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Proférer

Définitions de « proférer »

Trésor de la Langue Française informatisé

PROFÉRER, verbe trans.

A. − [Le suj. désigne une pers.] Dire, prononcer (des paroles) à voix haute; exprimer (une opinion, un jugement) par la parole (souvent avec force, véhémence ou violence). La menace du mépris de toute la terre (...) est absolument le rien pour moi, lorsqu'il s'agit de proférer, de vociférer, ce qui me paraît être la vérité sainte (Bloy, Journal,1895, p. 49).Tout de suite elle proféra contre moi, contre ma mère les injures les plus cruelles, les reproches les plus passionnés (Tharaud, Maîtr. serv.,1911, p.283):
. ... il songea à réciter le Pater, s'arrêta à cette idée que cette prière était la plus difficile de toutes à prononcer, lorsqu'on en pèse au trébuchet les phrases. N'y déclare-t-on pas, en effet, à Dieu, qu'on pardonne les offenses de son prochain? Or, combien parmi ceux qui profèrent ces mots pardonnent aux autres? Combien parmi les catholiques qui ne mentent point, lorsqu'ils affirment à celui qui sait tout qu'ils sont sans haine? Huysmans, En route,t.1, 1895, p.94.
SYNT. Proférer un nom, une phrase; proférer une plainte, une prière; proférer des accusations, des menaces; proférer un blasphème, un juron, un mensonge; proférer nettement, distinctement (Ac. 1798-1878).
En incise. Tas de salauds, murmura-t-il. Tas de salauds, proféra-t-il d'une voix sourde. Tas de salauds, hurla-t-il (Queneau, Pierrot,1942, p.19).C'est d'un goût assez atroce, proféra Henri avec hésitation, −toute chose étant soudain plus supportable que le silence (Gracq, Beau tén.,1945, p.160).
Empl. pronom. à valeur passive. Je me tais, non sans me dire que si Gide n'était pas né en France, il eût mérité de naître en Écosse où pas une parole ne se profère qui ne soit prise au pied de la lettre (Green, Journal,1935, p.29).
P. anal. Faire entendre, émettre (un son, un cri). À notre approche, un chien courut à nous et proféra quelques abois étouffés (Fabre, Barnabé,1875, p.345).Les petits amours dorés et roses des balcons, les cariatides des avant-scènes, etc., sont multipliés et sculptés presque partout. C'est à leurs bouches, précisément, orifices de phonographes, que sont placés les petits trous à soufflets qui, mus par l'électricité, profèrent soit les oua-ouaou, soit les cris, les «à la porte, la cabale!» les rires, les sanglots (Villiers de L'I.-A., Contes cruels,1883, p.89).Quand elle sentit que l'heure solennelle approchait, elle les assembla tous autour d'elle, mais à ce moment fut prise d'une paralysie de la langue et ne put, au lieu d'un discours sublime, que proférer un immense cri (Gide, Journal,1927, p.854).
B. − [P. réf. au sens étymol.] Littér. Porter en avant, produire. Vah! en ce jour, malheur! L'or sera proféré, et l'ancien guerrier de l'incertitude se mettra droit pour le contempler (Claudel, Ville,1893, iii, p.400).Un homme tenant une chaise par le dossier la profère hautement contre des oiseaux que le public ne voit pas (Audiberti, Ampélour,1937, p.91).
Prononc. et Orth.: [pʀ ɔfeʀe], (il) profère [-fε:ʀ]. Ac. 1694, 1718: -ferer; dep. 1740: -férer. Étymol. et Hist. Ca 1265 (Brunet Latin, Trésor, éd. F. J. Carmody, II, 66, p.244). Empr. au lat. proferre (de pro «en avant» et ferre «porter») littéral. «porter en avant» d'où «présenter, faire voir, révéler, exposer une chose publiquement, porter à la connaissance». Fréq. abs. littér.: 571. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 746, b) 403; xxes.: a) 1164, b) 871.
DÉR.
Profération, subst. fém.,littér. Action de proférer; ce qui est proféré. Peut-être bien que cela ne veut rien dire; mais cela joue la profondeur et l'on reste, devant cette profération, tout pantois (Gide, Journal,, 1937, p.1264).Turandot, sûr de la noblesse de sa cause, fait fi de ces proférations (Queneau, Zazie,1959, p.44). [pʀ ɔfeʀasjɔ ̃]. 1reattest. 1937 (Gide, loc. cit.); de proférer, suff. -(at)ion*.

Wiktionnaire

Verbe - français

proférer \pʁɔ.fe.ʁe\ transitif 1er groupe (voir la conjugaison)

  1. Énoncer à voix haute ; dire avec force, avec véhémence.
    • — Je ne me permettrai jamais de proférer une autre opinion que la vôtre, monsieur le Grand Doyen. — (Germaine Acremant, Ces dames aux chapeaux verts, Plon, 1922, collection Le Livre de Poche, page 128.)
    • Pas tant de chichis, proféra la grosse voix de Tacherot. Appelle-la Carmen... Ça ne la gênera pas. — (Victor Méric, Les Compagnons de l’Escopette, Éditions de l’Épi, Paris, 1930, page 74)
    • On appelle maintenant Derbo, le grand ministre de Mamma. Celui-là fait quelques difficultés pour accepter son incarnation. C'est en vain que le chœur profère son pressant appel, en vain que les mains agitent les tambourins. — (Out-el-Kouloub, « Nazira », dans Trois contes de l'Amour et de la Mort, 1940)
    • Personne n’arrivait à placer un mot ni à proférer une consolation, toute la ville avait avalé sa langue dépassée par le triste sort du jeune homme. — (Lidya Kastoryano, Quand l'innocence avait un sens: Chronique d'une famille juive d'Istanbul d'entre les deux-guerres, Éditions Isis (Collection Les cahiers du Bosphore, n°9), 1993, p. 143)
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Littré (1872-1877)

PROFÉRER (pro-fé-ré. La syllabe fé prend un accent grave, quand la syllabe qui suit est muette : je profère ; excepté au futur et au conditionnel : je proférerai) v. a.
  • Prononcer à haute et intelligible voix. Madame votre mère fait une action digne de son ordinaire bonté de ne vouloir pas souffrir que l'on profère une si grande méchanceté sur ses terres, Voltaire, Lett. 56 (à Mlle de Rambouillet) Des termes dont un jour vous vous repentirez Avec plus de raison qu'ils ne sont proférés, Mairet, Soliman, IV, 4. Il est dit expressément qu'elle [la mère de Samuel] ne parlait que dans le cœur ; ses lèvres allaient sans proférer aucun mot, Bossuet, États d'orais. V, 12.

    Se proférer, v. réfl. Être proféré. Toutes les prostitutions [flatteries] qui se peuvent proférer, Saint-Simon, 73, 193.

SYNONYME

PROFÉRER, ARTICULER, PRONONCER. Proférer c'est prononcer des paroles à haute et intelligible voix. Articuler c'est prononcer distinctement ou marquer les syllabes en les liant ensemble. Prononcer c'est exprimer ou faire entendre par le moyen de la voix, Roubaud.

HISTORIQUE

XIIIe s. Jà soit ce que ti dit [tes dits] ne soient biau ne gaires poli, se tu les proferes gentilment et de bele maniere et de biau deport, si seront il loé, Latini, Trésor, p. 363.

XVIe s. Le tout feut par icelluy proferé avecques gestes tant propres, que…, Rabelais, Garg. I, 15. Nous disons sans apostrophes le harem, la haulteur… et, si ces mots se proferent sans grande aspiration, la faulte est enorme, Et. Dolet, dans LIVET, la Gramm. franç. p. 112.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

PROFÉRER. Ajoutez :
2Au sens légal, dire à haute voix ou à voix ordinaire dans un lieu public. Attendu qu'aux termes d'un arrêt rendu le 26 novembre 1834 par la cour de cassation, le mot proférer dont se sert la loi du 17 mai 1819, embrasse les propos tenus dans un lieu public sur le ton de la conversation ordinaire et n'excepte que ceux dits à voix basse ou à titre confidentiel, Gaz. des Trib. 28-29 déc. 1874, p. 1242, 3e col. Il [l'avocat] conclut en disant que les paroles prononcées, mais non proférées par le prévenu, ne peuvent rentrer dans l'énumération de l'article 1er de la loi de 1819 [du 17 mai], ib. 3e col.

HISTORIQUE

Ajoutez :

XVe s. Ledit Phelippe Sermoise, meu de mauvais courage, dist et prophera ces paroles…, Lettres de remission, dans Romania, avril 1873, p. 235.

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Étymologie de « proférer »

Du latin proferre.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Prov. proferre ; cat. proferir ; it. profferrire ; du lat. proferre, de pro, en avant, et ferre, porter.

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Phonétique du mot « proférer »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
proférer prɔfere

Fréquence d'apparition du mot « proférer » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « proférer »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « proférer »

  • L’homme a été interpellé en flagrant délit en train de frapper des passants avec une ceinture et de proférer des menaces de mort. Un passant s’est même vu prescrire deux jours d’ITT après avoir été blessé.
    Lyonmag.com — Villeurbanne : il frappe les passants avec sa ceinture et profère des menaces de mort
  • N’importe qui sait proférer des paroles menteuses ; les mensonges du corps exigent une autre science.
    François Mauriac — Thérèse Desqueyroux
  • Des manifestants qui protestaient contre le Premier ministre à Jérusalem ont remarqué l’homme et, après l’avoir entendu proférer des menaces contre celui-ci, sa femme, des médecins et des Arabes, l’ont dénoncé à la police, selon le site d’information Ynet.
    The Times of Israël — Un homme arrêté pour avoir menacé les Netanyahu transportait des lames de rasoir | The Times of Israël
  • Est-ce que vous croyez qu'on puisse faire l'amour sans proférer une parole ?
    Voltaire
  • Tests à l'appui, des psychologues avaient déjà montré, il y a quelques années, que les jurons avaient aussi un effet galvanisant : en proférer avant un exerce physique permet de produire un effort plus important - sans pour autant que les paramètres physiologiques comme le pouls soient touchés.
    Science-et-vie.com — Proférer des jurons améliorerait la tolérance à la douleur - Science & Vie
  • Harcèlement sexuel : Permet d'envoyer à peu près n'importe qui en prison pour peu qu'il soit de sexe masculin et ait un jour l'outrecuidance de proférer à l'encontre de sa victime supposée un quelconque geste d'amitié.
    Jean-Christophe Florentin — Le Guide de la parfaite salope
  • Tests à l'appui, des psychologues avaient déjà montré il y a quelques années que les jurons avaient aussi un effet galvanisant : en proférer avant un exerce physique permet de produire un effort plus important - sans pour autant que les paramètres physiologiques comme le pouls soient touchés.
    Science-et-vie.com — Proférer des injures améliore la tolérance à la douleur - Science & Vie
  • « Quelles sont les raisons qui poussent certains au dénigrement permanent de nos éleveurs et qui osent proférer des comparaisons avec les périodes les plus sombres de l'histoire de l'humanité, aussi calomnieuses qu'insultantes ? », s’interrogent-ils. « Les conditions sont réunies pour travailler ensemble collectivement et en bonne intelligence, car pour atteindre ces objectifs, un seul mot doit nous guider... l'entente. »
    Terre-net — Joël Giraud, secrétaire d'État à la ruralité dans le gouvernement Castex
  • Mardi prochain, lorsque vous trouverez Henriette en train de coudre à vous attendre, vous lui direz avant même qu’elle vous ait demandé quoi que ce soit : “Je t’ai menti, comme tu t’en es bien doutée ; ce n’est pas pour la maison Scabelli que je suis allé à Rome cette fois-ci, et c’est en effet pour cette raison que j’ai pris le train de huit heures dix et non l’autre, le plus rapide, le plus commode, qui n’a pas de troisième classe ; c’est uniquement pour Cécile que je suis allé à Rome cette fois-ci, pour lui prouver que je l’ai choisie définitivement contre toi, pour lui annoncer que j’ai enfin réussi à lui trouver une place à Paris, pour lui demander de venir afin qu’elle soit toujours avec moi, afin qu’elle me donne cette vie extraordinaire que tu n’as pas été capable de m’apporter et que moi non plus je n’ai pas su t’offrir ; je le reconnais, je suis coupable à ton égard, c’est entendu, je suis prêt à accepter, à approuver tous tes reproches, à me charger de toutes les fautes que tu voudras si cela peut t’aider le moins du monde à te consoler, à atténuer le choc, mais il est trop tard maintenant, les jeux sont faits, je n’y puis rien changer, ce voyage a eu lieu, Cécile va venir • tu sais bien que je ne suis pas une si grande perte, ce n’est pas la peine de fondre en larmes ainsi…”Mais vous savez bien qu’elle ne pleurera nullement, qu’elle se contentera de vous regarder sans proférer une parole, qu’elle vous laissera discourir sans vous interrompre, que c’est vous, tout seul, par lassitude, qui vous arrêterez, et qu’à ce moment-là vous vous apercevrez que vous êtes dans votre chambre, qu’elle est déjà couchée, qu’elle est en train de coudre, qu’il est tard, que vous êtes fatigué de ce voyage, qu’il pleut sur la place.
    Michel Butor — La Modification

Traductions du mot « proférer »

Langue Traduction
Anglais utter
Espagnol pronunciar
Italien totale
Allemand äußern
Chinois 说出
Arabe مطلق كلى كامل
Portugais total
Russe выговорить
Japonais 全く
Basque utter
Corse utter
Source : Google Translate API

Antonymes de « proférer »

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Nombre de points du mot proférer au scrabble : 12 points

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