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Moraliste

Variantes Singulier Pluriel
Masculin et féminin moraliste moralistes

Définitions de « moraliste »

Trésor de la Langue Française informatisé

MORALISTE, subst. et adj.

I. − Substantif
A. −
1. Philosophe, théologien qui traite de la science morale. Je vous parle comme un moraliste stoïcien de la possession de soi-même, du dédain du dehors, de la vie sévère et contenue en soi (M. de Guérin, Corresp., 1835, p.213).Bacon n'est pas du tout un métaphysicien; il est beaucoup plus un moraliste, mais sans avoir pourtant ce qu'on appelle une doctrine (Cousin, Hist. gén. philos., 1861, p.331).
Emploi adj. Le scrupule a des frontières historiques. Il était inconnu de l'église d'Orient. Même dans l'Occident latin, on ne le trouve pas mentionné avant les théologiens moralistes de la seconde moitié du moyen âge (Mounier, Traité caract., 1946, p.694).
2. Écrivain qui observe, décrit et analyse les moeurs, les passions d'une époque. Les moralistes auteurs de maximes ont des vérités par trop naïves et qui n'avaient pas plus besoin d'être écrites que celle de M. de La Palisse. Témoin celle de Vauvenargues: «Quand on aime la vie, on craint la mort» (Vigny, Journ. poète, 1850, p.1276).V. convalescent ex. 5:
1. Considérons-les [les bons sentiments] avec la méfiance qui s'impose à nous, surtout, héritiers des grands moralistes français: de Montaigne à Pascal, à La Rochefoucauld, à La Bruyère et à Chamfort, pas un seul de nos maîtres qui n'ait décelé, dans nos actions les plus nobles, une racine d'intérêt, de vanité, une recherche de plaisir. Mauriac, Journal 1, 1934, p.35.
Emploi adj. Vous êtes moraliste [La Bruyère], et vous observez le monde; vous n'avez qu'un soin, voir ce qui est et le bien dire, le bien atteindre d'un mot droit frappé (Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 2, 1842, p.416).
B. −
1. Personne qui, sans être écrivain, observe la nature humaine, les moeurs, réfléchit sur elles, et en tire une morale. Jean-Baptiste Greuze (1724-1805) est un moraliste autant qu'un peintre, et c'est là ce qui lui donne une place spéciale dans l'art du XVIIIesiècle (Ménard, Hist. Beaux-Arts, 1882, p.366).Il penche la tête sur l'épaule, il a le sourire voilé des moralistes qui en savent long sur la vie (Aymé, Vaurien, 1931, p.151).
2. Personne qui se place à un point de vue moral, qui se réfère à un bien idéal:
2. Jamais il n'avait eu l'idée sotte de travailler à la rédemption d'une pécheresse. En épousant Madeleine, il ne rêvait nullement de la réhabiliter, de lui refaire, comme on dit, une virginité à l'aide de son estime et de son amour. Il l'épousait parce qu'il l'aimait, simplement. Il était d'une nature trop nerveuse, obéissait à ses affections avec trop de jouissance exquise, pour s'égarer dans des considérations ridicules de moraliste. Zola, M. Férat, 1868, p.182.
3. Souvent péj.
a) Personne qui se plaît ou se complaît à moraliser. Il flotte autour d'elle le louche parfum qu'on respire dans certaines maisons. Je ne veux pas faire le moraliste. De ma part, ce serait ridicule. Mais vraiment, elle est plutôt... répugnante. Et qui sait? dangereuse (Green, Moïra, 1950, p.176).
Emploi adj. Il n'y a rien de plus inutile que ces amitiés héroïques qui demandent des circonstances pour se prouver. Le difficile, c'est de trouver quelqu'un qui ne vous agace pas les nerfs dans toutes les occurrences de la vie. Ne trouves-tu pas, chère vieille, que je deviens diablement moraliste en voyage? J'ai beaucoup pratiqué l'humanité depuis dix-huit mois. Voyager développe le mépris qu'on a pour elle (Flaub., Corresp., 1851, p.290).
b) Celui (celle) qui est attaché(e) au formalisme de la morale ou qui se veut le défenseur de la morale. Pas un mot, je t'ai dit ou je te fais coffrer. Alors, comme ça tu t'amènerais ici en moraliste et en justicier (Aymé, Uranus, 1948, p.271).Il conservera (...) la marque et la saveur de votre génie, fût-ce au prix de quelques-unes de ces verdeurs naturelles qui choquent les moralistes engoncés (Arnoux, Roi, 1956, p.235).
II. − Adj. Qui est empreint de formalisme moral, qui développe des considérations morales ou qui vise à donner des leçons morales. Tu sais l'histoire: un nietzschéen, qui entreprend de transformer une famille à préjugés moralistes, et qui y parvient presque (Rivière, Corresp.[avec Alain-Fournier], 1906, p.192).Il remplissait notre silence d'un verbiage moraliste et sentimental (Bernanos, Enfants humil., 1948, p.28):
3. Mmede Staël, remarquant que les fables et les drames des anciens étaient rarement dirigés dans le sens de l'exhortation morale ou des exemples édifiants, notait que les modernes tiennent ce souci moraliste, si peu semblable au souci spirituel, de l'habitude que donnent les affaires de toujours tendre vers un but déterminé. Mounier, Traité caract., 1946, p.712.
REM.
Moralistement, adv.,hapax. À la manière d'un moraliste (v. supra I B). [Mmede Créqui] lisait moralistement (c'est son mot), en raisonnant et en extrayant de tout une moralité applicable (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 12, 1856, p.450).
Prononc. et Orth.: [mɔ ʀalist]. Att. ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. A. Subst. 1. 1690 «auteur qui écrit et traite de la Morale» (Fur.); 2. 1701 «dans les Flandres, janséniste» (ibid.); 3. 1762 «personne qui fait des réflexions morales sans être écrivain» (Diderot, Neveu de Rameau, p.94 cité par L. Undhagen, p.145). B. Adj. 1. 1758 passions discoureuses et moralistes (Id., Œuvres esthétiques, p.194, ibid., p.148); 2. 1800 écrivains moralistes (Mmede Staël, De la littérature, I, p.176, ibid.). Dér. de morale*; suff. -iste*. Fréq. abs. littér.: 730. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 986, b) 674; xxes.: a) 876, b) 1374. Bbg. Mack. t. 1 1939, p.163, 280, 283, 287. _ Undhagen (L.). Morale et les autres lexèmes formés sur le rad. moral-. Lund, 1975, pp.55-56, 140-147.

Wiktionnaire

Nom commun - français

moraliste \mɔ.ʁa.list\ masculin et féminin identiques

  1. Écrivain qui traite des mœurs.
    • Remarquons d'abord que les moralistes ne raisonnent presque jamais sur ce qu'il y a de vraiment fondamental dans notre individu ; ils cherchent d'ordinaire à projeter nos actes accomplis sur le champ des jugements que la société a rédigés d'avance pour les divers types d'action qui sont les plus communs dans la vie contemporaine. — (Georges Sorel, Réflexions sur la violence, 1908, p.34)
    • La France n'aime plus les moralistes : ils posent des problèmes qui n'existent pas. Elle n'aime plus les satiriques : ils dérangent l'ordre présent des valeurs. Approfondir, soit, contester, non. — (Philippe Tesson, en avant-propos de André Malraux ou le temps du silence par André Brincourt, 1966)
    • En ce qui regarde le moraliste allemand, il a pu constater, le jour où les soldats de la Révolution ont anéanti à Iéna l’armée de sa nation, que des hommes pouvaient croire à des principes immuables et se trouver singulièrement loin d’être pour cela « morts eux-mêmes ». — (Julien Benda, La trahison des clercs : Appendice des valeurs cléricales, 1927, éd. 1946)
    • Confucius était un moraliste qui se méfiait de l’intelligence ; le terre à terre des relations humaines lui plaisait mieux que la spéculation ondoyante. — (Paul Demiéville, La montagne dans l'art littéraire chinois, dans Choix d'études sinologiques (1921-1970), p.364, BRILL, 1973)
  2. (Figuré) (Péjoratif) Personne qui prêche sa morale pour les autres.
    • Les moralistes ne redoutent jamais de se monter contradictoires. Ils pensent à bon droit qu'ils ont assez fait en prêchant la bonne parole et que l'exemple personnel n'est pas un adjuvant nécessaire à l'influence de leurs idées. — (Pierre Louÿs, Les aventures du roi Pausole, 1901)
    • Les détracteurs du nudisme - les moralistes ou hygiénistes conservateurs d’État ou d’Église - prétendent que la vue du nu, que la fréquentation entre nudistes des deux sexes exaltent le désir érotique. — (Émile Armand, Le nudisme révolutionnaire, dans L’Encyclopédie anarchiste, 1934)
    • J'offre ici aux moralistes une occasion facile de triompher de moi. Mes censeurs s'apprêtent à montrer dans mon malheur les suites d'un égarement, le résultat d'un excès : il m'est d'autant plus difficile de les contredire que je vois mal en quoi consiste l'égarement, et où se situe l'excès. Je m'efforce de ramener mon crime, si c'en est un, à des proportions justes : […]. — (Marguerite Yourcenar, Mémoires d'Hadrien, éditions Plon, 1951)
    • Un homme moral dit oui à la vie dans toutes ses manifestations; il les accepte, les intègre, les transforme, les assimile et sait en bâtir tout un équilibre. Un homme moraliste dit non à beaucoup de choses, à trop de choses bien souvent. — (Irène de Buisseret, Deux langues, six idiomes, Ottawa, Carlton Green, 1975, p. 379)
    • Je mets autant de différence entre un voyageur Moraliste & un voyageur Physicien, qu'entre un homme qui me guide vers la vertu, qui forme mes mœurs, qui me fournit des moyens pour me garantir du vice, & un autre qui m'enseigne les causes cachées & incertaines du reflux de la mer, qui m'apprend les différens systèmes des Philosophes également opposés les uns aux autres, qui m'instruit des conjectures que quelques hommes hardis ont voulu faire recevoir pour des vérités évidentes : tout cela me divertit, m'amuse; mais ne me rend ni plus sage, ni plus modeste, ni plus charitable. — (1740, Lettres chinoises, ou Correspondance philosophique, historique et critique, entre un Chinois voyageur à Paris & ses correspondans à la Chine, en Moscovie, en Perse et au Japon)
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

MORALISTE. n. m.
Écrivain qui traite des mœurs. Un profond moraliste. Montaigne, Pascal, La Rochefoucauld, La Bruyère sont les principaux moralistes français.

Littré (1872-1877)

MORALISTE (mo-ra-li-st') s. m.
  • 1Écrivain qui traite des mœurs. La Rochefoucauld, la Bruyère, Vauvenargues sont nos plus grands moralistes. Toujours moralistes pédants, Rousseau, Ém. II. Prenons une autre extrémité, touchons une autre corde du cœur ; voyons non plus le moraliste pathétique et touchant, mais le moraliste profond et accusateur, Villemain, Litt. franç. 18e siècle, 2e part. 1re leçon.
  • 2Nom que l'on a donné en Flandre aux jansénistes.
Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

Étymologie de « moraliste »

 Dérivé de morale, avec le suffixe -iste.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Phonétique du mot « moraliste »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
moraliste mɔralist

Fréquence d'apparition du mot « moraliste » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « moraliste »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « moraliste »

  • En parcourant un livre de médecine, on s'imagine avoir toutes les maladies qu'il décrit, de même, en lisant l'ouvrage d'un moraliste, on découvre tous les travers qu'il signale... mais chez les autres !
    Otto von Bismarck
  • Au rebours de ce qu'enseignent les moralistes, les hommes ne sont nulle part les mêmes.
    Joseph Arthur, comte de Gobineau — Nouvelles asiatiques
  • La théologienne Véronique Margron évoque le souvenir du prêtre salésien et éminent théologien moraliste Xavier Thévenot, auquel elle doit son approche de la morale, concrète et attentive. Les grandes rencontres (8/9).
    La Croix — Véronique Margron et Xavier Thévenot, l’héritage d’une morale pour la vie
  • Il y a aujourd’hui, en France, une tentation moraliste, militariste, occidentaliste qui ressemble à ce que fut le néoconservatisme aux États-Unis.
    Dominique de Villepin — Le Figaro, 20 janvier 2015
  • Mettez une plume d'oie dans la main d'un moraliste qui soit écrivain de premier ordre. Il sera supérieur aux poètes.
    Lautréamont
  • Il n'est de bons moralistes que ceux qui ne s'occupent que de la morale d'autrui.
    Maurice Sachs — Derrière cinq barreaux
  • Comme son homologue, l’autre moraliste Clermontois Pascal, la pensée de Chamfort nous est parvenue par des fragments enigmatiques. « Les deux hommes ont également en commun de refuser toute pensée philosophique dogmatique et totalisante », ajoute le professeur de littérature Jean-Baptiste Bilger.
    www.lyonne.fr — Chamfort, un esprit libre et révolté raconté par Jean-Baptiste Bilger - Paris (75000)
  • Parenthèse enchantée de films électrisés, le cinéma hollywoodien Pré-Code se loge entre deux événéments : le krach boursier de 1929 et l'introduction du Code Hays par le très puritain Joseph I. Breen, qui tente un coup de balai moraliste sur les images produites par les studios et la vie privée des dieux et déesses qui régnaient sur Hollywood.
    Les Inrockuptibles — “Baby Face”, un film sur l’empowerment réalisé en 1933
  • Le philosophe cherche la vérité et l'artiste, la beauté. Plus ambitieux, le moraliste, artiste et philosophe tout ensemble, cherche, comme une femme, le bonheur.
    Pierre Baillargeon — Commerce
  • L'étude de l'homme physique est également intéressante pour le médecin et pour le moraliste.
    Georges Cabanis — Rapports du physique et du moral de l'homme
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Traductions du mot « moraliste »

Langue Traduction
Anglais moralist
Espagnol moralista
Italien moralista
Allemand moralist
Chinois 道德主义者
Arabe الأخلاقي
Portugais moralista
Russe моралист
Japonais 道徳家
Basque moralista
Corse moralista
Source : Google Translate API

Synonymes de « moraliste »

Source : synonymes de moraliste sur lebonsynonyme.fr

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Moraliste

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