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Borne

Variantes Singulier Pluriel
Féminin borne bornes

Définitions de « borne »

Trésor de la Langue Française informatisé

BORNE, subst. fém.

I.− [L'idée dominante est celle de limite et/ou de séparation]
A.− Bloc de pierre, poteau, etc. indiquant la limite d'un champ. Borne mitoyenne; planter, déplacer une borne :
1. En Normandie, quand deux paysans se sont mis d'accord sur leurs limites, ils font un trou de six pieds, y déposent une marque, par exemple, des bouteilles, recouvrent le tout avec de la terre et plantent une borne visible au-dessus. Tous les deux sont voleurs, et voudraient bien reculer la borne; en ce cas, la marque sert de témoin. Mais souvent, dès la première nuit, le plus rusé se relève, déterre les bouteilles, va les enfouir dix mètres plus avant dans le champ du voisin, laisse soigneusement la borne en place. Un an après, il se plaint qu'on a déplacé la borne. Enquête, vérification; la marque fait foi, et c'est le volé qui passe pour le voleur. Taine, Notes sur Paris,Vie et opinions de M. F.-T. Graindorge, 1867, p. 273.
2. Chaque hectare a son propriétaire, et l'on se dispute autour des bornes et des canaux d'irrigation. T'Serstevens, L'Itinéraire espagnol,1933, p. 65.
P. métaph. :
3. ... l'oncle Gustave, l'astronome, nous montrait, délimité entre des bornes que deux savants allemands déplaçaient chaque nuit, le petit champ obscur qu'il explorait et où il découvrait, avec des étoiles de onzième ou de dix-septième grandeur, le vrai journal du ciel. Giraudoux, Bella,1926, p. 18.
P. compar., expr. (Être, rester) planté comme une borne. (Être, rester) debout et immobile. Qu'est-ce que tu fais là, planté comme une borne? (Miomandre, Écrits sur de l'eau,1908, p. 81).
P. métaph. :
4. Ton extase opposait à mes brûlants esprits D'une entière beauté le marbre et le mépris... Mes pleurs n'ébranlaient point cette invincible borne! Valéry, Cantate du Narcisse,1939, p. 257.
B.− P. ext. [Le plus souvent au plur.]
1. [Pour indiquer les limites d'un territoire, d'un État, etc.] :
5. Regardez un peu ici, docteur Parpalaid. Vous connaissez la vue qu'on a de cette fenêtre. (...). Tout là-bas, le mont Aligre marque les bornes du canton. Romains, Knock,1923, p. 18.
Borne internationale :
6. Une cabane de terre et de pierres crevée, inhabitée, ancien poste de frontière sans doute, en face de la borne internationale, se montre seule, et dit en raccourci la désolation du lieu. Pesquidoux, Le Livre de raison,1925, p. 178.
P. anal. Les bornes du ciel, de l'horizon :
7. Le plus bel effet est au fond de la grotte dont il s'agit, quand le soleil y donne. J'en ai vu les rayons s'amortir insensiblement dans ce long détroit; comme on voit aux bornes de l'horizon, et sur le déclin du jour, cet astre radieux éteindre son flambeau dans les ondes frémissantes. Dusaulx, Voyage à Barège,t. 2, 1796, p. 94.
8. La rêverie devint solennelle et profonde, vague comme le lac brumeux, immense comme le ciel sans bornes. G. Sand, Lélia,1833, p. 37.
2. Au fig. [Domaine moral] Les (dernières) limites (de quelque chose). Sa passion n'eut désormais ni bornes, ni mesure (Stendhal, Le Rouge et le Noir,1830, p. 471);sa corruption semblait ne pas avoir de bornes (Balzac, Splendeurs et misères des courtisanes,1847, p. 78);mais la patience humaine a des bornes, et la mienne est à bout (Proust, Du côté de chez Swann,1913, p. 287):
9. Un jour viendra, et tout prochain qu'il est il me semble encore bien éloigné, où mes désirs n'auront plus de bornes comme mon bonheur, où ma vie sera complète, où mon âme appartiendra à ton âme, perpétuellement et éternellement. Hugo, Lettres à la fiancée,1822, p. 225.
10. ... le pays devait fixer à l'assemblée constituante une limite à sa durée, des bornes à ses attributions, un règlement quant à ses rapports avec l'exécutif. De Gaulle, Mémoires de guerre,1959, p. 264.
a) Loc. verbales. [Le compl. du nom est un subst. abstr.]
Franchir les bornes de. Je ne crois pas franchir les bornes du respect dont je fais profession pour le prince (Proust, À l'ombre des jeunes filles en fleurs,1918, p. 471):
11. Telle est la faiblesse humaine, que le talent, le génie, la vertu même, peuvent quelquefois franchir les bornes du devoir. Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 2, 1848, p. 276.
Passer, dépasser les bornes de. ,,Passer les bornes de la raison, de la modestie`` (Ac.1835-1932).Monsieur, dit le prince, vos équipées dépassent les bornes (T. Gautier, Le Capitaine Fracasse,1863, p. 424);le lendemain, Paul se sentit ridicule. Il s'avouait que son algarade passait les bornes (Cocteau, Les Enfants terribles,1929, p. 120):
12. ... toutes les lettres qu'il [Malherbe] a écrites sont d'un négligé et d'un trivial qui passent les bornes de la licence épistolaire. Sainte-Beuve, Tabl. hist. et crit. de la poésie fr. et du théâtre fr. au XVIes.,1828, p. 163.
13. ... une veuve de trois mois ne doit pratiquer aucun exercice, mais se promener à cheval sans garde du corps, cela dépassait les bornes. Mauriac, Le Nœud de vipères,1932, p. 124.
Absol. Aller trop loin :
14. ... vous en arrivez à vouloir me faire croire que la femme de mon neveu est ma femme! Vous comprenez que cela dépasse les bornes! Feydeau, La Dame de chez Maxim's,1914, p. 72.
Sortir des bornes de. Le discours ne sortit pas encore des bornes de la civilité (Balzac, La Peau de chagrin,1831, p. 51):
15. « Pourquoi ai-je été si long-temps sans vous voir? ... » Il y avoit, dans cette interrogation, toute la finesse, toute l'innocente coquetterie qu'une vierge, pure comme Annette, pouvoit y mettre sans sortir des bornes de la décente tendresse; ... Balzac, Annette et le criminel,t. 2, 1824, p. 171.
Reculer les bornes de. Le vacillement crapuleux des bougies reculait à l'infini les bornes de l'audace (Montherlant, Le Songe,1922, p. 208).
Mettre des bornes à. Mettre des bornes à son ambition; mettre des bornes au despotisme, à la puissance de quelqu'un. M. Necker cherchait sans cesse à mettre des bornes au pouvoir ministériel (Mme de Staël, Considérations sur les princ. événements de la Révolution fr.,t. 1, 1817, p. 70):
16. Simple commis parfumeur, il ne mettait point de bornes à son ambition; il avait embrassé la société par un coup-d'œil haineux en se disant : tu seras à moi! et il s'était juré à lui-même de ne se marier qu'à quarante ans. Balzac, César Birotteau,1837, p. 58.
b) Loc. adv. Sans bornes. Sans mesure; au plus haut degré. Une joie, un dévouement sans bornes.
II.− [L'idée dominante est celle de repère]
A.− Bloc de pierre, de maçonnerie, etc. servant de repère sur une voie, un parcours, etc.
1. ANTIQ. ROMAINE. Borne milliaire. Pour indiquer les milles sur les voies romaines. Borne du cirque. Bloc de pierre ou colonne placée à l'extrémité de la carrière et que devaient doubler les coureurs.
2. Moderne
Borne kilométrique. Pour indiquer les distances en kilomètres :
17. Au sortir de l'agglomération, la route nationale − R.N. 92, lisait-on à une borne − tourne brusquement à droite, pour éviter les côtes du bois de Rothone. Daniel-Rops, Mort, où est ta victoire?1934, p. 398.
P. méton., pop. Borne. Synon. de kilomètre.Une étape de cinq cents bornes.
Borne d'incendie. Bouche* d'incendie en forme de borne. Borne militaire. Pour indiquer les limites des terrains militaires.
Rem. Péj. stèle :
18. Le Nivernais est un être plat, sans esprit pratique, et le moins littéraire qui soit. Des peintres au mètre, oui, des sculpteurs pour bustes sur bornes, mais pas un artiste! Renard, Journal,1904, p. 932.
B.− [À l'idée de repère s'ajoute celle de protection] Bloc de pierre que l'on mettait à côté des portes, le long des murs, etc. pour les protéger du choc des roues des voitures. Mettre des bornes à une porte (Ac.1835-1932).Il s'adossa à l'une des bornes du porche Gondelaurier, déterminé à attendre que le capitaine sortît (Hugo, Notre-Dame de Paris,1832, p. 428):
19. Un trottoir étroit, très haut en été, se trouvait en hiver, quand la neige montait le niveau de la chaussée, à une hauteur raisonnable; d'anciennes bornes de pierre en marquaient le bord, les angles des rues. E. Triolet, Le Premier accroc coûte deux cents francs,1945, p. 273.
P. transpos. La rue. Un enfant de la borne. Orateur de borne. Orateur de place publique.
Expr. fig., vieilli. Mettre qqn à la borne. (À la rue).
C.− P. anal.
1. [Dans les jardins publ.] Siège circulaire dont le dossier central rappelle la forme d'une borne.
2. MAR. Bitte d'amarrage. Les ballots encombrent les trottoirs qu'hérissent des bornes en fonte, enroulées de câbles (Huysmans, L'Art mod.,1883, p. 218):
20. En faisant nos démarches, on se méfiait aussi du port, de passer trop près, à cause des bornes et des cordages, où l'on trébuche très facilement. Céline, Mort à crédit,1936, p. 138.
3. ÉLECTR. Partie d'un appareil électrique à laquelle on attache un fil pour le relier à un circuit extérieur. Borne positive, borne négative; les bornes d'une batterie (cf. cosse) :
21. ... le courant continu de la batterie traverse le récepteur. Il faut avoir bien soin de monter les écouteurs dans le bon sens. Ils portent gravé sur le boîtier, près de l'une des bornes, le signe (...). Il faut que la borne (...) soit reliée au fil positif : sans cette précaution on désaimante l'écouteur. A. Leclerc, Manuel de télégraphie et téléphonie,1924, p. 237.
P. métaph. :
22. L'intervention sans cesse promise céda la place au refus de descendre dans le monde vulgaire où nous vivons − et où nous vivons mal. Cette absence, et le sentiment que la direction des affaires humaines lui incombe, sont les deux bornes de la contradiction où s'enferme la philosophie bourgeoise. Nizan, Les Chiens de garde,1932, p. 99.
Rem. On rencontre dans la docum. le néol. bornillon, subst. masc. Petite borne (E. et J. de Goncourt, Manette Salomon, 1867, p. 363).
PRONONC. ET ORTH. − 1. Forme phon. : [bɔ ʀn]. Enq. : /boʀn/. 2. Forme graph. − Littré signale pour le sens fig. : ,,Sans bornes s'écrit avec un s; cela du moins est le plus usité; mais rien n'empêche d'écrire : sans borne``. Ac. (éd. 1798-1878) écrit l'expr. avec s. Cf. aussi Besch. 1845, Lar. 19e, Quillet 1965 et Dub. À comparer avec Rob. qui l'écrit sans s. Lar. encyclop. admet sans bornes ou sans borne.
ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Ca 1121 bodne (Voyage de Saint-Brendan, Oxford, éd. Waters, 1928, 1520 [trad. du lat. nuda petra ... in modum silicis de la Navigatio S. Brendani, v. éd. Waters, p. XCVII et 128] : Par un rochét sa veie tint, Une bodne puis i survint); ca 1175 bodnes « pierre plantée en terre pour servir de limite » (Chron. des Ducs de Normandie, éd. C. Fahlin, 10597-10600); ca 1280 bosne (G. d'Amiens, Escanor, 2815 dans T.-L., s.v. bone); entre 1180 et 1190 bornes (Lambert le Tort, A. de Bernay, Alexandre, 316, 25, ibid.); 2. entre 1200 et 1220 bone fig. « limite, terme » (R. de Houdenc, Méraugis, 3594, ibid.); 3. p. ext. a) 1680 « chasse-roue » (Rich.); b) 1701 borne de cirque (Fur.); c) 1867 borne kilométrique (Lar. 19e); d) 1899 électr. « serre-fil » (Nouv. Lar. ill.). Du b. lat. bodǐna, botǐna « borne », attesté dans la 1remoitié du viies. sous la forme butina (Loi Ripuaire, tit. 60 dans Nierm., s.v. bodina), et sous la forme bodina en 831-832 (De Monsabert, Ch. de Nouaillé, no13 p. 25, ibid.). Le b. lat. bodǐna est représenté en a. fr. par trois formes : bonne (d'où dérive abonner*), bosne et borne. En pic., le groupe δ /n a abouti à r/n (Fouché, p. 862; Gossen, Gramm. de l'a. pic., p. 107 § 50) d'où la forme borne*, qui l'a emporté en fr. mod. Botina, bodina serait d'orig. celt. (FEW t. 1, pp. 465-466, s.v. botina; REW4, no1235, s.v. *botǐna; Dottin, p. 235).
STAT. − Fréq. abs. littér. : 2 298. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 5 700, b) 2 762; xxes. : a) 2 558, b) 1 888.
BBG. − Dauzat Ling. fr. 1946, p. 222. − Nigra (C.). Metatesi. Z. rom. Philol. 1904, t. 28, p. 8. − Sain. Sources t. 1 1972 [1925], p. 126. − Termes techn. fr. Paris, 1972, p. 9. − Thurneysen 1884, p. 91.

Wiktionnaire

Nom commun - français

borne \bɔʁn\ féminin

  1. Pierre, arbre ou autre marque qui sert à séparer un champ d’avec un autre.
    • Un rapport et avis d'experts porte qu'il sera planté des bornes, pour limiter les fonds de Catherine Lambert et ceux des pères Jésuites. — (Paul Saint-Olive, Notice sur le territoire de la Tête-d'Or, Lyon : Aimé Vingtrinier, 1860, page 17)
  2. (Antiquité) Espèce de colonne qui marquait l’extrémité de la carrière dans les cirques des anciens.
    • Tourner autour de la borne. - Doubler la borne.
  3. (Par extension) Colonne qui marque les distances sur les routes, généralement, en kilomètres. On dit surtout dans ce sens « borne kilométrique ».
    • Nous atteindrons bientôt la dernière borne.
  4. (Par extension) (Familier) Un kilomètre.
    • Ils sont à quarante-cinq bornes d’ici.
    • J’ai regardé défiler les champs, en comptant les pylônes, et chaque pylône mettait une borne de plus entre Terminus et moi. — (Lolita Pille, Bubble gum, Bernard Grasset, Paris, 2004, ISBN 2-246-64411-9, ch. III, p. 42)
  5. Pierres plantées debout qu’on met à côté des portes, le long des murailles, ou à l’encoignure des édifices, pour empêcher qu’ils ne soient endommagés par les voitures, ou dont on borde un chemin, une place publique, un port, etc.
    • Mettre une borne contre un mur. Mettre des bornes à une porte. Cette place publique est entourée de bornes.
    • Monter sur une borne. Des bornes de granit. Une rangée de bornes liées par des barres de fer, par des chaînes.
  6. (Électricité) Pièce métallique souvent isolée sur laquelle se raccorde un conducteur électrique relié à un composant électrique.
    • Raccorder le câble B à la borne plus (+) de la batterie.
  7. Tout ce qui sépare un État, une province d’un autre.
    • Près de la borne où chaque État commence, Aucun épi n’est pur de sang humain. — (Pierre Jean de Béranger, Sainte alliance des peuples.)
    • Astracan est la borne de l’Asie et de l’Europe et peut faire le commerce de l’une et de l’autre. — (Voltaire, Russie, I, 1.)
    • Reculer les bornes d’un État. - Étendre les bornes de son Empire. - Fixer les bornes d’un empire.
    • Pour étendre les bornes de son royaume. — (François de Salignac de La Mothe-Fénelon, Les Aventures de Télémaque, XIV, 1699)
  8. (Mathématiques) Plus petit des majorants (borne supérieure), ou plus grand des minorants (borne inférieure) d’une partie d’un ensemble ordonné (partiellement ou totalement).
    • Prenez un nombre entre 0 et 100 (bornes incluses) ; les lettres comprises entre A et D (bornes incluses)
    • Pour la divisibilité, n’importe quel ensemble d’entiers possède une borne supérieure, appelée son « plus petit commun multiple ». Autrement dit, tout ensemble d’entiers a un ou plusieurs multiples, tous multiples du plus petit commun multiple de cet ensemble.
    • Dans l’affaire du meurtre de Christina […] la police put […] formuler une hypothèse sur la population à laquelle le coupable appartenait (à savoir les hommes âgés de 18 à 30 ans vivant à Oldenburg et dans ses environs). […] Une manière de traiter cette incertitude consiste à estimer des bornes inférieure et supérieure de la taille du groupe ; autrement dit à commencer par deux cas extrêmes. Par exemple, dans le cas de Christina, on pouvait prendre les 18 000 hommes âgés de 18 à 30 ans comme borne inférieure et le nombre, plus grand, d’hommes âgés de 16 à 50 ans comme borne supérieure. — (Gerd Gigerenzer, Penser le risque : apprendre à vivre dans l’incertitude, Éditions Markus Haller, 2009, traduction de l’anglais Calculated Risks: How to Know When Numbers Deceive You)
  9. (Au pluriel) Extrémité, fin de l’étendue, de la durée.
    • Empire qui n’aura point d’autres bornes que celles du monde. — (Jacques-Bénigne Bossuet, Historique II, 4.)
    • Dans le lointain, l’œil ne rencontre d’autres bornes que les collines du Cher, dont les cimes dessinaient en ce moment des lignes lumineuses sur le transparent azur du ciel. — (Honoré de Balzac, La Femme de trente ans, Paris, 1832)
  10. (Au pluriel) (Figuré) Limite, au sens moral.
    • […] ; elle lui jura de ne jamais donner le moindre chagrin à ses parents, de ne jamais sortir des bornes imposées à une jeune fille ; […]. — (Honoré de Balzac, Modeste Mignon, 1844)
    • […] l’Assemblée proclama d’abord cette formule solennelle: Citoyens, la patrie est en danger ! L’exaltation révolutionnaire ne connut plus de bornes, tous les hommes en état de porter les armes furent mis en activité. — (Alfred Barbou, Les Trois Républiques françaises, A. Duquesne, 1879)
    • Être du Tout-Paris inspire immédiatement à celui qui a cet honneur un orgueil sans bornes. Il méprise autour de lui — même dans ses amis et connaissances — quiconque n'en est pas ; […]. — (Anatole Claveau, Le Tout-Paris, dans Sermons laïques, Paris : Paul Ollendorff, 1898, 3e éd., p.22 & 23)
    • Arguant des cas tératologiques, Locke montre que « les bornes des espèces sont établies par les hommes et non par la nature, […] ». — (Louis Rougier, Histoire d’une faillite philosophique: la Scolastique, 1925, éd.1966)
    • Encore faut-il donner des bornes à cette lettre. — (Marquise de Sévigné, lettre 377)
    • Ce n’est pas à mon âge, aux bornes de la vie[…] — (Voltaire, Fanat. I, 1.)
    • Son orgueil s’éleva au delà de toutes bornes. — (Jacques-Bénigne Bossuet, Historique III, 4.)
    • Son esprit a des bornes et sa vertu en a aussi. — (Fénelon, Les Aventures de Télémaque, XII)
    • L’ambition s’est jouée, sans aucune borne, de la vie des hommes. — (Jacques-Bénigne Bossuet, Historique II, 1.)
    • Son orgueil est sans borne ainsi que sa richesse. — (Jean Racine, Esth. II, 9.)
  11. (Vitrerie) Carreau en forme de losange ou en hexagone barlong.
  12. (Mobilier) Canapé circulaire avec un dossier au milieu.
  13. (Suisse) Cheminée dans laquelle on suspend de la viande de porc pour la faire fumer.
    • Dans l’outa où nous sommes maintenant, il y avait ce que l'on appelait la borne. La borne était une cheminée en planches, qui montait jusqu'au toit. [...] À l’intérieur de la borne on accrochait à des traverses de bois les provisions de viande le porc, le lard, les saucisse. — (Luc Tournier, Il était une fois la montagne, Éd. France-Empire, 1979)
    • Les jambons étaient confiés à un certain Veillard qui les hébergeait dans la grande cheminée de sa ferme pour les faire mûrir en de succulents jambons fumés, appelé en pays fribourgeois, « jambon à la borne », du nom de ce type de cheminées à l’ancienne en forme de pyramide tronquée et que l’on appelle précisément la borne. — (Jean-Pierre Ciocco, Leucémie mon ennemie’', Éd. du Panthéon, 2019)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

BORNE. n. f.
Pierre, arbre ou autre marque qui sert à séparer un champ d'avec un autre. Planter une borne. Asseoir des bornes. Arracher des bornes. Par extension, il désigne les Pierres qui marquent les distances sur les routes. Nous atteindrons bientôt la dernière borne. On dit surtout dans ce sens Bornes kilométriques. Il se dit aussi de l'Espèce de colonne qui marquait l'extrémité de la carrière dans les cirques des anciens. Tourner autour de la borne. Doubler la borne. Il se dit encore des Pierres plantées debout qu'on met à côté des portes, le long des murailles, ou à l'encoignure des édifices, pour empêcher qu'ils ne soient endommagés par les voitures ou dont on borde un chemin, une place publique, un port, etc. Mettre une borne contre un mur. Mettre des bornes à une porte. Cette place publique est entourée de bornes. Monter sur une borne. Des bornes de granit. Une rangée de bornes liées par des barres de fer, par des chaînes. On se sert quelquefois de vieux canons en guise de bornes. Borne-fontaine, Sorte de petite fontaine en forme de borne disposée sur la voie publique. Fam., Il est planté là comme une borne, se dit d'un Homme qui se tient debout et sans remuer. Au pluriel, il se dit de Tout ce qui sert à séparer un État, une province d'une autre. Reculer les bornes d'un État. Étendre les bornes de son Empire. Il se dit figurément pour Limites, au sens moral. Passer les bornes de la raison, de la modestie. Aller, passer au delà des bornes de la bienséance. Demeurer, se tenir, se renfermer dans les bornes les plus étroites du devoir. Franchir les bornes du respect. Se prescrire des bornes. Son ambition n'a point de bornes, est sans bornes, ne connaît point de bornes. Les bornes de l'esprit humain. Absolument, Passer les bornes, Aller trop loin, dépasser toute mesure. Cela passe toutes les bornes.

Littré (1872-1877)

BORNE (bor-n') s. f.
  • 1Tout ce qui sert à séparer deux champs l'un de l'autre. Le grand législateur des Juifs maudit celui qui change les bornes de l'héritage de son prochain, Fénelon, XXII, p. 357. Près de la borne où chaque État commence, Aucun épi n'est pur de sang humain, Béranger, Sainte alliance des peuples. Astracan est la borne de l'Asie et de l'Europe et peut faire le commerce de l'une et de l'autre, Voltaire, Russie, I, 1.

    Colonne qui marquait le bout de la carrière dans les cirques anciens.

    Borne milliaire, borne qui servait à indiquer, sur les chemins romains, chaque distance de mille pas. Par extension, sur nos routes, les bornes qui marquent les distances en kilomètres ou même en moins de mètres.

    Au plur. Tout ce qui sépare un État d'un autre. Fixer les bornes d'un empire. Pour étendre les bornes de son royaume, Fénelon, Tél. XI.

  • 2Extrémité, fin de l'étendue, de la durée. Régions qui n'auraient pas de bornes. Les bornes de la vie. Le ciel qui est sans bornes. Une durée qui n'avait point de bornes. Empire qui n'aura point d'autres bornes que celles du monde, Bossuet, Hist. II, 4. Quand la gloire t'appelle aux bornes de l'Asie…, Voltaire, M. de César, I, 1.
  • 3 Fig. Il donnait la satiété pour borne à ses désirs. Quelles doivent être les bornes de l'affection ? Les bornes que je me suis fixées à moi-même. Lorsque les passions ont passé toute borne. Douleur sans borne. La nature elle-même y mettra des bornes. Enfermer quelque chose dans des bornes étroites. Rester dans de justes bornes. Il a peine à ne point passer les bornes du devoir. Encore faut-il donner des bornes à cette lettre, Sévigné, 377. Jésus-Christ n'a pas donné d'autres bornes à sa durée, Bossuet, Hist. II, 13. Donner des bornes à ses conquêtes, Bossuet, ib. III, 6. Les succès de ce prince avaient leurs bornes marquées, Bossuet, ib. II, 5. Vous sortez des bornes étroites de votre âge, Bossuet, ib. Préf. Ce n'est pas à mon âge, aux bornes de la vie…, Voltaire, Fanat. I, 1. Il fait demeurer la malice Aux bornes de quelque devoir, Malherbe, II, 3. Ce grand esprit à qui Dieu n'a point donné de bornes, Guez de Balzac, Liv. I, lett. 2. Les mers mettront des bornes à nos fureurs, Sévigné, 423. Son orgueil s'éleva au delà de toutes bornes, Bossuet, Hist. III, 4. Passer les bornes de la soumission, Bossuet, III, Vêt. 1. Le peuple était retenu dans certaines bornes par les périls, Bossuet, Hist. III, 7. Franchir les bornes de toute pudeur, Pascal, Prov. 15. Leur cupidité qui ne souffre point de bornes, Pascal, Prov. 12. Son esprit a des bornes et sa vertu en a aussi, Fénelon, Tél. XI. Qui donnera des bornes à ce torrent ? Fénelon, ib. XXII. De l'austère pudeur les bornes sont passées, Racine, Phèd. III, 3. Quiconque a pu franchir les bornes légitimes, Racine, ib. IV, 2. Sa douleur a été au delà des bornes, Sévigné, 415. Ils ne donnent aucunes bornes à leurs attentats, Bossuet, Hist. II, 7. C'est les bornes qu'il faut garder, Pascal, Prov. 6. J'ai dit quelque chose de la licence où se jettent les esprits quand on ébranle les fondements de la religion et qu'on remue les bornes une fois posées, Bossuet, Reine d'Anglet. Cette grandeur sans borne et cet illustre rang, Corneille, Cinna, II, 1. Vous n'avez point de borne, et votre affection Passe votre promesse et mon ambition, Corneille, Nicom. IV, 5. Mets enfin quelque borne au mal qui me possède, Corneille, Cid, I, 2. L'ambition s'est jouée, sans aucune borne, de la vie des hommes, Bossuet, Hist. II, 1. Je saurai mettre une borne à tes déréglements, Molière, Fest. IV, 6. Dans ses prétentions une femme est sans borne, Boileau, Sat. X. Son orgueil est sans borne ainsi que sa richesse, Racine, Esth. II, 9. Ne donne point de borne à ma reconnaissance, Racine, ib. II, 5. Et leurs opinions [des anabaptistes] mêlées au calvinisme ont fait naître les indépendants, qui n'ont point eu de bornes, Bossuet, Reine d'Anglet.

    Sortir des bornes, faire ce qu'il ne convient pas de faire. Ah ! le mauvais garnement ! Sans respect il sort des bornes, Béranger, M. d'école.

  • 4Pierres plantées près des murs, à l'encoignure des édifices, à côté des portes, pour les préserver du choc des voitures ; ainsi nommées pour leur ressemblance avec les bornes des chemins, et appelées jadis boute-roue.

    Fig. Il est là planté comme une borne, il ne bouge non plus qu'une borne, il reste debout sans remuer.

    Borne-fontaine, petite fontaine en forme de borne.

  • 5Carreau de vitre en forme de losange.

HISTORIQUE

XIIe s. La ù les bodnes furent mises, Chron. des D. de Norm. 8431.

XIIIe s. Et quant les bones [à la terre] i metoient, Mainte fois s'entrecombatoient, Et se tolurent ce qu'il porent ; Li plus fort les greignors pars orent, la Rose, 9637. Envie fet homme tuer, Et si fet bonnes remuer, Envie fet rooingner terre, Envie met ou siecle guerre, Rutebeuf, II, 36.

XVIe s. Je y ay esté jusques on trou de Gilbathar, et remply les bondes de Hercules, et ay abattu des plus meures, Rabelais, Pant. II, 30. La borne, qui la veult garder, est un bien qui bride la puissance ; et qui ne la veult garder, est une preuve et tesmoignage qui argue l'injustice, Amyot, Numa, 28. La nature a mis une borne aux richesses, Amyot, Comment lire les poët. 57.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

BORNE. Ajoutez : - REM. Au fig. Sans bornes s'écrit avec un s ; cela du moins est le plus usité ; mais rien n'empêche d'écrire : sans borne.

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Étymologie de « borne »

Bourguig. boone ; Berry, bune, bone ; bas-lat. bódina, bódena, avec l'accent sur bo, comme l'indique l'ancien français bodne ; angl. bound. On trouve dans le celtique bun, fond, bas ; kymri, bon, base ; mais les anciennes formes bodina, bodne, ne permettent pas de recevoir cette étymologie ; et il faut recourir, comme Diez, au radical bod, qui subsiste dans le provençal boz-ola, borne, contracté en bola, boula ; bas-latin. bodula ; ce radical bod est, d'après Diez, le même que celui de boudin, bouder. La forme régulière est bodne, prononcé et écrit bone ou bonne ; bonde est le même avec le déplacement du d ; borne est due à l'intercalation accidentelle d'une r, comme dans hurler pour huller, intercalation qui n'était pas rare dans l'ancienne langue et dont il reste quelques traces dans la moderne. La borne serait la chose renflée.

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(vers 1180) Altération de l’ancien français bodne (1121), du latin médiéval bodĭna, butĭna « arbre frontière », d’origine obscure, peut-être du gaulois *budina.
borne est due à l’intercalation accidentelle d’un r, comme dans hurler pour huller, intercalation qui n’était pas rare dans l’ancienne langue et dont il reste quelques traces dans la moderne. La borne serait la chose renflée.
(Séparation d’États) Par extension des « bornes milliaires ».
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Phonétique du mot « borne »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
borne bɔrn

Fréquence d'apparition du mot « borne » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « borne »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « borne »

  • Gloire à qui n'ayant pas d'idéal sacro-saint Se borne à ne pas trop emmerder ses voisins.
    Georges Brassens — Don Juan
  • Dieu, c'est le jour sans borne et sans fin qui dit : j'aime.
    Victor Hugo — Dieu
  • Dans ses prétentions une femme est sans borne.
    Nicolas Boileau — Satire X
  • La révolution ne supprime pas les privilèges, elle se borne à changer les privilégiés.
    Philippe Bouvard
  • Plaisante justice qu' une rivière borne. Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au delà.
    Blaise Pascal — Pensées sur le religion
  • Savetier, borne ta critique à la chaussure !
    Apelle
  • Tout homme a vu le mur qui borne son esprit.
    Alfred de Vigny — Poèmes philosophiques
  • La jeunesse qui se borne au logis a toujours l’esprit borné.
    William Shakespeare — Les deux gentilshommes de Vérone
  • En bornant ses désirs, on borne ses besoins ; Le plus riche est celui qui désire le moins.
    J. Saintine
  • Un livre, c'est déjà une borne.
    Jules Renard — Journal 1893 - 1898
Voir toutes les citations du mot « borne » →

Traductions du mot « borne »

Langue Traduction
Anglais terminal
Espagnol terminal
Italien morsetto
Allemand anschluß
Portugais terminal
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Synonymes de « borne »

Source : synonymes de borne sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « borne »

Combien de points fait le mot borne au Scrabble ?

Nombre de points du mot borne au scrabble : 7 points

Borne

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