Gramm. 1. Nouveau Mentor d'un nouveau Telémaque, Toi qui, le promenant par les siècles passés [lui enseignant l'histoire]…, Lamotte, dans DESFONTAINES.
  • 6Être cause d'une promenade, en parlant d'une chose. Faites-moi cette commission, cela vous promènera.
  • 7Il se dit des choses qui font aller çà et là d'autres choses. Insensible témoin des crimes de la terre, Dieu laisse au gré des vents promener son tonnerre, Bernis, Relig. veng. VI. Brûlez ces poupes et ces mâts Qui promènent vos maux de climats en climats, Delille, Énéide, v. L'Eurotas promenait son cours tortueux dans cette riante solitude, Chateaubriand, Mart. XI.

    Fig. Ma jalousie, à tout propos, Me promène sur ma disgrâce, Et plus mon esprit y repasse, Moins j'en puis débrouiller le funeste chaos, Molière, Amphit. III, 1. Chacun suit dans le monde une route incertaine, Selon que son erreur le joue et le promène, Boileau, Sat. IV.

  • 8Familièrement et fig. Promener quelqu'un, l'abuser, le lasser par des promesses vaines. Il m'a promené deux ans avant de me payer.
  • 9Se promener, v. réfl. Marcher, aller à pied ou à cheval, etc. pour faire de l'exercice ou pour se distraire. Je mande à mon fils que je n'ai que faire de lui, que je me promène, et qu'avec cela je l'envoie promener, Sévigné, 25 février 1685. Les sauvages ne savent ce que c'est que de se promener ; et rien ne les étonne plus dans nos manières que de nous voir aller en droite ligne, et revenir ensuite sur nos pas plusieurs fois de suite, Buffon, Hist. nat. Œuvr. t. IV, p. 332.

    Avec le verbe laisser et ellipse du pronom personnel. Qu'on me laisse ici promener toute seule, Molière, Am. magn. I, 6.

    Terme de dépit et d'humeur. Allez vous promener, se dit à une personne dont on est mécontent, dont on veut se débarrasser. Allez vous promener, madame la comtesse, de me venir proposer de ne vous point écrire ; apprenez que c'est ma joie et le plus grand plaisir que j'aie ici, Sévigné, 281. Là [à la cour] on se trouve toujours placé entre les grand merci et les va te promener, Al. Duval, Princ. des Ursins, III, 7.

    On dit de même : qu'il aille se promener, qu'il se promène. Va, va, je fais état de lui comme de toi, Dis-lui qu'il se promène, Molière, le Dép. IV, 2. Lui dire, sans tenir d'inutiles propos, Qu'il s'aille promener, et vous laisse en repos, Destouches, Phil. marié, III, 9.

    Envoyer promener, phrase peu polie par laquelle on dit qu'on s'est débarrassé de quelqu'un. Si j'avais été en votre place, je l'aurais envoyé promener, Molière, Festin, IV, 7. On dit qu'il a permission d'aller se promener dans ses abbayes ; on aurait dû l'envoyer promener quatre ans plutôt, D'Alembert, Lett. à Volt. 18 oct. 1760. Furia se fâcha, je m'emportai, et l'envoyai promener en termes qui ne se peuvent écrire, Courier, Lett. Renouard.

    Fig. Va te promener, la honte ! je veux rire et pleurer en même temps ; on ne sent pas deux fois ce que j'éprouve, Beaumarchais, Mar. de Fig. III, 18.

  • 10 Fig. Il se dit des choses qui errent, cheminent. J'aime mieux un ruisseau qui, sur la molle arène, Dans un pré plein de fleurs lentement se promène Qu'un torrent…, Boileau, Art p. I. Notre raison se promène par tous les ouvrages de Dieu, Bossuet, Conn. de Dieu, V, 6. Dans le vague avenir ma raison se promène, Ducis, Oscar, IV, 1.

REMARQUE

Dans le sens de marcher, c'est un verbe réfléchi, et l'on doit dire : allons nous promener et non pas : allons promener. C'est maintenant l'usage, et parler autrement est une faute commise par J. J. Rousseau, dans cette phrase : J'ai toutes les peines du monde à obtenir cinq ou six fois l'année qu'elle [Thérèse] veuille bien venir promener avec moi, Lett. à Mme de Créqui, sept. 1770. Mais Vaugelas considérait encore promener comme un verbe neutre, ainsi qu'avait fait le XVIe siècle.

HISTORIQUE

XVe s. [Les Romains] prirent le prudom qui bien avoit cent ans, et le menerent et le pourmenerent parmi Rome, Froissart, II, II, 20. Et qu'il y avoit largement gens qui se pourmenoient par les rues, Commines, I, 5.

XVIe s. Madame est en parfaite santé, ayant du tout recouvert le manger, dormir et proumener, Marguerite de Navarre, Lett. XXX. Si ne veux je pas pour ceste heure debatre ceste question tant pourmenée, assçavoir si…, La Boétie, VIII. Ceux qui abondent en ceste passion [la haine], trouveront assez de champs spacieux pour la promener, voire pour la lasser, Lanoue, 75. Dès la poincte du jour il se levoit, et, en se promenant devant son logis ou se tenant debout, recueilloit gracieusement tous ceulx qui le venoient saluer et visiter, Amyot, Cicéron, 45. Il sortit de son logis, et s'en alla sur la place promener avec ses amis, Amyot, Aratus, 7. Si des montaignes on a la veue longue, les yeux s'y promenans à l'aise, leur difficile accès donne beaucoup de peine aux pieds, De Serres, 17.

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

PROMENER, v. act. voyez Promenade.

Promener son cheval, en terme de Manege, c’est le mener doucement au pas. Le promener sur le droit, c’est le mener droit sans lui rien demander. Promener sur les voltes, c’est la même chose que passeger sur les voltes, voyez Volte & Passeger. Promener entre les deux talons, voyez Talon. Promener en main, c’est promener un cheval sans être monté dessus.

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Étymologie de « promener »

Berry, pourmener ; wallon, porminé ; du lat. prominare, de pro, et minare (voy. MENER).

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Réfection savante avec le préfixe pro-, de l’ancien français pourmener (« mener, faire aller en différents endroits »), formé à partir de pour- et de mener.
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Phonétique du mot « promener »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
promener prɔmne

Citations contenant le mot « promener »

  • Quand on est connu, aujourd’hui, le simple fait de se promener en public sans lunettes noires constitue presque un attentat à la pudeur.
    Philippe Bouvard
  • Week-end : profiter du week-end pour travailler un peu, se promener en débraillé, s’efforcer de ne pas manger.
    Alain Schifres — Le nouveau dictionnaire
  • Le château de Versailles réserve bien des secrets. Si les visiteurs venus du monde entier connaissent par cœur les trésors du palais, des Trianons ou du parc, ils sont certainement passés à côté de La Petite Venise. Caché dans l’ancienne demeure des gondoliers vénitiens invités par Louis XIV pour promener sa Majesté et la famille royale sur le Grand Canal du parc de Versailles, le restaurant propose de déjeuner dans un ancien garage à bateau superbement restauré ou sur la merveilleuse terrasse-jardin, à l’ombre des tilleuls et des marronniers. 
    Numéro Magazine — La Petite Venise au cœur du parc de Versailles
  • Pour qui peut se promener à loisir, même la jungle est une route royale.
    Proverbe cingalais
  • C’est ainsi que, depuis bien avant l’avènement de la COVID-19, le Québec distinct s’est vu frappé de plein fouet par cet autre virus qui nous a fait céder aux planchers « All the way », qui envoie promener nos chiens chez MarioDogs et nous envoie siroter un verre au Verdun Beach Guinguette, avec nos livres achetés chez Drawn & Quarterly, avant de terminer par un petit tatouage au Tattoo shop du coin. Maintenant, pourquoi nos villes n’ont-elles pas le pouvoir d’intervenir face à la prolifération de ces commerçants qui nous font courir à notre perte ?
    Le Journal de Montréal — L’autre pandémie | Le Journal de Montréal
  • Les paradoxes sont les robes que la vérité endosse pour quitter son puits et ne pas se promener indécemment chez les hommes.
  • Plutôt que de se promener sur la rive et regarder le poisson d'un oeil d'envie, mieux vaut rentrer chez soi et tisser un filet.
    Proverbe arabe
  • Le golf, ce n'est guère autre chose qu'une façon coûteuse de se promener.
    Michaël Parkinson
  • Il faut quelquefois se promener au fond de l'abîme. Même si je descends jusqu'en enfer, le bras de Dieu est assez long pour m'en retirer.
    Julien Green — Journal
  • À chaque étape validée, une vidéo, une photo ou un petit texte nous permet d’en apprendre plus sur la ville et ses luthiers. Le parcours permet de se promener en passant par des petites ruelles pas toujours empruntées par les usagers. L’itinéraire est agréable, ponctué par cinq étapes. En prenant son temps, il faut une petite heure pour terminer la promenade.
    Culture - Loisirs | On a testé pour vous le géocaching à Mirecourt
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Images d'illustration du mot « promener »

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Traductions du mot « promener »

Langue Traduction
Anglais walk
Espagnol pasear
Italien camminare
Allemand gehen
Chinois
Arabe على المشي
Portugais andar
Russe ходить
Japonais 歩く
Basque ibili
Corse marchjà
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Synonymes de « promener »

Source : synonymes de promener sur lebonsynonyme.fr

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Promener

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