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Citations sur le des - Page 8
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Midi et soir, je suis seule devant les casseroles. Je ne savais pas plus que lui préparer un repas, juste les escalopes panées, la mousse au chocolat, de l'extra, pas du courant. Aucun passé d'aide-culinaire dans les jupes de maman ni l'un ni l'autre. Pourquoi de nous deux suis-je la seule à devoir tâtonner, combien de temps un poulet, est-ce qu'on enlève les pépins des concombres, la seule à me plonger dans un livre de cuisine, à éplucher des carottes, laver la vaisselle en récompense du dîner, pendant qu'il bossera son droit constitutionnel. Au nom de quelle supériorité. Page 130, Folio, 2018.
Annie Ernaux — La femme gelée -
Quatre années. La période juste avant. Avant le chariot du supermarché, le qu'est-ce qu'on va manger ce soir, les économies pour s'acheter un canapé, une chaîne hi-fi, un appart. Avant les couches, le petit seau et la pelle sur la plage, les hommes que je ne vois plus, les revues de consommateurs pour ne pas se faire entuber, le gigot qu'il aime par-dessus tout et le calcul réciproque des libertés perdues. Une période où l'on peut dîner d'un yaourt, faire sa valise en une demi-heure pour un week-end impromptu, parler toute une nuit. Lire un dimanche entier sous les couvertures. S'amollir dans un café, regarder les gens entrer et sortir, se sentir flotter entre ces existences anonymes. Faire la tête sans scrupule quand on a le cafard. Une période où les conversations des adultes installés paraissent venir d'un univers futile, presque ridicule, on se fiche des embouteillages, des morts de la Pentecôte, du prix du bifteck et de la météo. Personne ne vous colle aux semelles encore. Toutes les filles l'ont connue, cette période, plus ou moins longue, plus ou moins intense, mais défendu de s'en souvenir avec nostalgie. Quelle honte ! Oser regretter ce temps égoïste, où l'on n'était responsable que de soi, douteux, infantile. La vie de jeune fille, ça ne s'enterre pas, ni chanson ni folklore là-dessus, ça n'existe pas. Une période inutile. Pages 109-110, Folio, 2018.
Annie Ernaux — La femme gelée -
Mon père gueule « je te cause ! t'as donc pas marre de tes romans ! », elle se défend « laisse-moi finir mon histoire ! ». Vivement que je sache lire, puis vivement que je comprenne ces longues histoires sans images qui la passionnent. Un jour vient où les mots de ses livres à elle perdent leur lourdeur ânonnante. Et le miracle a lieu, je ne lis plus des mots, je suis en Amérique, j'ai dix-huit ans, des serviteurs noirs, et je m'appelle Scarlett, les phrases se mettent à courir vers une fin que je voudrais retarder. Ça s'appelle "Autant en emporte le vent". Elle s'exclamait devant les clientes, « pensez qu'elle a seulement neuf ans et demi » et à moi elle disait « c'est bien hein ? ». Je répondais « oui » Rien d'autre. Elle n'a jamais su s'expliquer merveilleusement. Mais on se comprenait. A partir de ce moment il y a eu entre nous ces existences imaginaires que mon père ignore ou méprise suivant les jours « perdre son temps à des menteries, tout de même ». Elle rétorquait qu'il était jaloux. Je lui prête ma Bibliothèque verte, Jane Eyre et Le Petit Chose, elle me file La Veillée des chaumières et je lui vole dans l'armoire ceux qu'elle m'interdit, Une vie ou Les dieux ont soif. On regardait ensemble la devanture du libraire de la place des Belges, parfois elle proposait « veux-tu que je t'en achète un ? ». Pareil qu'à la pâtisserie, devant les meringues et les nougatines, le même appétit, la même impression aussi que c'était pas très raisonnable. « Dis, ça te ferait plaisir ? » Pages 24-25, Folio, 2018.
Annie Ernaux — La femme gelée -
L'arrivée de plus en plus rapide des choses faisaient reculer le passé. Les gens ne s'intéressaient pas sur leur utilité, ils avaient simplement envie de les avoir et souffraient de ne pas gagner assez d'argent pour se les payer immédiatement... La profusion des choses cachait la rareté des idées et l'usure des croyances.
Annie Ernaux — Les années -
La femme gelée Elle a trente ans, elle est professeur, mariée à un « cadre », mère de deux enfants. Elle habite un appartement agréable. Pourtant, c'est une femme gelée. C'est-à-dire que, comme des milliers d'autres femmes, elle a senti l'élan, la curiosité, toute une force heureuse présente en elle se figer au fil des jours entre les courses, le dîner à préparer, le bain des enfants, son travail d'enseignante. Tout ce que l'on dit être la condition « normale » d'une femme. Quatrième de couverture, Folio, 2018.
Annie Ernaux — La femme gelée -
C'était un dimanche, au début de l'après-midi. Ma mère est apparue dans le haut de l'escalier. Elle se tamponnait les yeux avec la serviette de table qu'elle avait dû emporter avec elle en montant dans la chambre après le déjeuner. Elle a dit d'une voix neutre: "C'est fini." Je ne me souviens pas des minutes qui ont suivi. Je revois seulement les yeux de mon père fixant quelque chose derrière moi, loin, et ses lèvres retroussées au-dessus des gencives. Je crois avoir demandé à ma mère de lui fermer les yeux. Autour du lit, il y avait aussi la sœur de ma mère et son mari. Ils se sont proposés pour aider à la toilette, au rasage, parce qu'il fallait se dépêcher avant que le corps ne se raidisse. Ma mère a pensé qu'on pourrait le revêtir du costume qu'il avait étrenné pour mon mariage trois ans avant. Toute cette scène se déroulait très simplement, sans cris, ni sanglots, ma mère avait seulement les yeux rouges et un rictus continuel.
Annie Ernaux — La place -
Le passé m'ennuie.Il est mort. Qu est-ce qu'on en fait ? Il était pour mon grand père le seul motif de vivre. Il le consolait des rigueurs d'aujourd'hui.
Jean d'Ormesson — Casimir mène la grande vie -
Pendant la guerre des six jours un village israëlien avait été encerclé par les arabes et avait été considéré comme perdu par Tsahal.Contre toute attente,il fut pourtant délivré et des journalistes venus de partout demandèrent au rabbin du cru,qui passait pour un saint homme comment il expliquait cet heureux dénouement - C'est très simple dit le rabbin,il y a eu une action, et il y a eu un miracle. - Quellle était l'action? demandèrent les journalistes? - Nous n'avons jamais cessé de réciter des psaumes et de chanter des quantiques. - Et quel a été le miracle? Tsahal est arrivé et les anges du ciel sont descendus sur nous. - Les anges du ciel? s'écrièrent les journalistes qui avaiet été élevés à la rude école des faits et buvaient des boissons fortes. - C'étaient des parachutistes,dit le rabbin.
Jean d'Ormesson — Histoire du Juif errant -
En France il faut parler des réformes et il ne faut pas les faire. Les Français sont conservateurs et révolutionnaires. Ils adorent les révolutions et ils adorent leurs droits acquis. Les réformes ils les vomissent.
Jean d'Ormesson — Dieu, les affaires et nous. Chroniques d'un demi siècle -
La vie est un élan vers la mort. Nous ne pouvons rien sur la mort. Mais nous pouvons, sinon tout, du moins beaucoup dans notre vie et sur notre vie. Vivre consiste à oublier la mort qui est notre seul destin et à profiter des quelques années, des quelques saisons qui nous ont été accordées dans un coin reculé de l'univers par la puissance inconnue.
Jean d'Ormesson — Je dirai malgré tout que cette vie fut belle -
Si quelque chose a marqué mon enfance, c'est l'amour. Un amour calme, sans tempête, sans fureur. Mais un amour fort. L'amour durable des parents entre eux. L'amour exigeant des parents pour leurs enfants. L'amour, mêlé de respect, des enfants pour les parents.
Jean d'Ormesson — Je dirai malgré tout que cette vie fut belle -
Une des caractéristiques les plus remarquables de l'intelligence [...], c'est qu'elle n'a jamais empêché qui que ce soit de se tromper gravement.
Jean d'Ormesson — Saveur du temps : Chroniques du temps qui passe -
Ce qu'il y a de mieux dans ce monde, de plus beau, de plus excitant, ce sont les commencements. L'enfance et les matins ont la splendeur des choses neuves. L'existence est souvent terne. Naître est toujours un bonheur. Il y a dans tout début une surprise et une attente qui seront peut-être déçues mais qui donnent au temps qui passe sa couleur et sa vigueur.
Jean d'Ormesson — C’est une chose étrange à la fin que le monde -
Une des fonctions les plus mystérieuses et les plus constantes du temps est d'élever le hasard à la dignité de la nécessité. Le monde avance à coup de rencontres et le temps qui passe les transforme en fatalité.
Jean d'Ormesson — Tous les hommes en sont fous -
Les hauts de Hurlevent sont un modèle de catastrophe dans laquelle plonge une femme innocente, capable d'exprimer le désespoir pur et dur. Pour Georges Bataille, c'est "l'un des meilleurs romans jamais écrits".
Jean d'Ormesson — Les 1001 livres qu'il faut avoir lus dans sa vie -
Le monde n’est rien d’autre que la représentation que nous nous en faisons. Sans sujet, pas d’objets – ou des objets de pur néant.
Jean d'Ormesson — Comme un chant d'espérance -
Qu'est-ce que nous pouvions faire d'autre que d'accepter l'histoire? Une histoire insidieuse, un peu basse, un peu lâche. Nous nous étions préparés à des morts héroïques, au crucifix sur l'échafaud, à la foi confessée. Nous n'avions pas beaucoup d'armes contre la dévaluation, contre la hausse du prix de la vie, contre l'évolution économique et sociale, contre la justice, peut-être, et l'avenir,et l'intelligence, contre tous les sables mouvants où, sous l'oeil triomphant de Karl Marx, de lord Keynes, du Docteur Freud, d'Einstein et de Picasso - ah! comme nous avions raison de nous méfier du génie! -s'enfonçait notre maison.
Jean d'Ormesson — Au plaisir de Dieu -
Je me sentais bien. Un curieux sentiment m'envahissait, qui allait plus loin que le silence des organes et la souplesse des mouvements. Quelque chose qui allait jouer un grand rôle tout au long de ma vie : c'était le bonheur.
Jean d'Ormesson — Et moi, je vis toujours -
Mon oncle et ma tante racontaient volontiers leurs promenades ... l'enterrement auquel ils avaient assisté d'un frère du maharajah de Jodhpur qui portait le titre enivrant de maître des éléphants. Ces irrésistibles animaux lui étaient si attachés que, le jour des obsèques, au passage du cercueil qui défilait devant eux, ils levaient l'un après l'autre leur trompe en signe d'adieu et les spectateurs bouleversés voyaient des larmes couler de leurs yeux. P. 60-61
Jean d'Ormesson — Un jour je m'en irai sans en avoir tout dit -
... ce que nous sommes d'abord, c'est des victimes. Les victimes d'un sort - vivre et mourir - que nous n'avons pas choisi et qui nous est imposé. (p.18)
Jean d'Ormesson — Un hosanna sans fin -
Rivarol ou Chamfort : lequel des deux glisse à un bel esprit qui laisse des papiers griffonnés dépasser largement de la poche de son habit : "Méfiez vous ! Si on ne vous connaissait pas, on vous les volerait " ? (p.56)
Jean d'Ormesson — Qu'ai-je donc fait ? -
Dieu est dans le temps, dans la lumière, dans la marche des astres. Il est aussi dans le vent et dans l'eau, dans la fleur qui s'ouvre, dans la chenille qui devient papillon, dans l'éléphant qui voit le jour, dans l'autruche qui sort de sa coquille, dans tout ce qui naît et qui change.
Jean d'Ormesson — Comme un chant d'espérance -
il y avait quelques années déjà que je n'avais rien publié. Avec raison. La masse prodigieuse des nouveaux livres me remplissait d'un découragement contre lequel le silence seul était capable de lutter. Je me disais que nous allions vers un temps où il y aurait plus d'auteurs que de lecteurs ... seuls quelques esprits d'exception, ivres de littérature, refuseraient encore de se dire écrivains. P. 38-39 NDL : Comme il était clairvoyant, ce livre date de 1985 et depuis il se publie de plus en plus de livres.
Jean d'Ormesson — Le Vent du soir -
Pour plusieurs raisons qui apparaîtront bientôt, ces récits répétés ont pesé sur ma vie. Et d'abord parce qu'ils ont provoqué chez moi une soif ardente de voyages. Quoi ! Il y avait des pays où les magnolias poussaient à trois mille mètres d'altitude et dont ni mon grand-père, ni le doyen Mouchoux, ni Stendhal, ni Flaubert, ni Aragon, que je lisais ne m'avais rien dit ! J'étouffais. Plessis-lez-Vaudreuil m'apparaissait soudain sous les traits d'une prison. P. 66
Jean d'Ormesson — Un jour je m'en irai sans en avoir tout dit -
Peut-être le faut-il - le faut-il? parler un peu de moi. Deux mots. Pas un de plus. Les autres ne cessaient jamais, collés à leurs passions, d'être ce qu'ils étaient. Chateaubriand était un épicurien à l'imagination religieuse ; Malraux, c'était l'Asie, l'Espagne, l'engagement, le culte de l'art contre la mort ; Montherlant, de la hauteur tempérée par l'alternance ; Aragon, un paysan de Paris saisi par le communisme ; Jules Romain, l'âme des foules travaillée par le canular ; Gide, le combat sans répit et toujours contrôlé du désir et du dépouillement ; Claudel jetait sur l'univers son filet catholique. Ah! bravo! Encore bravo. Fanfares, cours magistraux et obsèques nationales. Adeline aimait son fourneau ; Proust aimait les chauffeurs, les duchesses, les pavés mal assemblés où le pied se tordait, les madeleines trempées dans le thé ; Picasso, la peinture et ses révolutions ; Einstein, l'espace et le temps en train de se confondre jusqu'à ne plus faire qu'un. Mon grand-père aimait le passé, le Professeur aimait son livre, Éric ne pensait qu'à une chose, et ce n'était pas à Leïla : c'était à changer le monde. Tout cela, qui faisait les livres et la vie, était construit sur le roc et toujours semblable à soi-même. Moi, qu'est-ce que j'étais donc, qu'est-ce que je pouvais bien être? Je vais vous le dire : je n'étais rien.
Jean d'Ormesson — Casimir mène la grande vie -
L'éternité, c'est ce qu'il y a de plus fragile, c'est du papier. Qu'est – ce qui reste de tout le passé ? Non pas les idées parce qu'elles s'envolent, mais des mots écrits.
Jean d'Ormesson -
La nature, conformément à son devoir mystique qui est de préserver l’élan créateur, donne à l’enfant l’esprit de révolte et le mépris des goûts paternels.
Jean d'Ormesson — Je dirai malgré tout que cette vie fut belle -
L'Elégance du hérisson est une promenade philosophique, une réflexion sur le sens de la vie, qui offre au lecteur des sensations multiples et inattendues. Ce roman, à l'écriture élégante et vivante, légère et grave à la fois, nous emporte avec entrain dans un monde riche, subtil et drôle. On tombe sous le charme de ce hérisson.
Jean d'Ormesson — Les 1001 livres qu'il faut avoir lus dans sa vie -
La poussée des Turcs est pour Venise comme l'annonce de son déclin. Mais le coup le plus funeste lui est porté quarante ans après la chute de Constantinople : le 12 octobre 1492, après une traversée de soixante-dix jours, Christophe Colomb découvre l'Amérique. Le coeur du monde se déplace : il passe de la Méditerranée et de l'Adriatique à l'océan Atlantique.
Jean d'Ormesson — Et moi, je vis toujours -
A quelques mètres à peine de la terrasse de San Miniato où je suis en train d'écrire sous le pâle soleil du printemps, il traîne encore, ce vieux journal au papier quadrillé et à la couverture rouge taché ici et là par les embruns de l'Egée, dans la malle magique des souvenirs évanouis. Il me suffit de l'ouvrir, un demi-siècle après le voyage, pour que l'air de la mer envahisse la Toscane. Et que le vent du soir se lève dans ma mémoire. Car ce qui a été ne peut pas cesser d'être. P. 186
Jean d'Ormesson — Tous les hommes en sont fous -
Selon Jorge Luis Borges, le genre littéraire qu'est le "roman d'imagination raisonnée" est apparu pour la première fois en espagnol dans cette oeuvre. (...) Ce roman qui triomphe de l'association habituellement établie entre la fantaisie et la brièveté, explore une thèse unique : la possibilité d'enregistrer les sentiments et les événements d'une vie puis de les reproduire mécaniquement pour tous. (...) La fantaisie joue ainsi sur l'approche littéraire. Fable qui traite de l'immortalité et du désir de préserver les souvenirs du bonheur, L'invention de Morel est aussi un conte humoristique sur la perception erronée de soi, une parodie de l'ambiguïté et de la fidélité en amour, ainsi que l'un des premiers exemples littéraires situés aux confins de la fiction. (...) Adolfo Bioy Casares - L'invention de Morel
Jean d'Ormesson — Les 1001 livres qu'il faut avoir lus dans sa vie -
Comme dans n'importe quel jeu, il y a dans le jeu de l'histoire, avant et après la vie et la pensée, des gagnants et des perdants, des vainqueurs et des vaincus. Les hommes attribuent souvent les hasards qui ont décidé de leur destin à ce qu'ils appellent leur étoile. Il n'y a pas de grande figure, de conquérant, de découvreur, d'inventeur, de créateur qui n'ait pas, au moins une fois dans sa vie, été servi par le hasard. Une rencontre. Une occasion. Une situation passagère à saisir par les cheveux. Les Grecs anciens honoraient un petit dieu appelé Kairos, qui veillait sur l'instant opportun, sur le moment précis où il fallait s'emparer de l'avenir. L'empereur Napoléon, qui plus que personne, croyait à son étoile, avait l'habitude de demander à l'officier à qui il avait l'intention de confier un commandement s'il était heureux - c'est-à-dire s'il avait de la chance.
Jean d'Ormesson — Comme un chant d'espérance -
La science d'aujourd'hui détruit l'ignorance d'hier et elle fera figure d'ignorance au regard de la science de demain. Dans le cœur des hommes il y a un élan vers autre chose dont la clé secrète est ailleurs.
Jean d'Ormesson — C’est une chose étrange à la fin que le monde -
Le secret des bons, c’est qu’ils sont aussi des méchants.
Jean d'Ormesson — Casimir mène la grande vie -
Les femmes m'ont toujours beaucoup plu. Je crois qu'il m'est arrivé de plaire un peu à des hommes. Bien des années plus tard, en khâgne à Henri- IV ou à l'Ecole de la rue d'Ulm, j'ai beaucoup aimé Jean Beaufret . Il m'épatait. Nous nous promenions tous les deux le long du boulevard Saint-Michel et il me faisait en toute simplicité des propositions qui n'étaient guère dissimulées. Je bredouillais que non, franchement, ca ne me disait pas grand-chose. Mais il insistait : - Ce n'est pas parce que je t'enculerai trois ou quatre fois... - Tant que ca ? demandai-je. - ... que tu passeras de l'autre côté. (pp.60,61)
Jean d'Ormesson — Je dirai malgré tout que cette vie fut belle -
p 80 - Le rêve du Vieux (extrait) Il n'y a jamais eu qu'un roman : c'est le roman de l'univers. Et il y a un seul romancier : c'est moi. [...]. Il y a l'amour, le savoir, l'intelligence, la curiosité, l'ambition et tous leurs succédanés : la rivalité, la haine, l'envie, la jalousie, la fureur, la bêtise, la folie. Il y a la guerre, le chagrin, le malheur, la révolte. Vous mettez tous cela ensemble, vous secouez le puzzle, vous en faites tomber des morceaux, vous peignez des Vierges, des courtisanes et des pommes, vous sculptez des saints et des héros, vous élevez des pyramides, des temples, des cathédrales, des échangeurs et des ponts suspendus, vous écrivez des romans, des tragédies, des Mémoires, des symphonies, des systèmes de l'univers, des manuels du pêcheur ou du parfait bricoleur et des théogonies. Vous aimezn vous souffrez, vous vous souvenez, vous vous massacrez, vous découvrez des vieux : c'est le roman du monde.
Jean d'Ormesson — C’est une chose étrange à la fin que le monde -
L'imprimerie donne le départ à une catégorie d'objets culturels nomades d'une utilisation aisée: les livres. Dans mes jeunesses innombrables et successives, j'ai lu des livres dans des couvents, sur des plages, sur des bateaux, dans des trains, dans de vastes fauteuils, dans des bibliothèques qui étaient leurs cathédrales, à l'ombre des tilleuls, dans des lits où je n'étais pas toujours seule, à l'école, dans le travail et pour le plaisir. Mes vies se sont confondues avec les livres. Les bibliothèques et les librairies ont été mon destin. Vivre, pour moi, pour tous les moi où je me suis glissée les uns après les autres, c'était d'abord lire un livre.
Jean d'Ormesson — Et moi, je vis toujours -
Ce qui nous unissait, c'était l'amitié. C'était aussi le mécontentement. Sous des noms divers, le mécontentement est le sentiment dominant de notre temps. Les gens ne sont pas heureux. Ils se plaignent. Ils ont peur.
Jean d'Ormesson — Casimir mène la grande vie -
Mille et un livres! C'est beaucoup - et c'est peu. C'est beaucoup pour une seule personne, pour vous ou pour moi. Et je doute que même les plus cultivés d'entre nous aient une connaissance approfondie des héros et des aventures de chacun de ces ouvrages. C'est peu, et même très peu, au regard des centaines et des centaines de milliers de livres qui ont vu le jour, à un rythme sans cesse croissant, depuis vingt ou vingt-cinq siècles - Jean d'Ormesson
Jean d'Ormesson — Les 1001 livres qu'il faut avoir lus dans sa vie -
La littérature et la philosophie règnent très loin au dessus des divergences politiques.
Jean d'Ormesson — Je dirai malgré tout que cette vie fut belle