La paronomase – Figure de style [définition et exemples]
Définition de la paronomase
La paronomase est une figure de style qui consiste à rapprocher des paronymes, mots comportant des sonorités semblables mais avec des sens différents, au sein d’une même phrase. Ce rapprochement sémantique laisse penser que le sens des mots est également lié.
L’effet d’écho provoqué par la paronomase facilite la mémorisation et renforce l’expression d’un sentiment ou d’une pensée.
Dans le recueil Romance sans paroles, Paul Verlaine exprime sa mélancolie en utilisant la paronomase dans les premiers vers :
Il pleure dans mon cœur
Verlaine, Romances sans paroles, Il pleure dans mon cœur.
Comme il pleut sur ma ville
La confusion entre les verbes « pleurer » et « pleuvoir » dont la sonorité est semblable, renforce la similitude entre la pluie et les pleurs, mettant ainsi en avant le chagrin du poète.
Fréquente dans certains proverbes comme « Qui se ressemble s’assemble », la paronomase est souvent utilisée dans des slogans publicitaires : « Legal, le goût », « Entremont, c’est autrement bon », « Planta fin, le fin du fin ! ». Très courts et efficaces, ces énoncés sont facilement mémorisables et accrocheurs.
La paronomase fait donc naître des allitérations ou des assonances qui donnent une certaine puissance à la phrase, créant un effet musical dans l’écriture. Le linguiste Pierre Fontanier classe d’ailleurs la paronomase ainsi que l’allitération, l’antanaclase, l’assonance, la dérivation et le polyptote dans la catégorie des figures par consonance.
Le cas particulier de la paronomase implicite
Parfois, un seul des paronymes est cité dans la phrase, l’autre étant sous-entendu. On parle alors de paronomase implicite.
Par exemple, dans l’extrait suivant du roman de Gibert Cesbron, le terme « vrai » est utilisé à la place du terme « frais » :
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Le personnage en forme de Martin (mais auquel ce dernier ne commandait plus guère) se traîna jusqu’à la fenêtre, pour respirer un peu d’air vrai.
Gilbert Cesbron, C’est Mozart qu’on assassine
Autre exemple, dans son texte L’orage, Georges Brassens évoque le « gros temps » au lieu du « beau temps » :
Dieu fasse que ma complainte aille tambour battant, lui parler de la pluie, lui parler du gros temps.
Georges Brassens, L’orage
Enfin, comment ne pas résister à mentionner ici la rubrique du Canard Enchaîné, intitulée « Conflit de canard » pour « confit » ?
Origine et étymologie de la paronomase
Les termes paronomase ou paronomasie (variante ancienne de paronomase) sont utilisés depuis le XVIe siècle.
Paronomase vient du grec παρονομασία qui veut dire « transformer un mot ». Composé du préfixe παρο signifiant « à côté, proche » et du verbe ὀνομάζειν qui signifie « nommer », il représente donc la proximité et la ressemblance entre deux mots.
Exemples de paronomase
De nombreuses phrases, énoncés, citations ou autres expressions du langage populaire utilisent la paronomase. Tour d’horizon des textes les plus célèbres :
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Proverbes et expressions :
- Qui vole un œuf vole un bœuf.
- Comparaison n’est pas raison.
- À bon chat bon rat.
- Quand on veut, on peut.
- En littérature française :
Et la mer et l’amour ont l’amer pour partage.
P. de Marbeuf, Recueil des vers, 1628
Lors dit le prieur claustral :
Rabelais, Gargantua
« Que fera cet ivrogne ici ? Qu’on me le mène en prison. Troubler ainsi le service divin !
– Mais, dit le moine, le service du vin, faisons tant qu’il ne soit troublé, car vous-même, monsieur le prieur, aimez boire du meilleur si fait tout homme de bien. »
Qui s’excuse s’accuse.
Stendhal, Le Rouge et le Noir
Le vin nouveau n’est pas plus vrai, le lin nouveau n’est pas plus frais.
Saint-John Perse, Vents, 6
Va chercher ce Napolitain: s’il ne peut nous dire ce que ce vin goûte, il nous dira sûrement ce qu’il coûte.
Extrait de « La locandiera », pièce de théâtre de Carlo Goldoni.
Et l’on peut me réduire à vivre sans bonheur,
Corneille, Le Cid
Mais non pas me résoudre à vivre sans honneur.
Vous me le murmurez, ramures… Ô rumeurs !
Paul Valéry, Fragments du Narcisse
Comme la vie est lente ; et comme l’espérance est violente.
Guillaume Apollinaire, Alcools, Le Pont Mirabeau.
Au biseau des baisers
Louis Aragon, Elsa je t’aime
Les ans passent trop vite
Bizarre, beaux-arts, baisers !
Ionesco, La cantatrice chauve, IX, Monsieur Martin
Il en peut être aucun de ma complexion, qui m’instruis mieux par contrariété que par similitude : et par fuite que par suite.
Montaigne, Essais
- Plus rares, des titres de film ou des paroles de chansons françaises :
L’amour à mort
Alain Resnais, 1984
Banco à Bangkok pour OSS 117
André Hunebelle, 1964
J’étais un bateau gigantesque
Michel Sardou, Le France
J’emportais des milliers d’amants
J’étais la France qu’est-ce qu’il en reste
Un corps mort pour des cormorans
qu’ils aillent offrir au champ d’horreur
Jacques Brel, Jaurès
Leurs vingt ans qui n’avaient pu naître.
- Des expressions populaires, titres de journaux ou jeux de mots utilisent également cette figure de style :
- « Tu parles Charles ! », « Tu gères la fougère », « À l’aise, Blaise », « Relax Max »
- « Quand un gendarme rit dans la gendarmerie… »
- « Guéant : le flic rendu fou par le fric » ( Le Canard Enchaîné , 11/10/18)
- « Objectif : requinquer le quinquennat » (Libération, 09/10/2008)
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