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Citations sur le dans - Page 3
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« On arrive », dit le grand brun. Point d’orgue. Avec le revolver dans les reins, le Commandant von Lüttwitz-Randau descend.
Louis Aragon — Le mentir-vrai -
Au milieu de ce point d’orgue qui, dans la grande symphonie du tapage parisien, se rencontre vers une heure du matin, la femme de monsieur César Birotteau, marchand parfumeur établi près de la place Vendôme, fut réveillée en sursaut par un épouvantable rêve.
Honoré de Balzac — César Birotteau -
Toujours aussi bleu que l’eau le voudra Il est dans vos yeux il est dans vos bras Et c’est le secret de ce vieux mystère Qui dit aide-toi le ciel t’aidera
Louis Aragon — Le nouveau Crève-cœur -
Le Phaéton d’une voiture à foinVit son char embourbé. Le pauvre homme était loinDe tout humain secours. C’était à la campagnePrès d’un certain canton de la basse BretagneAppelé Quimpercorentin.On sait assez que le destinAdresse là les gens quand il veut qu’on enrage.Dieu nous préserve du voyage !Pour venir au Chartier embourbé dans ces lieux,Le voilà qui déteste et jure de son mieux.Pestant en sa fureur extrêmeTantôt contre les trous, puis contre ses chevaux,Contre son char, contre lui-même.Il invoque à la fin le Dieu dont les travauxSont si célèbres dans le monde :Hercule, lui dit-il, aide-moi ; si ton dosA porté la machine ronde,Ton bras peut me tirer d’ici.Sa prière étant faite, il entend dans la nueUne voix qui lui parle ainsi :Hercule veut qu’on se remue,Puis il aide les gens. Regarde d’où provientL’achoppement qui te retient.Ôte d’autour de chaque roueCe malheureux mortier, cette maudite boueQui jusqu’à l’essieu les enduit.Prends ton pic et me romps ce caillou qui te nuit.Comble-moi cette ornière. As-tu fait ? — Oui, dit l’homme.— Or bien je vais t’aider, dit la voix : prends ton fouet.— Je l’ai pris. Qu’est ceci ? mon char marche à souhait.Hercule en soit loué. Lors la voix : Tu vois commeTes chevaux aisément se sont tirés de là.Aide-toi, le Ciel t’aidera.
Jean de La Fontaine — Fables -
Les infirmières n’ont vu que l’acteur. Qu’importe le flacon, pourvu qu’il y ait l’ivresse. La leur. Il y a adjoint un bocal de foie gras que nous ne mangerons pas tout de suite. Je le confie benoîtement à la surveillante générale pour qu’il se conserve dans le réfrigérateur de la salle de garde.
Antoine Blondin — Ma vie entre des lignes -
Je sais bien qu’on m’objectera cette vieille rengaine d’Augier « Qu’importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse » Hé bien, Robert a peut-être l’ivresse, mais il n’a vraiment pas fait preuve de goût dans le choix du flacon !
Marcel Proust — À la recherche du temps perdu -
Les soirs crucifiés sur l’horizon les soirsSaignent, dans leurs marais leurs douleurs et leurs plaies
Emile Verhaeren — Les Soirs -
Patience, patience,Patience dans l’azur!Chaque atome de silenceEst la chance d’un fruit mûr!
Paul Valéry — Patience dans l’azur -
J’aime l’araignée et j’aime l’ortie,Parce qu’on les hait ;Et que rien n’exauce et que tout châtieLeur morne souhait ;Parce qu’elles sont maudites, chétives,Noirs êtres rampants ;Parce qu’elles sont les tristes captivesDe leur guet-apens ;Parce qu’elles sont prises dans leur œuvre ;Ô sort ! fatals nœuds !Parce que l’ortie est une couleuvre,L’araignée un gueux ;Parce qu’elles ont l’ombre des abîmes,Parce qu’on les fuit,Parce qu’elles sont toutes deux victimesDe la sombre nuit.Passants, faites grâce à la plante obscure,Au pauvre animal.Plaignez la laideur, plaignez la piqûre,Oh ! plaignez le mal !Il n’est rien qui n’ait sa mélancolie ;Tout veut un baiser.Dans leur fauve horreur, pour peu qu’on oublieDe les écraser,Pour peu qu’on leur jette un œil moins superbe,Tout bas, loin du jour,La vilaine bête et la mauvaise herbeMurmurent : Amour !
Victor Hugo — Les Contemplations -
Il prophétisait vrai : notre maître Mitis,Pour la seconde fois, les trompe et les affine,Blanchit sa robe et s’enfarine ;Et, de la sorte déguisé,Se niche et se blottit dans une huche ouverte.Ce fut à lui bien avisé :La gent trotte-menu s’en vient chercher sa perte.Un rat, sans plus, s’abstient d’aller flairer autour ;C’était un vieux routier, il savait plus d’un tour ;Même il avait perdu sa queue à la bataille.Ce bloc enfariné ne me dit rien qui vaille,S’écria-t-il de loin au général des chats :Je soupçonne dessous encor quelque machine :Rien ne te sert d’être farine ;Car, quand tu serais sac, je n’approcherais pas.C’était bien dit à lui : j’approuve sa prudence :Il était expérimenté,Et savait que la méfianceEst mère de la sûreté.
Jean de La Fontaine — Fables -
Une chose au moins était claire. Le monde est un bordel bourbeux. Il se bouche, s’enlise dans sa propre mélasse. Point barre.
David Means — Le poisson secret -
Un vieux bonhomme, un pied dans la tombe, il sent le sapin, comme on dit, et il suffit d’un ragot de bonne femme, il est tout de suite là pour écouter; rien ne peut se dire sans lui.
Fédor Dostoïevski — Le Double -
Tu es sur le point de commencer le nouveau roman d’Italo Calvino, Si une nuit d’hiver un voyageur. Détends-toi. Recueille-toi. Chasse toute autre pensée de ton esprit. Laisse le monde qui t’entoure s’estomper dans le vague. Il vaut mieux fermer la porte ; là-bas la télévision est toujours allumée. Dis-le tout de suite aux autres : « Non, non, je ne veux pas regarder la télévision. » Lève la voix, sinon ils ne t’entendront pas : « Je suis en train de lire ! Je ne veux pas être dérangé. » Il se peut qu’ils ne t’aient pas entendu avec tout ce bazar ; dis-le à haute voix, crie : « Je vais commencer le nouveau roman d’Italo Calvino ! » Ou si tu ne veux pas, ne le dis pas ; espérons qu’ils te laissent tranquille.
Italo Calvino — Si une nuit d’hiver un voyageur -
1 rouge (dans ma nuée) ; doux ; 4 noir (s) : (sévères!), hiver, tempsma neige, et l’enfer, infirme : d’une décente, toi, matière ;mais (un cheval sellé s’éloigne) : tu es nombre, rien (vers la droite) :Alphabets, nombres : nous dirons vos naissances latentes,céréales de Cérès, grenades de Proserpine,semences, peuples, races enterrées : âges !Et l’obscurité nourrit les jours et ce toit qui balancedépouillé maintenant de sa pente de feuilles, attendla lueur au cœur de la nuée qui fera naîtreplus que des nombres et Cérès effacer, jaillissant, les chiffresdoux aveugle et gourd au centre de la rouequand, plus-de-bleu plus-de-noir toi séquence de céréalesnombre du puits des feuilles ouvres en tremblant (tremblementaigu de la neige) ta lueur de louve (et loin !) sémillante
Jacques Roubaud — Renga -
Anton Voyl n’arrivait pas à dormir. Il alluma. Son Jaz marquait minuit vingt. Il poussa un profond soupir, s’assit dans son lit, s’appuyant sur son polochon. Il prit un roman, il l’ouvrit, il lut; mais il n’y saisissait qu’un imbroglio confus, il butait à tout instant sur un mot dont il ignorait la signification.Il abandonna son roman sur son lit. Il alla à son lavabo; il mouilla un gant qu’il passa sur son front, sur son cou.Son pouls battait trop fort. Il avait chaud. Il ouvrit son vasistas, scruta la nuit. Il faisait doux. Un bruit indistinct montait du faubourg. Un carillon, plus lourd qu’un glas, plus sourd qu’un tocsin, plus profond qu’un bourdon, non loin, sonna trois coups. Du canal Saint-Martin, un clapotis plaintif signalait un chaland qui passait.Sur l’abattant du vasistas, un animal au thorax indigo, à l’aiguillon safran, ni un cafard, ni un charançon, mais plutôt un artison, s’avançait, traînant un brin d’alfa. Il s’approcha, voulant l’aplatir d’un coup vif, mais l’animal prit son vol, disparaissant dans la nuit avant qu’il ait pu l’assaillir.
Georges Perec — La Disparition -
Si autrefois la littérature était vue comme miroir du monde, ou comme l’expression directe de sentiments, aujourd’hui nous ne pouvons plus oublier que les livres sont faits de mots, de signes, de procédés de construction ; nous ne pouvons plus oublier que ce que les livres communiquent reste parfois inconscient à l’auteur même, que ce que les livres disent est parfois différent de ce qu’ils proposaient de dire ; que dans tout livre, si une part relève de l’auteur, une autre part est oeuvre anonyme et collective.
Italo Calvino — La Machine littérature -
Ouvrons un dictionnaire aux mots « Littérature Potentielle.» Nous n’y trouverons rien. Fâcheuse lacune. […]L’humanité doit-elle se reposer et se contenter, sur des pensers nouveaux de faire des vers antiques ? Nous ne le croyons pas. Ce que certains écrivains ont introduit dans leur manière, avec talent (voire avec génie), mais les uns occasionnellement (forgeage de mots nouveaux), d’autres avec prédilection (contrerimes), d’autres avec insistance mais dans une seule direction (lettrisme), l’Oulipo entend le faire systématiquement et scientifiquement. […]Un mot, enfin, à l’intention des personnes particulièrement graves qui condamnent sans examen et sans appel toute œuvre où se manifeste quelque propension à la plaisanterie. Lorsqu’ils sont le fait de poètes, divertissements, farces et supercheries appartiennent encore à la poésie. La littérature potentielle reste donc la chose la plus sérieuse du monde. C.Q.F.D.
Jean-François Le Lionnais — Manifeste de l’Oulipo -
Je voulus lui parler du Clos Joli et de Marcellin Duprat, quelque chose me disait que l’avenir était de ce côté-là, mais nul n’est prophète dans son pays et on était alors encore loin de compte. Le retour d’Ambroise Fleury fut célébré comme une fête nationale, et ce fut un peu pour chacun comme si la France avait retrouvé son vrai visage.
Romain Gary — Les cerfs-volants -
Nul n’est prophète, non seulement chez lui, mais en son pays ; voilà ce que nous apprend l’histoire. […] Dans mon pays de Gascogne, on trouve amusant que je sois imprimé ; plus on est loin de chez moi quand on me découvre, plus ma réputation est grande.
Montaigne — Essais -
Revenons-en à la rue des Gravilliers. Lisa continuait à attendre le Grand Soir. Les grands-parents et Renoir se moquaient un peu d’elle. Son mari, que ses journaux payaient bien, commençait à mettre de l’eau dans son vin.
Jean Renoir et Pierre-Auguste Renoir — mon père -
L’Argentin ne put donner toute sa mesure gouvernementale, mais je gage qu’il eût fait un Suprême plus tranchant et drastique, moins ondoyant et louvoyant que l’autre. Plus éloigné des affaires, il n’avait pas à mettre de l’eau dans son vin ni à jouer aux Horaces et Curiaces avec l’adversaire impérial. L’art politique diviser l’adversaire et gagner du temps n’était pas son fort.
Régis Debray — Loués soient nos seigneurs -
Le chien concasse sa voix de sabot. Des ciseaux de son bec, le corbeau déchire la solide toile de l’air. Pour arriver, il faut mettre de l’eau dans son vin, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de vin.
Jules Renard — Journal -
L’arrière se désintéresse de nous, nous-mêmes nous ne songeons guère aux Allemands avec des intentions offensives. Beaucoup espèrent un « arrangement ». Un sergent hier encore me disait, avec une lueur d’espoir niais dans les yeux « Pour moi, ça va s’arranger, l’Angleterre mettra de l’eau dans son vin. » La plupart sont assez sensibles aux propagandes hitlériennes. On s’ennuie, le « moral » baisse.
Jean-Paul Sartre — Carnets de la drôle de guerre -
Enfin ! Étourdissons-nous avec le bruit de la plume et buvons de l’encre. Ça grise mieux que le vin. Quant à suivre les conseils du père Sainte-Beuve, « ménager la chèvre et le chou, mettre de l’eau dans son vin, s’arranger en un mot pour réussir près du public », c’est trop difficile et trop chanceux.
Gustave Flaubert — Correspondance -
Une malédiction frappe la science qui court de succès en succès tous ses triomphes, et ils sont réels, sont des victoires à la Pyrrhus. À mesure que se gonfle, dans l’océan de ce que nous ne savons pas, la sphère de ce que nous savons, le nombre de points de contact entre savoir et ignorance croît proportionnellement.
Jean d’Ormesson — C’était bien -
[Pyrrhus] avait perdu une grande partie des forces qu’il avait amenées, et presque tous ses amis et principaux commandants ; il n’avait aucun moyen d’avoir de nouvelles recrues (…). Tandis que, comme une fontaine s’écoulant continuellement de la ville, le camp romain se remplissait rapidement et abondamment d’hommes frais, pas du tout abattus par la défaite, mais gagnant dans leur colère une nouvelle force et résolution pour continuer la guerre.
Plutarque — Apophtegmes de rois et de généraux -
Un instant découragé par l’invraisemblable pagaille qui s’étalait dans les granges, il réussit à entasser tant bien que mal dans celle du fond un bric-à-brac de skis hors d’état, de silex arrachés au jardin pour planter la haie de thuyas, de batteries inutilisables, de bidons en tous genres.
Philippe Delerm — Le Portique -
De Moscou à Paris, en passant par Varsovie et Berlin, une immense dérive gagne notre continent désaccordé. La guerre approche, des truands en tout genre trafiquent au long des routes. Dans leur croisade pour la reconquête du monde occidental, catholiques et orthodoxes rivalisent d’invention.
Danièle Sallenave — Les trois minutes du diable -
Petite silhouette bleue parmi les passants, comme l’apparition d’un geai qui cours toujours au-delà des bornes dans la rue printanière ou même au Luxembourg derrière un ballon, une idée, une simple couleur goûte, ma chérie, à la pulpe de la vie tandis que nous gardons pour toi le souci des barrières en tout genre comme l’écorce amère, indispensable à sa conservation.
Jean-Pierre Lemaire — Le chemin du Cap -
Voilà. Ces personnages vont vous jouer l’histoire d’Antigone. Antigone, c’est la petite maigre qui est assise là-bas, et qui ne dit rien. Elle regarde droit devant elle. Elle pense. Elle pense qu’elle va être Antigone tout à l’heure, qu’elle va surgir soudain de la maigre jeune fille noiraude et renfermée que personne ne prenait au sérieux dans la famille et se dresser seule en face du monde, seule en face de Créon, son oncle, qui est le roi. Elle pense qu’elle va mourir, qu’elle est jeune et qu’elle aussi, elle aurait bien aimé vivre. Mais il n’y a rien à faire. Elle s’appelle Antigone et il va falloir qu’elle joue son rôle jusqu’au bout… Et, depuis que ce rideau s’est levé, elle sent qu’elle s’éloigne à une vitesse vertigineuse de sa sœur Ismène, qui bavarde et rit avec un jeune homme, de nous tous, qui sommes là bien tranquilles à la regarder, de nous qui n’avons pas à mourir ce soir.Le jeune homme avec qui parle la blonde, la belle, l’heureuse Ismène, c’est Hémon, le fils de Créon. Il est le fiancé d’Antigone. Tout le portait vers Ismène : son goût de la danse et des jeux, son goût du bonheur et de la réussite, sa sensualité aussi, car Ismène est bien plus belle qu’Antigone ; et puis un soir, un soir de bal où il n’avait dansé qu’avec Ismène, un soir où Ismène avait été éblouissante dans sa nouvelle robe, il a été trouver Antigone qui rêvait dans un coin, comme en ce moment, ses bras entourant ses genoux, et il lui a demandé d’être sa femme. Personne n’a jamais compris pourquoi. Antigone a levé sans étonnement ses yeux graves sur lui et elle lui a dit « oui » avec un petit sourire triste… L’orchestre attaquait une nouvelle danse, Ismène riait aux éclats, là-bas, au milieu des autres garçons, et voilà, maintenant, lui, il allait être le mari d’Antigone. Il ne savait pas qu’il ne devait jamais exister de mari d’Antigone sur cette terre et que ce titre princier lui donnait seulement le droit de mourir.Cet homme robuste, aux cheveux blancs, qui médite là, près de son page, c’est Créon. C’est le roi. Il a des rides, il est fatigué. Il joue au jeu difficile de conduire les hommes. Avant, du temps d’Œdipe, quand il n’était que le premier personnage de la cour, il aimait la musique, les belles reliures, les longues flâneries chez les petits antiquaires de Thèbes. Mais Œdipe et ses fils sont morts. Il a laissé ses livres, ses objets, il a retroussé ses manches, et il a pris leur place.Quelquefois, le soir, il est fatigué, et il se demande s’il n’est pas vain de conduire les hommes. Si cela n’est pas un office sordide qu’on doit laisser à d’autres, plus frustes… Et puis, au matin, des problèmes précis se posent, qu’il faut résoudre, et il se lève, tranquille, comme un ouvrier au seuil de sa journée.La vieille dame qui tricote, à côté de la nourrice qui a élevé les deux petites, c’est Eurydice, la femme de Créon. Elle tricotera pendant toute la tragédie jusqu’à ce que son tour vienne de se lever et de mourir. Elle est bonne, digne, aimante. Elle ne lui est d’aucun secours. Créon est seul. Seul avec son petit page qui est trop petit et qui ne peut rien non plus pour lui.Ce garçon pâle, là-bas, au fond, qui rêve adossé au mur, solitaire, c’est le Messager. C’est lui qui viendra annoncer la mort d’Hémon tout à l’heure. C’est pour cela qu’il n’a pas envie de bavarder ni de se mêler aux autres. Il sait déjà…Enfin les trois hommes rougeauds qui jouent aux cartes, leurs chapeaux sur la nuque, ce sont les gardes. Ce ne sont pas de mauvais bougres, ils ont des femmes, des enfants, et des petits ennuis comme tout le monde, mais ils vous empoigneront les accusés le plus tranquillement du monde tout à l’heure. Ils sentent l’ail, le cuir et le vin rouge et ils sont dépourvus de toute imagination. Ce sont les auxiliaires toujours innocents et toujours satisfaits d’eux-mêmes, de la justice. Pour le moment, jusqu’à ce qu’un nouveau chef de Thèbes dûment mandaté leur ordonne de l’arrêter à son tour, ce sont les auxiliaires de la justice de Créon.Et maintenant que vous les connaissez tous, ils vont pouvoir vous jouer leur histoire. Elle commence au moment où les deux fils d’Œdipe, Étéocle et Polynice, qui devaient régner sur Thèbes un an chacun à tour de rôle, se sont battus et entre-tués sous les murs de la ville, Étéocle l’aîné, au terme de la première année de pouvoir, ayant refusé de céder la place à son frère. Sept grands princes étrangers que Polynice avait gagnés à sa cause ont été défaits devant les sept portes de Thèbes. Maintenant la ville est sauvée, les deux frères ennemis sont morts et Créon, le roi, a ordonné qu’à Étéocle, le bon frère, il serait fait d’imposantes funérailles, mais que Polynice, le vaurien, le révolté, le voyou, serait laissé sans pleurs et sans sépulture, la proie des corbeaux et des chacals… Quiconque osera lui rendre les devoirs funèbres sera impitoyablement puni de mort.Pendant que le Prologue parlait, les personnages sont sortis un à un. Le Prologue disparaît aussi. L’éclairage s’est modifié sur la scène. C’est maintenant une aube grise et livide dans une maison qui dort. Antigone entr’ouvre la porte et rentre de l’extérieur sur la pointe de ses pieds nus, ses souliers à la main. Elle reste un instant immobile à écouter. La nourrice surgit.
Jean Anouilh — Antigone -
Les collectivités peuvent verser une prime exceptionnelle à leurs agents ne gagnant pas plus de 3.250 euros bruts par mois. Beaucoup se disent dans l’incapacité financière de le faire.
Les Echos — Les collectivités locales peu enclines à accorder la prime de pouvoir d’achat -
En 2019, un ménage devait gagner entre 3.500 euros et 7.600 euros nets pour acquérir une maison dans la capitale. Quatre ans plus tard, il doit gagner entre 5.000 euros et 11.400 euros, selon nos calculs sur base des prix de l’immobilier et des conditions de crédit (taux d’intérêt et niveau d’endettement).
L’Echo — Combien devez-vous gagner pour acheter un bien dans votre commune? -
Dans leur rapport publié ce jeudi, un groupe d’experts recommande au gouvernement d’augmenter le salaire minimum de 23 euros pour atteindre les 1406 euros nets par mois.
Le Parisien — Le Smic pourrait passer la barre des 1400 euros nets par mois au 1er janvier 2024 -
Je persiste à penser que le poème n’est accompli que s’il se fait chant, parole et musique en même temps. La diction dite expressive à la mode, à la manière du théâtre ou de la rue, est l’anti-poème. Comme si le rythme n’était pas, sous sa variété, monotonie, qui traduit le mouvement substantiel des Forces cosmiques de l’Eternel !… Il est temps d’arrêter le processus de désagrégation du monde moderne, et d’abord de la poésie. Il faut restituer celle-ci à ses origines, au temps qu’elle était chantée – et dansée. Comme en Grèce, en Israël, surtout dans l’Egypte des Pharaons. Comme aujourd’hui en Afrique noire. « Toute maison divisée contre elle-même », tout art ne peut que périr. La poésie ne doit pas périr. Car alors, où serait l’espoir du Monde ?
Léopold Sédar Senghor — Comment les lamantins vont boire à la source » -
Femme nue, femme noireVétue de ta couleur qui est vie, de ta forme qui est beautéJ’ai grandi à ton ombre ; la douceur de tes mains bandait mes yeuxEt voilà qu’au cœur de l’Eté et de Midi,Je te découvre, Terre promise, du haut d’un haut col calcinéEt ta beauté me foudroie en plein cœur, comme l’éclair d’un aigleFemme nue, femme obscureFruit mûr à la chair ferme, sombres extases du vin noir, bouche qui fais lyrique ma boucheSavane aux horizons purs, savane qui frémis aux caresses ferventes du Vent d’EstTamtam sculpté, tamtam tendu qui gronde sous les doigts du vainqueurTa voix grave de contralto est le chant spirituel de l’AiméeFemme noire, femme obscureHuile que ne ride nul souffle, huile calme aux flancs de l’athlète, aux flancs des princes du MaliGazelle aux attaches célestes, les perles sont étoiles sur la nuit de ta peau.Délices des jeux de l’Esprit, les reflets de l’or rongent ta peau qui se moireA l’ombre de ta chevelure, s’éclaire mon angoisse aux soleils prochains de tes yeux.Femme nue, femme noireJe chante ta beauté qui passe, forme que je fixe dans l’EternelAvant que le destin jaloux ne te réduise en cendres pour nourrir les racines de la vie.
Léopold Sédar Senghor — « Femme noire » -
Masques ! O Masques !Masque noir masque rouge, vous masques blanc-et-noirMasques aux quatre points où souffle l’EspritJe vous salue dans le silence !Et pas toi le dernier, Ancêtre à tête de lion. Vous gardez ce lieu forclos à tout rire de femme, à tout sourire qui se fane, Vous distillez cet air d’éternité où je respire l’air de mes Pères.Masques aux visages sans masque, dépouillés de toute fossette comme de toute rideQui avez composé ce portrait, ce visage mien penché sur l’autel de papier blanc A votre image, écoutez-moi !Voici que meurt l’Afrique des empires – c’est l’agonie d’une princesse pitoyable Et aussi l’Europe à qui nous sommes liés par le nombril. […]
Léopold Sédar Senghor — « Masques » -
Voici des hommes noirs debout qui nous regardent et je vous souhaite de ressentir comme moi le saisissement d’être vus. Car le blanc a joui trois mille ans du privilège de voir sans qu’on le voie ; il était regard pur, la lumière de ses yeux tirait toute chose de l’ombre natale, la blancheur de sa peau c’était un regard encore, de la lumière condensée. L’homme blanc, blanc parce qu’il était homme, blanc comme le jour, blanc comme la vérité, blanc comme la vertu, éclairait la création comme une torche, dévoilait l’essence secrète et blanche des êtres. Aujourd’hui ces hommes noirs nous regardent et notre regard rentre dans nos yeux ; des torches noires, à leur tour, éclairent le monde et nos têtes blanches ne sont plus que de petits lampions balancés par le vent…
Jean-Paul Sartre — « Orphée noir » -
La Négritude est l’ensemble des valeurs culturelles du monde noir, telles qu’elles s’expriment dans la vie et les oeuvres des Noirs. Je dis que c’est là une réalité, un nœud de réalités.
Léopold Sédar Senghor — l’Etudiant noir -
Ça n’était pas encore ça. Une courte incursion dans la nouvelle en prose ne lui valut pas plus de gloire ou d’argent. Une soirée passée au café-concert fut son chemin de Damas, et, à partir de ce moment, sa lyre ne vibra plus qu’en vue de nos music-halls nationaux.
Alphonse Allais — Amours -
Nuñez avançait, du pas confiant de l’adolescent qui entre dans la vie. Toutes les vieilles histoires de la vallée ensevelie et du Pays des Aveugles lui étaient revenues en mémoire et comme un refrain dans ses pensées, il se répétait le proverbe : Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois.
Herbert George Wells — Le Pays des Aveugles