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Bayer

Définitions de « bayer »

Trésor de la Langue Française informatisé

BAYER, verbe intrans.

A.− S'ouvrir :
1. Les arbres frissonnaient comme aux jours où le vent se met en colère. Les fleurs qui bayent à la rosée retenaient leur parfum. Murger, Les Nuits d'hiver,1861, p. 220.
2. À peine à genoux, elle ouvrit sa pelisse, fit bayer la fente du corsage, repoussant ses manches pour avoir l'avant bras nu. J. Péladan, Le Vice Suprême,1884, p. 251.
B.− En partic. Demeurer la bouche ouverte dans une attitude passive d'étonnement, d'admiration, etc. :
3. (...) entre la rue de la Michodière et la rue de Choiseul, il y avait une émeute, l'écrasement d'une foule chauffée par un mois de réclame, les yeux en l'air, bayant devant la façade monumentale du Bonheur des Dames, (...). Zola, Au Bonheur des dames,1883, p. 761.
Expressions
Bayer aux chimères, aux nuées. Désirer des choses impossibles :
4. Les songe-creux, qui vont aux chimères bayant, Trouvent les âpretés de ces ravins fort belles; Mais ces chemins pierreux aux passants sont rebelles, ... Hugo, La Légende des siècles,Le Petit roi de Galice, t. 1, 1859, p. 282.
Bayer aux corneilles, aux grues. Rêvasser, perdre son temps à regarder en l'air niaisement :
5. L'ostracisme qui pesait sur elle... dégager sa responsabilité... une fille qui a jeté son bonnet par-dessus les moulins! ... qui baye aux grues... qui, naguère encore... tenait le haut du pavé... Villiers de L'Isle-Adam, Contes cruels,1883, p. 15.
6. Même Madame Vogel, qui regardait tout artiste comme un fainéant, n'osait pas lui reprocher, d'une façon agressive, comme elle en avait envie, les heures qu'il passait à bayer aux corneilles, le soir, à la fenêtre de sa mansarde, ... R. Rolland, Jean-Christophe,L'Adolescent, 1905, p. 255.
PRONONC. ET ORTH. − 1. Forme phon. : [baje]. Barbeau-Rodhe 1930 admet toutefois [bεje], qui est la forme notée auparavant (par Fér. 1768, Fér. Crit. t. 1 1787, Gattel 1841, Nod. 1844, Fél. 1851 et DG). Land. 1834 note déjà bâ-ié. Il existe une forme bier (Ac. 1798-1878, Littré, DG, Rob.) et une forme baer (Ac. Compl. 1842). Relativement à la règle mentionnée sous bayadère, la prononc. [baje] fait exception, la prononc. [bεje] est régulière. 2. Homon. : baillée, bailler.
ÉTYMOL. ET HIST. − 1. 1121-35 baer « ouvrir tout grand » (Ph. de Thaon, Bestiaire, éd. Walberg, 1783-84 : La gist gule baee, sa langue hors getee); 1173 « id. (d'une pers.) » (Aliscans, éd. Guessard et A. de Montaiglon, 3986, cité par E. Walberg, Le Best. de Ph. de Thaon, Lund 1900, Notes, p. 141); début xiiies. « regarder bouche bée, muser » (Ste Julienne, éd. H. v. Feilitzen, 813 dans T.-L. : Cant li hom est en sainte glise ... Ne za ne la ne doit bäeir); d'où 1662 bayer aux corneilles « être oisif, ne rien faire » (Richer, Ovide bouffon, p. 11 dans Ch.-L. Livet, Lex. de la lang. de Molière, Paris 1895, p. 224); 2. ca 1190 au fig. « aspirer à, désirer qqc. » (Paraphr. du ps. Eructavit, Brit. Mus. add. 15606, fo20a dans Gdf. : N'i baier pas, ce ne pot estre). Du lat. vulg. *batare (cf. beer et bâiller).
STAT. − Fréq. abs. littér. : 47.
BBG. − Brüch (J.). Bemerkungen zum französischen etymologischen Wörterbuch E. Gamillschegs. Z. fr. Spr. Lit. 1927, t. 49, p. 302. − Dauzat Ling. fr. 1946, p. 213. − Gottsch. Redens. 1930, p. 92. − Goug. Lang. pop. 1929, p. 26. − Goug. Mots t. 1 1962, pp. 176-177.

Article lié : « bâiller », « bailler » ou « bayer » ?

Wiktionnaire

Verbe - ancien français

bayer \Prononciation ?\

  1. Variante de beer.

Verbe - français

bayer \ba.je\ ou \be.je\ intransitif 1er groupe (voir la conjugaison)

  1. Béer.
    • Bayer d’étonnement, s’étonner en béant.
    • Gabrielle Fumet a trouvé un biscuit dans son panier ! Cela dépasse tellement tout ce que l’imagination la plus folle aurait pu inventer d’impossible, — il est tellement extravagant que Gabrielle Fumet puisse « avoir du dessert », que tous s’émeuvent, bayent, rient, se regardent pour bien se reconnaître et murmurent, en rêve : Gabrielle Fumet !… — (Léon Frapié, La maternelle, Librairie Universelle, 1908)
    • La vieille allongeait le cou, bayait, remuait le menton, faisait des yeux avides devant la cuiller. — (Léon Frapié, Le dernier élève, dans Les contes de la maternelle, 1910, éditions Self, 1945, page 171)
  2. (Vieilli) Désirer quelque chose avec ardeur ; en ce sens se joint toujours avec la préposition après.
    • Bayer après la fortune.
    • Bayer après les richesses, après les honneurs. — (Louis-Nicolas et Henri Bescherelle, Dictionnaire usuel de tous les verbes français, Vol. 1 (A–E), 1843)
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

BAYER. (Il se conjugue comme BALAYER.) v. intr.
Avoir la bouche grande ouverte. Il ne se dit plus guère que dans l'expression Bayer aux corneilles, Perdre son temps à regarder en l'air niaisement.

Littré (1872-1877)

BAYER (ba-ié. Il faut se garder de le confondre avec bâiller, dont il se distingue par l'a bref et par l'absence des ll mouillées ; plusieurs prononcent béié, ce qui vaudrait mieux), je baye, tu bayes, il baye ou il baie, nous bayons, vous bayez, ils bayent ou ils baient ; je bayais, nous bayions, vous bayiez, ils bayaient ; je bayai ; je bayerai, baierai ou baîrai ; je bayerais, baierais ou baîrais ; baye, bayez ; que je baye, que nous bayions, que vous bayiez, qu'ils bayent ; que je bayasse ; bayant ; bayé v. n.
  • 1Tenir la bouche ouverte en regardant quelque chose. Je voulus aller dans la rue pour bayer comme les autres, Sévigné, 20. Il trouva sous sa main le comte de la Tour parmi une foule d'officiers qui étaient venus bayer là et faire leur cour à M. de Vaudemont, Saint-Simon, 346, 49.

    Fig. et familièrement. Bayer aux corneilles, regarder en l'air niaisement. Allons, vous, vous rêvez, et bayez aux corneilles, Molière, Tart. I, 1.

  • 2 Fig. Désirer quelque chose avec une grande avidité. Vanité… Qui baye après un bien qui sottement lui plaît, Régnier, Sat. V. Ce verbe vieillit en ce sens.

    Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir.

REMARQUE

Il serait à désirer que la prononciation de ce verbe fût bé-ier et non ba-ier, tant à cause de l'analogie avec payer et de l'ancienne orthographe et prononciation beer, que pour le distinguer de bâiller. Ces deux verbes en effet ont été souvent confondus, et le sont encore. La Fontaine a dit : C'est l'image de ceux qui bâillent aux chimères, La Fontaine, Fabl. II, 13. ; et : Le nouveau roi bâille après la finance ; Lui-même y court pour n'être pas trompé, La Fontaine, ib. VI, 6. Les éditions données par la Fontaine lui même ont baailler (c'est-à-dire bâiller) ; mais c'est une faute de sa part (faute qui prouve qu'il prononçait ba-ier et non bé-ier), et que des éditeurs subséquents ont corrigée avec raison. On lit de même dans St-Simon : Les tables sans nombre et à tous les moments servies ; jusqu'aux bâilleurs les plus inconnus, tout était invité, retenu, 60, 2. Lisez bayeurs, et voy. ce mot.

HISTORIQUE

XIIe s. Mout [je] voi baïe celle gent d'orlenois, Ronc. p. 137. Pinabel ont saisi, qui gist goule baée, ib. p. 196. Et du douz lieu où mes cuers tent et bée, Couci, XVII. N'est pas amours dont on se peut mouvoir, Ne cil amis qui en nule maniere La [l'amour] bée à decevoir, ib. XVIII. … Fins cuers qui bet à haute honeur, Ne se pourroit de tel chose desfendre, ib. XXIV.

XIIIe s. Et que c'est pour noient que rois Flores i bée, Berte, LXVIII. [Une ourse] qui vers lui s'en venoit courant gueule baée, ib. XLVI. Pour qui ferai mais ne chançon ne chant, Quant je ne bé à nule amour ateindre ? , Anonyme, dans Couci. Qui honeur cace [chasse, poursuit], honeur ataint ; Et ki à peu bée à peu vient, Bl. et Jehan, 2. Endementieres que Brun [l'ours] bée, Renart a les coins empoingniez Et à grant peine descoigniez, Ren. 10304. Mais qu'il ne puissent aparçoivre Que vous les beés à deçoivre, la Rose, 7456. Vers le bouton tant me treoit Mes cuers, que aillors ne beoit, ib. 1736. Et quant il sera resaizis, li sires pot propozer contre li ce qu'il bée à demander, en la presence de ses pers, Beaumanoir, 47. Je ne me bée pas à combatre pour vostre querele, Beaumanoir, VI, 16. Or [elle] a quanques demandé a, Or a ce à qu'ele bea, Or a ele sa volonté, Rutebeuf, II, 185. Sire de Joinville, foi que doi vous, je ne bée mie si tost à partir de ci, Joinville, 304.

XVe s. Et si tost après diner ils revenoient devant son hostel, et beoient en la rue, jusques à donc qu'il vouloit aller aval la rue, Froissart, I, I, 65. Et quant je voy que creature humaine à repentir n'à bien faire ne bée, Deschamps, Souffr. du peuple. Et quant ce fut fait, il dit que les Turcs avoyent euxmesmes fait une partie de ce qu'il beoit à faire, Bouciq. I, ch. 32. Nous avons beau coucher en raye, L'oreille au vent, la gueule baye, Villon, Malle paye et Baillevent. Elle s'avança de venir beyer et regarder par les crevances des fenestres, Louis XI, Nouv. C.

XVIe s. Ores des dieux les autelz elle adore, Et de presents chacun jour les honore ; Ores beant aux poitrines sanglantes, Regarde au fond des entrailles saillantes, Du Bellay, J. IX, 8, recto. Tu ne verras beer les portes grandes De la maison espouvantable à veoir, Si paravant tu n'as fait ton devoir, Du Bellay, J. IX, 41, verso. Car c'est de là que vient la fine marchandise, Qu'en beant on admire, et que si hault on prise, Du Bellay, J. 83, verso. Aller beant aprez les choses futures, Montaigne, I, 11. Qui ne bée point aprez la faveur des princes, Montaigne, IV, 165. Nous ne voulons pour conseillers et medecins ceux de Lorraine, qui de long-temps béent après notre mort, Sat. Mén. p. 177. Il acculoyt ses souliers, baisloyt souvent aux mousches, Rabelais, Gar. I, 11. Les gentilz hommes de Beauce desjeunent de baisler, et s'en treuvent fort bien, Rabelais, ib. I, 16. On trouvoit les bestes par les champs, mortes la gueule baye, Rabelais, Pant. II, 2. Ressemblans aux petits oysellets qui ne peuvent encore voler, et qui baillent toujours attendans la becquée d'autruy et voulans que l'on leur baille ja tout masché et tout prest, Amyot, Comment il faut ouir, 28.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

BAYER. - ÉTYM. Ajoutez : Saintong. bader, ouvrir la bouche.

Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

Étymologie de « bayer »

Variante de bâiller.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Picard, beer et beyer ; Berry, baier et é-bader, ouvrir, élargir ; wallon, bawi ; namurois, bauï, bâiller et bayer ; rouchi, baier, être étonné ; provenç. badar ; ital. badare. Étymologie incertaine. Le bas-breton bada, être dans l'étonnement, est sans doute emprunté au roman. L'ancien irlandais báith, sot, imbécile, et l'ancien haut allemand beitôn, muser, tarder, n'ont pas le sens primitif de bayer, qui est être béant. Diez propose comme conjecture une onomatopée, ba, exprimant l'ouverture de la bouche, avec un suffixe itare : ba-itare.

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Phonétique du mot « bayer »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
bayer baje

Fréquence d'apparition du mot « bayer » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « bayer »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Images d'illustration du mot « bayer »

⚠️ Ces images proviennent de Unsplash et n'illustrent pas toujours parfaitement le mot en question.

Traductions du mot « bayer »

Langue Traduction
Anglais abbott laboratories
Espagnol baeyer
Italien bayer
Allemand bayer
Portugais bayer
Source : Google Translate API

Synonymes de « bayer »

Source : synonymes de bayer sur lebonsynonyme.fr

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Bayer

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