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Aéré

Définitions de « aéré »

Trésor de la Langue Française informatisé

AÉRÉ, ÉE, part. passé et adj.

I.− Part. passé de aérer* :
1. ... les fonctionnaires sommeillant sur les dossiers poussiéreux dans les locaux par extraordinaire aérés, portes et fenêtres ouvertes pour établir un courant d'air, ... B. Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 304.
II.− Adjectif
A.− [S'applique à un lieu clos] Où l'air entre, circule et se renouvelle facilement. P. ext. Où la lumière pénètre. Anton. confiné (cf. aérer I A 1) :
2. ... l'heure de visiter le collège était arrivée; M. M., qui voulut bien m'y conduire, m'y laissa, en me rappelant qu'il m'attendait à dîner. Le local réunit tous les avantages qu'exige sa destination : il est vaste, commode et bien aéré; ... V. de Jouy, L'Hermite de la chaussée d'Antin,t. 4, 1813, p. 29.
3. Les bergeries, les écuries, les vacheries, les laiteries, les granges se rebâtirent sur le modèle de mes constructions et de celles de M. Gravier, qui sont vastes, bien aérées, par conséquent salubres. H. de Balzac, Le Médecin de campagne,1833, pp. 46-47.
4. Ainsi on dit d'une manière générale qu'il faut ventiler beaucoup; hé bien! des faits prouvent que dans des salles mal aérées des malades amputés guérissent mieux que dans des salles bien aérées. Il peut se faire en effet que dans un air peu renouvelé l'individu s'abaisse peu à peu comme un oiseau sous cloche et qu'il résiste mieux à la cause morbifique qui l'épuise. C. Bernard, Principes de médecine expérimentale,1878, pp. 164-165.
5. La rue commerçante à l'intérieur de l'édifice est mal aérée... (Le Corbusier). Combat,19-20 janv. 1952, p. 8, col. 1.
Rem. Assoc. fréq. : bien aéré (ex. 2, 3, 4); anton. mal aéré (ex. 4); vaste/aéré (ex. 2, 3).
Par métaph. [En parlant d'un espace pris au fig.] :
6. Un secret inexpliqué tient souvent en vous une place plus noble et plus aérée que son explication. C'est l'ampoule d'air chez les poissons. Nous nous dirigeons avec sûreté dans la vie en vertu de nos ignorances et non de nos révélations. J. Giraudoux, Intermezzo,1933, III, 4, p. 188.
7. Jacques aussi, depuis quatre ans, avait plus ou moins cédé à ses « entraînements »; mais jamais sans remords. À son insu, dans un coin peut-être mal aéré de sa conscience, subsistait quelque chose de cette distinction puérile entre le « pur » et l'« impur », qu'il faisait si souvent, jadis, au cours de ses discussions avec Daniel. R. Martin du Gard, Les Thibault,L'Été 1914, 1936, p. 271.
8. On peut encore opposer un milieu stimulant, qui lutte contre les torpeurs où s'engourdit la sensibilité, à un milieu déprimant, qui détend le ressort vital; un milieu aéré, qui donne à l'initiative et à la liberté l'espace de vie nécessaire et un milieu étouffant qui les comprime, parfois sous les meilleures intentions. E. Mounier, Traité du caractère,1946, p. 111.
P. ext., CHIM. [Appliqué gén. à l'eau, s'emploie aussi pour qualifier une substance, ou tout autre liquide] Imprégné d'air (cf. aérer I A 3 a) :
9. [Un] procédé [de préparation] de l'oxyde de fer (...) repose sur la décomposition spontanée, au moyen de l'eau aérée, du sulfate de protoxyde de fer. A. Brongniart, Traité des arts céramiques,t. 2, 1844, p. 518.
10. Si les plantes peuvent s'assimiler les éléments de l'air, ce sont celles qui vivent dans l'air ou dans l'eau. Les placer dans de l'air sec ou dans de l'eau distillée, aérée. Croîtront-elles en ayant le soin de tamiser l'air? C. Bernard, Cahier de notes,1860, p. 94.
[En parlant d'une chose placée dans l'espace] Ouvert et exposé à l'air libre :
11. Je gagnai la zone sud avec l'intention de me renseigner sur la résistance. Mais une fois rendu, et renseigné, j'hésitai. L'entreprise me paraissait un peu folle et, pour tout dire, romantique. Je crois surtout que l'action souterraine ne convenait ni à mon tempérament, ni à mon goût des sommets aérés. A. Camus, La Chute,1956, p. 1537.
Par métaph. :
12. Le nom de Mllede Préfailles fut prononcé comme il devait l'être. − Alors tu vois de qui il s'agit, et c'est bien. Ses confidences ainsi aérées et toute son âme ouverte, ce fut désormais très facile. Un flot large coula, d'un cœur repris par tous les enivrements du passé. J. Malègue, Augustin ou le Maître est là,t. 2, 1933, p. 460.
B.− [En parlant de choses concr.] Où l'on a pratiqué (var. : où se trouvent naturellement) des espaces vides favorisant la circulation de l'air (le cas échéant, la pénétration ou la diffusion de la lumière) :
13. Les prairies semées de coucous et de violettes, à son humble et impérieux avis, sont aussi douces à ceux qui s'étendent l'un sur l'autre qu'à ceux qui s'étendent l'un près de l'autre, soit qu'ils lisent, soit qu'ils soufflent sur la sphère aérée du pissenlit, soit qu'ils pensent au repas du soir ou à la république. J. Giraudoux, La Guerre de Troie n'aura pas lieu,1935, II, 12, p. 177.
14. Nous dînons en face d'un jardin à l'italienne assez beau mais insuffisamment aéré; le feuillage trop luxuriant estompe le dessin des allées, la forêt vierge, ici comme dans le vrai sud, tendant toujours à reprendre ses droits et bousculant l'architecture des jardins : ... J. Green, Journal,1940, p. 7.
C.− Emplois fig. (cf. aussi supra A et B, emplois métaph.)
1. [En parlant de la vie de l'esprit] Ouvert à ce qui libère de l'oppression, accueillant à ce qui vient du dehors :
15. Sa vie intérieure est (...) trouble, équivoque, jamais aérée, malsaine. S'il prend des libertés avec la doctrine, il affecte un respect scrupuleux du précepte moral. G. Bernanos, L'Imposture,1927, p. 315.
16. Le nouveau professeur, M. Bougaud, juste sorti de l'École normale, annonçait son dessein d'insister sur ce qu'il appelait la partie idées de l'histoire littéraire, le libéralisme universitaire devant ouvrir à toutes un cœur aéré, des bras pleins d'accueil. J. Malègue, Augustin ou le Maître est là,t. 1, 1933, p. 84.
2. [En parlant d'idées, et plus gén. d'activités ou d'œuvres de l'esprit] Clarifié et simplifié par l'intelligence, allégé par l'élimination de ce qui est accessoire :
17. Voici, au début d'une pièce de Swelinck (...) une construction qui (...) est plus plaisante, nette, aérée... J. Combarieu, La Musique,1910, p. 76.
18. Vous avez fait plus de quarante articles pour décrire, prédire ce que nous constatons. Aujourd'hui (on rencontre vos pas sur tous les sentiers de guerre où nous nous engageons), je me figure que vous n'en avez jamais écrit de plus mouvementé, souple, aéré, persuasif que celui que vous me faites l'honneur de me consacrer. M. Barrès, Mes cahiers,t. 10, janv.-avr. 1914, p. 301.
19. C'est trop dense; tout le système y passe; une malade s'accommoderait mieux de réflexions plus légères, plus aérées. La mère Agnès vient de prendre ses grades, mais enfin il paraît bien qu'elle ne récite pas une leçon. L'assimilation est achevée. Voici plus alerte et plus simple. Elle écrit à Robert d'Andilly, ... H. Bremond, Hist. littéraire du sentiment religieux en France,t. 4, 1920, p. 201.
20. Il diffère du paragraphe d'Adolphe plus resserré, plus profond encore, mais moins immédiatement poétique dans l'acception aérée du terme. Ch. Du Bos, Journal,nov. 1926, p. 134.
3. P. ext. [En parlant de choses faites, de paroles dites par l'homme] Léger ou libre comme l'air :
21. Il s'agissait cette fois de la réelle bouillabaisse de mer, aérée, légère... L. Daudet, La Mésentente,1911, p. 194.
22. La prière du matin, récitée, ainsi que jadis, entre la cuisine et la chambre à coucher, était hâtive, légère, aérée et comme mousseuse, à goût de chocolat et de départ. J. Malègue, Augustin ou le Maître est là,t. 1, 1933, p. 63.
23. La jeunesse d'Allan a été entourée certainement d'une prodigalité de luxe, de ce luxe aéré, capricieux, un peu irréel, qui doit s'accommoder de continuels déplacements, d'une vie de voyages, de palaces, de stations thermales élégantes, de relations aussi inconsistantes que brillantes avec des acteurs, des écrivains, des virtuoses − une atmosphère de cour de jeune prince romantique dont le manque d'assise réelle ne dut pas être perceptible tout de suite à Allan. J. Gracq, Un Beau ténébreux,1945, p. 49.
Rem. 1. Dans ces emplois, aéré est fréquemment associé à léger, dont il est un synon. expr. 2. Le sens y demeure souvent, de propos délibéré, très vague et ne se détermine tant soit peu que dans le cont. des énoncés (cf. en partic. l'ex. 21).
Stylistique − Aéré se prête facilement à des emplois en hypallage, c.-à-d. à des constr. où, par fig. visant un certain effet, il est grammaticalement rapporté à un autre mot que celui auquel il se rapporte pour le sens : 24. Je disais à Myrtil, qui m'accompagnait dans les champs : « Combien de ce matin charmant, de cette brume et de cette lumière, de cette fraîcheur aérée, de cette pulsation de ton être, la sensation te donnerait plus de délices encore, si tu savais t'y donner tout entier... » A. Gide, Les Nourritures terrestres, 1897, p. 189. 25. De la vision et de l'exécution ferme, pure, un peu figée du xviesiècle, on est passé à la fluidité vivante du xviiesiècle, et surtout on est passé à Rubens, car nul plus que lui n'a contribué à son apparition. Ce sang qui court, cette palpitation charnelle, cette irrégularité sourde qui mine la forme et libère la flexibilité de la chair, la légèreté aérée de la chevelure, la souple mollesse du bonnet de fourrure, le mouvement aérien des nuages, cet éclat radieux de la couleur, cette intensité, cette chaleur, sont la présence même du grand Anversois. R. Huyghe, Dialogue avec le visible, 1955, p. 262. (Dans l'ex. 24, cette fraîcheur aérée : la fraîcheur de ce matin aéré; dans l'ex. 25, la légèreté aérée de la chevelure : la légèreté de la chevelure aérée). Ailleurs il s'agit de raccourcis ell. : 26. Un vaste ciel aéré de lumière et de vapeur [dans la Reddition de Breda par Velasquez], richement peint en pleine pâte d'outremer, fond son azur avec les lointains bleuâtres... T. Gautier, Guide de l'amateur au Musée du Louvre, 1872, p. 275. Ces emplois, lorsqu'ils tournent au procédé, sont caractéristiques du style précieux ou maniéré; ils sont en partie affaire de mode (cf. aussi les ex. 21, 22, 23, 24, et supra rem. 2).
Prononc. ET ORTH. − Sur la 1resyllabe qui s'est prononcée [ε], cf. E. Molard (Le Mauvais langage corrigé, 1810, p. 15) : ,,Qui est en plein air. Il se dit particulièrement d'un bâtiment : cette maison est bien airée; dites, aérée, en mettant un accent aigu sur les deux premiers e. Ce qui a donné lieu à la corruption de ce mot, c'est qu'on l'a fait dériver du mot air, au lieu que les grammairiens veulent qu'on le prononce comme aer, mot latin qui signifie la même chose``; cf. aussi R. de Gourmont (Esthétique de la langue française, 1899, p. 152) : ,,Airé : bien meilleur que aéré. Il faudrait oser s'en servir``. Enq. : /aeʀe1/.
STAT. − Fréq. abs. litt. : 127.

Wiktionnaire

Adjectif - français

aéré

  1. Qui reçoit un courant d'air.
    • Le Havre, tout le monde le sait, est une ville de création beaucoup plus récente que Rouen, une ville claire, ouverte, aérée, une ville rectiligne. — (Ludovic Naudeau, La France se regarde : le Problème de la natalité, Librairie Hachette, Paris, 1931)
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

AÉRER. v. tr.
Assainir en mettant en contact avec l'air. Aérer un escalier, une salle de spectacle, un sous-sol. Il signifie aussi Faire prendre l'air à quelqu'un. Aérer un convalescent. Le participe passé

AÉRÉ, ÉE, s'emploie adjectivement et se dit d'un Bâtiment qui est au grand air, en bel air. Une maison bien aérée.

Littré (1872-1877)

AÉRÉ (a-é-ré, rée)
  • 1 Part. passé. Bâtiment aéré à l'aide d'un ventilateur. De l'eau aérée, de l'eau qui a reçu de l'air en soi.
  • 2 Adj. Qui est en grand air, en bel air. Je jouis d'une maison plus aérée que n'était celle de Hugues-Capet, Voltaire, Dial. 4.
Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

Phonétique du mot « aéré »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
aéré aere

Fréquence d'apparition du mot « aéré » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « aéré »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Traductions du mot « aéré »

Langue Traduction
Anglais airy
Espagnol aireado
Italien arioso
Allemand luftig
Chinois 通风的
Arabe جيد التهوية
Portugais arejado
Russe воздушный
Japonais 風通しの良い
Basque airetsua
Corse aria
Source : Google Translate API

Antonymes de « aéré »

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Nombre de points du mot aéré au scrabble : 2 points

Aéré

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