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Moins

Définitions de « moins »

Trésor de la Langue Française informatisé

MOINS, adv., prép. et subst. masc.

I. − Adv. de quantité
A. − Compar. d'infériorité
1. [Dans un système compar., exprime une qualité ou une intensité inférieure, soit à cette même qualité ou intensité chez un autre être ou objet, soit à une autre qualité ou intensité]
a) [Le morphème compar., corrélatif de moins (mais qui peut être sous-entendu) est la conj. que] Moins... (que)
α) [La compar. concerne un autre être ou objet ; le terme comparé est]
[un adj. (ou un part.)]
Moins + adj. + que + prop.C'est très curieux, et bien moins convaincant que ne le sera l'Ode de Claudel (Rivière, Corresp.[avec Alain-Fournier], 1908, p.331).
Moins + adj. + que + subst./nominal.Quand tu me plaquais au milieu de la nuit pour aller coucher avec une «entraîneuse», dix fois moins belle que moi (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p.33).
Moins + adj.Une reine Frédérique moins jeune, moins aimable et moins belle (Lemaitre, Contemporains, 1885, p.187).L'art des bouquets et des guirlandes est moins soutenu (Alain, Beaux-arts, 1920, p.179):
1. «Clara,» m'a dit cette femme si vieille Qui chaque jour pleure encor son printemps, «Quoi! votre joue est déjà moins vermeille! Vous languissez, et n'avez que vingt ans!...» Béranger, Chans., t. 3, 1829, p.57.
[un adv.]
Moins + adv. + que + prop.Je ne sais pas pourquoi les Stamply dormiraient ici moins bien que n'y dormaient les La Seiglière (Sandeau, Mllede La Seiglière, 1848, p.9).
Moins + adv. + que + subst./nominal.Nous sommes bien contents, quand nous sommes amochés, qu'il y ait des infirmières pour s'occuper de nous moins durement que bien des salauds d'infirmiers militaires (Romains, Hommes bonne vol., 1938, p.127).
Moins + adv.Il avait en son maître la même foi que Pencroff, mais il la manifestait moins bruyamment (Verne, Île myst., 1874, p.175).
[un subst. ayant une valeur adj.] Tous ceux qui adorent quelque chose sont frères, ou certes moins ennemis que ceux qui n'adorent que l'intérêt et le plaisir (Renan, Avenir sc., 1890, p.482).
Fam. [Dans une constr. avec faire] Si tu m'avais écouté ces nuits-ci, au lieu de ronfler, ça me ferait moins deuil à présent, je me sentirais moins seul (Bernanos, M. Ouine, 1943, p.1440).
[un verbe]
Verbe + moins + prop.Elle l'intimidait moins que ne l'eût fait un article de Paris (Radiguet, Bal, 1923, p.179).
Verbe + moins + subst./nominal.Or la lune éclaire moins que mes douze flambeaux de cire (Louys, Aphrodite, 1896, p.51).
Verbe + moins.Si M. le Préfet avait consenti à écrire moins et à parler davantage, peut-être eussions-nous pu gagner les gens timides (Stendhal, L. Leuwen, t. 3, 1836, p.119).
En partic. [La compar. concerne un autre lieu ou un autre temps] Sais-tu, me dit-elle, que, depuis que tu es mon rom [homme] pour tout de bon, je t'aime moins que lorsque tu étais mon minchorro [soupirant]? (Mérimée, Carmen, 1847, p.65).J'y vais tout de même et m'y ennuie − mais moins que chez moi (Valéry, Corresp.[avec Gide], 1896, p.260).
Moins que jamais.J'en doute moins que jamais (Amiel, Journal, 1866, p.305).
β) [La compar. concerne une autre qualité ou intensité ou bien un autre procès ou une autre modalité du procès; le compl. du compar. est exprimé par]
[un adj. (un part.) ou un adv.] Il réfléchit moins vite que profondément. Cette situation est moins angoissante qu'absurde (Nizan, Conspir., 1938, p.104).
[un verbe]
[La compar. concerne le procès lui-même] Je connaissais Léonard beaucoup moins que je ne l'admirais (Valéry, Variété[I], 1924, p.181).
[La compar. concerne les compl. du verbe] Des souvenirs irritants qui engendraient moins l'amour que la fureur (Nizan, Conspir., 1938, p.32).Les Barbares aiment moins ce qui est beau que ce qui est riche (Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p.206).
Rem. Moins peut être modifié par: a) un multiplicatif. La course était ainsi deux fois moins longue (Gyp, Souv. pte fille, 1928, p.76). b) Un adv. d'intensité (beaucoup, bien, nettement, un peu, etc.). La signature de Madame de Chalais au bas du bulletin aura beaucoup moins de poids (Gyp, Souv. pte fille, 1928, p.153). D'autres étaient encore moins libres qu'eux (Camus, Peste, 1947, p.1354).
γ) [La compar. consiste à situer ce dont on parle sur une échelle et à le déclarer inférieur à une qualité signifiée par un adj. ou un subst. ou nominal à valeur d'adj. introd. par que]
Moins que + adj.Il sera indifférent; non pas froid... moins que froid... indifférent! (Gobineau, Pléiades, 1874, p.140).
Moins que + subst. à valeur d'adj.Constamment humilié par des échecs, persuadé qu'on lui imposait une épreuve dérisoire et que ces abstractions étaient moins que fumée, il s'ennuyait à mourir (Queffélec, Recteur, 1944, p.226).
Moins que rien.Cela se réduit − si on veut le réduire − à très peu de chose, à rien. À moins que rien (Gracq, Syrtes, 1951, p.101).
Emploi subst. Personne d'importance négligeable. Mais Djouma était un chien pareil à tous les chiens, c'est-à-dire un moins que rien (Maran, Batouala, 1925, p.137).
δ) [Précédé d'un adv. négatif, moins exprime l'égalité ou la supériorité] La femme n'est pas moins spontanée que l'homme dans ses affinités électives (Ménard, Rêv. païen, 1876, p.112).
Ni plus (...) ni moins (...) que.L'île de Sein, ni plus ni moins que la corbeille de Moïse, avait été protégée par Dieu (Queffélec, Recteur, 1944, p.52).
Non moins (...) que.Il eût ressenti (non moins que Balzac d'ailleurs) une satisfaction dont il n'eût pu cependant s'empêcher de se targuer (Proust, Sodome, 1922, p.1053).
Il n'en reste/demeure pas moins que.[Pour renforcer une énonciation] Il n'en restait pas moins qu'un prêtre avait fait d'elle la femme d'un misérable, pour toujours (G.Leroux, Parfum, 1908, p.13).
Ne (...) rien moins que.Ne (...) nullement. Qu'allait en dire mon collègue, qui n'est rien moins que bienveillant envers le questeur? (Maine de Biran, Journal, 1816, p.186).Moi qui ne suis rien moins que dévot − maman n'aime pas les prêtres, c'est connu (Bernanos, M. Ouine, 1943, p.1373).
Rien de moins que.Bel et bien. Pour penser autrement il ne faut rien de moins que se placer au point de vue des dieux (Valéry, Variété IV, 1938, p.34).
[En relation avec une concessive] Le lyrisme, quoique méconnu, n'en était pas moins le fait d'une inspiration élevée (Reybaud, J. Paturot, 1842, p.315).
Rem. L'usage observe mal la distinction entre rien moins que négatif et rien de moins que positif; rien moins que a fréq. un sens positif, particulièrement lorsqu'il est suivi d'un subst. ou d'un inf. ,,Le reste de la phrase doit déterminer le sens dans lequel est prise cette locution. «Vous lui devez de la reconnaissance, car il n'est rien moins que votre bienfaiteur», Il est véritablement votre bienfaiteur. «Vous pouvez vous dispenser de reconnaissance envers lui, car il n'est rien moins que votre bienfaiteur», Il n'est pas du tout votre bienfaiteur`` (Ac. 1835-1935).
b) [Dans une relation corrélative avec plus ou avec lui-même]
[Moins indique une variation proportionnelle ou inversement proportionnelle] Moins (...) (et) plus (...), plus (...) (et) moins (...), moins (et) moins (...).Plus j'en fais, moins je réussis (Florian, Fables, 1792, p.39).Moins on est encombré, moins on descend vite (Guitry, Veilleur, 1911, iii, p.24).Moins il en reste, plus elle est précieuse (Barrès, Cahiers, t. 11, 1914, p.95).
D'autant moins (...) que (...) (plus/moins...).Des difficultés d'autant moins surmontables qu'il s'agit d'opérations plus compliquées (Cournot, Fond. connaiss., 1851, p.113).
[Pour indiquer une approximation]
Un peu plus, un peu moins.Hé bien! je souffrirai; que fais-je autre chose? un peu plus, un peu moins... (Gobineau, Pléiades, 1874, p.140).
Plus ou moins.Les pointes plus ou moins aiguës ou arrondies, plus ou moins élevées, ont des formes (...) différentes (Crèvecoeur, Voyage, t. 2, 1801, p.156).
c) Moins de + subst.[Évoque une moindre quantité (le compl. de comparaison pouvant être implicite)]
Moins de + subst. (que...).Sur la route, d'abord moins de blé, plus de vignes (Michelet, Journal, 1835, p.200).Ce n'est nullement que Valéry ait moins de génie (Du Bos, Journal, 1927, p.189).
[Le compl. introd. par de est lui-même implicite] Il s'attendait à moins. Nous ne nous contenterons pas de moins (Clemenceau, Vers réparation, 1899, p.240).Je n'attendais pas moins de lui (Giraudoux, Intermezzo, 1933, i, 4, p.24).
[Le compl. du compar. est un numéral] Moins de...L'ébahissement des passants de moins de dix ans (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p.464).L'ingénieur, voulant produire un effet formidable, ne comptait pas consacrer moins de dix litres de nitro-glycérine à l'opération (Verne, Île myst., 1874, p.159).
Emploi subst. [Pour désigner une pers. n'ayant pas atteint un âge déterminé] Les moins de quarante ans ne me voient plus (Larbaud, Journal, 1934, p.332).
Rem. ,,Devant un nom de nombre, on emploie plus que, moins que quand on veut donner au second terme de la comparaison un relief plus accusé ou lui faire prendre une signification mathématique`` (Grev. 1969, § 851a). Il n'avait pourtant guère moins que cinquante ans (Michelet, Journal, 1834, p.134).
2. Dans des loc.
a) Loc. adj. Subst./pronom./numéral + de moins (... que)/en moins.Qui manque, qui vient en diminution. L'argent en moins et la diffamation en plus (Fourier, Nouv. monde industr., 1830, p.31).Elle a dix ans de moins que sa fille (Zola, Nana, 1880, p.1426).
[Pour signifier qu'un état ou une situation peut être (ou ne pas être) modifiée par une petite quantité] Qqc. de/en plus ou de/en moins.Ce qu'elles ont en plus ou en moins dans un certain sens corrige ce que nous avons en moins ou en plus dans le sens contraire (Sand, Hist. vie, t. 2, 1855, p.266).Quelques gouttes d'eau de plus ou de moins ont fait pencher Napoléon (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p.374).
b) Loc. adv.
À moins
Pour un moindre prix. Trois francs cinquante, dit Durgé: je ne travaille pas à moins (R. Bazin, Blé, 1907, p.197).
Pour une moindre cause. Je puis mourir d'étonnement; on meurt à moins (Lautréam., Chants Maldoror, 1869, p.127).Je suis content. On le serait à moins (Jarry, Ubu, 1895, i, 1, p.35).
En moins
En moins + adj. Avec une intensité, une qualité moindre. J'ai beaucoup d'elle, mais en moins bon et en moins rude (Sand, Hist. vie, t. 2, 1855, p.247).Voilà bien mes enthousiasmes, en moins long (Renard, Journal, 1900, p.612).
De moins en moins (avec un adj. ou un verbe). En diminuant graduellement. Tours en étages avec terrasses, de moins en moins larges (Michelet, Journal, 1831, p.102).Je te reconnais de moins en moins (Vogüé, Morts, 1899, p.427).
c) Loc. prép.
À moins de
À moins de + numéral. Pour une quantité (une distance, une somme...) inférieure. Elle ne trouverait rien de propre, à moins de cinq cents francs (Zola, Assommoir, 1877, p.478).À moins de cinquante mètres, ils distinguèrent nettement des hommes qui galopaient vers eux (Genevoix, Raboliot, 1925, p.268).
À moins de + subst./inf.; (littér.) à moins que de + inf. Sauf si, excepté si. À moins que d'être gentilhomme (Chamfort, Max. et pens., 1794, p.76).À moins d'être un colosse, à moins d'avoir des épaules d'Hercule, on reste ou sans coeur ou sans talent (Balzac, Illus. perdues, 1839, p.530).Le soir venu, à moins de pluie, on réaccompagnait à pied, de part et d'autre, ses visiteurs (Pesquidoux, Livre raison, 1928, p.78).
En moins de. Dans un temps inférieur à. Les bureaux n'étaient pas loin du camp, et nous y fûmes en moins de cinq minutes (About, Roi mont., 1857, p.80).
Littér. En moins de rien. En moins de rien il ne resta debout que le nouveau venu (Alain-Fournier, Meaulnes, 1913, p.147).
Fam. En moins de deux. Il faudrait voir à c'que vous vous fassiez la paire d'ici, en moins de deux (Barbusse, Feu, 1916, p.116).En moins de temps qu'il ne faut pour le dire. En moins de temps que je n'en mets à vous le dire, la prisonnière avait disparu (Mérimée, Carmen, 1847, p.36).
d) Loc. conj. À moins que (ne) + subj. [Envisage la possibilité d'un fait et signifie que si ce fait a lieu, ce qui est dit dans la principale (ou dans la phrase précédente) se trouve mis en cause] Sauf si, excepté si. M. Stangerson devait normalement passer à Valence à moins qu'il ne se soit arrêté en route (G.Leroux, Parfum, 1908, p.27).À moins qu'elle n'eût à le déshabiller ivre mort et qu'il ne s'endormît en travers du lit (Triolet, Prem. accroc, 1945, p.174).
B. − Superl. d'infériorité. Le moins
1. Emplois adv. [Exprime une qualité ou une intensité inférieure à celle de tout autre sujet ou objet (pris ou non dans une classe déterminée)]
a) Le(s) moins + adj. (ou subst. à valeur d'adj.)/ + verbe/ + adv. (+ de ...).
Le(s) moins + adj. (ou subst. à valeur d'adj.) + de ...Certes, ce n'est pas la moins pieuse de vos paroisses (Queffélec, Recteur, 1944, p.19).
Le(s) moins + adj. (ou subst. à valeur d'adj.).Cette dame (...) est l'écrivain le moins poète que je connaisse (Delécluze, Journal, 1827, p.372).Les songes du premier sommeil sont les moins purs et les moins importants (Béguin, Âme romant., 1939, p.82).
Rem. Le subst., à la différence de l'adj., est obligatoirement suivi par une relative : qui soit, que je connaisse, que j'aie jamais rencontré.
Le(s) moins + adv.La chose que les écoliers amnistient le moins facilement, c'est la soupe du pensionnat (Reybaud, J.Paturot, 1842, p.414).Il est conforme à la logique naturelle d'aller demander appui aux parties les plus anciennes de la pensée occidentale, les plus violemment opposées aux disciplines du XIXesiècle, et dont l'efficacité, depuis trois cents ans, a été le moins fréquemment mise à l'épreuve (J.-R. Bloch, Dest. du S., 1931, p.176).
Verbe + le moins.De vous tous, ma petite Marie est celle qui me préoccupe le moins (Becque, Corbeaux, 1882, i, 1, p.69):
2. Je ne crois pas qu'on m'aime, parce que je ne me soucie pas de me faire aimer. Savez-vous que c'est, à tout prendre, l'attitude qu'on pardonne le moins à un de ses semblables? Simenon, Vac. Maigret, 1948, p.55.
Le moins du monde
Pas le moins du monde. Absolument pas. Toute géométrie serait-elle ainsi devenue impossible? Pas le moins du monde (Poincaré, Valeur sc., 1905, p.109).
[Dans un cont. interrogatif ou hypothétique] Un tant soit peu. J'en ai assez pour que nous puissions voyager grandement pendant cinq ou six mois, si cela t'amuse le moins du monde (Dumas fils, Dame Camélias, 1848, p.195).S'il nous compromet le moins du monde, je t'avertis que je me débarrasserai de lui carrément (Zola, Ventre Paris, 1873, p.761).
Rem. Le superl. peut être renforcé: a) De beaucoup/de loin/.../le moins + adj./adv. Lui, de beaucoup le moins coupable des deux (Billy, Introïbo, 1939, p.231). b) Le moins + adj. (ou subst. à valeur d'adj.) possible/du monde/... Moi, qui suis le moins chimiste des hommes (Ponchon, Muse cabaret, 1920, p.239).
b) Emploi de nominal
Le moins de + subst. (ou pronom.) (que/qui...).La plus petite quantité de. J'écris le moins de lettres que je peux (Hugo, Corresp., 1864, p.475).
Le moins + rel.La moindre chose. Le moins que j'aurais risqué c'est que, dans l'intervalle de l'arrivée de ma lettre à sa publication, un homme d'esprit daignât prendre la chose sous sa responsabilité (Gobineau, Corresp.[avec Tocqueville], 1857, p.283).
Le moins que l'on puisse dire/faire.Le moins qu'on puisse faire, c'est d'indemniser des frais de l'entreprise (Marat, Pamphlets, Charlatans mod., 1791, p.275).Le moins que l'on puisse dire, c'est que vous avez agi avec une imprudence... bien coupable (Martin du G., Thib., Pénitenc., 1922, p.731).
Le moins + complétive.C'est (bien) le moins (que...). C'est la moindre des choses (que...). Pauvres créatures! si c'est un tort de les aimer, c'est bien le moins qu'on les plaigne (Dumas fils, Dame Camélias, 1848, p.23).Lorsqu'on s'est fait tuer pour le service de la France, que diable! c'est le moins qu'on ne vienne pas soi-même le raconter aux gens (Sandeau, Mllede La Seiglière, 1848, p.166).
Proverbe. Qui peut le plus peut le moins. Qui peut le plus peut le moins, le droit de tuer suppose celui de voler (Mille, Barnavaux, 1908, p.239).
2. Dans des loc. adv.
a) Au moins
En prenant la plus faible estimation. Il doit être au moins licencié, en droit ou ès sciences (Romains, Hommes bonne vol., 1932, p.147).
En partic.
[Suivi d'un numéral] Il devait être au moins une heure du matin (Radiguet, Bal, 1923, p.54).Il lui devait au moins deux mille francs (Céline, Mort à crédit, 1936, p.529).
[Portant sur l'énonciation; le locuteur suggère que ce qui est demandé et ce sur quoi il interroge est considéré par lui comme le minimum de ce qui est dû, de ce qu'il faut] Changez au moins cette chemise tachée; vous exhalez le sang! (Borel, Champavert, 1833, p.54).Et elle te plaît, au moins, cette montre? C'est M. l'abbé Petitjeannin qui l'a choisie (Aragon, Beaux quart., 1936, p.239).Il y en a pour cher, au moins, de tes cailloux? (Aragon, Beaux quart., 1936, p.350).
b) À tout le moins, tout au moins, pour le moins. En estimant les choses au minimum, en se bornant au minimum. Il n'y a là, à tout le moins, rien de plus déraisonnable (Breton, Nadja, 1928, p.137).Elles sont esclaves, écrivait-il, du schéma grec de la perception qui (sous sa forme la plus simple, tout au moins) oppose le sujet dans une attitude réceptive et à peine engagée (Mounier, Traité caract., 1946, p.44).Une voix molle au bout du fil, celle d'un homme qui en est à sa cinquième ou sixième heure de bridge et à son sixième petit verre pour le moins (Simenon, Vac. Maigret, 1948, p.81).
c) Des moins
Des moins + adj. plur.Parmi les moins. Ma vie est des moins singulières, je la veux ainsi (Bernanos, Joie, 1929, p.665).
Rare. Des moins + adj. sing. ou + adv.Très peu. Il chante des moins juste (Grev. 1969, § 828 N. B. 2 b).
d) Du moins
[Dans un système oppositionnel (souvent précédé de ou ou figurant dans une incise) sert à restreindre une assertion] Il nous fallut, du moins pour quelques temps, renoncer au spectacle dont on nous avait flattés (Dusaulx, Voy. Barège, t.1, 1796, p.233).Vous êtes charmante, belle Raimonde, ou du moins je suis charmé (Stendhal, L. Leuwen, t.3, 1836, p.32).Elle aimait son fiancé, du moins elle croyait l'aimer (Sandeau, Mllede La Seiglière, 1848, p.104).
[En corrélation avec sinon] Dès lors il était, sinon agréable, du moins naturel et honorable d'être à ce point méconnu par eux (Larbaud, Journal, 1935, p.359).Elle était sinon mince, du moins pas grasse (Triolet, Prem. accroc, 1945, p.229).
[Portant sur l'énonciation] Synon. de au moins, au minimum.Vous êtes du moins Andalouse. Il me semble le reconnaître à votre doux parler (Mérimée, Carmen, 1847, p.20).S'il a tous ces torts mystérieux, existe-t-il, du moins, quelqu'un qui ne les ait pas? (Gobineau, Pléiades, 1874, p.106).
II. − Préposition
A. − [Pour indiquer une soustraction]
1. [Dans une opération arithmétique] Six moins quatre égale deux (DG).
P. ext. Sauf. Tous sortent, moins Isabelle et le droguiste (Giraudoux, Intermezzo, 1933, i, 6, p.68):
3. Bientôt pour lui Eugénie fut l'idéal de la Marguerite de Goethe, moins la faute. Balzac, E. Grandet, 1834, p.170.
2. [Dans le décompte de l'heure, précédant le nom de nombre correspondant au nombre des minutes manquant pour que l'heure soit complète] Cinq heures moins un quart... Cinq heures moins cinq... Allons! (Barbusse, Feu, 1916, p.156).Sous un bec de gaz, Conan regarda son bracelet-montre: − Oh! bon Dieu! moins dix! (Vercel, Cap. Conan, 1934, p.57).
(Il était) moins cinq/moins une. Il s'en est fallu de très peu. C'était moins cinq, comme a dit Maurras (Giono, Colline, 1929, p.191).
B. − [Pour indiquer un nombre négatif]
1. [En alg.] Moins trois plus moins cinq égale moins huit. Un millième, ou dix puissance moins trois (10−3) (Lar. Lang. fr.).
2. [Dans la mesure de la température, pour indiquer les degrés au-dessous de zéro] Pierre H. qui s'est envolé vendredi 13 (le veinard!) pour Marseille, écrit qu'on a moins six sur la Côte d'Azur (Gide, Journal, 1946, p.304).
III. − Subst. masc. Symb. (−).
A. − MATH. Signe de la soustraction ou d'un nombre négatif. Plus par moins qui donne moins, (...) moins par moins qui donne plus (Bonald, Législ. primit., t.1, 1802, p.270).
P. anal. Votre vie intérieure, mon enfant, porte le signe moins (Bernanos, Imposture, 1927, p.320).
B. − IMPR. Tiret servant à séparer les phrases incidentes (en remplaçant des parenthèses), à marquer l'interlocution ou à remplacer parfois idem (d'apr. Comte-Pern. 1963).
Prononc. et Orth.: [mwε ̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. Adv., compar. de peu A. Modifie 1. ca 1135 un verbe (Couronnement de Louis, 865 ds T.-L.: Or te pris meins que al comencement); 1155 (Wace, Brut, 1768, ibid.: Mais tu m'as regëi a front Que meins m'eimes qu'eles ne font); 1174-76 (Guernes de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, 362, ibid.: E cum plus a li hum, meins atent al saveir); 2. ca 1170 un adv., une loc. adv. (Marie de France, Lais, éd. J.Rychner, Lanval, 580, var. du ms. H [mil. xiiies.]: Ele veneit meins que le pas); 1176-81 (Chrétien de Troyes, Chevalier au Lion, éd. M. Roques, 567: moins volentiers); 3. 1174-76 un adj. (Guernes de Pont-Ste-Maxence, op. cit., 2760 ds T.-L.: mains sacrez). B. 1155 accompagnant un nom de nombre à retrancher d'un autre nombre «étant soustrait, enlevé» (Wace, op. cit., 1619, ibid.: Quarante anz un meins regna cil); 1174-87 moins de (Chrétien de Troyes, Perceval, éd. F. Lecoy, 2000: De III C chevaliers et dis, Don cist chastiax estoit garnis N'a ceanz remés que cinquante; Que II et dis moins de seissante En a uns chevaliers mout max [...] menez Et ocis et anprisonez); 1606 (Nicot: un moins de cent), tour à l'orig. de l'emploi de moins considéré comme prép.: cinq moins trois (Trév. 1771). C. Loc. adv. 1.ca 1160 ne plus ne meins (Eneas, 6508 ds T.-L.); 2. 1530 de moyns en moyns (Palsgr., p.850a); 3. a) 1534 ne ... rien moins que «ne ... nullement» (Rabelais, Gargantua, prol., éd. R. Calder et M. A. Screech, p.11, 46: ... tel est vestu d'habit monachal, qui au dedans n'est rien moins que moyne); av. 1559 (A. Papillon, Sermon du bon pasteur et du mauvais [v. C. Marot, Œuvres, éd. C. A. Meyer, t.3, pp.54-55] ds C.Marot, Œuvres, éd. A. Grenier, t.1, p.66: Tu ne cherchois rien moins, Samaritaine, Que ton salut, allant à la fontaine); 1534 emploi ell. (Rabelais, op. cit., XXXVIII, p.229, 43: ... ilz prient Dieu pour nous. - Rien moins); b) 1608 ne ... rien moins que «bel et bien» (J. de Schelandre, Tyr et Sidon, éd. J. Haraszti, IV, 2211: ... cest avide Roy Ne prétendoit rien moins que ma couronne et moy); 4. 1538 plus ou moins (après un chiffre, synon. du lat. circiter) (Est., s.v. multus - plus); 1595 plus ou moins «à différents degrés» (Montaigne, Essais, II, XII, éd. A. Thibaudet, p.610); 5. av. 1628 ne ... pas moins «tout de même, malgré cela» (Malherbe, ,,Traité des bienfaits`` de Sénèque ds Œuvres, éd. L. Lalanne, t.2, p.111: Le chantre que le bruit empêche de se faire ouïr n'a pas moins bonne voix); 1662 n'en ... pas moins «id.» (Corneille, Sertorius, VI, 1: Ah! Pour être Romain, je n'en suis pas moins homme). II. Le moins superl. de peu; dans les loc. suiv.: A. Ca 1135 al meins (Couronnement de Louis, éd. E. Langlois, 1988: al meins cent chevaliers); 1155 (Wace, Brut, 749 ds T.-L.: Tant les funt par mer foleier [les sirènes] Ke sovent les funt periller; U al mains lur dreit eire perdent); ca 1165 a tot le meins (Benoît de Ste-Maure, Troie, 28691, ibid.). B. 1. 1174-87 estre del mains a «être de minime importance, être la moindre des choses en comparaison de» (Chrétien de Troyes, Perceval, 4590: Einz ne vëistes si noir fer Com ele ot le col et les mains Et ancores fu ce del mains A l'autre leidure qu'ele ot); 1364 c'est du mains «pour le moins, tout au moins» (Miracles de N.-D., éd. G.Paris et U. Robert, XXII, 1194); 2. 4equart xives. du moins «au moins» précédant un nom de nombre (Froissart, Chron., II, éd. G.Raynaud, VII, §106, t.9, p.171 [1379]); 3. 1512 du moins exprimant une restriction (Corresp. de l'empereur Maximilien I et de Marg. d'Autriche, éd. M. Le Glay, t.2, p.21, 12 août). C. Av. 1514 pour le mains précédant un nom de nombre (Lemaire de Belges, Couronne margaritique ds Œuvres, éd. J. Stecher, t.4, p.48). III. Emploi nom. A. Loc. 1. loc. prép. a) 1155 en meins de + terme exprimant le temps (Wace, op. cit., 2856 ds T.-L.: En meins d'un an); b) α) 1549 a moins de + le montant d'une somme (Est.); β) 1630 à moins que + subst. «sans (un fait, une condition)» (Malherbe, Poésies, LXIV, 174 ds Œuvres, éd. L.Lalanne, t.1, p.214: [ces miracles] Ne sont point ouvrages possibles A moins qu'une immortelle main); 1644 à moins de + subst. «id.» (Corneille, Rodogune, II, 2: Je me voyais perdue à moins d'un tel otage); 1651 id. (Racan, Mém. pour la vie de Malherbe ds Œuvres, éd. Tenant de Latour, t.1, p.266); γ) 1636 à moins que de + inf. marque une condition qui, si elle n'est pas remplie, laisse s'effectuer l'action exprimée (Corneille, Cid, III, 4), la suppression possible de que est signalée par Ac. 1798: A moins d'être fou; δ) 1643 à moins que + inf. «sauf si, excepté si» (Corneille, Menteur, II, 1); av. 1654 (Guez de Balzac, Lettres, III, 20 ds G. Guillaumie, J. L. Guez de Balzac et la prose fr., 1927, p.459: A moins que changer de sexe, elle ne saurait empêcher qu'on ne la haïsse); 2. loc. conj. a) 1268 a moins que ne... «sans que, étant exclu que» (Claris et Laris, 19762 ds T.-L.); b) 1668 à moins que ... ne «sauf si» (La Fontaine, Fables, II, 14: Car, que faire en un gîte, à moins que l'on ne songe?); 3. loc. adv. a) 1636 à moins «pour une moindre somme» (Monet); b) 1668 id. «pour une moindre raison, une moindre cause» (La Fontaine, Fables, I, 12). B. «Une quantité moindre» 1. 1160-74 suj. (Wace, Rou, éd. J. Holden, III, 2325); 2. ca 1165 meins de (Benoît de Ste-Maure, Troie, 26798 ds T.-L.); 1176-81 moins de ... que (Chrétien de Troyes, Chevalier au Lion, 568: ... Ne que moins d'enor me feîssent Qu'il avoient fet l'autre nuit); 1269-78 mains de ... que de (Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 8658, 8663, 8665: Preude fame, par saint Denis! Don il est mains que de fenis...; Mains que de fenis? par ma teste! Par comparaison plus honneste, Voire, mains que de blans corbiaus); 3. 1174-87 a mains «d'une chose moindre» (Chrétien de Troyes, Perceval, 8606: Volantiers m'en feîsse a mains). IV. Subst. 1. 1174-76 (Guernes de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, 155 ds T.-L.: Mes cel premier romanz m'unt escrivein emblé ... Et là ù j'oi trop mis ne l'oi uncore osté, Ne le plus ne le mains n'erés ne ajusté); 2. 1762 désigne le signe de soustraction (Ac.); 3.1835 impr. (ibid.). V. Adj. 1erquart xiiies. «moindre» (Renclus de Molliens, Carité, 92, 5 ds T.-L.). Du lat. minus (compar. de parum «peu») «moins»; à rapprocher du I B, l'emploi de minus avec un ablatif marquant la quantité: uno minus teste (Cicéron, Verr., 1, 149) «un témoin de moins». Fréq. abs. littér.: 64737. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 106748, b) 79020; xxes.: a) 73464, b)97713. Bbg. Bastin (J.). Ne rien moins que. In : Nouv. glanures gramm. Riga, 1907, pp.3-8. _ Falk (P.) À propos du synt. à moins que de + inf. R. Ling. rom. 1967, t.31, pp.252-256. _ Faucher (E.). Les Machines comparantes. Verbum. 1978, t.1, p.50. _ Kleiber (G.). Adj. antonymes... Trav. Ling. Litt. Strasbourg. 1976, t.14, no1, pp.277-326. _ Yvon (H.). Le, la, les, art. ou pron.? Fr. mod. 1950, t.18, pp.248-253.

Wiktionnaire

Nom commun - français

moins \mwɛ̃\ masculin, singulier et pluriel identiques

  1. (Mathématiques) Signe de la soustraction ou d’un nombre négatif. - ou −.

Conjonction - français

moins \mwɛ̃\ invariable

  1. (Mathématiques) Soustraction, indique qu’il faut retrancher la seconde quantité de la première.
    • Cinq moins deux égalent trois.

Adverbe - français

moins \mwɛ̃\ ou \mwɛ̃s\ (Voir sec. prononciation) invariable

  1. Comparatif de peu. Servant à marquer l’infériorité d’une personne ou d’une chose, comparée à une autre ou à elle-même sous quelque rapport de qualité, de quantité, d’action, etc.
    • Cette pièce est deux fois moins large que longue. : Sa largeur est la moitié de sa longueur.
    • Il sera ici dans moins d’une heure.
  2. (Avec le) Superlatif de peu, servant à marquer le dernier degré de l’infériorité.
    • On dit bien souvent que les bons développeurs sont feignants. En effet, ils cherchent systématiquement à réaliser toute tâche en déployant le moins d'effort possible. — (Louis-Guillaume Morand & ‎Thomas Garcia, Windows 7 avancé, 2e édition, Éditions Eyrolles, 2011, p. 327)
    • C’est le moins qu’on puisse dire.
    • Le mari et la femme affectent de ne pas s’adresser la parole ; c’est bien le moins que chacun se renferme dans son entêtement d’amour-propre. La soupe est servie — (Léon Frapié, Le tyran, dans Les contes de la maternelle, éditions Self, 1945, page 127)
  3. (Avec de) Comparatif de peu de. Un plus petit nombre de. Une plus petite quantité de.
    • Il y a moins de gens que d’habitude.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

MOINS. adv.
Comparatif de Peu, qui est opposé à Plus et qui sert à marquer l'infériorité d'une personne ou d'une chose comparée à une autre ou à elle-même, sous quelque rapport de qualité, de quantité, d'action, etc. Elle est moins jolie que sa sœur. Elle a six ans de moins que son frère. Il est moins intelligent que spirituel. Il a moins de savoir que de vanité. Il est moins bien portant qu'avant son voyage. Cette chambre est moins grande que l'autre, moins grande que je ne l'avais cru. Sa famille est bien moins nombreuse que la vôtre. J'ai bien moins, beaucoup moins d'intérêt à cela que vous. Ce que je vous en dis est moins pour vous faire de la peine que pour vous avertir. Plus vous le presserez, moins il en fera. Moins vous en direz, plus en il fera. Nous n'étions pas moins de cent personnes. Un peu plus, un peu moins. Je n'en donnerai ni plus ni moins. Il n'en sera ni plus ni moins. Parlez moins, moins haut. Soyez moins en colère, un peu moins en colère. Il ne le menace pas de moins que de lui rompre bras et jambes, Il porte ses menaces jusqu'à dire qu'il lui rompra bras et jambes. C'est moins que rien, se dit d'une Chose de nulle considération et aussi d'une Personne qu'on méprise. Le présent que je vous fais est moins que rien. Cet homme-là est moins que rien.

MOINS s'emploie substantivement avec l'article. Ils sont à peu près d'accord, ils en sont sur le plus et sur le moins, il ne s'agit maintenant que du plus ou moins, Il n'y a entre eux de débat que sur la quantité, sur la somme plus ou moins considérable à donner d'un côté et à recevoir de l'autre. La chose ne peut pas être arrivée ainsi, il faut qu'il y ait du plus ou du moins, Il faut qu'on ait supposé des circonstances qui ne sont pas vraies, ou qu'on en ait omis qui le sont. Prov., Qui peut le plus peut le moins.

LE MOINS, adv. Superlatif de Peu, qui est opposé à Le plus et qui sert à marquer le dernier degré d'infériorité. L'homme le moins brave. C'est ce que j'aime le moins. Substantivement, C'est le moins qu'il puisse faire, C'est la moindre chose qu'il puisse faire. C'est bien le moins, C'est la moindre chose qu'on puisse faire, qui puisse arriver. Pas le moins du monde, Pas du tout.

MOINS, en termes d'Algèbre, désigne un Trait horizontal qui est le signe de la soustraction. Moins indique qu'il faut retrancher la seconde quantité de la première.

À MOINS DE, loc. prép. À un prix au-dessous de. Je ne lui donnerai pas ce cheval à moins de mille francs. Il signifie aussi Sans une certaine condition. Je ne lui pardonnerai pas à moins d'une rétractation publique. Absolument, Vous avez beau marchander ce livre, vous ne l'aurez pas à moins, Pour une moindre somme. On rirait, on se fâcherait à moins, Pour une moindre cause.

À MOINS QUE... NE, loc. conj. qui régit le subjonctif. Si ce n'est que. Il n'en fera rien, à moins que vous ne lui parliez. À moins que vous ne preniez bien votre temps, vous n'en viendrez pas à bout. Il se construit, dans le même sens, avec l'infinitif et la préposition de, sans négation. Je ne pouvais pas lui parler plus nettement, à moins que de le quereller. On peut aussi supprimer le que. À moins d'être fou, il n'est pas possible de raisonner ainsi.

AU MOINS, DU MOINS, locutions conjonctives qui servent à marquer quelque restriction dans les choses dont on parle. Si vous ne voulez pas être pour lui, au moins ne soyez pas contre. S'il n'est pas fort riche, du moins il a, du moins a-t-il de quoi vivre honnêtement. On dit à peu près de même Tout au moins, pour le moins. Donnez-lui tout au moins, pour le moins de quoi vivre.

AU MOINS signifie quelquefois Sur toutes choses et sert à avertir celui à qui l'on parle de se souvenir particulièrement de ce qu'on lui dit. Au moins prenez-y garde, c'est votre affaire. Au moins je vous en avertis. Au moins ne manquez pas de venir.

DE MOINS, loc. adv. De manque. Il avait un billet de moins dans son portefeuille.

DE MOINS EN MOINS, loc. adv. En diminuant progressivement. Il dort de moins en moins.

EN MOINS DE, DANS MOINS DE, loc. prép. Dans un moindre espace de temps. J'aurai achevé en moins d'un an, d'un mois, d'une heure, d'un jour. Dans moins d'une demi-heure, je serai à vous.

EN MOINS DE RIEN, loc. adv. Très promptement, en fort peu de temps. J'aurai fini en moins de rien. Il a mangé son bien en moins de rien.

NE... PAS MOINS, N'EN... PAS MOINS, loc. adv. Nonobstant, malgré tout. Il ne dit rien, mais il n'en pense pas moins.

NON MOINS QUE, loc. conj. Autant que. Aimable non moins que brave. On dit aussi, dans le même sens, Non moins aimable que brave.

MOINS QUE JAMAIS, loc. adv. Moins qu'en toute autre circonstance.

RIEN MOINS QUE, loc. adv., a d'ordinaire le sens négatif et signifie Tout plus que, nullement, en aucune façon. Il n'est rien moins que sage, Il n'est point sage. Cependant, suivi d'un substantif ou d'un verbe, il est quelquefois employé dans un sens positif et signifie alors Véritablement. Le reste de la phrase doit déterminer le sens dans lequel est prise cette locution. Vous lui devez de la reconnaissance, car il n'est rien moins que votre bienfaiteur, Il est véritablement votre bienfaiteur. Vous pouvez vous dispenser de reconnaissance envers lui, car il n'est rien moins que votre bienfaiteur, Il n'est pas du tout votre bienfaiteur. Vous le croyez votre concurrent; il a d'autres vues : il n'aspire à rien moins qu'à vous supplanter, Il n'est point votre concurrent. Vous ne le regardez pas comme votre concurrent; cependant il n'aspire à rien moins qu'à vous supplanter, Il est votre concurrent. Dans le premier sens, Il n'aspire à rien moins qu'à vous supplanter veut dire : Vous supplanter est la chose à laquelle il aspire le moins; et dans le second sens, Il n'aspire à rien moins qu'à vous supplanter signifie : Il n'aspire pas à moins qu'à vous supplanter. - Pour éviter toute équivoque, il est bon de réserver l'emploi de Rien moins que au sens négatif qui se justifie mieux; et dans le sens positif, il convient de l'éviter et de se servir de préférence de Rien de moins que, qui s'explique parfaitement.

RIEN DE MOINS QUE, Pas moins que, véritablement, bel et bien. Il n'est rien de moins que votre bienfaiteur, Il est véritablement votre bienfaiteur. Il n'aspire à rien de moins qu'à vous supplanter, Il aspire bel et bien à vous supplanter.

RIEN DE MOINS s'emploie, absolument dans le même sens. Il m'a dit cela, rien de moins, Il m'a dit cela en propres termes. Je n'attendais rien de moins, Je n'en attendais pas moins, c'est ce que j'attendais.

RIEN MOINS s'emploie aussi absolument dans le sens négatif. Je ne pensais à rien moins, Je n'y pensais pas du tout.

Littré (1872-1877)

MOINS (moin ; l's se lie : moin-z on a… Au XVIIe siècle, quelques-uns prononçaient mains, c'était une prononciation archaïque)
  • 1Adv. comparatif de peu, répondant à l'adverbe latin minus, opposé à plus et servant à marquer infériorité ou diminution. Parlez moins haut. Un peu plus, un peu moins. Un certain mauvais génie, non moins rusé et trompeur que puissant, Descartes, Médit. I, 10. Seigneur, honorez moins une faible conquête, Racine, Iph. I, 2. Tu me haïssais plus, je ne t'aimais pas moins, Racine, Phèdre, II, 5. Achille nous menace, Achille nous méprise ; Mais ma fille en est-elle à mes lois moins soumise ? Racine, Iph. IV, 8. En effet, ajoutait-il [Papirius], l'or et l'argent, à parler vrai, sont moins des armes que des dépouilles, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. VIII, p. 140, dans POUGENS.
  • 2Ne… pas moins, n'en… pas moins, c'est-à-dire tout de même, nonobstant. Je suis souffrant, mais je n'en irai pas moins à la cérémonie. Je n'en perdrai pas moins ce peuple abominable, Racine, Esth. II, 6. Je n'en mourrai pas moins, j'en mourrai plus coupable, Racine, Phèdre, I, 3.
  • 3Moins que jamais, se dit pour exprimer une impossibilité absolue. Après l'éclat et les pas que j'ai faits, Je dois vous épouser encor moins que jamais, Racine, Bérén. V, 6.
  • 4Encor moins, se dit, après une première réponse négative, pour nier encore plus fortement dans une seconde réponse. Connais-tu cette femme, lui dit le visir ? Non, seigneur, lui répondit Dgerberi. Tu connais donc son fils ? Encore moins, reprit-il, Comte de Caylus, Cont. orient. Hist. du portefaix, Œuv. t. VIII, p. 190, dans POUGENS.
  • 5Moins… moins, plus… moins, moins… plus, se dit dans des phrases qui se correspondent. Plus je suis votre amant, moins je suis Curiace, Corneille, Hor. II, 5. Certes, plus je médite, et moins je me figure Que vous m'osiez compter pour votre créature, Racine, Brit. I, 2. Moins on lui en parlait, et plus il s'en occupait, Rousseau, Ém. IV.

    Au commencement du XVIIe siècle, on pouvait, dans cette construction, disposer autrement les adverbes de comparaison. J'ai moins de repentir plus je pense à ma faute, Malherbe, V, 30.

  • 6Le moins, superlatif de peu. Nous demandons au ciel ce qu'il nous faut le moins, Boileau, Épître V. Quand j'y pensai le moins, Racine, Théb. III, 6. Et les plus malheureux osent pleurer le moins, Racine, Iphig. I, 5.

    Au moins mal qu'il se peut, de la façon la moins mauvaise possible (moins dans cette locution détermine le mot mal, et est par conséquent adverbe). Quant au but principal qu'Ésope s'y propose, J'y tombe au moins mal que je puis, La Fontaine, Fabl. V, 1.

    Ne… pas le moins du monde, en aucune façon (dans cette locution, le moins du monde détermine un verbe et est par conséquent adverbe). Le roi ne s'aperçut pas le moins du monde de cette scène, Duclos, Œuv. t. V, p. 316.

    Absolument. Avez-vous eu connaissance de ce bruit ? pas le moins du monde.

    Moins pour le moins, tournure archaïque et qui n'est plus guère usitée. Ce Dieu touche les cœurs lorsque moins on y pense, Corneille, Poly. IV, 3. Souvent le bonheur vient lorsque moins on l'espère, Racan, Berger. V, 3. Pour montrer que son cœur sait, quand moins on y pense, D'une bonne action verser la récompense, Molière, Tart. V, 7. De tous les besoins publics c'est celui qui court moins de risque, Massillon, Carême, Resp. hum. De toute la philosophie de Platon, la partie que je crois moins soutenable est la physique, Fleury, Disc. sur Platon, III.

  • 7Moins a certains emplois où il est adjectif, répondant à l'adjectif latin neutre minus.

    C'est moins que rien, se dit d'une chose de nulle considération, et aussi d'une personne qu'on méprise. Cette femme est moins que rien. Cette blessure est moins que rien.

    Dans certaines locutions que l'usage a consacrées, au lieu du que, on emploie de. Cela coûtera moins de dix francs. Votre exemple ne laisse à personne à douter, Qu'à moins de la couronne on peut le mériter, Corneille, Othon, IV, 4.

    En moins de, dans moins de, c'est-à-dire dans un moindre espace de temps. Ainsi Charles XII, à dix-huit ans, commença et finit cette guerre en moins de dix semaines, Voltaire, Charles XII, 2.

    En moins de rien, en très peu de temps, en un moment. Mais, sitôt qu'il parut, je vis en moins de rien Tout mon camp déserté pour repeupler le sien, Corneille, Sertor. I, 1. Toute votre félicité, Sujette à l'instabilité, En moins de rien tombe par terre, Corneille, Poly. IV, 2. On dépeuplerait un État en moins de rien, si on en tuait tous les médisants, Pascal, Prov. VII. Nos gens ont chassé en moins de rien les ennemis de la demi-lune, et s'en sont emparés, Pellisson, Lett. hist. t. III, p. 241, dans POUGENS.

    Cette tournure est le reste d'un archaïsme. Dans l'ancienne langue, le complément des comparatifs se marquait par de : Moins grand de moi, ce qui répond à l'ablatif latin : minor me.

  • 8A moins de, loc. prép. À un prix au-dessous de (dans cette locution, moins joue le rôle d'adjectif). Je ne lui donnerai pas ce cheval à moins de mille francs.

    C'est encore ici un reste de l'archaïsme noté plus haut, n° 7.

    Absolument. À moins, pour un prix moindre, pour une peine moindre, pour une cause moindre. Vous avez beau marchander, vous ne l'aurez pas à moins. On rirait, on se fâcherait à moins. Et je crois qu'à moins on s'effraie, La Fontaine, Fabl. I, 12. La tête tourne à moins, Sévigné, 214. J'ai compris [dit une vierge infidèle] qu'on pouvait vous servir à moins, que vous ne demandiez pas des empressements si vifs et une fidélité si scrupuleuse, Massillon, Prof. relig. Serm. 2.

    À moins de, sans une certaine condition (le de est ici pour le que qui suit les comparatifs). À moins de cela il ne devait pas exposer sa réputation en produisant des ouvrages si ridicules, Racan, Mém. pour la vie de Malherbe. Je me voyais perdue à moins d'un tel otage, Corneille, Rodog. II, 2. Tout est perdu, madame, à moins d'un prompt remède, Corneille, Nicom. V, 4. Je sais qu'à moins d'une couronne sur la tête, je ne saurais seconder votre mérite, Cyrano de Bergerac, Pédant joué, V, 10.

    À moins que de, avec un substantif, au-dessous de, pour quelque chose de moindre (cette locution, irrégulière d'ailleurs, ne s'explique que par le pléonasme du que qui suit les comparatifs, avec le de archaïque qui les suivait autrefois et qui les suit aujourd'hui en quelques cas avec moins et plus). À moins que d'une reine il n'a pu s'enflammer, Corneille, D. Sanche, IV, 5. Ce serait pour Carthage un bonheur signalé ; Mais, madame, les dieux vous l'ont-ils révélé ? À moins que de leur voix, l'âme la plus crédule D'un miracle pareil ferait quelque scrupule, Corneille, Soph. I, 3. À moins que d'une tête un si grand corps chancelle, Corneille, Othon, III, 3. À moins que de cela, l'eussé-je soupçonné ? Molière, l'Ét. I, 10.

    À moins que, sans de, ce qui est la locution correcte, mais est devenu un archaïsme. Ces miracles visibles Ne sont point ouvrages possibles, à moins qu'une immortelle main, Malherbe, III, 3. Après leur avoir demandé s'ils étaient condamnés à faire des vers ou à être pendus, il leur disait qu'à moins que cela ils n'en devaient point faire, Racan, Lett. XI, à Chapelain. Moi dont la perte est sûre à moins que sa ruine, Corneille, Nicom. III, 8.

    À moins que de, avec un verbe à l'infinitif, indique une condition qui, si elle ne s'effectue pas, laisse faire ce dont il s'agit. Et ta beauté, sans doute, emportait la balance, à moins que d'opposer à tes plus forts appas Qu'un homme sans honneur ne te méritait pas, Corneille, Cid, III, 4. Toute puissance est faible à moins que d'être unie, La Fontaine, Fabl. IV, 18.

    On peut supprimer le que. À moins d'être fou, il n'est pas possible de raisonner ainsi.

    À moins que… sans de, avec un verbe à l'infinitif. Je ne t'écoute pas à moins que m'épouser, Corneille, le Ment. II, 3. N'es-tu pas, Ô mon Dieu, mon Seigneur souverain, Et moi ton serviteur, pauvre, lâche, imbécile, Dont tout l'effort est inutile à moins qu'avoir l'appui de ta divine main, Corneille, Imit. III, 10. Le moyen d'en rien croire à moins qu'être insensé ? Molière, Amph. II, 1. Et l'on ne doit jamais souffrir sans dire mot De semblables affronts, à moins qu'être un vrai sot, Molière, Sgan. 17. Qui croit qu'on n'est point sage à moins qu'être insensible, Destouches, Phil. mar. I, 6.

    Les grammairiens ont condamné la tournure à moins que avec un infinitif. Mais c'est tout au plus un archaïsme, et rien n'empêcherait de s'en servir en vers et dans la prose élevée suivant l'euphonie.

    À moins que, loc. conj. qui régit le subjonctif avec la particule ne, et qui signifie si ce n'est que. Un lièvre en son gîte songeait (Car que faire en un gîte à moins que l'on ne songe ?), La Fontaine, Fabl. II, 14. À moins que votre cœur, animé d'un beau zèle, De vos nouveaux amis n'embrasse la querelle, Racine, Alex. II, 3. À moins que la pitié qui semble vous troubler Ne soit ce coup fatal qui vous faisait trembler, Racine, Athal. II, 7. À moins qu'un homme ne soit un monstre, la douceur d'une femme le ramène et triomphe de lui tôt ou tard, Rousseau, Ém. V.

    Quelquefois le ne est supprimé, du moins en vers. À moins que pour régner le destin les sépare, Corneille, Œdipe, I, 5. À moins qu'à vos projets un plein effet réponde, Ce serait trop donner à discourir au monde, Corneille, Ment. II, 1. À moins que ton secours me relève le cœur, à moins que ta bonté ranime ma langueur, Mes plus ardents efforts ne peuvent rien produire, Corneille, Imit. III, 40. À moins qu'il soit mêlé d'un peu de peine, La Fontaine, Gag. La maîtresse ne peut abuser votre foi, à moins que la suivante en fasse autant pour moi, Molière, le Dép. I, 1. Et moi je ne puis vivre à moins que vos bontés Accordent mon pardon à mes témérités, Molière, D. Garc. II, 6. oins a certains emplois où il figure comme substantif abstrait, signifiant une moindre quantité. Il a moins de fortune que vous. Il a moins de capacité que son frère. Eux trois [protecteurs] voulaient moins de reconnaissance Qu'à ce marchand il n'en coûtait pour un, La Fontaine, Fabl. VIII, 18. Nous avons parlé sérieusement de ses affaires [du marquis de Pomenars], qui ne sont jamais de moins que de sa tête ; le comte de Creance veut à toute force qu'il ait le cou coupé ; Pomenars ne veut pas ; voilà tout le procès, Sévigné, 26 juill. 1671. Il lui coûtait moins d'exposer sa vie, que de dissimuler ses sentiments, Fléchier, Duc de Mont. Je veux moins de valeur et plus d'obéissance, Racine, Iph. IV, 6. Ayez moins de frayeur ou moins de modestie, Racine, Brit. II, 3. En un mot, moins de superstitions, moins de fanatisme ; et moins de fanatisme, moins de malheurs, Voltaire, Dict. phil. Superstition, V. On a moins de génie que dans le siècle de Louis XIV, moins de vrai talent, moins de grâce et de politesse ; mais on a beaucoup plus de connaissances ; notre philosophie n'est pas à mépriser, Voltaire, Lett. Richelieu, 1er oct. 1775.

    Il ne le menace pas de moins que de lui rompre bras et jambes, c'est-à-dire ses menaces vont jusqu'à dire qu'il lui rompra bras et jambes.

    Ni plus ni moins. Il n'en fait ni plus ni moins. Sévigné, 44.

    Quand je me fâcherais, il n'en sera ni plus ni moins, c'est-à-dire la chose restera la même.

  • 9Moins, employé substantivement avec l'article le, la plus petite partie. Et le glaive est le moins de ma calamité, Malherbe, IV, 7. Que le plus et le moins y mette différence, Régnier, Sat. X.

    Le moins qu'on puisse faire, se dit pour exprimer que la chose qu'on fait est la moindre, et qu'on devrait faire davantage. Le moins que vous puissiez faire, c'est de l'aller trouver. C'était bien le moins qu'ils fissent brûler Zadig pour le mauvais tour qu'il leur avait joué, Voltaire, Zadig, 13.

    Moins se dit quelquefois archaïquement en ce sens pour le moins. Le respect que l'on porte à l'antiquité est aujourd'hui à tel point, dans les matières où il doit avoir moins de force, que l'on se fait des oracles de toutes ses pensées, et des mystères même de ses obscurités, Pascal, Traité sur le vide, Préf.

    PROVERBE

    Qui peut le plus, peut le moins.
  • 10Il se construit aussi comme substantif avec du, et se joint à plus ; la locution signifie d'une quantité plus ou moins grande. Tous les hommes sont fous, et, malgré tous leurs soins, Ne diffèrent entre eux que du plus ou du moins, Boileau, Sat. IV.

    Ils sont à peu près d'accord, ils en sont sur le plus et le moins, il ne s'agit maintenant que du plus ou du moins, c'est-à-dire il n'y a plus entre eux de débat que sur la quantité, sur la somme plus ou moins considérable à donner d'un côté et à recevoir de l'autre.

    La chose ne peut pas être arrivée ainsi, il faut qu'il y ait du plus ou du moins, il faut qu'on ait supposé des circonstances qui ne sont pas vraies, ou qu'on en ait omis qui le sont.

  • 11 S. m. Terme d'algèbre. Un moins, trait horizontal qui est le signe de la soustraction ; ainsi dénommé parce qu'il se prononce moins. A-B, prononcez : A moins B.
  • 12 S. m. Terme d'imprimerie. Tiret long qui ordinairement sert à séparer des phrases ou à remplacer des mots qu'on juge inutile de répéter ; ainsi nommé parce qu'il a la forme du moins employé en algèbre.
  • 13L'et tant moins, substantif composé, qui signifie la quantité, la somme qu'il y aura de moins sur une quantité à fournir, une somme à payer. Claudine, je t'en prie, sur l'et tant moins, Molière, G. Dand. II, 1.

    Sur et tant moins, en déduction. Je vous donnerai cela sur et tant moins de ce que je vous dois. Sur et tant moins de la somme de mille écus on lui a donné cinq cents francs.

    Cette locution a vieilli ; elle signifie : et autant de moins.

  • 14Moins se combine avec quelques propositions pour former des locutions dans lesquelles il a grammaticalement un rôle de substantif.

    Au moins, loc. conj. qui sert à marquer quelque restriction dans les choses dont on parle. Quand nous sommes malheureux, au moins avons-nous la mort, qui est comme un port assuré pour sortir de nos misères, Boileau, Traité du sublime, ch. VII. [Il] Présente à mes regards un front séditieux, Et ne daignerait pas au moins baisser les yeux, Racine, Esth. II, 1. Ne sait-on pas au moins quel pays est le vôtre ? Racine, Athal. II, 7.

    On dit à peu près de même, tout au moins, pour le moins, à tout le moins. Qu'il offre à tout le moins quelque chose qu'on voie, Régnier, Sat. VI. À tout le moins usons de ce peu de liberté qui nous reste, Guez de Balzac, liv. I, lett. 3. À tout le moins il est en ma puissance de suspendre mon jugement, Descartes, Méd. I, 10. Donne-moi pour le moins le temps de la connaître, Corneille, Poly. V, 2. Tout au moins vous vous moqueriez de moi, et vous savez combien j'estime votre estime, Sévigné, 13 oct. 1673. Votre songe, tout faux qu'il est, est pourtant le songe d'un homme qui rêve : tout au moins il est sûr que vous rêvez, Fénelon, t. XXIX, p. 248. Nous valons pour le moins ce qu'elle a su quitter, Voltaire, Scyth. I, 3.

    Au moins, signifie quelquefois sur toutes choses, et sert à avertir celui à qui l'on parle de se souvenir particulièrement de ce qu'on lui dit. Au moins, prenez-y garde, c'est votre affaire. Ne vous en allez pas au moins, j'ai besoin de vous. Songe au moins, songe au sang qui coule dans tes veines, Voltaire, Zaïre, II, 3.

    Au moins signifie encore en une quantité qu'on ne peut évaluer au-dessous de… Il a au moins dix mille livres de rente…

  • 15Du moins, loc. conj. qui sert à restreindre ; c'est un synonyme de au moins. Il est étourdi ; du moins il a bon cœur. Rends-toi digne du moins de ce que tu demandes, Corneille, Cinna, IV, 6. Il sait aimer du moins, et même sans qu'on l'aime, Racine, Andr. II, 1.

    Du moins a été employé pour signifier en une quantité qui n'est pas au-dessous de ; c'est un archaïsme et un des sens qu'a aujourd'hui au moins. …Je m'en doutais, seigneur, que ma couronne Vous charmait bien du moins autant que ma personne, Corneille, Nicom. I, 2. Poppée avait pour vous du moins autant d'appas ; Et, quand on vous l'ôta, vous n'en mourûtes pas, Corneille, Othon, I, 3. Je crois avoir démontré que l'action de l'Heautontimorumenos de Térence comprend du moins quinze heures, Ménage, Disc. sur l'Heautont. de Térence, avert. Je vais gager qu'en perruques et rubans il y a du moins vingt pistoles, Molière, l'Av. I, 5. Nous trouvâmes qu'il fallait qu'ils fussent du moins trois cents piqueurs pour piquer menu, Sévigné, 15 juill. 1671. Il y a peu de femmes si parfaites qu'elles empêchent un mari de se repentir, du moins une fois le jour, d'avoir une femme, ou de trouver heureux celui qui n'en a point, La Bruyère, III. L'évêque était choisi en présence du peuple par les évêques de la province assemblés dans l'église vacante, du moins au nombre de deux ou trois, Fleury, Mœurs des chrét. XXXII. Après cette guerre terminée en 1697, l'Europe se voyait sur le point de retomber dans un trouble du moins aussi grand par la mort de Charles II, roi d'Espagne, Fontenelle, Tallard. Je l'aurai [une terre] pour vingt-cinq mille écus, et je suis assuré qu'elle en vaut bien soixante mille. - Du moins, Monsieur, du moins, Lesage, Crispin rival de son maître, sc. 15.

  • 16De moins, loc. adv. De manque. Il y a dans ce sac dix francs de moins.

    On a supprimé jadis la préposition de. Il eût mieux valu danser une courante moins, et m'envoyer une lettre, Voiture, Lett. 102.

    Corneille a renversé la place de la préposition de, et dit : J'ai moins d'un ennemi, au lieu de : J'ai un ennemi de moins. Enfin, grâces aux dieux, j'ai moins d'un ennemi ; La mort de Séleucus m'a vengée à demi, Corneille, Rodog. V, 1.

    De moins sert aussi à exprimer quelque diminution, quelque rabais. Marchandez, vous aurez cela pour quelque chose de moins.

  • 17En moins, à déduire. Vous compterez cela en moins.

    Manquant. J'ai reçu en moins trois francs.

  • 18Rien moins que, voy. RIEN.
  • 19Rien de moins, voy. RIEN. L'Académie n'a pas cette locution ; car, quand elle cite comme un exemple : il n'y a rien de moins vrai que cette nouvelle, elle se méprend ; ce n'est pas la locution rien de moins, c'est la locution rien de : il n'y a rien de moins vrai, rien de plus vrai.
  • 20 Terme d'administration militaire. Moins perçu, ce que l'on n'a pas reçu. Il y a tant de moins perçu.
  • 21Moins enchérisseur, celui qui reste adjudicataire dans les adjudications qui se font au rabais (MASSÉ, 1766).

REMARQUE

1. Moins sans que se met ordinairement avant le participe passé dans les temps composés : si je l'eusse moins aimé. Cependant ce n'est pas une faute de dire : si je l'eusse aimé moins.

2. S'il y a un que, moins se place ordinairement après le participe : Si je l'eusse aimé moins que vous ; mais on peut dire aussi : Si je l'eusse moins aimé que vous.

HISTORIQUE

XIe s. E li plaiez [le blessé] jurra [jurera] sur saintz que par mes [moins] nel pot faire…, Lois de Guill. 11.

XIIe s. Vostre lignage en sera meins amés, Roncisv. 82. Quant mains se donent garde cil qui sont au crenel, Sax. IX. Tous li mains courrouciez s'estoit bien aatis [décidé], Qu'ains i lairroit la teste que il fust asservis, ib. XXVI.

XIIIe s. Li aisnés ot non Robiers et li mains nés Loeys, Chr. de Rains, 2. Mais ore en savons mains que ne savions devant, Berte, CVII. Si comme s'il done le [la] coze por mains que ele ne vaut, Beaumanoir, XXI, 32. Une d'eles [des fleches] qui le mains blece, Ot non, ce m'est avis, simplece, la Rose, 943.

XVe s. [Jean Lyon] avoit du moins deux ou trois cens blancs chaperons autour de lui, Froissart, II, II, 53. Ce siege dura onze semaines trois jours moins, Froissart, I, I, 143. Fut pris le sire de Cliçon et soupçonné de trahison ; à tout le moins grand fame en courut, Froissart, I, I, 212. Allons à tout le moins jusques sur le mont d'or, Froissart, II, II, 195. Le hourt estoit tant richement paré de drap d'or et de soye qu'il resplendissoit à touz lez [de tous côtés] par le soleil, qui ses raiz matineux gettoit ; et encores estoit ce du moins [c'était encore ce qu'il y avait de moins beau] ; car la pucelle…, Perceforest, t. V, f° 81. Car jeunesse et adolescence (C'est son parler, ne mains ne mais), Ne sont qu'abbus et ignorance, Villon, Gr. Test. Et là ha continué à escripre le moings mal qu'il ha peu, selon ce qu'on luy ha rapporté, Juvénal Des Ursins, Charles VI, 1420.

XVIe s. Tous chevaliers certes ne plus ne mains, Vers les dames doivent tendre les mains, Marot, J. V, 288. Qu'il ne veut pas moins fidelement garder aux autres leurs droits, qu'il veut les siens lui estre gardez, Calvin, Inst. 905. Ceste parole ne s'adresse pas moins aujourd'hui aux chrestiens, qu'elle s'adressoit aux peres du vieil testament, Calvin, ib. 1069. Voire assez moins que…, Montaigne, I, 11. Les Pallantides avoient tousjours esperé de recouvrer le royaume d'Athenes, à tout le moins après la mort d'Aegeus, Amyot, Thés. 15. Diocles a le premier mis ce compte en avant, au moins quant aux principaux points, Amyot, Rom. 3. C'est la beste de ce monde la moins mal faisante, Amyot, ib. 14. Il eust eu honte, si le plus pauvre homme de la ville de Thebes se fust passé à moins que luy pour sa personne, Amyot, Pélop. 6. S'ilz eussent encore poursuivy le moins du monde, ilz eussent sans point de doute attainct le cheval qui l'emportoit, Amyot, Lucull. 31. Si veu ne l'avez, pour le moins avez vous ouy de luy parler, Rabelais, Pant. III, prol. Reste ung petit scrupule à rumpre ; petit, dy je, moins que rien, Rabelais, ib. III, 30.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

MOINS. - REM. Ajoutez :

3. Régnier emploie souvent ni moins au sens de encore moins. Or ce [qui me pousse à faire des vers] n'est point de voir en règne la sottise, L'avarice et le luxe entre les gens d'Église… Ni moins, que la valeur n'ait plus ici de lieu, Que la noblesse coure en poste à l'Hôtel-Dieu, Sat. VI. Cela n'est plus usité.

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Étymologie de « moins »

(XVe siècle)[1] Du moyen français moins, de l’ancien français moins, meins[1] (XIIe siècle), mains, du latin minus, neutre de minor[1]
Cette forme dénote une supplétion car son étymologie est distincte de celle de peu.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Wall. mon ; namur. moin ; messin, moué ; provenç. mens, menz, meins ; espag. et portug. menos ; ital. meno ; du lat. minus ; comparez le grec μινύθειν, le goth. mins, minz. Minus est le neutre de minor (voy. MOINDRE). On remarquera, dans l'ancien français, la forme mes, qui concorde avec le préfixe mes….

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Phonétique du mot « moins »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
moins mwɛ̃

Fréquence d'apparition du mot « moins » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « moins »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « moins »

  • Réprimez, vous aurez moins à punir.
    Gaston, duc de Lévis — Maximes politiques
  • L’huître, de la grosseur d’un galet moyen, est d’une apparence plus rugueuse, d’une couleur moins unie, brillamment blanchâtre. C’est un monde opiniâtrement clos. Pourtant on peut l’ouvrir : il faut alors la tenir au creux d’un torchon, se servir d’un couteau ébréché et peu franc, s’y reprendre à plusieurs fois. Les doigts curieux s’y coupent, s’y cassent les ongles : c’est un travail grossier. Les coups qu’on lui porte marquent son enveloppe de ronds blancs, d’une sorte de halos.À l’intérieur l’on trouve tout un monde, à boire et à manger : sous un firmament (à proprement parler) de nacre, les cieux d’en dessus s’affaissent sur les cieux d’en dessous, pour ne plus former qu’une mare, un sachet visqueux et verdâtre, qui flue et reflue à l’odeur et à la vue, frangé d’une dentelle noirâtre sur les bords.Parfois très rare une formule perle à leur gosier de nacre, d’où l’on trouve aussitôt à s’orner.
    Francis Ponge —  Le parti pris des choses 
  • Tu m’en veux de ne pas plaindre ce garçon ? Mais, Fani, les souffrances d’un amoureux ne sont qu’un miroir aux alouettes, une des éternelles tactiques de la séduction, et la moins noble. Je ne dis pas qu’elles soient feintes, je dis seulement qu’un homme qui ne sait pas les dissimuler n’est pas digne d’être plaint.
    Zoé Oldenbourg — Réveillés de la vie
  • Cependant, les fortes chaleurs étaient venues. Une après-midi de juin, un samedi que l’ouvrage pressait, Gervaise avait elle-même bourré de coke la mécanique, autour de laquelle dix fers chauffaient, dans le ronflement du tuyau. […] On avait laissé ouverte la porte de la rue, mais pas un souffle de vent ne venait ; les pièces qui séchaient en l’air, pendues aux fils de laiton, fumaient, étaient raides comme des copeaux en moins de trois quarts d’heure.
    Emile Zola — L’Assommoir
  • Lorsque je fus rentré au pays, j’estimai de mon devoir de me rendre aussitôt dans la ville d’Alberto afin de rapporter à sa mère et à son frère tout ce que je savais. Je fus accueilli avec courtoisie et cordialité, mais dès que j’eus commencé mon récit la mère me pria de l’interrompre, elle savait déjà tout, au moins en ce qui concernait Alberto, et il était inutile que je lui répète les sempiternelles et épouvantables histoires.
    Marcel Proust — À la recherche du temps perdu
  • Le moins mauvais gouvernement est celui qui se montre le moins, que l'on sent le moins et que l'on paie le moins cher.
    Alfred, comte de Vigny — Journal d'un poète
  • La vieillesse vit sous le signe moins : on est de moins en moins intelligent, de moins en moins bête.
    Paul Morand
  • Moins une oeuvre est comprise, moins vite elle ouvre ses pétales et moins vite elle se fane.
  • Gouverne le mieux qui gouverne le moins.
    Lao-Tseu — Tao Te King
  • Plus on va loin, moins on apprend.
    Lao-Tseu
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Traductions du mot « moins »

Langue Traduction
Anglais less
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Italien di meno
Allemand weniger
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Portugais menos
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Japonais もっと少なく
Basque gutxiago
Corse menu
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Synonymes de « moins »

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Antonymes de « moins »

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