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Citations sur la mort - Page 6
Il y a 252 citations sur la mort.
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Il était las à mort. Il n'y avait qu'à voir son traîné de pied, le poids que le bâton pesait dans sa main.
Giono — Grand troupeau -
Dès qu’ils sont face à face, les deux chevaliers s’élancent l’un contre l’autre à bride abattue et ils se heurtent avec violence. Le choc des lances est tel qu’elles se plient en arc et volent en éclats. Ils prennent leurs épées et se portent de rudes coups qui endommagent les écus, les heaumes et les cottes de maille. Ils font de larges brèches dans le bois des écus, rompent leurs cottes de mailles et se blessent en maints endroits. Ils se rendent leurs coups avec rage comme s’ils respectaient un contrat. Mais souvent, en glissant, les épées atteignent la croupe des chevaux. Elles se rougissent de sang en entaillant le flanc des malheureuses bêtes qui ne tardent pas à tomber mortes toutes les deux. À peine ont-ils roulé à terre, que les deux combattants se ruent à pied l’un contre l’autre. S’ils s’étaient haïs à mort, ils ne se seraient pas battus plus sauvagement avec leurs épées. Ils se frappent à un rythme rapide que celui avec lequel le joueur le plus invétéré lance ses deniers en doublant sa mise chaque fois qu’il perd. (…) Alors il l’assaille de coups redoublés qui pleuvent dru autour de sa tête ; il le bouscule comme un ouragan, le presse et le contraint à céder du terrain. Il le fait reculer et le malmène si durement que l’autre est bien près d’en perdre le souffle et qu’il n’a guère la force de se défendre.
Chrétien de Troyes — Lancelot ou le Chevalier de la charrette -
Tout à coup il crut avoir été appelé par une voix terrible, et tressaillit comme lorsqu’au milieu d’un brûlant cauchemar nous sommes précipités d’un seul bond dans les profondeurs d’un abîme. Il ferma les yeux ; les rayons d’une vive lumière l’éblouissaient ; il voyait briller au sein des ténèbres une sphère rougeâtre dont le centre était occupé par un petit vieillard qui se tenait debout et dirigeait sur lui la clarté d’une lampe. Il ne l’avait entendu ni venir, ni parler, ni se mouvoir. Cette apparition eut quelque chose de magique. L’homme le plus intrépide, surpris ainsi dans son sommeil, aurait sans doute tremblé devant ce personnage extraordinaire qui semblait être sorti d’un sarcophage voisin. La singulière jeunesse qui animait les yeux immobiles de cette espèce de fantôme empêchait l’inconnu de croire à des effets surnaturels ; néanmoins, pendant le rapide intervalle qui sépara sa vie somnambulique de sa vie réelle, il demeura dans le doute philosophique recommandé par Descartes, et fut alors, malgré lui, sous la puissance de ces inexplicables hallucinations dont les mystères sont condamnés par notre fierté ou que notre science impuissante tâche en vain d’analyser.[…] Le moribond frémit en pressentant que ce vieux génie habitait une sphère étrangère au monde où il vivait seul, sans jouissances, parce qu’il n’avait plus d’illusion, sans douleur, parce qu’il ne connaissait plus de plaisirs. Le vieillard se tenait debout, immobile, inébranlable comme une étoile au milieu d’un nuage de lumière, ses yeux verts, pleins de je ne sais quelle malice calme, semblaient éclairer le monde moral comme sa lampe illuminait ce cabinet mystérieux. Tel fut le spectacle étrange qui surprit le jeune homme au moment où il ouvrit les yeux, après avoir été bercé par des pensées de mort et de fantasques images.
Honoré de Balzac — La peau de chagrin -
Du Cid à Polyeucte, le héros construit l’État […] ; de La Mort de Pompée à Pertharite, le héros subit l’État et les exigences de la raison d’État ; d’Œdipe à Suréna, le héros succombe sous les coups de la raison d’intérêt, de la déraison d’État, de la passion d’État.
id. — p. 559 -
Du Cid à Polyeucte, l’ordre héroïque et l’ordre politique se construisent simultanément. De La Mort de Pompée à Pertharite, toutes les valeurs de la nature et de l’héroïsme sont soumises à une véritable subversion politique : le tragique prend pour forme le désordre ou la confusion des ordres. D’Œdipe à Suréna, le héros quitte lentement la scène de la tragédie qui est envahie par l’État .
M. Prigent — Le héros et l’État dans la tragédie de Pierre Corneille -
L’enfant partit avec l’ange et le chien suivit derrière. Cette phrase convient merveilleusement à François d’Assise. On sait de lui peu de choses et c’est tant mieux. Ce qu’on sait de quelqu’un empêche de le connaître. Ce qu’on en dit, en croyant savoir ce qu’on dit, rend difficile de le voir. On dit par exemple : Saint-François-d’Assise. On le dit en somnambule, sans sortir du sommeil de la langue. On ne dit pas, on laisse dire. On laisse les mots venir, ils viennent dans un ordre qui n’est pas le nôtre, qui est l’ordre du mensonge, de la mort, de la vie en société. Très peu de vraie paroles s’échangent chaque jour, vraiment très peu. Peut-être ne tombe-t-on amoureux que pour enfin commencer à parler. Peut-être n’ouvre-t-on un livre que pour enfin commencer à entendre. L’enfant partit avec l’ange et le chien suivit derrière. Dans cette phrase vous ne voyez ni l’ange ni l’enfant. Vous voyez le chien seulement, vous devinez son humeur joyeuse, vous le regardez suivre les deux invisibles : l’enfant – rendu invisible par son insouciance -, l’ange – rendu invisible par sa simplicité. Le chien, oui, on le voit. Derrière. À la traîne. Il suit les deux autres. Il les suit à la trace et parfois il flâne, il s’égare dans un pré, il se fige devant une poule d’eau ou un renard, puis en deux bonds il rejoint les autres, il recolle aux basques de l’enfant et de l’ange. Vagabond, folâtre. L’enfant et l’ange sont sur la même ligne. Peut-être l’enfant tient-il la main de l’ange, pour le conduire, pour que l’ange ne soit pas trop gêné, lui qui va dans le monde visible comme un aveugle en plein jour. Et l’enfant chantonne, raconte ce qui lui passe par la tête, et l’ange sourit, acquiesce – et le chien toujours derrière ces deux-là, tantôt à droite, tantôt à gauche. Ce chien est dans la Bible. Il n’y a pas beaucoup de chiens dans la Bible. Il y a des baleines, des brebis, des oiseaux et des serpents, mais très peu de chiens. Vous ne connaissez même que celui-là, traînant les chemins, suivant ses deux maîtres : l’enfant et l’ange, le rire et le silence, le jeu et la grâce. Chien François d’Assise.
Christian Bobin — Le Très-Bas -
Il ignore même s'il a vraiment aimé ce grand garçon mince, aux muscles un peu mous, mais subitement coincés dans la colère et la passion, ces yeux troubles sous des cils de femme. Il l'imagine mort, dissous, sans pouvoir se persuader que ce feu sombre est pour toujours éteint.
Marguerite Yourcenar — Quoi ? L'Éternité -
[Gowan Stevens] se bourre d'alcool comme un régiment de gentlemen, démolit sa bagnole, se ressoûle à mort et tombe dans les pommes.
Albert Camus — Requiem -
Les mots « interdiction a priori » m'ont impressionné. Je songe aux lumières rouges et aux contraventions. Mais la contravention, ici, c'est la mort. Je déteste surtout « a priori ». J'ai l'impression d'être personnellement visé.
Antoine de Saint-Exupéry — Pilote de guerre -
Nous sommes entre nous, mon vieux. Et si Romain était encore là, il se moquerait de vous. Quand j’étais jeune, il n’y avait que deux choses amusantes et assez proches l’une de l’autre pour se haïr à mort et pour se comprendre à demi-mot : le fascisme et le communisme. Ils se sont compris d’ailleurs autant qu’ils se sont haïs, et il n’y a eu que les imbéciles pour pousser des cris d’orfraie à la signature du pacte germano-soviétique.
Jean d’Ormesson — Voyez comme on danse -
Ne dites pas : mourir ; dites : naître. Croyez.On voit ce que je vois et ce que vous voyez ;On est l’homme mauvais que je suis, que vous êtes ;On se rue aux plaisirs, aux tourbillons, aux fêtes ;On tâche d’oublier le bas, la fin, l’écueil,La sombre égalité du mal et du cercueil ;Quoique le plus petit vaille le plus prospère ;Car tous les hommes sont les fils du même père ;Ils sont la même larme et sortent du même œil.On vit, usant ses jours à se remplir d’orgueil ;On marche, on court, on rêve, on souffre, on penche, on tombe,On monte. Quelle est donc cette aube ? C’est la tombe.Où suis-je ? Dans la mort. Viens ! Un vent inconnuVous jette au seuil des cieux. On tremble ; on se voit nu,Impur, hideux, noué des mille nœuds funèbresDe ses torts, de ses maux honteux, de ses ténèbres ;Et soudain on entend quelqu’un dans l’infiniQui chante, et par quelqu’un on sent qu’on est béni,Sans voir la main d’où tombe à notre âme méchanteL’amour, et sans savoir quelle est la voix qui chante.On arrive homme, deuil, glaçon, neige ; on se sentFondre et vivre ; et, d’extase et d’azur s’emplissant,Tout notre être frémit de la défaite étrangeDu monstre qui devient dans la lumière un ange.
Victor Hugo — Ce qu’est la mort -
Quand cet excellent homme est mort, le mois dernier, Natacha a vécu une semaine d'insomnie. Je l'ai guérie avec un enregistrement du Beau Danube. Aux premières notes, elle tombe dans les bras de Morphée. C'est radical.
Michel Déon — Taisez-vous… j'entends venir un ange -
Le Vieillard et ses enfantsToute puissance est faible, à moins que d'être unie :Écoutez là-dessus l'esclave de Phrygie.Si j'ajoute du mien à son invention,C'est pour peindre nos mœurs, et non point par envie ;Je suis trop au-dessous de cette ambition.Phèdre enchérit souvent par un motif de gloire ;Pour moi, de tels pensers me seraient malséants.Mais venons à la fable ou plutôt à l'histoireDe celui qui tâcha d'unir tous ses enfants.Un vieillard prêt d'aller où la mort l'appelait :« Mes chers enfants, dit-il (à ses fils il parlait),Voyez si vous romprez ces dards* liés ensemble ; (*lances, flèches)Je vous expliquerai le nœud qui les assemble. »L'aîné les ayant pris et fait tous ses efforts,Les rendit, en disant : « Je le donne aux plus forts. »Un second lui succède, et se met en posture ;Mais en vain. Un cadet tente aussi l'aventure.Tous perdirent leur temps ; le faisceau résista :De ces dards joints ensemble un seul ne s'éclata.« Faibles gens ! dit le père, il faut que je vous montreCe que ma force peut en semblable rencontre. »On crut qu'il se moquait ; on sourit, mais à tort :Il sépare les dards, et les rompt sans effort.« Vous voyez, reprit-il, l'effet de la concorde :Soyez joints, mes enfants, que l'amour vous accorde. »Tant que dura son mal, il n'eut autre discours.Enfin, se sentant prêt de terminer ses jours :« Mes chers enfants, dit-il, je vais où sont nos pères.Adieu, promettez-moi de vivre comme frères ;Que j'obtienne de vous cette grâce en mourant. »Chacun de ses trois fils l'en assure en pleurant.Il prend à tous les mains ; il meurt ; et les trois frèresTrouvent un bien fort grand, mais fort mêlé d'affaires.Un créancier saisit, un voisin fait procès :D'abord notre trio s'en tire avec succès.Leur amitié fut courte autant qu'elle était rare.Le sang les avait joints ; l'intérêt les sépare :L'ambition, l'envie, avec les consultants,Dans la succession entrent en même temps.On en vient au partage, on conteste, on chicane :Le juge sur cent points tour à tour les condamne.Créanciers et voisins reviennent aussitôt,Ceux-là sur une erreur, ceux-ci sur un défaut.Les frères désunis sont tous d'avis contraire :L'un veut s'accommoder, l'autre n'en veut rien faire.Tous perdirent leur bien, et voulurent trop tardProfiter de ces dards unis et pris à part.
Jean de La Fontaine — Fables -
[…] Ennemonde n'est pas un poids mort, c'est un poids vivant de ses regards (toujours si beaux !), de sa chaleur, de son intelligence précise, dont elle a donné tout le long du jour des quantités de preuves et qu'on sent en train de s'intéresser au fait qu'ils sont trois hommes, dont deux de ses fils, à la tripoter. Cet ensemble fait beaucoup plus de cent trente-cinq à cent quarante kilos. Enfin ils l'étendent sur le lit de sangles
Jean Giono — Ennemonde et autres caractères -
On prétend que c'est la chose la moins mauvaise que la faiblesse humaine ait pu inventer... Bien inhumaine, pourtant, et inutile, à mon avis ! Plusieurs peuples, en cela moins « barbares » que les Grecs et les Romains, qui les appellent pourtant ainsi, estiment qu'il est horrible et cruel de faire souffrir et démembrer un homme, dont la faute n'est pas avérée. Que peut-il contre cette ignorance ? N'êtes-vous pas injustes, sous prétexte de ne pas le tuer sans raison, de lui faire subir quelque chose de pire encore que la mort ? Et pour preuve qu'il en est bien ainsi, voyez comment bien des fois il préfère mourir sans raison que de passer par cette épreuve. Elle est plus pénible que le supplice final lui-même, et bien souvent, tellement insupportable, qu'elle le devance et même l'exécute.Je ne sais d'où je tiens cette histoire, mais elle reflète bien la conscience dont sait faire preuve notre justice. Devant le Général d'armée, grand justicier, une villageoise accusait un soldat d'avoir enlevé à ses jeunes enfants ce peu de bouillie qui lui restait pour les nourrir, l'armée ayant tout ravagé. Mais pas de preuves !... Le Général somma la femme de bien considérer ce qu'elle disait, car elle devrait répondre de son accusation si elle mentait. Mais comme elle persistait, il fit alors ouvrir le ventre du soldat pour connaître la vérité. Et la femme se trouva avoir raison. Voilà bien une condamnation instructive.
Michel de Montaigne — Les essais -
Si calme, si gentil! comme un ami qu’un cauchemar vous a montré étendu mort et sanglant et qu’on retrouve au réveil, souriant, futile, animé, si inconscient de la menace.
Gracq — Un Beau ténébreux -
Un soir, étant entré au casino, le narrateur du présent récit entend, avec surprise, un bruit singulier, celui d'un craquement ou d'un claquement de doigts qui se brisent. Il s'approche de la table d'où lui parvient ce bruit. Zweig réussit merveilleusement bien à nous rendre l'atmosphère fébrile qui règne dans le casino et la tension particulière du joueur qu'il observe.C'étaient des mains d'une beauté très rare, extraordinairement longues, extraordinairement minces, et pourtant traversées de muscles extrêmement rigides - des mains très blanches, avec, au bout, des ongles pâles, aux dessus nacrés et délicatement arrondis. Je les ai regardées toute la soirée, oui, je les ai regardées avec une surprise toujours nouvelle, ces mains extraordinaires, vraiment uniques ; mais ce qui d'abord me surprit d'une manière si terrifiante, c'était leur fièvre, leur expression follement passionnée, cette façon convulsive de s'étreindre et de lutter entre elles. Ici, je le compris tout de suite, c'était un homme débordant de force qui concentrait toute sa passion dans les extrémités de ses doigts, pour qu'elle ne fît pas exploser son être tout entier. Et maintenant..., à la seconde où la boule tomba dans le trou avec un bruit sec et mat et où le croupier cria le numéro ..., à cette seconde les deux mains se séparèrent soudain l'une de l'autre, comme deux animaux frappés à mort d'une même balle.
Stefan Zweig — vingt-quatre heures dans la vie d’une femme -
THÉSÉEEh bien ! vous triomphez, et mon fils est sans vie !Ah ! que j’ai lieu de craindre, et qu’un cruel soupçon,L’excusant dans mon cœur, m’alarme avec raison !Mais, madame, il est mort, prenez votre victime ;Jouissez de sa perte, injuste ou légitime :Je consens que mes yeux soient toujours abusés.Je le crois criminel, puisque vous l’accusez.Son trépas à mes pleurs offre assez de matièresSans que j’aille chercher d’odieuses lumières,Qui, ne pouvant le rendre à ma juste douleur,Peut-être ne feraient qu’accroître mon malheur.Laissez-moi, loin de vous, et loin de ce rivage,De mon fils déchiré fuir la sanglante image.Confus, persécuté d’un mortel souvenir,De l’univers entier je voudrais me bannir.Tout semble s’élever contre mon injustice ;L’éclat de mon nom même augmente mon supplice :Moins connu des mortels, je me cacherais mieux.Je hais jusques aux soins dont m’honorent les dieux ;Et je m’en vais pleurer leurs faveurs meurtrières,Sans plus les fatiguer d’inutiles prières.Quoi qu’ils fissent pour moi, leur funeste bontéNe me saurait payer de ce qu’ils m’ont ôté.PHÈDRENon, Thésée, il faut rompre un injuste silence ;Il faut à votre fils rendre son innocence :Il n’était point coupable.THÉSÉEAh ! père infortuné !Et c’est sur votre foi que je l’ai condamné !Cruelle ! pensez-vous être assez excusée…PHÈDRELes moments me sont chers ; écoutez-moi, ThéséeC’est moi qui sur ce fils, chaste et respectueux,Osai jeter un œil profane, incestueux.Le ciel mit dans mon sein une flamme funeste :La détestable Œnone a conduit tout le reste.Elle a craint qu’Hippolyte, instruit de ma fureur,Ne découvrît un feu qui lui faisait horreur :La perfide, abusant de ma faiblesse extrême,S’est hâtée à vos yeux de l’accuser lui-même.Elle s’en est punie, et fuyant mon courroux,A cherché dans les flots un supplice trop doux.Le fer aurait déjà tranché ma destinée ;Mais je laissais gémir la vertu soupçonnée :J’ai voulu, devant vous exposant mes remords,Par un chemin plus lent descendre chez les morts.J’ai pris, j’ai fait couler dans mes brûlantes veinesUn poison que Médée apporta dans Athènes.Déjà jusqu’à mon cœur le venin parvenuDans ce cœur expirant jette un froid inconnu ;Déjà je ne vois plus qu’à travers un nuageEt le ciel et l’époux que ma présence outrage ;Et la mort à mes yeux dérobant la clarté,Rend au jour qu’ils souillaient toute sa pureté.PANOPEElle expire, seigneur !THÉSÉED’une action si noireQue ne peut avec elle expirer la mémoire !Allons, de mon erreur, hélas ! trop éclaircis,Mêler nos pleurs au sang de mon malheureux fils !Allons de ce cher fils embrasser ce qui reste,Expier la fureur d’un vœu que je déteste :Rendons-lui les honneurs qu’il a trop mérités ;Et, pour mieux apaiser ses mânes irrités,Que, malgré les complots d’une injuste famille,Son amante aujourd’hui me tienne lieu de fille !
Racine — Phèdre -
On serait venu lui annoncer que madame Numance épuisée d'amour était devenue folle ou à l'article de la mort que son premier sentiment aurait été une joie délirante.
Jean Giono — Les Âmes fortes -
Il pouvait encore voir distinctement une petite image colorée dans la coquille de noix de sa tête la main blanche émaciée qui avait poussé vers lui la boîte sur la table d'acajou. Son père à l'article de la mort lui disant, de l'amertume dans la voix « Tu la vendras, Bruno, pauvre niais, et tu te feras royalement voler. »
Iris Murdoch — Le Rêve de Bruno -
Cet homme, je l'ai détesté à un point. et pourtant, comme vous le savez sans doute, dès que j'ai appris qu'il était à l'article de la mort et qu'il voulait me revoir une dernière fois.
Yukio Mishima — La Musique -
On faisait tous les jours prendre des nouvelles de tant de gens à l'article de la mort, et dont les uns s'étaient rétablis tandis que d'autres avaient « succombé ».
Marcel Proust — Le Temps retrouvé -
L’affaire est entendue avec le tourisme de masse et la standardisation qu’il implique. Que le pourtour de la mer Méditerranée, par exemple, lieu de rendez-vous plébiscité par les touristes de la terre entière, agonise lentement, que sa muséification soit presque achevée, que Venise soit à l’article de la mort, que Barcelone cherche à réduire les bataillons de touristes, tout ceci est une évidence sur laquelle Christin ne s’attarde pas.Jean-Pierre Tuquoi, Qu’il soit « éthique » ou de masse, le tourisme épuise le monde sur Reporterre.net
Jean-Pierre Tuquoi — Qu’il soit « éthique » ou de masse -
La vie frissonne de lumière sur fond de mort. Philostrate peignit un crâne de mort. C'est, à l'opposé des Vanités du monde vivant, un Carpe diem funèbre il s'agit de cueillir la fleur de ce qui va périr tout à la fois dans…
Pascal Quignard — Le sexe et l'effroi -
Au voleur ! au voleur ! à l’assassin ! au meurtrier ! Justice, juste ciel ! Je suis perdu, je suis assassiné ; on m’a coupé la gorge : on m’a dérobé mon argent. Qui peut-ce être ? Qu’est-il devenu ? Où est-il ? Où se cache-t-il ? Que ferai-je pour le trouver ? Où courir ? Où ne pas courir ? N’est-il point là ? n’est-il point ici ? Qui est-ce ? Arrête. (À lui-même, se prenant par le bras.) Rends-moi mon argent, coquin… Ah ! c’est moi ! Mon esprit est troublé, et j’ignore où je suis, qui je suis, et ce que je fais. Hélas ! mon pauvre argent ! mon pauvre argent ! mon cher ami ! on m’a privé de toi ; et puisque tu m’es enlevé, j’ai perdu mon support, ma consolation, ma joie : tout est fini pour moi, et je n’ai plus que faire au monde. Sans toi, il m’est impossible de vivre. C’en est fait ; je n’en puis plus ; je me meurs ; je suis mort ; je suis enterré. N’y a-t-il personne qui veuille me ressusciter, en me rendant mon cher argent, ou en m’apprenant qui l’a pris. Euh ! que dites-vous ? Ce n’est personne. Il faut, qui que ce soit qui ait fait le coup, qu’avec beaucoup de soin on ait épié l’heure ; et l’on a choisi justement le temps que je parlais à mon traître de fils. Sortons. Je veux aller quérir la justice, et faire donner la question à toute ma maison ; à servantes, à valets, à fils, à fille, et à moi aussi. Que de gens assemblés ! Je ne jette mes regards sur personne qui ne me donne des soupçons, et tout me semble mon voleur. Hé ! de quoi est-ce qu’on parle là ? de celui qui m’a dérobé ? Quel bruit fait-on là-haut ? Est-ce mon voleur qui y est ? De grâce, si l’on sait des nouvelles de mon voleur, je supplie que l’on m’en dise. N’est-il point caché là parmi vous ? Ils me regardent tous, et se mettent à rire. Vous verrez qu’ils ont part, sans doute, au vol que l’on m’a fait. Allons, vite, des commissaires, des archers, des prévôts, des juges, des gênes, des potences, et des bourreaux ! Je veux faire pendre tout le monde ; et si je ne retrouve mon argent, je me pendrai moi-même après.
Molière — L’Avare -
JULIETTE. – Ô Roméo ! Roméo ! pourquoi es-tu Roméo ? Renie ton père et abdique ton nom ; ou, si tu ne le veux pas, jure de m’aimer, et je ne serai plus une Capulet.ROMÉO, à part. – Dois-je l’écouter encore ou lui répondre ?JULIETTE. – Ton nom seul est mon ennemi. Tu n’es pas un Montague3, tu es toi-même. Qu’est-ce qu’un Montague ? Ce n’est ni une main, ni un pied, ni un bras, ni un visage, ni rien qui fasse partie d’un homme… Oh ! sois quelque autre nom ! Qu’y a-t-il dans un nom ? Ce que nous appelons une rose embaumerait autant sous un autre nom. Ainsi, quand Roméo ne s’appellerait plus Roméo, il conserverait encore les chères perfections qu’il possède… Roméo, renonce à ton nom ; et, à la place de ce nom qui ne fait pas partie de toi, prends-moi tout entière.ROMÉO. – Je te prends au mot ! Appelle-moi seulement ton amour et je reçois un nouveau baptême : désormais je ne suis plus Roméo.JULIETTE. – Quel homme es-tu, toi qui, ainsi caché par la nuit, viens de te heurter à mon secret ?ROMÉO. – Je ne sais par quel nom t’indiquer qui je suis. Mon nom, sainte chérie, m’est odieux à moi-même, parce qu’il est pour toi un ennemi : si je l’avais écrit là, j’en déchirerais les lettres.JULIETTE. – Mon oreille n’a pas encore aspiré cent paroles proférées5 par cette voix, et pourtant j’en reconnais le son. N’es-tu pas Roméo et un Montague ?ROMÉO. – Ni l’un ni l’autre, belle vierge, si tu détestes l’un et l’autre.JULIETTE. — Comment es-tu arrivé jusqu’ici, dis-le moi, et qu’y viens-tu faire? Les murs du verger sont élevés et difficiles à escalader. Songe qui tu es; ces lieux sont pour toi la mort si quelqu’un de mes parents vient à t’y rencontrer.ROMÉO. — Des ailes légères de l’amour j’ai volé sur le haut de ces murailles; car des barrières de pierre ne peuvent exclure l’amour; et tout ce que l’amour peut faire, l’amour ose le tenter: tes parents ne sont donc point pour moi un obstacle.JULIETTE. — S’ils te voient, ils te tueront.
William Shakespeare — Roméo et Juliette -
ŒDIPE — […] Est-il homme plus abhorré des dieux ? Étranger, citoyen, personne ne peut plus me recevoir chez lui, m'adresser la parole, chacun me doit écarter de son seuil. Bien plus, c'est moi-même qui me trouve aujourd'hui avoir lancé contre moi-même les imprécations que tu sais. A l'épouse du mort j'inflige une souillure, quand je la prends entre ces bras qui ont fait périr Laïos ! Suis-je donc pas un criminel ? suis-je pas tout impureté ? puisqu'il faut que je m'exile, et qu'exilé je renonce à revoir les miens, à fouler de mon pied le sol de ma patrie ; sinon, je devrais tout ensemble entrer dans le lit de ma mère et devenir l'assassin de mon père, ce Polybe qui m'a engendré et nourri. Est-ce donc pas un dieu cruel qui m'a réservé ce destin ? On peut le dire, et sans erreur.
Sophocle — Œdipe-roi -
T'aurais quand même pasVoulu qu'y vive comme un conSur le canapéLoin des gouttières des pigeonsC'était un aventurierT'aurais pas voulu qu'on l'attacheY t'aurais miaulé: "Mort aux vaches!"
Renaud Séchan — Le Petit chat est mort -
Le Concierge. — Dame ! monsieur le juge, je ne peux pas nier, mais c’est de la prison honorable.Le Juge. — Comment ?Le Concierge. — Oui, monsieur le juge, la première fois, j’étais alors valet de chambre, c’est pour avoir crié, le premier mai : « Vive la grève ! »Le Juge. — Vous étiez valet de chambre chez qui ?Le Concierge. — Chez M. Jaurès.Le Juge. — Ah ! bon, et votre deuxième condamnation ?Le Concierge. — C’est pour avoir crié sur le seuil de Sainte-Clotilde : « Mort aux vaches ! »
Maurice Blanc et Francis de Croisset — Arsène Lupin -
Non, certes, je ne méconnais pas les services modestes et précieux que rendent journellement les gardiens de la paix à la vaillante population de Paris. Et je n’aurais pas consenti à vous présenter, Messieurs, la défense de Crainquebille, si j’avais vu en lui l’insulteur d’un ancien soldat. On accuse mon client d’avoir dit : “Mort aux vaches!“. Le sens de cette phrase n’est pas douteux. Si vous feuilletez le dictionnaire de la langue verte, vous y lirez : “Vachard, paresseux, fainéant; qui s’étend paresseusement comme une vache, au lieu de travailler”. - Vache, qui se vend à la police ; mouchard. “Mort aux vaches!” se dit dans un certain monde. Mais toute la question est celle-ci : Comment Crainquebille l’a-t-il dit? Et même, l’a-t-il dit? Permettez-moi, Messieurs, d’en douter. Je ne soupçonne l’agent Matra d’aucune mauvaise pensée. Mais il accomplit, comme nous l’avons dit, une tâche pénible. Il est parfois fatigué, excédé, surmené. Dans ces conditions il peut avoir été la victime d’une sorte d’hallucination de l’ouïe. Et quand il vient vous dire, Messieurs, que le docteur David Matthieu, officier de la Légion d’honneur, médecin en chef de l’hôpital Ambroise-Paré, un prince de la science et un homme du monde, a crié : ” Mort aux vaches!”, nous sommes bien forcés de reconnaître que Matra est en proie à la maladie de l’obsession, et, si le mot n’est pas trop fort, au délire de la persécution. Et alors même que Crainquebille aurait crié: “Mort aux vaches!“, il resterait à savoir si ce mot a, dans sa bouche, le caractère d’un délit. Crainquebille est l’enfant naturel d’une marchande ambulante, perdue d’inconduite et de boisson, il est né alcoolique. Vous le voyez ici abruti par soixante ans de misère. Messieurs, vous direz qu’il est irresponsable.
Anatole France — L’Affaire Crainquebille -
Au marché de Briv'-la-Gaillarde,A propos de bottes d'oignons,Quelques douzaines de gaillardesSe crêpaient un jour le chignon.A pied, à cheval, en voiture,Les gendarmes, mal inspirés,Vinrent pour tenter l'aventureD'interrompre l'échauffouré'.[…]En voyant ces braves pandoresÊtre à deux doigts de succomber,Moi, j'bichais car je les adoreSous la forme de macchabées.De la mansarde où je résideJ'excitais les farouches brasDes mégères gendarmicidesEn criant :"Hip, hip, hip, hourra !"Frénétiqu' l'une d'elle attacheLe vieux maréchal des logisEt lui fait crier : "Mort aux vaches,Mort aux lois, vive l'anarchie !"
Georges Brassens — Hécatombe -
Moi qui était son homme et pas une peau de vacheMoi qui dans ma jeunesse pris des principes d'apacheSortis mon 6.35 et d'une balle en plein cœurJe l'étendis raide mort et fus serré sur l'heureMort aux vaches, mort aux condésVive les enfants d'Cayenne, à bas ceux d'la sûreté
Parabellum — Cayenne -
ROMÉO – Ah ! chère Juliette, pourquoi es-tu si belle encore ? Dois-je croire que le spectre de la Mort est amoureux et que l’affreux monstre décharné te garde ici dans les ténèbres pour te posséder ?... Horreur ! Je veux rester près de toi, et ne plus sortir de ce sinistre palais de la nuit ; ici, ici, je veux rester avec ta chambrière, la vermine ! Oh ! c’est ici que je veux fixer mon éternelle demeure et soustraire au joug des étoiles ennemies cette chair lasse du monde...
William Shakespeare — Roméo et Juliette -
Il y a longtemps que les cimetières, dans l'ensemble, ne nous font plus peur, qu'ils n'évoquent plus la mort que comme une formalité administrative ou, le cas échéant, une occasion de réjouissances familiales.
Jean Rolin — L'Organisation -
Rien n'était si beau, si leste, si brillant, si bien ordonné que les deux armées. Les trompettes, les fifres, les hautbois, les tambours, les canons, formaient une harmonie telle qu'il n'y en eut jamais en enfer. Les canons renversèrent d'abord à peu près six mille hommes de chaque côté ; ensuite la mousqueterie ôta du meilleur des mondes environ neuf à dix mille coquins qui en infectaient la surface. La baïonnette fut aussi la raison suffisante de la mort de quelques milliers d'hommes. Le tout pouvait bien se monter à une trentaine de mille âmes. Candide, qui tremblait comme un philosophe, se cacha du mieux qu'il put pendant cette boucherie héroïque.
Voltaire — Candide -
Toutefois, au-delà du village mort, j’aperçus dans le lointain une sorte de brouillard gris qui recouvrait les hauteurs comme un tapis. Depuis la veille, je m’étais remis à penser à ce berger planteur d’arbres. « Dix mille chênes, me disais-je, occupent vraiment un très large espace. »
Jean Giono — L’homme qui plantait des arbres -
Avant tout, il y a eu rencontre.Isabelle Leblanc et moi, assis chez Isabelle, dans la cuisine, autour d’une bouteille de champagne, parce que cela faisait trop longtemps que l’on ne s’était pas parlés. Pas vus. Pas regardés.Il y avait donc, avant tout, une fille un peu écoeurée, assise en face d’un type un peu perdu. Entre les deux (juste à côté de la bouteille maintenant à moitié vide), la soif des idées. C’est-à-dire le désir de se sortir, de s’extraire d’un monde qui cherchait trop à nous faire croire que l’intelligence était une perte de temps, la pensée un luxe, les idées une fausse route.Il y avait donc deux personnes, l’une en face de l’autre, qui avaient elles aussi une soif insatiable de l’infini, cette soif que les chiens de Lautréamont portent au fond de leurs gosiers.Puis il y a eut des comédiens et des concepteurs, des amis, des gens que nous aimions, qui nous bouleversaient, assis autour d’une table. Une question fut posée : « Nous voici arrivés à notre trentaine. De quoi avons-nous peur ? » Réfléchir autour de cette question, tenter, chacun son tour, d’élaborer un discours, une pensée pour nommer ce qui se trame au fond de notre âme, nous a permis de mettre le doigt sur certaines choses essentielles. Invariablement, nous avons parlé de l’amour, de la joie, de la peine, de la douleur, de la mort. Aussi, nous avons réalisé que, si nous avions peur d’aimer, nous n’avions pas peur de mourir, car la peur, en ce qui concerne la mort, tournait autour de nos parents, en ce sens que nous n’avions pas tant peur de notre propre mort que de la mort de ceux qui nous ont conduits à la vie, et dans la vie ; cela ne concernait pas uniquement nos parents naturel, mais aussi nos parents dans la création.
Wajdi Mouawad — Littoral – Éditions Actes Sud 1999 -
Il parut alors une beauté à la cour, qui attira les yeux de tout le monde, et l'on doit croire que c'était une beauté parfaite, puisqu'elle donna de l'admiration dans un lieu où l'on était si accoutumé à voir de belles personnes. Elle était de la même maison que le vidame de Chartres, et une des plus grandes héritières de France. Son père était mort jeune, et l'avait laissée sous la conduite de madame de Chartres, sa femme, dont le bien, la vertu et le mérite étaient extraordinaires. Après avoir perdu son mari, elle avait passé plusieurs années sans revenir à la cour. Pendant cette absence, elle avait donné ses soins à l'éducation de sa fille ; mais elle ne travailla pas seulement à cultiver son esprit et sa beauté ; elle songea aussi à lui donner de la vertu et à la lui rendre aimable. La plupart des mères s'imaginent qu'il suffit de ne parler jamais de galanterie devant les jeunes personnes pour les en éloigner. Madame de Chartres avait une opinion opposée ; elle faisait souvent à sa fille des peintures de l'amour ; elle lui montrait ce qu'il a d'agréable pour la persuader plus aisément sur ce qu'elle lui en apprenait de dangereux ; elle lui contait le peu de sincérité des hommes, leurs tromperies et leur infidélité, les malheurs domestiques où plongent les engagements ; et elle lui faisait voir, d'un autre côté, quelle tranquillité suivait la vie d'une honnête femme, et combien la vertu donnait d'éclat et d'élévation à une personne qui avait de la beauté et de la naissance. Mais elle lui faisait voir aussi combien il était difficile de conserver cette vertu, que par une extrême défiance de soi-même, et par un grand soin de s'attacher à ce qui seul peut faire le bonheur d'une femme, qui est d'aimer son mari et d'en être aimée.Cette héritière était alors un des grands partis qu'il y eût en France ; et quoiqu'elle fût dans une extrême jeunesse, l'on avait déjà proposé plusieurs mariages. Madame de Chartres, qui était extrêmement glorieuse, ne trouvait presque rien digne de sa fille ; la voyant dans sa seizième année, elle voulut la mener à la cour. Lorsqu'elle arriva, le vidame alla au-devant d'elle ; il fut surpris de la grande beauté de mademoiselle de Chartres, et il en fut surpris avec raison. La blancheur de son teint et ses cheveux blonds lui donnaient un éclat que l'on n'a jamais vu qu'à elle ; tous ses traits étaient réguliers, et son visage et sa personne étaient pleins de grâce et de charmes.
Mme de La Fayette — La Princesse de Clèves -
La plupart râla dans les défilés nocturnes,S'enivrant du bonheur de voir couler son sang,Ô Mort le seul baiser aux bouches taciturnes !
Stéphane Mallarmé — Le guignon -
La duchesse de Guise, presque évanouie ; le duc de Guise, suivi de Saint-Paul, et de plusieurs hommes.LE DUC DE GUISE, après un coup d’œil rapide. – Il sera descendu par cette fenêtre... Mais Mayenne était dans la rue avec vingt hommes, et le bruit des armes... Va, Saint-Paul ; vous, suivez-le. Va, et tu me diras si tout est fini. (Heurtant du pied la duchesse.) Ah ! c’est vous, madame. Eh bien, je vous ai ménagé un tête-à-tête.LA DUCHESSE DE GUISE. – Monsieur le duc, vous l’avez fait assassiner !LE DUC DE GUISE. – Laissez-moi, madame ; laissez-moi.LA DUCHESSE DE GUISE, à genoux, le prenant à bras-le-corps. – Non, je m’attache à vous.LE DUC DE GUISE. – Laissez-moi, vous dis-je !... ou bien, oui, oui. Venez ! à la lueur des torches, vous pourrez le revoir encore une fois. (Il la traîne jusqu’à la fenêtre.) Eh bien, Saint-Paul ?SAINT-PAUL, dans la rue. – Attendez ; il n’est pas tombé seul. Ah ! ah ! LE DUC DE GUISE. – Est-ce lui ? SAINT-PAUL. – Non, c’est le petit page. LA DUCHESSE DE GUISE. – Arthur ! Ah ! pauvre enfant ! LE DUC DE GUISE. – L’auraient-ils laissé fuir ?... Les misérables !... LA DUCHESSE DE GUISE, avec espoir. – Oh !... SAINT-PAUL. – Le voici. LE DUC DE GUISE. – Mort ? SAINT-PAUL. – Non, couvert de blessures, mais respirant encore. LA DUCHESSE DE GUISE. – Il respire ! On peut le sauver. Monsieur le duc, au nom du ciel... SAINT-PAUL. – Il faut qu’il ait quelque talisman contre le fer et contre le feu... LE DUC DE GUISE, jetant par la croisée le mouchoir de la duchesse de Guise. – Eh bien, serre-lui la gorge avec ce mouchoir ; la mort lui sera plus douce ; il est aux armes de la duchesse de Guise. LA DUCHESSE DE GUISE. – Ah ! (Elle tombe.) LE DUC DE GUISE, après avoir regardé un instant dans la rue. – Bien ! et maintenant que nous avons fini avec le valet, occupons-nous du maître.
Alexandre DUMAS — Henri III et sa cour