La langue française

Accueil > Dictionnaire > Définitions du mot « sien »

Sien

Variantes Singulier Pluriel
Masculin sien siens
Féminin sienne siennes

Définitions de « sien »

Trésor de la Langue Française informatisé

SIEN, SIENNE, pron. et adj. poss.

I. − Le sien, la sienne, les siens, les siennes. [Groupe pronom. représentant un syntagme nom. déterminé par un poss.; s-, comme dans son/sa/ses, exprime la 3epers. du sing.; le (les)... -ien(s) et la (les)... -ienne(s) rappellent le genre du subst. représenté]
A. − [Marque un rapp. de possession entre une pers. (le « possesseur ») et l'objet désigné par le subst. représenté, p. oppos. à d'autres pers.] Nous te tenions déjà, quand ce misérable officier survint. Il te délivra. Il commençait ainsi ton malheur, le mien et le sien (Hugo,N.-D. Paris, 1832, p. 377).La déception des deux amis fut grande: chacun, outre la sienne, ressentait celle de l'autre (Flaub.,Bouvard, t. 2, 1880, p. 30).Comme il fumait, elle lui enleva sa cigarette de la bouche et la mit à la sienne (Zola,L'Œuvre, 1886, p. 80).
Fam. [Peut être suivi d'un compl. en de rappelant le subst. représenté ou permettant la représentation par anticipation] [L'auteur] n'est que le metteur en scène d'un sentiment démolisseur, qui est dans l'air et dont Vallès, peignant si cruellement la sienne, de mère, est un peu responsable (Goncourt,Journal, 1889, p. 1079).Le sien de faux-col, le même, il le gardait depuis deux ans (Céline,Mort à crédit, 1936, p. 412).
Rem. 1. Le groupe pronom. peut être suivi des syntagmes prép. à lui/à elle permettant de lever certaines ambiguïtés ou de mettre en relief une relation: Aurais-je jamais le courage de lui apprendre que sa mère a été arrêtée et traduite devant la cour d'assises de Poitiers, où l'on instruit son procès et le sien, à lui, pauvre Édouard! (Gozlan, Notaire, 1836, p. 115). Il peut se passer de la bonne volonté de sa femme, qui ne peut rien faire sans la sienne à lui (Renard, Journal, 1897, p. 365). Il en va de même avec l'adj. qualificatif propre: Un regard d'elles, quand il est triste, me fige le sang. Un jour vous saurez que l'on est bien plus (...) heureux de leur bonheur que du sien propre (Balzac, Goriot, 1835, p. 151). Les affaires de son frère pesaient toujours sur les siennes propres (Pourrat, Gaspard, 1930, p. 142). 2. Le nombre du syntagme pronom. peut être différent de celui du subst. qu'il représente: On devinait quelque grande décision, brusque comme étaient les siennes, prise là tout à coup (Loti, Pêch. Isl., 1886, p. 225). Ils sont quelques-uns à avoir acheté une terre près des siennes pour y faire des battues de canards (Montherl., Bestiaires, 1926, p. 462).
B. − [Sans idée d'oppos., sien exprimant sans plus une relation de coréférence, gén. au suj. de la proposition]
1. [Le suj. (le possesseur) désigne une pers.] Il acheta même une redingote neuve, la sienne étant un peu usée, afin de se présenter convenablement (Maupass.,Contes et nouv., t. 1, Dimanches bourg. Paris, 1880, p. 306).
[En tournure attributive] Le comte Michele Cantarini ne livrait pas facilement le secret de la nature élevée, violente, impatiente qui était la sienne (Jouve,Paulina, 1925, p. 100).Entre toutes les phrases de l'auteur des Pensées qu'il me cita et me commenta avec cette éloquence familière qui était la sienne, une me frappa très fortement (Bourget,Actes suivent, 1926, p. 39).
[En corrél. avec les distributifs chaque, chacun] Deux litres tout de suite, chacun le sien! gueula Jésus-Christ (Zola,Terre, 1887, p. 227).Mais tout à coup François les appela, les gâteaux étaient cuits, et comme il les sortait du four, elles prirent chacune le sien (Ramuz,A. Pache, 1911, p. 258).
2. Plus rarement. [Le suj. (le « possesseur ») désigne une chose] La science suprême, la psychologie, a besoin des méthodes et des concepts de la physiologie, de l'anatomie, de la mécanique (...), c'est-à-dire de toutes les sciences qui occupent un rang inférieur au sien dans la hiérarchie de nos connaissances (Carrel,L'Homme, 1935, p. 352).
[En corrél. avec un distributif] Chaque maison avait le sien [un cochon] pour tirer parti des épluchures et des eaux grasses (Pourrat,Gaspard, 1930, p. 96).
II. − Empl. nom.
A. − Masc. sing.
1. Rare. Le sien. Ce que possède la personne dont il est question. Je tiens l'argent en mépris. La vie est ailleurs. Le tien, le mien, le mien, le tien, jamais le sien, sinon pour l'en dépouiller! (Cendrars,Bourlinguer, 1948, p. 112).
2. Loc. verb. Mettre du sien dans; y mettre du sien
a) Payer de sa poche. Madame Vauquer soigna sa table, fit du feu dans les salons pendant près de six mois, et tint si bien les promesses de son prospectus, qu'elle y mit du sien (Balzac,Goriot, 1835, p. 30).À de pareilles conditions, le fermier, ne produisant pas davantage, serait bientôt obligé de travailler pour rien, que dis-je? de mettre encore du sien (Proudhon,Propriété, 1840, p. 289).Ajouter du sien. Les bons de pain, signés du maire, étaient écrits de sa main [de Mmede Bray]. Et si elle ajoutait du sien aux libéralités officielles de la commune, personne n'en savait rien (Fromentin,Dominique, 1863, p. 20).
b) Apporter quelque chose de personnel, quelque chose qui vient de soi. [Rousseau n'a] pas vu que les langues se sont formées insensiblement, et que chaque homme y a mis du sien (J. de Maistre,Soirées St-Pétersb., t. 1, 1821, p. 116).Tout ce que l'intellect ajoute du sien aux données brutes de l'expérience externe ou interne, il doit nécessairement le recevoir de Dieu (Gilson,Espr. philos. médiév., 1932, p. 63).
c) Faire preuve de bonne volonté, faire des concessions. Et encore que chacun, comme l'on dit, « y mît du sien », cela n'allait qu'à moitié bien entre l'oncle Édouard et Bernard (Gide,Faux-monn., 1925, p. 1076).
3. Loc. verb. En être du sien; y être du sien. Être perdant, en être de sa poche. V. nôtre III A 1 ex. de Zola.
B. − Masc. plur. Les siens. Ensemble de personnes avec lesquelles la personne dont il est question entretient des liens étroits. Retrouver les siens après une séparation; être parmi les siens; se dévouer pour les siens. Souvent aussi, le manufacturier et les siens haïssent l'ouvrier parce qu'ils s'en croient haïs (Michelet,Peuple, 1846, p. 120).Dans un coin, un des prisonniers (...) hurlait aux siens: « Ne tirez plus! » (Malraux,Cond. hum., 1933, p. 249):
À mesure qu'on avance dans l'évolution, les liens qui attachent l'individu à sa famille, au sol natal, aux traditions que lui a léguées le passé, aux usages collectifs du groupe, se détendent. Plus mobile, il change plus aisément de milieu, quitte les siens pour aller ailleurs vivre d'une vie plus autonome... Durkheim,Divis. trav., 1893, p. 396.
Rare, au fém. Communauté de femmes à laquelle appartient la femme dont il est question. [La mère Eugénie] et les siennes définissaient ainsi les adversaires qu'elles avaient à réduire (Sainte-Beuve,Port-Royal, t. 4, 1859, p. 118).
C. − Loc. verb., fam. Faire des siennes
1. [Le suj. désigne une pers.] Agir de manière intempestive, extravagante, se livrer à des excentricités. Synon. jouer des tours (v. tour3).Je cours au palais pour faire destituer cet infâme général P., qui fait des siennes; il flatte bassement le peuple (Stendhal,Chartreuse, 1839, p. 392).[Letondu] faisait des siennes. Il bouleversait la Direction de ses excentricités (Courteline,Ronds-de-cuir, 1893, p. 99).
2. [Le suj. est un subst. de l'inanimé] Produire des effets fâcheux, intempestifs. Le vent a encore fait des siennes. Le brouillard fait des siennes (...), la poste arrive en retard (Hugo,Corresp., 1867, p. 9).Elle avait dû se placer quand le phylloxéra avait fait des siennes (Aragon,Beaux quart., 1936, p. 80).
III. − Adj. qualificatif
A. − [En fonction d'attribut]
1. [Avec être ou un autre verbe attributif]
a) [Le suj. désigne une chose] Qui appartient en propre à quelqu'un. Mais, en réalité, cette activité qu'il manifeste [l'individu] n'est pas sienne. C'est la société, c'est la race qui agissent en lui et par lui (Durkheim,Divis. trav., 1893, p. 400).L'affaire qui l'occupait à cette heure, elle était sienne, il s'y était voué farouchement (Genevoix,Raboliot, 1925, p. 88).
Reconnaître comme, pour sien. [Esterhazy] a reconnu pour sienne l'écriture de certains mots du bordereau (Clemenceau,Iniquité, 1899, p. 96).
b) [Le suj. désigne une pers.] Qui appartient totalement à quelqu'un (surtout dans des relations affectives, sexuelles). Elle se sentait totalement sienne; elle ne désirait que s'abandonner davantage encore, s'anéantir, se confondre en lui (Martin du G.,Thib., Été 14, 1936, p. 401).
2. Loc. verb. Faire sien
a) Faire sien qqc. Se l'approprier, l'adopter, le prendre à son compte. Faire siennes les idées de qqn. [La Révolution aurait dû] non renier le passé, mais le revendiquer au contraire, le ressaisir et le faire sien, comme elle faisait du présent (Michelet,Peuple, 1846, p. 342).Ces lotharingistes s'exprimaient ainsi en haine du rationalisme, qu'ils accusaient de substituer au culte chrétien de la justice l'idolâtrie de la force et du succès. Léopold fit siennes leurs thèses (Barrès,Colline insp., 1913, p. 94).
DR. Faire les fruits siens. S'approprier le produit d'un fonds. Le simple possesseur ne fait les fruits siens que dans le cas où il possède de bonne foi: dans le cas contraire, il est tenu de rendre les produits avec la chose au propriétaire qui la revendique (Code civil, 1804, art. 549, p. 101).Que le travailleur fasse les fruits siens, je l'accorde; mais je ne comprends pas que la propriété des produits emporte celle de la matière (Proudhon,Propriété, 1840, p. 208).
b) Faire sien qqn. Se rendre maître de quelqu'un, se l'approprier (surtout dans des relations affectives, sexuelles). Ses mains s'égaraient, le fouillaient partout, aux flancs, aux épaules, comme si elle eût cherché son cœur, dans cette caresse tâtonnante, cette prise de possession, où elle semblait vouloir le faire sien (Zola,L'Œuvre, 1886, p. 381).
B. − [En fonction épith.] Vx ou littér. Qui appartient de manière spécifique, qui est le bien propre.
1. [Postposé au subst.] Les livres ouverts, les feuilles éparses, les revues jetées pêle-mêle, dans une rage de recherche, témoignaient d'une propriété sienne, inaliénable (Estaunié,Empreinte, 1896, p. 220).
2. [Antéposé au subst., gén. associé à l'art. indéf. un] Le patron jura qu'un vieux sien matelot était un cuisinier estimable et n'avait pas son pareil pour la bouille-abaisse (Mérimée,Colomba, 1840, p. 7).Il se rendit chez un sien voisin (France,Pt Pierre, 1918, p. 185).Un poète contemporain place en exergue d'une sienne étude cette prière (Benda,Fr. byz., 1945, p. 25).
[Devant un subst. non actualisé] Jamais sien départ ne m'avait tant brisé l'âme, c'était comme un pressentiment que ce serait le dernier (E. de Guérin,Journal, 1840, p. 335).
Prononc. et Orth.: [sjε ̃], fém. [sjεn]. Dénasalisation éventuelle de la voy. dans la liaison, [sjεnami] sien ami (Mart. Comment prononce 1913, p. 387). Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Poss. tonique de la singularité, fonctionnant comme un adj. qualificatif I. n'est accompagné d'aucun déterm. [empl. rare] 1. 842 cas régime fém. sing. suo [v. E. Koschwitz, Commentar zu den ältesten frz. Sprachdenkmälern, Heilbronn, 1886, p. 8, 42] (Serments de Strasbourg ds Henry Chrestomathie I, 20, p. 2: Si Lodhuuigs sagrament [...] conservat, et Karlus [...] de suo part non lo's tanit); 881 id. souue dial. Nord-Est [Pope, § 1321 XIVa] (Ste Eulalie, ibid., II, 29, p. 3: Par souue clementia); fin xes. id. (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 25: Per sua grand humilitad; 267: Dunc lor gurpit [Jesus] soe chamisae); 2. 1176 maugré suen « contre son gré » loc. autonome dans l'énoncé; cas régime masc. sing. (Chrétien de Troyes, Cligès, éd. A. Micha, 457). II. Déterminé par un art. (déf., indéf.), un dém. A. il précède le subst. 1. masc. sing. a) cas régime α) 881 art. déf. suon [E. Koschwitz, op. cit., p. 60] (Ste Eulalie, II, 15, p. 3: Ell' ent aduret lo suon element); β) ca 1050 art. indéf. (St Alexis, éd. Chr. Storey, 15: d'un son filz voil parler); 1209 (Henri de Valenciennes, Contin. Conquête de Constantinople, 509 ds T.-L.: sor un sien cheval); γ) ca 1050 art. dém. (St Alexis, 280: Cel son servant ad a sei apelet); b) cas suj. α) 2emoit. xes. art. déf. (St Léger, éd. J. Linskill, 10: dels aanz Que li suos corps susting si granz [v. éd., p. 89]); β) ca 1050 indéf. (St Alexis, 272: Ne reconut [Alexis] nuls sons apartenanz); ca 1100 agn. un soens cumpainz (Roland, éd. J. Bédier, 941); ca 1200 uns siens chevaz (Dialoge Gregoire lo pape, 11, 24 ds T.-L.); 2. masc. plur. a) cas régime α) 2emoit. xes. art. déf. (St Léger, 170: Deus exaudis lis sos pensaez [sos infl. mérid.? v. éd. p. 90]); β) ca 1050 art. dém. (St Alexis, 123: D'icez sons sers); b) cas suj. α) fin xes. art. indéf. tuit soi fidel (Passion, 274); β) id. art. déf. li soi fidel (ibid., 429); 3. fém. sing. a) cas régime α) id. art. déf. (ibid., 204: La soa mort mult demandant); ca 1050 (St Alexis, 432: A grant duel met la sue carn medisme); β) ca 1170 indéf. une soe cousine (Chrétien de Troyes, Erec, éd. M. Roques, 5290); b) cas suj. fin xes. art. déf. la sua morz, la soa madre (Passion, 11; 353); fin xiies. la soie amors (Floire et Blancheflor, éd. J. L. Leclanche, 2254); 4. fém. plur. cas régime ca 1260 numéral [postposition du poss.] deus brebiz sïennes (Récits Ménestrel de Reims, 405 ds T.-L.); xiiies. art. déf. les söes mains (Sermon pointevin, 80, ibid.). B. En l'absence d'un subst. non répété, l'adj. poss. est référé à l'art. déf., il est appelé « pron. poss. » 1. fém. sing. a) ca 1050 cas régime (St Alexis, 372: Li apostolie tent sa main a la cartre; Sainz Alexis la sue li alascet); b) ca 1223 cas suj., en fonction d'attribut (Gautier de Coinci, Miracles, éd. V. Fr. Koenig, 1 Mir. 10, 1188: Bien croi [...] Que ta volentez est la soie, Et que la seue est la tiue); 2. masc. a) ca 1140 sing. cas régime (Voyage de Charlemagne, éd. G. Favati, 436: si unt veüd les liz; Casquun[s] des duze per(e)s i ad ja le son pris); ca 1208 le suen (Geoffroi de Villehardouin, Constantinople, éd. E. Faral, § 112); b) 1176-81 plur. id. (Chrétien de Troyes, Chevalier de la Charrette, éd. M. Roques, 4673: Quant il la tient antre ses braz Et ele lui antre les suens); 1306 les siens (Joinville, Vie de St Louis, éd. N. L. Corbett, § 134, p. 110). C. Précédé de l'art. déf., fait fonction d'adj. subst. 1. masc. plur. désigne des personnes (d'un groupe, d'une famille...) a) fin xes. cas régime (Passion, 19: Avant dels sos dos enveid); ca 1200 les siens (Poème moral, éd. A. Bayot, 2823); b) ca 1170 cas suj. (Rois, I, XVII, 2, éd. E. R. Curtius, p. 32: Saül e li suen s'asemblerent); 2. masc. sing. désigne le bien, l'avoir a) 1130-40 cas régime le sien (Wace, Ste Marguerite, éd. E. A. Francis [ms. A], 55); ca 1150 le suen (Id., St Nicolas, éd. E. Ronsjö, 713); b) 1288 cas suj. li siens (Jacquemart Gielee, Renart le Nouvel, éd. H. Roussel, 2020). III. En fonction d'attribut 1. fém. sing. a) ca 1100 cas suj. sue agn. (Roland, 917: si est la citet sue); 1160-74 (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, III, 6825: La force ert soe); ca 1180 siue [ms. de base pic.] (Fierabras, éd. G. Servois, p. 2); 1180-90 seue (Alexandre de Paris, Alexandre, I, 2782 ds Elliott Monographs, 37, p. 62); ca 1210 siwe pic. (Robert de Clari, Constantinople, XCIX, p. 97, 16 ds T.-L.); 1erquart xiiies. sieue pic. (Renclus de Molliens, Carité, éd. A. G. Van Hamel, CXXII, 5); ca 1260 sienne (Récits Ménestrel de Reims, 130 ds T.-L.); b) 1176-81 cas régime (Chrétien de Troyes, Chevalier de la Charrette, 1676: Et por soe ja la tenoit); 2. masc. sing. a) ca 1165 cas suj. (Benoît de Ste-Maure, Troie, éd. L. Constans, 5342: se li mondes fust toz sien [var. déb. xiiies. siens]); 1176 suens (Chrétien de Troyes, Cligès, 1389); b) ca 1200 cas régime (Châtelain de Couci, Chans., éd. A. Lerond, II, 48: de ce qu'ele m'adaigne E tieigne a suen); 3. masc. plur. a) ca 1208 cas suj. (Geoffroi de Villehardouin, op. cit., § 476: cil de Marmora qui suen estoient); b) cas régime 1283 (Philippe de Beaumanoir, Coutumes de Beauvaisis, éd. A. Salmon, § 630; fère siens les fruis de vilenages). Suen, soue sont issus des parad. toniques lat.: cas régime masc. sing. súŭm, soum > sǫum (différenciation d'aperture entre les deux voy.) > suǫm (diphtongaison; amuïssement de u) > suen (différenciation des deux segments vélaires de la diphtongue) entraînant par réfection anal. le cas suj. suens, le plur. cas suj. suen, cas régime suens; cas suj. fém. sing. sŭa, sọa > sọue̥, sœ ̣e̥ (diphtongaison; affaiblissement de -a) > seue̥, entraînant le cas régime seue, le plur. seues. L'a. pic. si(e)ue est anal. de mi(e)ue, réfection d'un masc. *mieu, issu du lat. męu (Pope, § 858; Gossen, § 69), v. mien. Les formes soie, fém. sing., sien, cas régime masc. sing., sont respectivement anal. de moie (méa > mẹie̥ > mọie̥) et de mien*; en sont tirés soies plur. et siens, cas suj. sing. et cas régime pluriel. Fréq. abs. littér.: 7 774. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 11 405, b) 9 397; xxes.: a) 10 480, b) 11 987. Bbg. Barnett (F. J.). The Development of the Old Fr. possessives of singular person reference. Mél. Reid (T.B.W.). Oxford, 1972, pp. 1-17. − Rouget (Chr.). Comment son et le sien mettent de l'ordre dans la synt. nom. Rech. Fr. parlé. 1986, n o8, pp. 105-117. − Sandf. t. 1 1965, pp. 169-177. − Wunderli (P.). Strukturen des Possessivums im Altfranzösischen. Vox rom. 1977, t. 36, p. 46, 48, 56; Les Struct. du poss. en m. fr. In: Ét. de synt. du m. fr. Éd. par R. Martin. Paris, 1978, pp. 119-126.

Article lié : « Le sien » ou « le siens » ?

Wiktionnaire

Adjectif possessif - français

sien \sjɛ̃\

  1. (Vieilli) Qui appartient à lui ou à elle.
    • Il me conduisit dans un hôtel de Broummana, où un sien oncle, digne notable entarbouché et quelque peu ministre, arrangea mon affaire d'un coup de téléphone. — (Jacques Berque, Mémoires des deux rives, Éditions du Seuil, 1989, rééd. 1999)
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

SIEN, IENNE. pron. possessif de la troisième personne
. Ce n'est pas mon livre, c'est le sien. Mes intérêts et les siens sont les mêmes. Quiconque se charge des affaires d'autrui est souvent obligé de négliger les siennes. Il croyait ne travailler que pour son profit, mais chacun y trouvera le sien. Il s'intéresse à votre gloire comme à la sienne propre.

LE SIEN s'emploie quelquefois comme nom et désigne Ce qui appartient en propre à une personne. Il ne demande que le sien. Il y a mis du sien. Il signifie aussi Ce qui vient d'une personne. Il vous a rapporté la chose telle qu'elle s'est passée, il n'y a rien ajouté du sien. Y mettre du sien, Contribuer à quelque chose. Il signifie aussi, figurément, Faire des concessions, s'imposer des sacrifices. Pour conclure cet accord, il a fallu que chacun y mette du sien.

LES SIENS se dit comme nom masculin pluriel des Proches, des alliés, de ceux qui appartiennent en quelque façon à quelqu'un. C'est un excellent père de famille, qui ne vit que pour les siens. Il a stipulé pour lui et pour les siens. Ce général fut abandonné par les siens. Prov., On n'est jamais trahi que par les siens se dit lorsqu'On éprouve un mauvais procédé de la part de quelqu'un de ses parents, de ses amis, de ses partisans. Dans le langage de l'Écriture, Dieu connaît, protège les siens, éprouve les siens, Ceux qui se consacrent, qui se dévouent à lui. Fam., Faire des siennes, Faire des folies, jouer de mauvais tours, avoir de mauvais procédés qui sont bien dans le caractère, dans les habitudes de celui qui s'en est rendu coupable. Ce jeune homme a fait des siennes. Il va faire encore des siennes. Tout allait bien : il a fallu que ce triste individu vînt tout gâter en faisant des siennes.

SIEN, SIENNE s'employait dans l'ancienne langue comme adjectif possessif. Il se dit encore ainsi dans quelques expressions. Un sien neveu, un sien ami, Un neveu qu'il a, un de ses amis. Il fait siennes les idées des autres, Il les considère comme ses propres idées.

Littré (1872-1877)

SIEN (siin, si-è-n' ; au masculin, l'n se lie quand sien précède son substantif : un siin-n ami ; l'n ne se lie pas dans les autres cas : le siin est meilleur ; au XVIe s. d'après Palsgrave, p. 3, sienne se prononçait sianne) adj. poss. relatif à la troisième personne du singulier
  • 1Avec l'article, le, la, les. Avez-vous un secret important ? versez-le hardiment dans ce noble cœur : votre affaire devient la sienne par la confiance, Bossuet, Louis de Bourbon. Nos écrits sont mauvais ; les siens valent-ils mieux ? Boileau, Épît. II. Il [Montfort] travaillait depuis un temps à l'histoire de la géométrie ; chaque science, chaque art devrait avoir la sienne, Fontenelle, Montfort. Héliogabale alla jusqu'à vouloir détruire tous les objets de la vénération de Rome, et ôter tous les dieux de leurs temples pour y placer le sien, Montesquieu, Rom. XVI. L'évêque de Luçon, fils du célèbre Bussy, m'a dit qu'ayant demandé à M. de Meaux quel ouvrage il eût mieux aimé avoir fait s'il n'avait pas fait les siens, Bossuet lui répondit : les Lettres provinciales, Voltaire, Louis XIV, 32. Je voudrais en fait de belles lettres qu'on fût de tous les pays, mais surtout du sien, Voltaire, Mél. litt. Cons. à un journaliste. Plus heureuse que son ancienne amie, elle [Ninon] ne se plaignit jamais de son état, et Mme de Maintenon se plaignit quelquefois du sien, Voltaire, Mél. litt. sur Mlle de l'Enclos.
  • 2Il s'emploie sans article, et signifie à soi. Ainsi ce rang est sien, cette faveur est sienne, Et je n'ai rien enfin que d'elle je ne tienne, Corneille, Poly. II, 1. Dans ce penser, il [l'âne] se carrait, Recevant comme siens l'encens et les cantiques, La Fontaine, Fabl. V, 14. Dieu prodigue ses biens à ceux qui font vœu d'être siens, La Fontaine, Fabl. VII, 3. Mais surtout fais si bien, Qu'elle garde toujours l'ardeur de me voir sien, Molière, l'Ét. I, 6. Arnauld prétend que la doctrine de Malebranche n'est ni nouvelle ni sienne, Diderot, Opin. des anc. philos. (Malebranchisme).
  • 3 Familièrement, avec l'article un, une. Resté seul au palais avec un sien esclave, Desmarets, Mirame, IV, 1. Un sien ami, voyant ces somptueux repas, Lui dit…, La Fontaine, Fabl. VII, 14.

    Au lieu de un, une, on met parfois quelque. Que, déguisant son cœur et cachant sa famille, Il avait fait merveille aux guerres de Castille, D'où quelque sien voisin, depuis peu de retour, L'avait vu plein de gloire et fort bien à la cour, Corneille, D. Sanche, V, 8.

  • 4 S. m. Le sien, son bien. Ne point mentir, être content du sien, C'est le plus sûr…, La Fontaine, Fabl. V, I. Il [d'Aubigné] appelle Henri IV le conquérant du sien ; éloge qui renferme, ce me semble, en deux mots toute la justice de sa cause, et toute la gloire des autres conquérants, Mme de Caylus, Souvenirs, p. 8, dans POUGENS. Qui donne de l'encens ne donne rien du sien, La Chaussée, Gouvernante, I, 3.

    PROVERBE

    Chacun le sien n'est pas trop.
    Si vous avez le plaisir de quereller, il faut bien que de mon côté j'aie le plaisir de pleurer ; chacun le sien, ce n'est pas trop, Molière, Mal. imag. I, 2. Bornez-vous à votre lot ; Chacun le sien n'est pas trop, Pannard, Œuvr. t. III, p. 347.

    Fig. Mettre du sien dans une affaire, y contribuer de son argent, de sa peine, de son imagination. Ce cavalier en était toujours [des collations, divertissements, etc.] ; et c'était un grand hasard quand il n'y mettait pas quelque chose du sien, pour surprendre agréablement par quelque trait de magnificence et de galanterie, Hamilton, Gramm. 7. Il [Méry] n'a rien mis du sien dans sa réputation que son mérite, Fontenelle, Méry. Il est entouré de mille volumes, et il en compose un où il ne met rien du sien, Lesage, Diable boit. 6. La comtesse : Mais surtout que personne… - Suzanne : Ah ! Figaro ! - La comtesse : Non, non, il voudrait mettre ici du sien, Beaumarchais, Mar. de Figaro, II, 24.

    Familièrement, mettre du sien, ajouter à un récit des détails imaginaires. Il a mis du sien dans cette histoire. Le prince n'a point assez de toute sa fortune pour payer une basse complaisance, si l'on en juge par tout ce que celui qu'il veut récompenser y a mis du sien, La Bruyère, IX.

    Ajouter du sien à un texte, y ajouter des choses qui n'appartiennent pas à ce texte. Quoi qu'il en soit, je le prends au mot [Burnet rétractant un passage de son livre], et je le loue de désavouer de bonne foi ce qu'il dit que son traducteur avait ajouté du sien, Bossuet, Déf. Var. 1er disc. 22.

  • 5 Au pluriel, tous ceux qui sont en relation avec celui dont on parle, à quelque titre que ce soit (parents, descendants, héritiers, soldats, domestiques, partisans). Pour être mieux reçu [d'un jésuite], je feignis d'être fort des siens, Pascal, Prov. I. Mais un reste des siens, entourés dans leur fuite,…, Racine, Alex. III, 7. T'a-t-il de tous les siens reproché le trépas ? Racine, Andr. III, 8. Antoine [père de Henri IV], mandé dans la chambre de François II, fut averti, à la porte, par un des siens, du complot formé contre sa vie, Voltaire, Hist. parl. XXII.

    PROVERBE

    On n'est jamais trahi que par les siens, c'est-à-dire par ceux à qui on se fie le plus.
  • 6Dans le langage de l'Écriture, les siens, en parlant de Dieu, ceux qui se consacrent, se dévouent à lui. Dieu connaît les siens. Il ne faut point espérer d'être du nombre des siens, si l'on n'est résolu d'en faire hautement profession, Bourdaloue, Resp. humain, 2e avent, p. 374.
  • 7 Familièrement, au féminin pluriel. Faire des siennes, faire des fredaines, des folies, des tours, soit de jeune homme, soit de fripon. S'il pense ainsi faire des siennes, à la fin je ferai des miennes, Scarron, Typh. I. Vaudemont avait quitté le service de France, et faisait des siennes dans ses terres, Saint-Simon, 154, 4. Oui, comme un petit fripon, Qui de temps en temps fait des siennes, Imbert, Jaloux sans amour, V. 8.

    Fig. J'ose dire qu'encore qu'au siècle où nous sommes, la fortune fasse bien des siennes, elle ne sera pas si folle que de se commettre avec un mérite comme le vôtre, Scarron, Epît. Dédic. Œuv. t. I, p. 152, dans POUGENS. Je vous dirai que l'amour fait ici des siennes, Sévigné, à Bussy, 23 déc. 1682. Le tonnerre a fait des siennes, en attendant le canon : il est tombé sur le chevalier de la Luzerne, qui était à la tête de sa troupe ; il a brûlé ses habits et sa culotte, sans lui faire beaucoup de mal, Voltaire, Lett. Mme de Fontaine, 28 mai 1760.

HISTORIQUE

XIe s. Que l'emperere nessun [aucun] des soens n'i perde, Ch. de Rol. LXIII. Estramariz i est, uns soens compains, ib. LXXIV.

XIIe s. Et je sui si siens quites ligement, Que tout [elle] me puet ou engager ou vendre, Couci, V. [Je] Merci amour, de ce qu'ele me deigne Tenir à sien.. ib. IX. Car qui le sien done retraiament [de manvaise grâce], Son gré en pert…, ib. XVI.

XIIIe s. Et uns siens chevaliers fu montés à cheval, qui avait nom Nicoles le Jaulain, Villehardouin, LXXII. Un jour estoit rois Flore à un sien grand manoir, Berte, LXV. Chascune [dame] cuide k'il soit siens [un amant] ; Si s'en fait molt jolie et cointe, Lai d'Ignaurès. Nus [nul], par reson de garde ne par reson de bail, ne pot faire siens les fruis des vilenages, Beaumanoir, XXI, 10.

XIVe s. Se Diex reprent çou qui est sien, Encontre nous ne mesfait rien ; Tout sommes sien…, Jean de Condé, t. II, p. 159. Et s'il est ainsi que les siens [ses concitoyens] se repentent et s'ennuient de son gouvernement, Bercheure, f° 24, recto.

XVe s. Jean Lyon… se tenoit en sa maison, et vivoit du sien, Froissart, II, II, 52. Et prirent leurs haches, et se commencerent de haches à combattre et à donner grands et horribles horions, et chacun avoit le sien, Froissart, II, III, 9. L'on doit faire servir le sien, Non pas qu'homs ou femme s'asserve à son avoir…, Deschamps, Poésies mss. f° 553. Manda au duc de Bourgogne qu'il vint, et qu'il pouvoit estre seur que la ville estoit sienne, Commines, III, 10. Font des exactions indues à la grande charge du peuple et à leur profit particulier ; et, pour abreger, sont detruits de tout, et qui perd le sien perd le sens, Duclos, Preuv. de Louis XI, p. 289, dans LACURNE.

XVIe s. Estre toujours recors de la dignité et magnificence tant sienne que de ses ancestres, Sleidan, f° 5. Malheureux est celuy qui, pendant qu'il est sien, Qu'il sent, qu'il voit, qu'il oyt, qui ne fait bonne chere, Ronsard, 707. Cette sienne resolution arresta sus bout la furie de son maistre, Montaigne, I, 2. C'est le cours du monde, c'est nature qui faict des siennes, Charron, Sagesse, II, 2.

Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

Étymologie de « sien »

Du latin suus → voir mien.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Berry, sen, senne ; saintong. son : o n'est grain tout son, ce n'est pas tout sien. Voy. MIEN (l'opinion que mien, tien, sien sont des formes diphthonguées de mon, ton, son, ou men, ten, sen, appartient à M. Baudry).

Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

Phonétique du mot « sien »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
sien sjɛ̃

Fréquence d'apparition du mot « sien » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « sien »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « sien »

  • La chevalerie : délivrer de belles vierges des châteaux des autres pour les enfermer dans le sien.
    Levison
  • L'homme adultère laboure le champ d'autrui et laisse le sien inculte.
    Plaute — Asimaria
  • Si j’étais né avant mon père, j’aurais pu être le sien.
    Louis Auguste Commerson
  • Un bon journaliste ne lit qu'un journal, le sien, et dans ce journal, il ne lit qu'un article, le sien.
    Emile de Girardin
  • Savoir écouter, c'est posséder, outre le sien, le cerveau des autres.
    Léonard de Vinci
  • Un homme a toujours deux caractères : le sien et celui que sa femme lui prête.
    Albert Camus
  • On voit la paille dans l’oeil de son voisin, mais pas la poutre dans le sien.
    Proverbe français
  • Tout homme a deux pays, le sien et puis la France !
    Henri de Bornier — La fille de Roland
  • Dire le secret d'autrui est une trahison, dire le sien est une sottise.
    Voltaire
  • Celui qui convoite le bien d'autrui mérite bien de perdre le sien.
    Phèdre — Fables
Voir toutes les citations du mot « sien » →

Traductions du mot « sien »

Langue Traduction
Anglais his
Espagnol su
Italien il suo
Allemand seine
Chinois 他的
Arabe له
Portugais dele
Russe его
Japonais 彼の
Basque haren
Corse su
Source : Google Translate API

Synonymes de « sien »

Source : synonymes de sien sur lebonsynonyme.fr

Combien de points fait le mot sien au Scrabble ?

Nombre de points du mot sien au scrabble : 4 points

Sien

Retour au sommaire ➦