Quel plus beau moment que de commencer un roman par un passage qui vous touche profondément et vous entraîne – ivres – dans la lecture de plusieurs centaines de pages ? La langue française est chaque jour sublimée par de nombreux auteurs, classiques et moins classiques, qui s’attachent à transporter leurs lecteurs vers d’autres horizons.
C’est pourquoi j’ai choisi d’écrire un article afin de partager quelques incipits, c’est-à-dire les premiers mots d’un récit ou d’un manuscrit, qui illustrent la beauté de la langue française. Certains sont surprenants, d’autres sont tout simplement sublimes… À vous de juger !
Sommaire
- 1# L’Étranger (1942) – Albert Camus
- 2# Le dernier jour d’un condamné (1829) – Victor Hugo
- 3# Notre-Dame de Paris (1831) – Victor Hugo
- 4# Du côté de chez Swann (1913) – Marcel Proust
- 5# Voyage au bout de la nuit (1932) – Louis-Ferdinand Céline
- 6# Tristes Tropiques (1955) – Claude Levi-Strauss
- 7# L’Amant (1984) – Marguerite Duras
- 8# Aden Arabie (1931) – Paul Nizan
- 9# Aurélien (1944) – Louis Aragon
- 10# Les Confessions (1782) – Jean-Jacques Rousseau
- 11# Jacques le fataliste (1778) – Denis Diderot
- 12# La Peste (1947) – Albert Camus
- 13# Salammbô (1862) – Gustave Flaubert
- 14# Mort à Crédit (1936) – Louis-Ferdinand Céline
- 15# La Parure (1884) – Guy de Maupassant
- 16# Les Âmes grises (2003) – Philippe Claudel
- 17# Les Choses (1965) – Georges Perec
- 18# Germinal (1885) – Émile Zola
- 19# Mémoires de guerre (1954) – Charles de Gaulle
- 20# La Promesse de l’aube (1960) – Romain Gary
- 21# Sans famille (1878) – Hector Malot
1# L’Étranger (1942) – Albert Camus
« Aujourd’hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. »
2# Le dernier jour d’un condamné (1829) – Victor Hugo
« Condamné à mort ! Voilà cinq semaines que j’habite avec cette pensée, toujours seul avec elle, toujours glacé de sa présence, toujours courbé sous son poids ! »
3# Notre-Dame de Paris (1831) – Victor Hugo
« Il y a aujourd’hui trois cent quarante-huit ans six mois et dix-neuf jours que les Parisiens s’éveillèrent au bruit de toutes les cloches sonnant à grande volée dans la triple enceinte de la Cité, de l’Université et de la Ville. »
4# Du côté de chez Swann (1913) – Marcel Proust
« Longtemps, je me suis couché de bonne heure. »
5# Voyage au bout de la nuit (1932) – Louis-Ferdinand Céline
« Ça a débuté comme ça. »
6# Tristes Tropiques (1955) – Claude Levi-Strauss
« Je hais les voyages et les explorateurs. »
7# L’Amant (1984) – Marguerite Duras
« Un jour, j’étais âgée déjà, dans le hall d’un lieu public, un homme est venu vers moi. Il s’est fait connaître et il m’a dit : « Je vous connais depuis toujours. Tout le monde dit que vous étiez belle lorsque vous étiez jeune, je suis venu pour vous dire que pour moi je vous trouve plus belle maintenant que lorsque vous étiez jeune, j’aimais moins votre visage de jeune femme que celui que vous avez maintenant, dévasté. » »
8# Aden Arabie (1931) – Paul Nizan
« J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie. »
9# Aurélien (1944) – Louis Aragon
« La première fois qu’Aurélien vit Bérénice, il la trouva franchement laide. »
10# Les Confessions (1782) – Jean-Jacques Rousseau
« Je forme une entreprise qui n’eut jamais d’exemple et dont l’exécution n’aura point d’imitateur. Je veux montrer à mes semblables un homme dans toute la vérité de la nature; et cet homme ce sera moi. »
11# Jacques le fataliste (1778) – Denis Diderot
« Comment s’étaient-ils rencontrés? Par hasard, comme tout le monde.
Comment s’appelaient-ils? Que vous importe?
D’où venaient-ils? Du lieu le plus prochain.
Où allaient-ils? Est-ce que l’on sait où l’on va?
Que disaient-ils? Le maître ne disait rien; et Jacques disait que son capitaine disait que tout ce qui nous arrive de bien et de mal ici-bas était écrit là-haut. »
12# La Peste (1947) – Albert Camus
« Les curieux évènements qui font le sujet de cette chronique se sont produits en 194., à Oran.»
13# Salammbô (1862) – Gustave Flaubert
« C’était à Mégara, faubourg de Carthage, dans les jardins d’Hamilcar. »
14# Mort à Crédit (1936) – Louis-Ferdinand Céline
« Nous voici encore seuls. Tout cela est si lent, si lourd, si triste… Bientôt je serai vieux. Et ce sera enfin fini. Il est venu tant de monde dans ma chambre. Ils ont dit des choses. Ils ne m’ont pas dit grand-chose. Ils sont partis. Ils sont devenus vieux, misérables et lents chacun dans un coin du monde. »
15# La Parure (1884) – Guy de Maupassant
« C’était une de ces jolies et charmantes filles nées, comme par erreur du destin, dans une famille d’employés. »
16# Les Âmes grises (2003) – Philippe Claudel
« Je ne sais pas trop par où commencer. »
17# Les Choses (1965) – Georges Perec
« L’œil, d’abord, glisserait sur la moquette grise d’un long corridor, haut et étroit. Les murs seraient des placards de bois clair, dont les ferrures de cuivre luiraient. »
18# Germinal (1885) – Émile Zola
« Dans la plaine rase, sous la nuit sans étoiles, d’une obscurité et d’une épaisseur d’encre, un homme suivait seul la grande route de Marchiennes à Montsou, dix kilomètres de pavé coupant tout droit, à travers les champs de betteraves. »
19# Mémoires de guerre (1954) – Charles de Gaulle
« Toute ma vie, je me suis fait une certaine idée de la France… Le sentiment me l’inspire aussi bien que la raison. »
20# La Promesse de l’aube (1960) – Romain Gary
« C’est fini. La plage de Big Sur est vide, et je demeure sur le sable, à l’endroit même où je suis tombé. »
21# Sans famille (1878) – Hector Malot
« Je ne suis qu’un pauvre orphelin mais jusqu’à huit ans j’ai cru avoir une mère. »
Si vous avez d’autres incipits à partager, n’hésitez pas à le faire en commentaire.
Le 13, c’est Salammbô.
No. 12 / faute de frappe dans la date.
Non, c’est un choix délibéré de l’auteur 😉
Nicolas.
Bonjour,
Je vous remercie pour ce beau moment.
Juste deux tout petits incertitudes…
– Je n’ai pas de numéro 15,
– Je ne suis pas sûr du titre 13, ne serais-ce pas « Salammbô »
Merci pour votre réponse.
Les âmes grises en 2003, je dirai plutôt Philippe Claudel.
Merci pour vos rectifications.
Nicolas.
« Je ne me suis jamais accoutumé à ce malheur de n’avoir pas connu mon père. » Commencements d’une vie, 1932, François Mauriac.
Quelle beauté que la langue française! Merci pour ce rappel!
MERCI POUR VOUS T VRAIMENY GENTIL DE CES COURS POUR BIEN CONNAITRE LA LANGUE MERCI BIEN
Très chouette de nous rappeler ces chefs-d’œuvre, à lire ou à relire.
C’est dans une maison qu’on est seul. Et pas au dehors d’elle mais au -dedans d’elle.
M.DURAS « Ecrire »1993
Merci pour cet article
Merci pour ce petit moment d’inspiration et je owns à souligner aussi tout en parlant du réchauffement climatique que nous devons agir tous pour sauver les etres vivants sur notre planète ‘Quand l’homme aura coupé le dernier arbre ,pollué la dernière rivière,tue le dernier animal et pêche le dernier poisson, il s’apercevra alors que l’argent ne sera plus comestible de Josette sauthier.merci
Croyez-le ou pas, mais c’est avec beaucoup d’émotion que je vous lis. J’adore la langue française. Elle est très subtile, très capricieuse. Mais elle demeure ma langue préférée. Je ne suis pas française. Mais je fais partie des amoureux de la langue française. Merci d’être là !
bonjour
je cherche le livre de Zoé Oldenbourg qui commence par :L’ost avança.
merci pour votre aide
bien clt
Je pense à ce magnifique roman de Boris Vian « »l’écume des jours, » Tout en métaphores. Je me trompe ?
J’adore le français
Vous êtes sur le bon site alors !
Nicolas.
Il y en a un de chez nous que j’aime beaucoup: Cuba coule en flamme au milieu du Lac Léman pendant que je descends au fond des choses.
– Prochain Épisode, Hubert Aquin (1965)
Merci pour cette article. Personnellement, j’adore aussi les premiers paragraphes des la Condition Humaine, qui commencent par « (minuit et demi) Tchen tenterait-il de lever la moustiquaire ? Frapperait-il au travers ? »
Et pour Voyage au bout de la nuit, j’ajouterai les phrases suivantes: « Ca a débuté comme ça. Moi, j’avais jamais rien dit. Rien. C’est Arthur Ganate qui m’a fait parler ».