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Alphonse de Lamartine, Méditations poétiques : À Laurence

Méditations Poértiques Alphonse de Lamartine

Méditations poétiques est le premier recueil de poèmes d'Alphonse de Lamartine, publié en 1820. La première édition comportait 24 poèmes. D'autres éditions suivirent ; celle de 1849 comportait alors 41 poèmes. Ce recueil marque l'aboutissement d'un courant de poésie élégiaque caractérisé par de nombreuses allusions mythologiques, une tonalité exclamative, des interrogations ainsi qu'une abondance de périphrases poétiques.

Pour citer l'œuvre : Œuvres complètes de Lamartine Chez l’auteur, 1860, 1 (p. 511-514).

QUATRIÈME

MÉDITATION



À LAURENCE



Es-tu d’Europe ? es-tu d’Asie ?
Es-tu songe ? es-tu poésie ?
Es-tu nature, ou fantaisie,
Ou fantôme, ou réalité ?
Dans tes yeux l’Inde se décèle,
Sur tes cheveux le Nord ruisselle ;
Tout climat a son étincelle
Dans le disque de ta beauté !


Sœur des Psychés, ou fille d’Ève !
Quand ma jeunesse avait sa séve,
C’était sous ces traits que le rêve
M’incarnait en un mille amours ;
Je leur disais : « Je vous adore !
» Ne disparaissez pas encore !… »
Mais ils fuyaient avec l’aurore,
Et tu renais avec les jours !

Oh ! pourquoi, divine inconnue,
Pourquoi si tard es-tu venue,
Du ciel, de l’air ou de la nue,
Passer et luire devant moi ?
Du regard je t’aurais suivie !
Ô Dieu ! qui me rendra ma vie ?
Ma part de temps me fut ravie,
Puisque je vécus avant toi.

Jour à jour, d’ivresse en ivresse,
Tu m’aurais conduit comme en laisse,
Sans autre chaîne qu’une tresse,
Depuis l’aube jusqu’au trépas ;
Sur tout l’univers dispersée,
Et dans mille coupes versée,
Ma vie, immobile pensée,
N’eût été qu’un pas sur tes pas !

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Retour perdu vers l’impossible !
Le Temps, sous son aile inflexible,
A passé ma vie à son crible,
Ainsi qu’un rude moissonneur ;
Un peu de terre amoncelée
Dira bientôt dans la vallée :
« De ses jours la gerbe est foulée,
» Et voilà la part du glaneur ! »

Ces heures, en cercle enchaînées,
Qui dansaient au seuil des années,
Sortent du chœur découronnées,
Et leur aspect se rembrunit ;
La dernière vers moi s’avance,
Et du doigt me montre en silence
La couche où le sommeil commence
Sur un oreiller de granit.

Est-ce l’heure d’ouvrir son âme
À ces songes aux traits de femme,
Qui brûlent d’un poison de flamme
Les yeux d’abord, le cœur après,
Quand des jours l’espace et le nombre
Se borne au petit cercle d’ombre
Que décrit, sur un tertre sombre,
La flèche d’un jeune cyprès ?


Mais toi, si tu viens jeune encore,
Au bras de l’époux qui t’adore,
Voir une marguerite éclore
De ce gazon qui fleurit tard,
Dis, en marchant sur ma poussière :
« Celui qui dort sous cette pierre
» Conserve au ciel, dans sa paupière,
» Un rayon qui fut mon regard ! »




Commentaire de texte d'Alphonse de Lamartine : À Laurence

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L'auteur : Alphonse de Lamartine

Lamartine

Alphonse de Lamartine (1790-1869) est un poète, romancier, dramaturge français, ainsi qu'une personnalité politique qui participa à la Révolution de février 1848 et proclama la Deuxième République. Il est l'une des grandes figures du romantisme en France.

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