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Avorter

Définitions de « avorter »

Trésor de la Langue Française informatisé

AVORTER, verbe intrans.

A.− [En parlant d'un animé animal ou humain]
1. Emploi intrans.
a) Rural. [En parlant d'un animal] Mettre bas accidentellement un fœtus non viable :
1. Le pronostic [de la fièvre aphteuse] demeure toujours grave, non pas tant par la mortalité d'ailleurs très faible, mais en raison surtout des pertes économiques. Les femelles malades avortent, les laitières ne donnent pour ainsi dire plus de lait. Les veaux et les agneaux succombent facilement. E. Garcin, Guide vétér.,1944, p. 228.
Rem. Pour une femme enceinte, on dit dans ce cas faire une fausse couche.
b) Usuel. [En parlant d'une femme enceinte] Accoucher volontairement d'un fœtus non viable :
2. Mais la grossesse est possible chez les basedowiennes : il en est qui avortent et il en est qui accouchent à terme. Souques ds(F. Widal, P.-J. Teissier, G.-H. Roger, Nouv. traité de méd.,fasc. 8, 1920-24, p. 205).
3. Je me souvenais bien de sa fille aussi, à lui, une autre gaillarde, flétrie déjà, mais solide et silencieuse, qui était revenue pour avorter, à plusieurs reprises chez ses parents. On ne lui reprochait rien à celle-là. On aurait seulement voulu qu'elle finisse par se marier en fin de compte, surtout qu'elle avait déjà un petit garçon de deux ans à demeure chez les grands-parents. Céline, Voyage au bout de la nuit,1932, p. 336.
Rem. Lar. 19e, Nouv. Lar. ill. enregistrent un emploi pronom. présentant un sens identique, mais vx : ,,Accoucher avant terme : une femme qui s'avorte``.
2. Emploi factitif-trans.
a) Rare, vx. Faire avorter une grossesse. L'interrompre volontairement. Faire avorter un fœtus. Le rejeter par une manœuvre d'avortement :
4. − C'est pourtant ce diable qui sonne l'angélus! − Oh! le sourd! le borgne! le bossu! le monstre! − Figure à faire avorter une grossesse mieux que toutes médecines et pharmaques! Hugo, Notre-Dame de Paris,1832, p. 269.
b) Faire avorter une femme. Faire en sorte que sa grossesse soit interrompue :
5. Elle ignorait tout de son malheur que Mérodack portait seul, « Enceinte, » se disait le mage; « lorsqu'elle sentira le crime s'agiter en elle, ce sera sa mort; je ne puis pas cependant la faire avorter pour la sauver. Oh! si je l'aimais de passion folle et non de charité, je pourrais lui sauver l'honneur et la vie sans qu'elle sût jamais qu'ils furent en danger. Mais tuer même l'enfant du mal! un innocent!... Cependant, quand elle saura, elle se tuera certainement, et l'enfant n'étant pas à terme mourra de sa mort ... » J. Péladan, Le Vice suprême,1884, p. 291.
Rem. Seul Quillet 1965 mentionne un emploi trans. : ,,provoquer un accouchement prématuré par des manœuvres abortives. La sage-femme qui l'avait avortée est en prison. On dit mieux : faire avorter``.
Emploi abs. Un remède qui fait avorter (Rob.).
c) Emploi pronom.-réfl. Se faire avorter
Interrompre sa grossesse par des manœuvres appropriées. Elle fut soupçonnée d'avoir pris des breuvages pour se faire avorter (Ac.1835).
Faire appel à une aide pour interrompre sa grossesse. Elle fut soupçonnée de s'être fait avorter (Ac.1932).
B.− P. anal. [En parlant d'un organe, d'une plante, d'un fruit, etc.] Ne pas arriver à son plein développement. Les fruits du verger avortent :
6. Mais le seul lieu où il me soit permis de me fixer, c'est Cuverville, où j'ai contre moi le ciel et la terre et les hommes; où ma pensée bientôt s'engourdit; où tous les fruits de mon verger avortent, etc. Gide, Journal,1933, p. 1177.
Faire avorter. Il y a des vents qui font avorter les fruits (Ac.1798-1932) :
7. ... des accidents de saison, des sécheresses excessives ayant fait avorter les récoltes, le gouvernement n'a fait pour l'impôt ni délai ni grace : ... Volney, Les Ruines,1791, p. 94.
C.− P. métaph. et au fig.
1. [En parlant d'une pers. qui entreprend qqc.] S'interrompre prématurément; échouer.
a) Emploi intrans., vieilli :
8. Son père avait fini par avoir une maison et un champ; mais lui, le fils, n'avait rien eu de plus pressé que de perdre dans une fausse spéculation ce champ et cette maison. Il ne lui était rien resté. Il avait de la science et de l'esprit, mais il avortait. Tout lui manquait, tout le trompait; ce qu'il échafaudait croulait sur lui. S'il fendait du bois, il se coupait un doigt. S'il avait une maîtresse, il découvrait bientôt qu'il avait aussi un ami. À tout moment quelque misère lui advenait; de là sa jovialité. Hugo, Les Misérables,t. 1, 1862, p. 781.
b) Emploi pronom. (à sens réfl.) :
9. Il est des hommes débiles qui ne peuvent se surmonter. D'un bonheur médiocre, ils font leur bonheur après avoir suicidé leur grande part. Ils s'arrêtent dans une auberge pour la vie. Ils se sont avortés eux-mêmes. Et peu m'importe de ceux-là ce qu'ils deviennent ni s'ils vivent. Ils nomment bonheur de croupir sur la pauvreté de leurs provisions. Saint-Exupéry, Citadelle,1944, p. 637.
2. [En parlant de tout ce qui est susceptible de connaître une évolution, un développement, un résultat (action, maladie, sentiment, etc.)] Ne pas atteindre le terme attendu de son évolution. Une entreprise qui avorte :
10. Si un projet de débarquement en Angleterre avorta, comme avortera celui de Napoléon, partout, de l'océan Atlantique à l'océan Indien, nos escadres avaient tenu les Anglais en échec et le bailli de Suffren s'illustra comme un de nos plus grands marins. Bainville, Histoire de France,t. 2, 1924, p. 14.
Faire avorter :
11. D'où vient ce mal secret qui atteint, fait avorter, les œuvres et les hommes en qui la force originale, le dynamisme, était le plus vivant? Massis, Jugements,t. 2, 1924, p. 260.
(Faire) avorter en. (Faire) dégénérer en :
12. Ces foules déchaînées et illuminées allaient, au crépuscule des croisades, amener les mêmes malheurs qu'au début. En 1096 elles avaient failli faire avorter la guerre sainte en un ignoble massacre de Juifs et de paysans hongrois ou grecs. Ce fut par un massacre du même ordre qu'en 1291 elles provoquèrent la catastrophe finale. Grousset, L'Épopée des croisades,1939, p. 378.
Rem. 1. On rencontre dans la docum. le néol. avortoir, subst. masc. (Sartre, La Nausée, 1938, p. 51; suff. -oir*). Lieu où l'on pratique l'avortement. 2. L'emploi adj. de la forme en -ant est attesté ds l'emploi fig. une indemnité avortante (Chateaubriand, Polémique, 1818-27, p. 466).
PRONONC. : [avɔ ʀte].
ÉTYMOL. ET HIST. − Début xiies. part. passé subst. avorted « enfant mort-né » (Psautier Cambridge, éd. Fr. Michel, 57, 8 ds T.-L. : sicume l'avortad [var. : avorted] de la femme, ki ne vit unches soleil [quasi abortivum mulieris quod non vidit solem]); 1174-78 avorter « accoucher avant terme » (E. de Fougères, Manières, éd. F. Talbert, 1182, ibid. : conceit e porte Et a effant s'ele n'avorte); fin xiies. fig. « ne pas réussir, échouer » (Béroul, Tristan, éd. Fr. Michel, I, 102, ibid). Du lat. abortare « id. » (Varron, Rust., 2, 4, 14 ds TLL s.v., 126, 77).
STAT. − Fréq. abs. littér. : Avorter. 187. Avortant. 6.
BBG. − Bruant 1901. − Littré-Robin 1865. − Nysten 1814. − Rog. 1965, p. 109.

Wiktionnaire

Verbe - français

avorter \a.vɔʁ.te\ intransitif 1er groupe (voir la conjugaison)

  1. (Biologie) Mettre bas accidentellement un fœtus non viable (pour les femmes, on dit « faire une fausse couche »).
    • Le pronostic [de la fièvre aphteuse] demeure toujours grave, non pas tant par la mortalité d'ailleurs très faible, mais en raison surtout des pertes économiques. Les femelles malades avortent, les laitières ne donnent pour ainsi dire plus de lait. Les veaux et les agneaux succombent facilement. — (E. Garcin, Guide vétérinaire, 1944, p. 228.)
  2. Mettre fin volontairement à une grossesse avant son terme.
    • Beaucoup de femmes, dans le but d'échapper aux conséquences de la maternité, se font avorter; c'est-à-dire qu'elles provoquent l'expulsion du produit de la conception avant qu'il n'ait atteint le développement nécessaire pour naître viable, soit dans le cours des six premiers mois. — (Jean Marestan, L'Éducation sexuelle, Éditions de la Guerre sociale, 1910)
  3. (Emploi factitif) Interrompre volontairement une grossesse.
    • Faire avorter une grossesse.
  4. (Emploi factitif) Rejeter un fœtus par une manœuvre d’avortement.
    • Faire avorter un fœtus.
  5. (Figuré) Échouer en cours de réalisation, ne pas atteindre les objectifs initiaux.
    • Ce projet a avorté faute de ressources.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Littré (1872-1877)

AVORTER (a-vor-té) v. n.
  • 1Accoucher avant terme. Les femmes ne se faisaient-elles pas avorter, pour que leurs enfants n'eussent des maîtres aussi cruels ? Montesquieu, Esp. XXIII, 11. La cruelle habitude où sont les femmes de se faire avorter, afin que leur grossesse ne les rende pas désagréables à leurs maris, Montesquieu, Lett. pers. 120.

    En parlant des animaux, mettre bas avant le terme. Les brebis avortent fréquemment.

    Fig. L'autre avorte avant temps des œuvres qu'il conçoit, Régnier, Sat. X.

    En parlant des fruits, ne pas se nouer, ne pas venir à maturité. Cette année, presque tous les boutons des poiriers ont avorté.

  • 2 Fig. Ne pas réussir. Le projet venant à avorter, La Bruyère, 12. Dieu, pour le réserver à ses puissantes mains, Fait avorter exprès tous les moyens humains, Corneille, Héracl. III, 3. Lui qui sait qu'aussitôt ces tumultes avortent, Corneille, Othon, IV, 7. Voyant d'un temps si court leur puissance bornée, Des plus heureux desseins [ils] font avorter le fruit, Corneille, Cinna, II, 1. Par quel amour de mère Pressez-vous tellement ma douleur contre un frère ? Prenez-vous intérêt à la faire éclater ? - J'en prends à la connaître et la faire avorter, Corneille, Rodog. IV, 6. Tout mon dessein avorte au milieu du succès, Corneille, ib. II, 8. Une disgrâce fit avorter toute sa bonne fortune, Corneille, Ex. de D. San. Il est impossible que ce projet n'avorte pas au milieu de cette confusion, Chateaubriand, Natch. III, 76. Venge-toi du forfait que tu fais avorter, Rotrou, Bélisaire, I, 2.

REMARQUE

1. Avorter se conjugue avec l'auxiliaire avoir quand on veut exprimer l'acte même : cette femme a avorté hier ; ces projets ont avorté par sa faute ; et avec l'auxiliaire être, quand on veut marquer l'état : cette femme est avortée ; ses desseins sont avortés.

2. On a dit s'avorter, qui n'est plus usité. Leurs desseins tôt conçus se sont tôt avortés, La Fontaine, Ode v. C'est, comme on verra par l'historique, un archaïsme.

HISTORIQUE

XIIIe s. Que honiz soit qui vos porta, Quant ele [votre mère] ne vos avorta, Ren. 8144. Car foy sans bien ouvrer avorte ; Foy sans bonnes euvres est morte, J. de Meung, Tr. 522. Bien, amour et honeur faut par femme et avorte ; Ja femme n'amera, qui fine amour lui porte, Chastie-musart.

XIVe s. Elle avoit eu plusieurs de ses enfans morsnez et abourtez, Du Cange, abortire. Ne bailleront aucune medecine qui puisse faire abortir, Ord. des rois de France, t. II, p. 533.

XVIe s. Ceste semence de raison ne pouvant durer contre les vices survenus, estouffée s'avorte, Montaigne, IV, 354. Elle rend les arbres par où on la passe steriles, et y fait avorter les fruicts, Amyot, Aratus, 40. Autrement, ils ne font qu'avorter la terre, et meurtrir les arbres, Palissy, 25. Par tels efforcements lesdictes meres abortent, Paré, t. II, p. 624. Ce breuvage sert aussi de remettre en vigueur la jument qui s'est avortée, De Serres, 306.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

AVORTER. - HIST. XIIIe s. Ajoutez : Se la jument sent l'odour et la fumée de la chandeille esteinte, elle aorterat, Latini, Trésor, p. 242.

Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

Étymologie de « avorter »

Provenç. abhortir, abordir ; espagn. abortar ; ital. abortire ; de abortire, de aborior, qui a la même signification, et qui vient de ab, indiquant défaut, manque, et de orior, naître, surgir (voy. ORIENT) : mot à mot mal naître.

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(XIIe siècle) Du latin abortare, dérivé de aborior (« disparaitre, mourir avant de venir au monde, avorter »), lui-même de orior (« naitre »).
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Phonétique du mot « avorter »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
avorter avɔrte

Fréquence d'apparition du mot « avorter » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « avorter »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « avorter »

  • Le plus infime des pécheurs peut faire avorter une espérance de Dieu. Les calculs de Dieu peuvent ne pas tomber juste. La sagesse de Dieu par nous peut défaillir. Et nous pouvons faire tout manquer.
    Charles Péguy — Le Porche du mystère de la deuxième vertu
  • La véritable urgence en temps de crise sanitaire, c’est que les femmes enceintes puissent être accompagnées et sécurisées, qu’elles puissent avoir accès aux aides et être soutenues si elles sont en difficulté, et surtout qu’elles soient protégées de toute violence. Parmi ces violences, nous déplorons la recrudescence des pressions masculines ou de l’entourage qui tentent de les pousser à avorter.
    Valeurs actuelles — Avortement : le prétexte Covid | Valeurs actuelles
  • Pour la patiente qui s’est présentée à la Maison des femmes, cet amendement aurait pu être un gain de temps. Elle aurait été « dans les clous ». « J’aurais pu l’avorter dans l’après-midi »,regrette la médecin. Elle devra passer par une interruption médicale de grossesse (IMG). Face à l’urgence, Olivier Véran a rappelé que la loi permettait aux femmes ayant dépassé les délais légaux pour une IVG de se tourner vers l’IMG pour motif de détresse psychosociale.
    « Elles peuvent avorter mais en passant par la voie compliquée » - Elle
  • Le Sénat s’est finalement opposé à cette extension du délai pour avorter à 156 voix contre 143.
    A l'heure du Covid-19, l'avortement toujours en ligne de mire, le Sénat refuse d'étendre les délais | Gènéthique

Traductions du mot « avorter »

Langue Traduction
Anglais abort
Espagnol abortar
Italien abortire
Allemand abbrechen
Chinois 中止
Arabe إجهاض
Portugais abortar
Russe преждевременное прекращение
Japonais アボート
Basque abortatzeko
Corse abortà
Source : Google Translate API

Synonymes de « avorter »

Source : synonymes de avorter sur lebonsynonyme.fr

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Nombre de points du mot avorter au scrabble : 10 points

Avorter

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