La langue française

Accueil > Dictionnaire > Définitions du mot « sourdre »

Sourdre

Définitions de « sourdre »

Trésor de la Langue Française informatisé

SOURDRE, verbe intrans.

Littéraire
A. − [Le suj. désigne de l'eau]
1. Sortir du sol. Synon. jaillir.Entendre sourdre l'eau. L'eau était rare, mais partout où sourdait une fontaine, croissait un figuier (Chateaubr.,Mém., t. 1, 1848, p. 264).Angoulême voit sourdre à ses pieds dans les prairies des eaux magnifiques (Vidal de La Bl.,Tabl. géogr. Fr., 1908, p. 369).V. avalanche ex. 3, cristal B 3 ex. de Pesquidoux.
Rare. [Le suj. désigne un cours d'eau] Sourdre à + topon.Prendre sa source à. De nombreux ruisseaux, dont quelques-uns sourdent aux Aigues (Balzac,Paysans, 1844, p. 25).
2. Sourdre de (un lieu naturel ou p. ext., artificiel).Sortir de, jaillir de. Sourdre de terre. Ronds-points où les jets d'eau sourdent, inattendus, De vasque circulaire en gerbes volatiles (Régnier,Sites, 1887, p. 120).Il y a des sources qui jaillissent des rochers; il y en a qu'on voit sourdre de sous les glaciers (Gide,Nourr. terr., 1897, p. 216).
B. − P. anal. Sourdre (de)
1. [Le suj. désigne un liquide] Sortir (de). Par des ouvertures éloignées du cratère on voyait la lave sourdre du sol (Quinet,All. et Ital., 1836, p. 200).[Pierre] sentait des larmes de rage lui sourdre sous les paupières (Van der Meersch,Invas. 14, 1935, p. 262).
2. [Le suj. désigne une chose concr.] Apparaître, se manifester, se faire sentir (du sein de, provenant de). Une grosse odeur de chicorée montant des cuisines, commençait de sourdre sous les portes (Malègue,Augustin, t. 1, 1933, p. 163).Dans ce bois où sourdaient les premières pousses de mars (Vialar,Morts viv., 1947, p. 172).V. malhabile ex. de Daniel-Rops.
C. − Au fig. [Le suj. désigne une chose abstr.]
1. Naître, se manifester. Qqc. sourd en qqn, en son âme, en son cœur, dans l'âme, dans le cœur, dans l'esprit de qqn; qqc. fait sourdre qqc. en qqn. Je sens (...) Dans le complot commun sourdre votre complot (Hugo,Cromwell, 1827, p. 333).En un instant toutes ses émotions de jeunesse lui sourdirent au cœur (Balzac,Fille yeux d'or, 1835, p. 363).
2. Sourdre de.Naître de, avoir son origine dans. Ils sentaient de leur désespoir sourdre une nouvelle espérance (Chateaubr.,Paradis perdu, 1836, p. 383).De la vérité violentée (...), à travers les mots menteurs sourd une atroce ironie (Bernanos,Imposture, 1927, p. 330).
REM.
Sourdant, -ante, part. prés. en empl. adj.,rare. Nehemius sentait (...) cette sourdante réprobation (Kahn,Conte or et sil., 1898, p. 43).
Prononc. et Orth.: [suʀdʀ], (il) sourd [su:ʀ]. Homon. de formes de sourdre: sourd, sourds, sourde, sourdes. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. 1100 « se présenter, apparaître en parlant de personnes » (Roland, éd. J. Bédier, 1448); 2. ca 1140 « jaillir, en parlant des eaux » (Geffrei Gaimar, Histoire des Anglais, éd. A. Bell, 4367); 3. ca 1470 « s'élever en sortant de terre, en parlant des végétaux » (G. Chastellain, Chroniques, éd. Kervyn de Lettenhove, t. 4, p. 21); 4. id. « apparaître aux yeux comme un jaillissement, en parlant d'un phénomène lumineux » (Id., ibid., t. 3, p. 116). B. 1160-74 « se manifester progressivement; paraître » (Wace, Rou, éd. J. Holden, I, 1820); 1560 sourdre de qqc. « en provenir » (Calvin, Institution chrétienne, IV, XX, 16 ds Hug.). Du lat. surgere « élever », « émerger, se montrer », « apparaître », comp. de sub- marquant le mouvement de bas en haut et regere « diriger en droite ligne ». Fréq. abs. littér.: 185.

Wiktionnaire

Verbe - français

sourdre \suʁdʁ\ ou \suʁ.dʁə\ intransitif 3e groupe, défectif (voir la conjugaison)

  1. (Littéraire) Jaillir, surgir, en parlant d’une source d’eau.
    • Les Mongols nous recommandèrent de suivre avec beaucoup de prudence les sentiers battus, et de nous éloigner des endroits où nous verrions l’eau sourdre et monter. — (Évariste Huc, Lettre à M. Etienne, Supérieur général, Annales de la propagation de la foi, 1847)
    • Déjà on entend le bruit de l’eau qui sourd du rocher par trois fissures et tombe d’assez haut dans un petit étang. — (Judith Gautier, L’Usurpateur., E. Flammario, 1875, t. 1, page 167)
    • Le voyageur lassé par une longue route dans le soleil, et qui s’essuie le front après avoir péniblement gravi une côte poudreuse, écoute avec délices le murmure d’une source froide qui vient sourdre au milieu de roches moussues et tombe en cascade argentine sur les feuilles découpées des fougères et sur les rameaux de cornouiller chargés de baies pierreuses. — (Marcel Schwob, La Moisson sabine dans Cœur double, 1891)
    • Cela donna au jeune forestier la certitude qu’il avait fait bonne route, puisque le ruisseau semblait sourdre des entrailles du plateau d’Orgall. — (Jules Verne, Le Château des Carpathes, J. Hetzel et Compagnie, 1892, pages 53-68)
    • Dès l’Antiquité, les hommes se sont rassemblés autour de ce lieu mystérieux. Les eaux sourdaient d’un marécage, qui par la suite fut assaini. — (F.L., Crues : la fosse Dionne à Tonnerre plus mystérieuse que jamais, France Télévisions. Mis en ligne le 9 janvier 2018)
  2. (Par analogie) Arriver comme d’un lieu caché, en parlant d’une manifestation physiologique.
    • Une larme sourd de mes yeux et, après avoir trembloté un instant à mes cils, coule au long de mes joues amaigries pour s’engouffrer dans les broussailles de ma rude moustache. — (Alphonse Allais, À se tordre : En voyage, Paul Ollendorff, 1891, page 256)
    • Il se rajusta, tant bien que mal, monta, ainsi qu’un homme pris de démence, dans sa chambre, trouva Louise, presque nue, en larmes ; et chez elle, l’énervement s’était si rapidement accru que les doigts tremblaient, en même temps que les dents entre la haie desquelles sourdaient des hoquets et des râles. — (Joris-Karl Huysmans, En rade, A. Blaizot, 1911, page 136)
    • Le long du poignard le sang commençait à sourdre, noir dans cette fausse lumière. — (André Malraux, La condition humaine, 1946, rééditions Folio Plus Classiques, 2019, page 16)
    • Il fit une deuxième enjambée, puis une troisième, et c’était comme si la force de se soutenir contre la gravité sourdait à travers la longueur de sa cuisse, par son mollet, de ses bottes ferrées de vif. — (Alain Damasio, La Horde du Contrevent, 2004)
  3. (Par analogie) Arriver comme d’un lieu caché, en parlant de lumière.
    • Et déjà, du côté du lac encore visible entre les arbres, une lueur sourdait sous l’horizon en bleuissant un peu la neige : le lever de la lune était proche. — (Maurice Genevoix, Laframboise et Bellehumeur, Flammarion, 1959, page 59)
    • Résignées et point encore sorties de leur volonté de rire, les deux femmes massacrèrent d’une voix méchante un chant d’exorcisme, pendant qu’un dernier rayon sourdait à l’horizon, comme un bras de noyé. — (Francis Gruyer, Les ruines du soleil, Gallimard, 1979, page 192)
  4. (Figuré) Naître, se manifester, faiblement pour commencer, en parlant d’une idée ou d’une émotion.
    • À côté de l’idée de puissance commence à sourdre l’idée de justice. — (Théophile Gautier, Le Panthéon, peintures murales dans L'Art moderne, M. Lévy frères, édition de 1856, chap. 1)
    • Jacques savourait une joie de vivre jusqu’alors inconnue, s’appliquant à refouler les inquiétudes qui parfois sourdaient au fond de son cœur. — (Arthur Daxhelet, Cœur en détresse, 1897, édition de 1914, chap. 3)
    • L’indifférence en matière de foi était devenue de règle, car d’hostilité on n’en sentait point trop encore ; à peine sourdait-elle, peut-être, dans quelques propos sacrilèges. — (Louis Pergaud, Le Sermon difficile dans Les Rustiques, nouvelles villageoises, 1921)
    • Trois semaines auparavant, en apprenant que la guerre était déclarée, Paul avait senti sourdre en lui, immédiate et implacable, la résolution de se faire tuer. — (Maurice Leblanc, L’Éclat d’obus, édition de 1923, chap. 5)
    • Un étrange gémissement, rauque et sourd, presque inaudible, s’est mis à sourdre. — (Glen Cook, Le Château noir, 1984)
    • tu vois, je n’ai pas songé un instant à t’obliger à t’ouvrir complètement, à étaler ce qui t’emplit, ce que tu retiens, ce à quoi tu ne permets de s’échapper que par bribes, par bouffées, tu pourras en laisser sourdre un tout un petit peu… — (Nathalie Sarraute, Enfance, Gallimard, 1983, collection Folio, page 58)
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

SOURDRE. v. intr.
Sortir de terre; il ne se dit que des Eaux et n'est guère en usage qu'à l'infinitif et à la troisième personne du présent de l'indicatif. L'eau sourd de la terre, sourd d'un rocher. Dans cette prairie, on voit l'eau sourdre de tous côtés.

Littré (1872-1877)

SOURDRE (sour-dr'), il sourd, ils sourdent ; il sourdait ; il sourdit ; il sourdra ; il sourdrait ; qu'il sourde ; qu'il sourdît ; sourdant ; point de participe passé v. n.
  • 1En parlant des eaux, sortir de terre. L'eau sourd. Que dirai-je des bains que produit le sein de la terre pour une infinité de maladies, et des eaux chaudes qui sourdent aux rives de la mer ? Malherbe, Traité des bienf. de Senèque, IV, 5. Là sourdait une eau qui avait la propriété de rajeunir : c'est ce qu'on appelle encore aujourd'hui la fontaine de Jouvence, La Fontaine, Psyché, II, p. 176. On trouve des eaux douces le long de la mer, en remontant vers Gaza ; il suffit de creuser avec la main dans le sable pour faire sourdre au bord même de la vague une eau fraîche, Chateaubriand, Itinér. 3e part.
  • 2Se dresser, s'agiter. Nous entendrons… Ces millions de morts, moisson du Fils de l'homme, Sourdre confusément dans leurs sépulcres, comme Le grain dans le sillon, Hugo, F. d'aut. 6.

    Fig. Entre le Clerc et son ami Coras, Deux grands auteurs rimant de compagnie, N'a pas longtemps sourdirent grands débats Sur le propos de leur Iphigénie, Racine, Épigr. I.

  • 3 Fig. Sortir, résulter. C'est une affaire dont on a vu sourdre mille inconvénients. De cette grâce [faite à Fleury de monter dans le carrosse du roi] sourdit une dispute de préférence et de préséance, Saint-Simon, 466, 122.
  • 4 Terme de marine. Se disait d'un nuage s'élevant à l'horizon.

    Sourdre au vent, se disait d'un navire marchant au plus près du vent.

REMARQUE

Buffon a dit sourdissent au présent de l'indicatif ; c'est un barbarisme : Les sources chaudes qui découlent des montagnes, ou sourdissent à l'intérieur des cavités de la terre, Théor. terr. part. hyp. Œuvr. t. IX, p. 361.

HISTORIQUE

XIe s. Quant de paiens li surdent les antgardes, Ch. de Rol. CCXI.

XIIe s. Quant il esguardeit si le hanap tut entur Et vit le vin si truble qu'il en out grant hisdur, Dous iraignes [araignées] vit surdre del funz d'une tenur, Th. le mart. 105. Il nel dist pur nul mal, mais en conseil de fei ; Surdre i vit grant peril e mult mortal desrei, ib. 41. Aval le capitral, tut entur surstrent dous ordres de male granates, Rois, p. 253.

XIIIe s. Et i sordoient li bain tuit chaud li plus bel de tout le monde, Villehardouin, CLXVI. Bien est droiz qu'il en sorde guerre ; Si n'en doit nus avoir pitié, Ren. 18864. Par là, soit esté, soit ivers, S'encorent dui flueves divers, Sordans de diverses fontaines Qui moult sunt de diverses vaines, la Rose, 6005.

XVe s. Ceste nuyt sourdit une grande tourmente, Commines, III, 5. Dieu luy sourdit ung ennemy qui n'avoit nulle force, Commines, V, 18. Il se leva sur pied et battit tant madame qu'elle ne pouvoit sourdre [se lever], Louis XI, Nouv. XXXIX.

XVIe s. Perceant la terre, il en veit sourdre Tages, demi-dieu, Montaigne, I, 45. De ce vice sourdent plusieurs grandes incommoditez, Montaigne, I, 234. Nous ne sentons point le cours des heures en oyant deviser un sage, disert et eloquent vieillard, en la bouche duquel sourt un flux de langage plus doux que miel, Amyot, Préf. XIV, 42. Il ne s'entremesla point des troubles qui depuis sourdirent entre les Grecs, Amyot, Timol. 47. Toutes et quantes fois, dit-il, que je frapperay du pied seulement la terre d'Italie, je feray sourdre de toutes parts gens de guerre à pied et à cheval, Amyot, Pomp. 82.

Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

Étymologie de « sourdre »

Du latin sŭrgĕre (« se lever, se dresser »).
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Du latin sŭrgĕre (« se lever, se dresser »).
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Wallon, sûd ; provenç. sorger, sorzir ; espagn. surgir ; portug. sordir, surdir ; ital. sorgere ; du lat. surgere, de sursum, en haut, et regere, diriger (voy. RÉGIR) ; c'est la contraction de surrigere. Sourdre est la forme française du latin surgere ; surgir a été refait sur le modèle des autres langues romanes.

Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

Phonétique du mot « sourdre »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
sourdre surdr

Fréquence d'apparition du mot « sourdre » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « sourdre »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « sourdre »

  • Bien vivante la poésie ? Incontestablement si l’on en croie la fréquentation du festival des Voix Vives, à Sète. Ici on peut croiser les représentants d’une langue d’Oc toujours vivace, tels Aurelia Lassaque ou Miquel Décor… Mais ce sont d’autres voix qui nous intéressent ici, celles que l’on entend sourdre de la pierre ou du bronze des statues qui les immortalisent, ici ou là en Occitanie…
    Dis-leur ! — Tourisme - Statues (3) : Non, ils ne sont pas morts les poètes ! - Dis-leur !
  • Rose-Alma Brault meurt en 1964, presque quarante ans après son mariage avec le poète. Ce dernier, alors dans la soixantaine, dit entrer dans « l’époque du néant ». Ses veines épiques et terroiristes le guident toujours, mais elles se sont adoucies. Le départ de l’épouse a assourdi la rumeur du monde extérieur, permettant ainsi au murmure intérieur, habité par la mélancolie, de sourdre. « Sans doute les railleurs diront-ils que j’ordonne / Bien sagement ma peine au rythme alexandrin ; / Oui, mais le nouveau-né débile, en son chagrin, / Ne répète-t-il pas un sanglot monotone ? » écrit le poète.
    Le Devoir — Deux poètes amoureux | Le Devoir
  • Voir une rivière naître est toujours un moment d’émotion qui remet à chaque fois les choses en perspective et nous rappelle ce qu’est l’humilité. La voir sourdre d’un glacier ajoute encore à cette impression, nous rappelant aussi que toute chose a une place.
    Culture - Loisirs | Les balades de l'été : aux sources de la Romanche, plus près des hauts sommets

Traductions du mot « sourdre »

Langue Traduction
Anglais spring
Espagnol primavera
Italien primavera
Allemand frühling
Chinois 弹簧
Arabe ربيع
Portugais primavera
Russe весна
Japonais
Basque udaberri
Corse primavera
Source : Google Translate API

Synonymes de « sourdre »

Source : synonymes de sourdre sur lebonsynonyme.fr

Combien de points fait le mot sourdre au Scrabble ?

Nombre de points du mot sourdre au scrabble : 8 points

Sourdre

Retour au sommaire ➦