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Chameau

Variantes Singulier Pluriel
Masculin chameau chameaux

Définitions de « chameau »

Trésor de la Langue Française informatisé

CHAMEAU1, CHAMELLE, subst.

A.− ZOOLOGIE
1. Mammifère ruminant de la famille des camélidés, possédant une ou deux bosses dorsales graisseuses, utilisé comme monture ou comme bête de somme dans les régions arides de l'Arabie ou de l'Asie centrale :
1. ... lionnes, nous avons rugi dans l'Aurès; et nous avons brouté, chamelles, le varech gris des chotts, ... Gide, Les Nourritures terrestres,1897, p. 202.
2. Les chameaux, débâtés pour la nuit, s'escrimaient, à grandes enjambées, à brouter d'épineuses touffes de had. Benoît, L'Atlantide,1919, p. 70.
3. ... et les chameaux fuient droit vers l'horizon, où un geyser d'oiseaux noirs vient de s'élever dans le ciel inaltéré. Camus, L'Exil et le royaume,1957, p. 1590.
SYNT. À dos de chameau, caravane de chameaux, chameau de charge; le chameau blatère*; faire baraquer un chameau (cf. baraquer2); lait de chamelle.
TEXT. Poil de chameau. Tissu fabriqué avec le poil de cet animal et, p. ext., étoffe de laine souple et douce. Étoffe, manteau, pardessus, robe de chambre en poil de chameau. Le baigneur s'arme d'un gant de poil de chameau qu'il vous promène sur tout le corps (About, La Grèce contemporaine,1854, p. 411).Martin dans sa carapace de poil de chameau (M. Butor, Passage de Milan,1954, p. 124).
Sac de chameau. Sacoche, généralement en cuir souple et richement décoré, destinée à recevoir des bagages, qui est fixée à la selle d'un chameau et pend sur ses flancs :
4. Cette tente de pacha somptueux était meublée de fauteuils et de divans, faits avec des sacs de chameaux, les uns coupés de losanges bariolés, les autres plantés de roses naïves. Zola, Au Bonheur des dames,1883, p. 471.
Rem. On rencontre en ce sens sac de selle (cf. D. Gersi, La Dernière grande aventure des Touareg, Paris, R. Laffont, 1972).
Au fig. Ô stylographe à la plume de platine, (...) fier coursier de mes rêves, fidèle chameau de mes exploits littéraires (Queneau, Exercices de style,1947, p. 91).
2. En partic.
a) Nom réservé au chameau d'Asie ou bactrien, à deux bosses, pour le distinguer du chameau d'Arabie, à une bosse, communément appelé dromadaire. Dans le dromadaire, le chameau, le lama, on retrouve les quatre estomacs des ruminans à cornes (Cuvier, Leçons d'anat. comp.,t. 3, 1805, p. 397):
5. Et puis le conférencier recommençait : « Ce qui différencie les deux animaux, c'est que le dromadaire n'a qu'une bosse, tandis que, chose étrange et utile à savoir, le chameau en a deux... » Prévert, Histoires,Paris, Gallimard, 1963, p. 154.
b) Vieilli, au sing. ou au plur. Chameau désigne le genre jusqu'à l'apparition de camélidé (cf. Cuvier, Leçons d'anat. comp., t. 2, 1805, p. 39).
Rem. 1. On rencontre les mots composés (rares) oiseau-chameau qui désigne l'autruche et chameau léopard synon. de girafe (cf. Bernardin de Saint-Pierre, Harmonies de la nature, 1814, p. 242, 218). 2. Chamelle ne s'emploie qu'en zoologie.
B.− Emplois spéc.
1. Loc. et proverbes, fam. Être sobre comme un chameau (p. allus. au fait que cet animal peut se passer de boire pendant plusieurs jours et exige peu de nourriture) :
6. Ici, un peuple heureux, gai de la gaîté du ciel, avec des bonheurs à bon marché. Sobre comme le chameau, dînant presque de son soleil, ... E. et J. de Goncourt, Journal,1867, p. 331.
[P. allus. à l'Évangile]
a) Essayer de faire passer un chameau par le trou d'une aiguille (Saint Matthieu, XIX, 24 : Il est plus facile à un chameau de passer par un trou d'aiguille qu'à un riche d'entrer dans le Royaume des Cieux). Entreprendre une chose difficile, sinon impossible à réaliser :
7. Et une autre idée abstraite ou attitude d'esprit pourrait être représentée par quelques-uns des innombrables symboles de l'écriture, exemple : le trou d'aiguille à travers lequel le chameau est incapable de passer. Artaud, Le Théâtre et son double,1939, p. 48.
Rem. Cf. également aiguille ex. 7.
b) Rejeter le moucheron et avaler le chameau (saint Matthieu, XXIII, 24 : Guides aveugles, qui arrêtez au filtre le moucheron et engloutissez le chameau!). Éviter de commettre des fautes légères et s'en permettre de graves (Bonald, Législ. primitive,t. 1, 1802, p. 130).
2. Au fig.
a) Fam. Personne hargneuse. Ah! le chameau, quel chameau! Le chameau n'a pas l'air commode (Bloy, La Femme pauvre,1897, p. 15).Son chameau de bonne (Zola, Pot-Bouille,1882, p. 268).
Emploi adj., rare. Elle est chameau, ct'e vieille (Aymé, Brûlebois,1926, p. 204).
b) Arg. Terme injurieux désignant une femme de mœurs légères. Tu viens de la retape, chameau! (Zola, L'Assommoir,1877, p. 792).
Rem. On rencontre chez le même aut. l'expr. chameau du boulevard. Puer le musc comme le chameau du boulevard (Zola, L'Assommoir, 1877, p. 601).
Prononc. et Orth. : [ʃamo], [ʃamεl]. Ds Ac. 1694-1835 uniquement au masc.; ds Ac. 1878 et 1932 au masc. et au fém. Étymol. et Hist. A. Subst. masc. 1. a) ca 1100 cameil zool. (Roland, éd. Bédier, 847); 1121-35 chameil (Ph. de Thaon, Bestiaire, éd. Walberg, 1249 ds T.-L.); b) 4equart xives. camel « étoffe en poil de chameau » (J. Froissart, Poésies, II, 346 ds Gdf.); 2. 1828 « terme d'insulte envers une femme » (ds Esn.). II. Subst. fém. ca 1160 chameille < œilles > « femelle du chameau » (B. de Ste Maure, Troie, éd. L. Constans, 26 945), seulement en a. fr.; aux xvieet xviies. : chameau ou chameau femelle (Hug., Nicot); chamelle est repris au xixes. 1829 (V. Hugo, Orient., 1 ds Littré). Du lat. class. camelus, sens 1, empr. au gr. κ α ́ μ η λ ο ς « id. » lui même empr. au sémitique occ. (cf. hébr. gāmāl); v. Chantraine; d'abord chameil, chamoil (v. T.-L. et Gdf. Compl.) puis chamel par changement de suff. (-ēlu > -ĕllu), v. Fouché, p. 232 et 449. Fréq. abs. littér. Chameau : 889. Chamelle : 26. Fréq. rel. littér. Chameau : xixes. : a) 1 240, b) 2 000; xxes. : a) 1 243, b) 901. Chamelle : xixes. : a) 64, b) 63; xxes. : a) 21, b) 8.
DÉR.
Chamelier, subst. masc.Conducteur de caravane, chargé également du soin des chameaux qui la composent. Synon. conducteur de chameau.Caravane marchant au bruit des grelots des dromadaires et aux chants des chameliers (Du Camp, Le Nil,1854, p. 268).Au fig., péj. On rencontre chez Colette, Claudine en ménage, 1902, p. 115 l'expr. chamelier-servant (supra B 2) : la grotesque mère Barman, à qui Gréseuille sert, dit Maugis, de chamelier-servant. [ʃaməlje]. Fouché Prononc. 1959, p. 100 note que l'e muet intérieur se conserve devant le groupe [lj] dans les subst. suiv. : atelier, bachelier, batelier, bourrelier, chamelier, chancelier, chandelier, chapelier, coutelier, hôtelier, râtelier, sommelier, tonnelier, bachelière, chancelière, hôtelière, muselière. Ds Ac. 1762-1932. 1reattest. ca 1430 (Alain Chartier, Œuvres, 350, éd. 1617 ds R. Hist. litt. Fr., t. 4, p. 302); de l'a. fr. chamel (v. chameau), suff. -ier* ou plus prob. adaptation du b. lat. camelarius « id. ». Fréq. abs. littér. : 80.
BBG. − Gottsch. Redens. 1930, pp. 42, 123. − Le Breton Grandmaison. Comment parlent les relieurs. Vie Lang. 1961, pp. 433-437. − Sain. Lang. par. 1920, p. 259.

CHAMEAU2, subst. masc.

MAR. [P. réf. à l'aptitude des chameaux à recevoir de lourdes charges] Ensemble de deux caissons à air utilisé pour soulever un navire qui doit franchir des passages où il n'y a pas assez de fond :
Les vaisseaux de guerre n'atteignaient Amsterdam et n'en sortaient qu'à force d'argent, de temps et d'efforts; il fallait les traîner vides et désarmés sur des chameaux à l'ouverture du Zuiderzee. Las Cases, Le Mémorial de Sainte-Hélène,t. 2, 1823, p. 262.
Prononc. et Orth. : [ʃamo]. Ds Ac. 1835-1932. Étymol. et Hist. 1722 (Aubin, Dict. de marine ds Kemna, p. 162). Trad. du néerl. kameel proprement « chameau », appellation donnée p. métaph. à un bâtiment inventé en 1691 par Meeuwes Bakker, servant à soulever les navires de faible tonnage de manière à leur faire franchir les hauts-fonds (Verdam; Valkh., p. 88; v. aussi Encyclop. 1753, s.v. chameau). Bbg. C. (M.). Chameau chez Apollinaire. Fr. Mod. 1952, pp. 55-56. − Kemna 1901, p. 162. − La Landelle (G. de). Le Lang. des marins. Paris, 1859, p. 204.

Wiktionnaire

Nom commun 2 - français

chameau \ʃa.mo\ masculin

  1. (Marine) Grand ponton qu’on emploie surtout en Hollande et qui sert à soulever un bâtiment pour le faire passer sur de petits fonds.
    • On place un chameau de chaque côté du vaisseau qu’on veut soulever.

Nom commun 1 - français

chameau \ʃa.mo\ masculin (pour la femelle, on dit : chamelle)

  1. Mammifère quadrupède ruminant haut de jambes du genre Camelus, ayant une ou deux bosses sur le dos.
    • Le poney est le seul moyen de transport dans ce pays dépourvu de voies de communication; il est à l’Islandais ce que le chameau est au Bédouin : il porte le voyageur et tous ses impedimenta. — (Jules Leclercq, La Terre de glace, Féroë, Islande, les geysers, le mont Hékla, Paris : E. Plon & Cie, 1883, page 9)
    • Ces chameaux des Touaregs sont de la meilleure espèce ; ils peuvent rester de trois à sept jours sans boire, et deux jours sans manger ; leur vitesse est supérieure à celle des chevaux, et ils obéissent avec intelligence à la voix du khabir, le guide de la caravane. — (Jules Verne, Cinq semaines en ballon, J. Hetzel et Cie, Paris, 1863)
    • Nous avions un troupeau de chèvres assez nombreux, et quelques malheureux chameaux, maigres et épuisés, — épave de l’expédition d’In-Salah, qui a dépeuplé de chameaux le Sahara pour des années […] — (Isabelle Eberhardt, Dans la dune)
    • Le poil de chameau naturel est de toutes les couleurs, depuis le brun foncé jusqu'au blanc, mais la teinte moyenne des blousses est fauve. […] Malheureusement le poil de chameau se file mal et se feutre très lentement. — (D. de Prat, Nouveau manuel complet de filature, 1re partie : Fibres animales & minérales, Encyclopédie Roret, 1914)
    • La pluie se remet à tomber, drue et froide, et la nuit s'approche à grands pas. Nous sommes trempés et glacés, et les chameaux portant nos tentes sont bien loin encore. — (Frédéric Weisgerber, Trois mois de campagne au Maroc : étude géographique de la région parcourue, Paris : Ernest Leroux, 1904, page 28)
    • Au Tchad, nous changerons nos chevaux de réquisition (qui sont d’insignes rosses) et nos bêtes de somme contre des chameaux pour continuer notre route dans la zone désertique d’Agadem. — (Louis Alibert, Méhariste, 1917-1918, Éditions Delmas, 1944, page 23)
    • « Il faut faire attention avec les chameaux ! lançai-je avec enjouement. D’ailleurs, ce sont des dromadaires.
      – Le Robert donne
      chameau à une bosse ou chameau d’Arabie », remarqua-t-il d’un ton pensif, sans bouger pour autant. — (Michel Houellebecq, Rudi, nouvelle, supplément au magazine « Elle », 2000, page 13.)
  2. (En particulier) Chameau de Bactriane par opposition au dromadaire.
    • Mais il faut, si l’on compare le cheval de trait et le cheval de course, le dromadaire et le chameau, les diverses races de moutons adaptées soit aux plaines cultivées, soit aux pâturages des montagnes, et dont la laine, suivant la race, est appropriée tantôt à un usage, tantôt à un autre ; […] — (Charles Darwin, L’Origine des espèces, Chapitre I, traduit par Edmond Barbier, 1876, édition de 1906)
  3. (Argot polytechnicien) (Vieilli) Femme.
  4. (Figuré) (Familier) (Populaire) Personne méchante et désagréable.
    • — Quand mon quatrième est né, j’étais si en colère que je n’arrêtais pas de cogner sur l’aîné, comme si c’était de sa faute : « Toi, chameau, si tu n’étais pas là, ça ne m’en ferait pas quatre. » — (Léon Frapié, La maternelle, Librairie Universelle, 1908)
    • Il est cardiaque. Et elle, c'est un chameau.
      On sait peu de chose sur leur relation, cela permet de laisser naviguer son imagination.
      — (Marie-Noëlle Himbert , Marie Curie: Portrait d'une femme engagée (1914-1918), Éditions Actes Sud, 2014)
  5. (Zoologie) Notodonte chameau (Notodonta dromedarius).
  6. (Afrique) Faute de français.
    • Enfin, si chameauser renvoie bien à chameau, il faut savoir qu'un chameau est, dans le langage scolaire, une faute de français : chameauser signifie donc «faire une faute de français ». — (Henriette Walter, Le Français d'ici, de là, de là-bas, éditions Jean-Claude Lattès, 1998)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

CHAMEAU. n. m.
Quadrupède ruminant haut de jambes, ayant une ou deux bosses sur le dos. Chameau mâle. Chameau femelle. Le chameau est originaire de l'Asie centrale et sert de bête de somme. Chameau d'Arabie ou Dromadaire. Voyez DROMADAIRE. En termes de Marine, il désigne une Espèce de grand ponton qu'on emploie surtout en Hollande et qui sert à soulever un bâtiment pour le faire passer sur de petits fonds. On place un chameau de chaque côté du vaisseau qu'on veut soulever.

Littré (1872-1877)

CHAMEAU (cha-mô) s. m.
  • 1Quadrupède ruminant haut de jambes, qui a le cou fort long, et une ou deux bosses sur le dos. Le chameau bactrien, qui a deux bosses et est dit vulgairement chameau ; il est répandu dans toute la Bactriane ainsi qu'en Tartarie et en Chine. Le chameau dromadaire, nommé vulgairement dromadaire, et ayant une seule bosse. Le premier qui vit un chameau S'enfuit à cet objet nouveau ; Le second approcha ; le troisième osa faire Un licou pour le dromadaire, La Fontaine, Fabl. IV, 10. Vois l'homme en Mahomet, juge avec moi ton maître ; Tu verras de chameaux un grossier conducteur…, Voltaire, Fanat. I, 4.

    Poil de chameau, poil dont on se sert pour différents ouvrages.

    Terme d'injure, populaire et très bas. Va, grand chameau.

  • 2Chameau du Pérou, lama.

    Chameau de rivière, pélican.

  • 3 Terme de marine. Sorte de grande caisse qu'on place sous le flanc d'un navire pour le porter et le soutenir au-dessus de l'eau, dans certaines occasions. Demi-chameau, se dit quelquefois de chacun des deux pontons qui composent un chameau complet.

HISTORIQUE

XIe s. Set cenz camelz et mil autours muez, Ch. de Rol. III.

XIIe s. Muls et chevaux, et chamels, Roncisv. 21. Li bon chamel gisent en sa contrée, ib. 41. Et sa posessions fut set milhiers de berbiz et trois milhiers de chamoz, Job, 495.

XIIIe s. Li chameus siet joste le roy, Moult fu en la cort chier tenuz, Ren. 8422. Il sont jà entré en ma terre, Et si les conduit li chameus, ib. 26129. Donques ont lor gaaing coilli et asamblé ; Cinc cens et mil camel i furent conquesté, Estre [outre] muls et somiers qui pas ne sont nombré, Ch. d'Ant. VIII, 1510.

XVe s. Ils estoient rafreschis souvent de nouvelles pourveances, car on leur amenoit à sommes et à cameaux, Froissart, III, IV, 15.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

CHAMEAU. Ajoutez :
4Sorte de papillon, bombyx camelina.
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Encyclopédie, 1re édition (1751)

CHAMEAU, s. m. camelus, (Hist. nat. Zoolog.) animal quadrupede ruminant, dont il y a plusieurs especes. On les distingue par le nombre des bosses qu’ils ont sur le dos. Suivant Aristote & Pline, celui qui a deux bosses retient le nom de chameau : il se trouve plus ordinairement dans la partie orientale de l’Asie ; c’est pourquoi il est nommé camelus bactrianus. Il est le plus grand & le plus fort. Celui qui n’a qu’une bosse, est plus petit & plus léger ; c’est à cause de sa vîtesse qu’on l’appelle dromadaire. On le trouve plus communément dans la partie occidentale de l’Asie, savoir dans la Syrie & dans l’Arabie. Solin donne au contraire le nom de chameau à ceux de ces animaux qui n’ont qu’une bosse. On distingue trois especes de chameaux en Afrique : ceux de la premiere, sont les plus grands & les plus forts ; on les appelle hegins ; ils portent jusqu’à mille livres pesant. Ceux de la seconde espece sont nommés bechets ; ils viennent de l’Asie ; ils sont plus petits que les premiers ; ils ont deux bosses, & ils sont également propres à être montés & à être chargés. Les troisiemes portent le nom de raguahil ; ils sont petits & maigres, mais si bon coureurs, qu’ils peuvent faire plus de cent milles en un seul jour : on les appelle aussi maihari & dromadaires. On a décrit dans les Mém. de l’Acad. royale des Sciences, sous le nom de chameau, deux de ces animaux qui n’avoient qu’une bosse. Ils étoient de différente grandeur : le plus petit avoit cinq piés & demi depuis la haute courbure de l’épine du dos, qui est la bosse, jusqu’à terre ; quatre piés & demi depuis l’estomac jusqu’à la queue, dont la partie osseuse avoit quatorze pouces de longueur ; la longueur de la queue entiere y compris le crin, étoit de deux piés & demi ; le cou avoit la même longueur, & la tête vingt-un pouces depuis l’occiput jusqu’au museau. Le poil étoit doux au toucher, d’une couleur fauve, un peu cendrée ; il n’étoit guere plus long que celui d’un bœuf sous le ventre & sur la plus grande partie du corps : il étoit beaucoup plus long sur la tête, au-dessous de la gorge, & au haut de la poitrine où il avoit cinq ou six pouces : le plus long étoit sur le milieu du dos, il avoit près d’un pié ; & quoiqu’il soit fort doux & fort mou, il se tenoit élevé, de sorte qu’il faisoit la plus grande partie de la bosse du dos.

L’autre chameau qui étoit le plus grand, & qu’on voit Pl. II. fig. 1. de l’Hist. nat. avoit le poil frisé & bouchonné, plus long par tout le corps que celui du premier, mais plus court sur la bosse, qui étoit plus relevée à proportion que celle du petit chameau ; le grand n’avoit de poil long ni sur la tête, ni au bas du cou. On a observé à la ménagerie de Versailles, que le poil des chameaux tombe tous les ans, à l’exception de celui de la bosse. On le recueille avec soin à cause du grand commerce qu’on en fait. On le mêle avec d’autres poils, & il entre pour lors dans la fabrique des chapeaux, particulierement de ceux qu’on appelle caudebecs. Voyez l’article Chapeau. Le poil de la queue étoit gris, fort dur, & semblable au crin de la queue d’un cheval.

Ces chameaux avoient la tête petite à proportion du corps ; le museau fendu comme celui d’un lievre, & les oreilles très-courtes. Le grand avoit de chaque côté à la mâchoire supérieure, trois dents canines de grandeurs différentes, & deux aussi de chaque côté à l’inférieure ; il n’avoit point d’incisives en haut. Les dents du petit chameau étoient comme celles des autres animaux ruminans : chaque pié étoit garni par le bout de deux petits ongles, & le dessous étoit plat, large, fort charnu, & revêtu d’une peau molle épaisse & peu calleuse. Le pié étoit fendu par-dessus à quatre ou cinq doigts près de l’extrémité ; & au-dessous de cette fente qui étoit peu profonde ; il étoit solide. Il y avoit deux callosités à chacune des jambes de devant ; la plus haute étoit en arriere à la jointure du coude, & la seconde en-devant à la jointure qui représente le pli du poignet. Les jambes de derriere avoient aussi une callosité à la jointure du genou, qui étoit dure & presque aussi solide que la corne du pié des autres animaux. Enfin il y avoit au bas de la poitrine une septieme callosité beaucoup plus grosse que les autres, & attachée au sternum, qui étoit protubérant dans cet endroit : elle avoit huit pouces de longueur, six de largeur, & deux d’épaisseur. Toutes ces callosités viennent de ce que cet animal ne se couche pas sur son côté comme les autres animaux, mais qu’il s’accroupit ; toutes les parties qui portent sur la terre dans cette situation deviennent calleuses. Le prépuce étoit grand & lâche ; il se recourboit en arriere après avoir recouvert l’extrémité de la verge : c’est sans doute ce qui fait que le chameau jette son urine en arriere. Mém. de l’Acad. roy. des Sc. tom. III. part. I.

Les chameaux mangent très-peu ; ils broutent des joncs, des orties, des chardons, &c. & le feuillage des arbres : mais lorsqu’ils fatiguent beaucoup & pendant long-tems, on leur fait manger de l’orge, du maïs, ou de la farine d’orge & de froment. On fait ordinairement une pâte avec la farine d’orge, & on leur en donne à chacun un morceau de la grosseur des deux poings. En Perse, la quantité de cette pâte est d’environ trois livres chaque jour pour chacun de ces animaux : on y mêle quelquefois de la graine de coton. On leur donne aussi des dattes & du poisson sec. Si on réduisoit les chameaux à brouter l’herbe qu’ils rencontrent dans leurs voyages, ils maigriroient beaucoup ; & même quelques précautions que l’on prenne, il y en a qui sont fort maigres au retour, leurs bosses & leurs callosités diminuent de volume. Lorsqu’ils sont fort gras en partant, ils peuvent se passer d’orge pendant quarante ou cinquante jours. On dit qu’il y a des chameaux qui dans la disette passent huit ou dix jours sans manger : mais il est certain qu’ils peuvent être pendant trois, quatre ou cinq jours sans boire. A l’ordinaire, on ne leur donne de l’eau qu’une fois en trois jours lorsqu’ils vivent d’herbes fraîches. On dit qu’il y en a qui ne boivent qu’une fois en quinze jours.

Les pays chauds sont les plus propres aux chameaux ; le froid leur est funeste, même celui de nos climats : ainsi cet animal restera toûjours en Asie & en Afrique, où il est de la plus grande utilité. Il sert de monture, il porte de grands fardeaux, & il fournit du lait bon à manger. En Perse, on monte les chameaux à deux bosses, & on se place entre les deux bosses qui servent de selle. On dit qu’il y en a de petits en Afrique qui font jusqu’à quatre vingts lieues par jour, & vont ce train pendant huit ou dix jours de suite : leur allure est le trot. On fait porter les fardeaux aux gros chameaux, & le poids de leur charge est depuis six ou sept cents livres jusqu’à mille & douze cents. Il y en a en Perse qui portent jusqu’à 1500 livres ; mais ils ne font pas plus de deux ou trois lieues par jour sous un si grand poids. En Arabie, ils ne portent que sept cents livres ; mais ils font deux milles & demi par heure, & leur traite est de dix & quelquefois de quinze jours. On charge le chameau sur sa bosse, ou on y suspend des paniers assez grands, pour qu’une personne s’y puisse tenir assise les jambes croisées, à la mode des orientaux : c’est dans ces paniers qu’on voiture les femmes. On attele aussi les chameaux pour traîner des chars. Ces animaux sont fort dociles ; ils obéissent à la voix de leur maître lorsqu’il veut les faire accroupir pour les charger ou les décharger, & ils se relevent au moindre signe ; quelquefois cependant ils se levent d’eux-mêmes lorsqu’ils se sentent surcharger, ou ils donnent des coups de tête à ceux qui les chargent. Mais la plûpart ne jettent qu’un cri sans se remuer. Ces animaux ne donnent des marques de férocité, que lorsqu’ils sont en rut ; alors ils deviennent furieux, ils ne connoissent plus le camelier, ils mordent tous ceux qu’ils rencontrent,ils se battent à coups de piés & de dents contre les autres animaux, même contre les lions ; on est obligé de leur mettre des muselieres. Le tems du rut arrive au printems, & dure quarante jours, pendant lesquels ils maigrissent beaucoup ; aussi mangent-ils moins qu’à l’ordinaire. La femelle s’accroupit pour recevoir le mâle ; elle entre en chaleur au printems ; elle ne porte qu’un petit à la fois, qu’elle met bas au printems suivant ; & elle ne rentre en rut qu’un an ou deux après. On coupe les mâles pour les rendre plus forts, & on n’en laisse qu’un entier pour dix femelles. On prétend que les chameaux ne s’accroupiroient pas d’eux-mêmes pour recevoir leur charge, si on ne leur faisoit prendre cette habitude dans leur jeunesse. On ne les charge qu’à l’âge de trois ou quatre ans. On ne se sert pas d’étrille pour les panser ; on les frappe seulement avec une petite baguette, pour faire tomber la poussiere qui est sur leur corps. En Turquie, leur fumier séché au soleil, leur sert de litiere ; & on le brûle pour faire la cuisine, lorsqu’on se trouve au milieu des deserts. On ne met point de mors aux chameaux que l’on monte ; on passe dans la peau, au-dessus des naseaux, une boucle qui y reste, & on y attache des rênes. On ne frappe pas ces animaux pour les faire avancer, il suffit de chanter ou de siffler : lorsqu’ils sont en grand nombre, on bat des tymbales. On leur attache aussi des sonnettes aux genoux, & une cloche au cou pour les animer & pour avertir dans les défilés. Cet animal est courageux ; on le fait marcher aisément, excepté lorsqu’il se trouve de la terre grasse & glissante, sur laquelle ils ne peuvent pas se soûtenir, à cause de la pelote qu’ils ont sous les piés. Lorsqu’on rencontre de ces mauvais pas, on est obligé d’étendre des tapis pour faire passer les chameaux, ou d’attendre que le chemin soit sec. On ne sait pas précisément combien de tems vivent les chameaux ; on a dit que leur vie étoit de cinquante ans, & quelquefois de cent : on a même prétendu qu’elle s’étendoit jusqu’à cent soixante. Voyez Quadrupede ; voyez aussi l’article Chamoiseur. (I)

Chameau : (Mat. med.) les auteurs de matiere medicale ont donné à la graisse, au cerveau, au fiel, à l’urine, & à la fiente de cet animal, toutes les vertus medicinales qu’ils ont observées dans les mêmes matieres tirées des animaux, qui ont quelqu’analogie avec celui-ci : mais nous ne leur connoissons aucune vertu particuliere : aussi ne sont-elles d’aucun usage parmi nous.

Chameau moucheté ; voyez Giraffe.

Chameau, (Marine.) est un grand & gros bâtiment inventé à Amsterdam en 1688, par le moyen duquel on enleve un vaisseau jusqu’à la hauteur de cinq à six piés, pour le faire passer sur des endroits où il n’y a pas assez d’eau pour de gros vaisseaux. On a appellé cette espece de machine chameau, à cause de sa grandeur & de sa force.

Pour entendre sa construction & son usage, il faut avoir sous les yeux la fig. 2. Planc. V. de Mar. où le chameau est représenté enlevant un bâtiment. La description qu’on en va donner, est tirée d’un ouvrage publié à Amsterdam en 1719, sur la construction des vaisseaux.

La construction de ce bâtiment est à plates varangues ; il a cent vingt-sept piés de long, vingt-deux piés de large par un bout, & treize piés par l’autre bout ; un bout a onze piés de creux, & l’autre bout treize piés  : un des côtés de cette machine a les mêmes façons à l’avant & l’arriere qu’un autre vaisseau ; mais de l’autre côté, elle est presque droite & tombe un peu en-dehors. Le fond de cale est séparé d’un bout à l’autre par un fronteau bien étanché, & où l’eau ne peut passer. Chaque côté est aussi séparé en quatre parties, par fronteaux aussi étanchés, si bien qu’il y a huit espaces séparés l’un de l’autre, dans une partie desquels on peut laisser entrer l’eau, & on peut la pomper dans les autres, & par ce moyen tenir le chameau en équilibre. Outre cela, il y a en chaque espace ou retranchement, une dale bien étanchée, par laquelle on y fait entrer l’eau, & qu’on bouche avec un tampon. Il y a aussi deux pompes, pour pomper l’eau, qu’on y fait entrer. Il y a dans le bâtiment vingt tremues, qui passent du tillac au fond du vaisseau, par où l’on fait passer des cordes de neuf pouces de circonférence, lesquelles sortent par les trous qui sont au bord de ces tremues ; & embrassant la quille, vont passer dans un autre chameau, qui est au côté du premier. Ces cordes se virent par le moyen des guindeaux qui sont sur le pont, auprès près de chaque tremue, & qui servent à roidir les cordes. Le vaisseau qu’on veut enlever étant passé sur les cordes entre les deux chameaux, on pompe toute l’eau ; & par ce moyen les chameaux étant plus légers, s’élevent sur la surface de l’eau, & flottent plus haut qu’ils ne faisoient lorsqu’ils étoient plus pleins, & ils élevent avec eux le vaisseau qui est sur les cordes, qu’on fait roidir en même tems par les guindeaux ; de sorte que le vuide des chameaux qu’on pompe, & la manœuvre qu’on fait avec les guindeaux, concourent en même tems, & le vaisseau est comme emporté jusqu’au-delà des endroits qui ne sont pas assez profonds (Z)

* Chameau ou Porte-grille, (Art méchaniq.) partie du métier à faire des bas. Voyez l’article Bas au Métier.

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Étymologie de « chameau »

Picard, cameau ; provenç. camel ; espagn. camello ; ital. cammello ; du latin camelus, de l'arabe djamal. Dans l'ancien français, le nominatif singulier est li chamels ou chamaus ou chameus, et le régime singulier le chamel.

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(Nom 1) (1080) Du latin camelus (« chameau ») lui-même du grec ancien κάμηλος, kámêlos, de l’arabe جَمَلٌ (jamalũ) (« chameau ; palmier »)[1][2][3].
(Nom 2) Calque du néerlandais kameel.
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Phonétique du mot « chameau »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
chameau ʃamo

Fréquence d'apparition du mot « chameau » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « chameau »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « chameau »

  • Attache ta chamelle et confie-toi à Dieu.
    Mahomet en arabe Muḥammad — Tradition musulmane
  • L’ogre fisc a l’appétit du lion envers les uns, mais la sobriété du chameau à l’égard des autres.
    Paul Morand
  • Souvent on filtre un moustique Tout en avalant un chameau.
    Mikael Agricola — Préface aux trois petits prophètes
  • A beau chameau, vaste désert.
    Achille Chavée — Décoctions II
  • Les chats ont un petit côté chameau.
    R. Chartrand
  • Marche en avant de toi-même, comme le chameau qui guide la caravane.
    Proverbe africain
  • Un chameau, c'est un cheval dessiné par une commission d'experts.
    Francis Blanche
  • On ne rassasie pas un chameau en le nourrissant à la cuillère.
    Proverbe chinois
  • Ce que le chameau imagine, les chameliers le devinent.
    Proverbe arabe
  • Celui qui porte un présent sur un âne attend de recevoir un présent sur un chameau.
    Proverbe arabe
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Images d'illustration du mot « chameau »

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Traductions du mot « chameau »

Langue Traduction
Anglais camel
Espagnol camello
Italien cammello
Allemand kamel
Portugais camelo
Source : Google Translate API

Synonymes de « chameau »

Source : synonymes de chameau sur lebonsynonyme.fr

Combien de points fait le mot chameau au Scrabble ?

Nombre de points du mot chameau au scrabble : 14 points

Chameau

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