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Il y a 56 citations sur le bleu.
De la musique avant toute chose,Et pour cela préfère l’ImpairPlus vague et plus soluble dans l’air,Sans rien en lui qui pèse ou qui poseIl faut aussi que tu n’ailles pointChoisir tes mots sans quelque mépriseRien de plus cher que la chanson griseOù l’Indécis au Précis se joint.C’est des beaux yeux derrière des voilesC’est le grand jour tremblant de midi,C’est par un ciel d’automne attiédiLe bleu fouillis des claires étoiles !Car nous voulons la Nuance encor,Pas la Couleur, rien que la nuance !Oh! la nuance seule fianceLe rêve au rêve et la flûte au cor !Fuis du plus loin la Pointe assassine,L’Esprit cruel et le Rire impur,Qui font pleurer les yeux de l’AzurEt tout cet ail de basse cuisine !Prends l’éloquence et tords-lui son cou !Tu feras bien, en train d’énergie,De rendre un peu la Rime assagie.Si l’on n’y veille, elle ira jusqu’où ?Ô qui dira les torts de la Rime ?Quel enfant sourd ou quel nègre fouNous a forgé ce bijou d’un souQui sonne creux et faux sous la lime ?De la musique encore et toujours !Que ton vers soit la chose envoléeQu’on sent qui fuit d’une âme en alléeVers d’autres cieux à d’autres amours.Que ton vers soit la bonne aventureEparse au vent crispé du matinQui va fleurant la menthe et le thym…Et tout le reste est littérature. Verlaine — L’Art poétique
Au bout de la rue Guénégaud, lorsqu’on vient des quais, on trouve le passage du Pont-Neuf, une sorte de corridor étroit et sombre qui va de la rue Mazarine à la rue de Seine. Ce passage a trente pas de long et deux de large, au plus ; il est pavé de dalles jaunâtres, usées, descellées, suant toujours une humidité âcre ; le vitrage qui le couvre, coupé à angle droit, est noir de crasse. Par les beaux jours d’été, quand un lourd soleil brûle les rues, une clarté blanchâtre tombe des vitres sales et traîne misérablement dans le passage. Par les vilains jours d’hiver, par les matinées de brouillard, les vitres ne jettent que de la nuit sur les dalles gluantes, de la nuit salie et ignoble. À gauche, se creusent des boutiques obscures, basses, écrasées, laissant échapper des souffles froids de caveau. Il y a là des bouquinistes, des marchands de jouets d’enfant, des cartonniers, dont les étalages gris de poussière dorment vaguement dans l’ombre ; les vitrines, faites de petits carreaux, moirent étrangement les marchandises de reflets verdâtres ; au-delà, derrière les étalages, les boutiques pleines de ténèbres sont autant de trous lugubres dans lesquels s’agitent des formes bizarres. À droite, sur toute la longueur du passage, s’étend une muraille contre laquelle les boutiquiers d’en face ont plaqué d’étroites armoires ; des objets sans nom, des marchandises oubliées là depuis vingt ans s’y étalent le long de minces planches peintes d’une horrible couleur brune. Une marchande de bijoux faux s’est établie dans une des armoires ; elle y vend des bagues de quinze sous, délicatement posées sur un lit de velours bleu, au fond d’une boîte en acajou. Au-dessus du vitrage, la muraille monte, noire, grossièrement crépie, comme couverte d’une lèpre et toute couturée de cicatrices. Thérèse Raquin — Émile Zola
Il passa contre nous, ne s’interrompit pas de parler à sa voisine, et nous fit du coin de son œil bleu un petit signe en quelque sorte intérieur aux paupières et qui, n’intéressant pas les muscles de son visage, put passer parfaitement inaperçu de son interlocutrice ; mais, cherchant à compenser par l’intensité du sentiment le champ un peu étroit où il en circonscrivait l’expression, dans ce coin d’azur qui nous était affecté il fit pétiller tout l’entrain de la bonne grâce qui dépassa l’enjouement, frisa la malice ; Marcel Proust — Du côté de chez Swann
Tailleurs, cordonniers, forgerons, fabricants de fleurs artificielles, les artisans travaillaient sur le seuil de leurs échoppes, les femmes s'asseyaient devant leurs portes pour épouiller leurs enfants, laver leur linge, vider leurs poissons, tout en surveillant les bassines de tomates écrasées qu'elles exposaient au bleu lointain du ciel. Simone de Beauvoir — La force de l'âge
Depuis que j’écris ces pages, je me dis qu’il y a un moyen, justement, de lutter contre l’oubli. C’est d’aller dans certaines zones de Paris où vous n’êtes pas retourné depuis trente, quarante ans et d’y rester un après-midi, comme si vous faisiez le guet. Peut-être celles et ceux dont vous vous demandez ce qu’ils sont devenus surgiront au coin d‘une rue, ou dans l’allée d’un parc, ou sortiront de l’un des immeubles qui bordent ces impasses désertes que l’on nomme « square » ou « villa ». Ils vivent de leur vie secrète, et cela n’est possible pour eux que dans des endroits silencieux, loin du centre. Pourtant, les rares fois où j’ai cru reconnaître Dannie, c’était toujours dans la foule. Un soir, Gare de Lyon, quand je devais prendre un train, au milieu de la cohue des départs en vacances. Un samedi de fin d’après-midi, au carrefour du boulevard et de la Chaussée d’Antin dans le flot de ceux qui se pressaient aux portes des grands magasins. Mais, chaque fois, je m’étais trompé.Un matin d’hiver, il y a vingt ans, j’avais été convoqué au tribunal d’instance du treizième arrondissement, et vers onze heures, à la sortie du tribunal, j’étais sur le trottoir de la place d’Italie. Je n’étais pas revenu sur cette place depuis le printemps de 1964, une période où je fréquentais le quartier. Je me suis aperçu brusquement que je n’avais pas un sou en poche pour prendre un taxi ou le métro et rentrer chez moi. J’ai trouvé un distributeur de billets dans une petite rue derrière la mairie, mais après avoir composé le code une fiche est tombée à la place des billets. Il y était écrit : « Désolé. Vos droits sont insuffisants. » De nouveau, j’ai composé le code, et la même fiche est tombée avec la même inscription : « Désolé. Vos droits sont insuffisants. » J’ai fait le tour de la mairie et de nouveau j’étais sur le trottoir de la place d’Italie.Le destin voulait me retenir par ici et il ne fallait pas le contrarier. Peut-être ne parviendrais-je plus jamais à quitter le quartier, puisque mes droits étaient insuffisants. Je me sentais léger à cause du soleil et du ciel bleu de janvier. Les gratte-ciel n’existaient pas en 1964, mais ils se dissipaient peut à peu dans l’air limpide pour laisser place au café du Clair de lune et aux maisons basses du boulevard de la Gare. Je glisserais dans un temps parallèle où personne ne pourrait plus m’atteindre.Les paulownias aux fleurs mauves de la place d’Italie… Je me répétais cette phrase et je dois avouer qu’elle me faisait monter les larmes aux yeux, ou bien était-ce le froid de l’hiver ? En somme, j’étais revenu au point de départ et, si les distributeurs de billets avaient existé vers 1964, la fiche aurait été la même pour moi : Droits insuffisants. Je n’avais à cette époque aucun droit ni aucune légitimité. Pas de famille ni de milieu social bien défini. Je flottais dans l’air de Paris. Patrick Modiano — L'Herbe des nuits
Elle traverse les vitres des appartements du quartier, rougissant même le plafond de la salle à manger, pendant qu'au pays d'Hitachi les écoliers se lèvent dans leur costume bleu marine, leur collation de la demi-journée dans une boîte métallique au bout du bras… Sylvie Gracia — Les Nuits d'Hitachi
France Bleu adopte un dispositif spécial pour vous faire vivre cet évènement et réalise une antenne spéciale, en direct depuis Dun-le-Palestel. France Bleu — France Bleu vous fait vivre en direct la 3e étape du Paris-Nice 2022 entre Vierzon et Dun-le-Palestel
Je vais sans doute te faire sourire; mais quand il arrive qu'on me serve des haricots verts, ils jouent pour moi le rôle de la petite madeleine de Proust, et je revois ta mère, le tablier bleu qu'elle avait accroché pardessus sa robe… Claude Roy — L'Ami lointain
C'est un ciel d'Italie tout d'azur, avec un horizon net et arrêté ; pas un nuage, pas une vapeur : le bleu pur et les lignes certaines. Sainte-Beuve — Causeries du lundi
Parfois nous croisions un homme vêtu de bleu dont aucune tache ne souillait la combinaison et qui semblait ne rien avoir à faire qu'écouter; c'était un mécanicien. Jean Lartéguy — La grande aventure de Lacq
Elles assoient l'enfant auprès d'une croiséeGrande ouverte où l'air bleu baigne un fouillis de fleurs Arthur Rimbaud — Les chercheuses de poux
Le jour suivant deux garçons virent son corps qui flottait à quelques mètres de la rive. Elle n’avait sur elle que son soutien-gorge. On ne trouva pas la valise. On ne trouva pas le tailleur bleu. On ne trouva même pas la culotte, les bas, les chaussures, le sac à main et les papiers d’identité. Elena Ferrante — L’amour harcelant
Ô souvenirs ! printemps ! aurore !Doux rayon triste et réchauffant !- Lorsqu'elle était petite encore,Que sa sœur était tout enfant... - Connaissez-vous, sur la collineQui joint Montlignon à Saint-Leu,Une terrasse qui s'inclineEntre un bois sombre et le ciel bleu ? Victor Hugo — Ô souvenirs ! printemps ! aurore !
Il mêla ses doigts à ceux de Nadine et se colla au sable chaud ; entre la mer nonchalante que le soleil décolorait et le bleu impérieux du ciel, il y avait du bonheur en suspens ; pour qu'il pût s'en saisir, il aurait peut-être suffi d'un sourire de Nadine [...] Simone de Beauvoir — Les Mandarins
Dans les premiers jours du mois d’octobre 1815, une heure environ avant le coucher du soleil, un homme qui voyageait à pied entra dans la petite ville de Digne. Les rares habitants qui se trouvaient en ce moment à leurs fenêtres ou sur le seuil de leurs maisons regardaient ce voyageur avec une sorte d’inquiétude. Il était difficile de rencontrer un passant d’un aspect plus misérable. C’était un homme de moyenne taille, trapu et robuste, dans la force de l’âge. Il pouvait avoir quarante-six ou quarante huit ans. Une casquette à visière de cuir rabattue cachait en partie son visage brûlé par le soleil et le hâle et ruisselant de sueur. Sa chemise de grosse toile jaune, rattachée au col par une petite ancre d’argent, laissait voir sa poitrine velue ; il avait une cravate tordue en corde, un pantalon de coutil bleu, usé et râpé, blanc à un genou, troué à l’autre, une vieille blouse grise en haillons, rapiécée à l’un des coudes d’un morceau de drap vert cousu avec de la ficelle, sur le dos un sac de soldat fort plein, bien bouclé et tout neuf, à la main un énorme bâton noueux, les pieds sans bas dans des souliers ferrés, la tête tondue et la barbe longue. Victor Hugo — Les Misérables
… tout secoué par son besoin de cultiver la petite fleur bleue des romances. Emile Zola — Pot Bouille
Ô géraniums, ô digitales… Celles-ci fusant des bois-taillis, ceux-là en rampe allumés au long de la terrasse, c’est de votre reflet que ma joue d’enfant reçut un don vermeil. Car « Sido » aimait au jardin le rouge, le rose, les sanguines filles du rosier, de la crois-de-Malte, des hortensias, et des bâtons-de-Saint-Jacques, et même le coqueret-alkékenge, encore qu’elle accusât sa fleur, veinée de rouge sur pulpe rose, de lui rappeler un mou de veau frais… A contre-cœur, elle faisait pacte avec l’Est : « Je m’arrange avec lui », disait-elle. Mais elle demeurait pleine de suspicion et surveillait, entre tous les cardinaux et collatéraux, ce point glacé, traître aux jeux meurtriers. Elle lui confiait des bulbes de muguet, quelques bégonias, et des crocus mauves, veilleuses des froids crépuscules. Hors une corne de terre, hors un bosquet de lauriers-cerises dominés par un junkobiloba, – je donnais ses feuilles, en forme de raie, à mes camarades d’école, qui les séchaient entre les pages de l’atlas – tout chaud jardin se nourrissait d’une lumière jaune, à tremblements rouges et violets, mais je ne pourrais dire si ce rouge, ce violet, dépendaient, dépendent encore d’un sentimental bonheur ou d’un éblouissement optique. Étés réverbérés par le gravier jaune et chaud, étés traversant le jonc tressé de mes grands chapeaux, étés presque sans nuits… Car j’aimais tant l’aube, déjà, que ma mère me l’accordait en récompense. J’obtenais qu’elle m’éveillât à trois heures et demis, et je m’en allais, un panier vide à chaque bras, vers des terres maraîchères qui se réfugiaient dans le pli étroit de la rivière, vers les fraises, les cassis et les groseilles barbues. A trois heures et demie, tout dormait dans un bleu originel, humide et confus, et quand je descendais le chemin de sable, le brouillard retenu par son poids baignait d’abord mes jambes, puis mon petit torse bien fait, atteignait mes lèvres, mes oreilles et mes narines plus sensible que tout le reste de mon corps… J’allais seule, ce pays mal pensant était sans dangers. C’est sur ce chemin, c’est à cette heure que je prenais conscience de mon prix, d’un état de grâce indicible et de ma connivence avec le premier souffle accouru, le premier oiseau, le soleil encore ovale, déformé par son éclosion… Ma mère me laissait partir, après m’avoir nommée « Beauté, Joyau-tout-en-or » ; elle regardait courir et décroître sur la pente son œuvre, - « chef-d’œuvre » disait-elle. J’étais peut-être jolie ; ma mère et mes portraits de ce temps-là ne sont pas toujours d’accord… Je l’étais à cause de mon âge et du lever du jour, à cause des yeux bleus assombris par la verdure, des cheveux blonds qui ne seraient lissés qu’à mon retour, et de ma supériorité d’enfant éveillée sur les autres enfants endormis. Je revenais à la cloche de la première messe. Mais pas avant d’avoir mangé mon saoul, pas avant d’avoir, dans les bois, décrit un grand circuit de chien qui chasse seul, et goûté l’eau de deux sources perdues, que je révérais. L’une se haussait hors de la terre par une convulsion cristalline, une sorte de sanglot, et traçait elle-même son lit sableux. Elle se décourageait aussitôt née et replongeait sous la terre. L’autre source, presque invisible, froissait l’herbe comme un serpent, s’étalait secrète au centre d’un pré où des narcisses, fleuris en ronde, attestaient seuls sa présence. La première avait goût de feuille de chêne, la seconde de fer et de tige de jacinthe… Rien qu’à parler d’elles, je souhaite que leur saveur m’emplisse la bouche au moment de tout finir, et que j’emporte, avec moi, cette gorgée imaginaire… Colette — Sido
Dans le fronton d’un temple antique,Deux blocs de marbre ont, trois mille ans,Sur le fond bleu du ciel attique,Juxtaposé leurs rêves blancs ; Théophile Gautier — Dans le fronton d’un temple antique
Je suis un pâle enfant du vieux Paris, et j’aiLe regret des rêveurs qui n’ont pas voyagé.Au pays bleu mon âme en vain se réfugie,Elle n’a jamais pu perdre la nostalgieDes verts chemins qui vont là-bas, à l’horizon.Comme un pauvre captif vieilli dans sa prisonSe cramponne aux barreaux étroits de sa fenêtrePour voir mourir le jour et pour le voir renaître.Ou comme un exilé, promeneur assidu,Regarde du coteau le pays défenduSe dérouler au loin sous l’immensité bleue,Ainsi je fuis la ville et cherche la banlieue.Avec mon rêve heureux j’aime partir, marcherDans la poussière, voir le soleil se coucherParmi la brume d’or, derrière les vieux ormes,Contempler les couleurs splendides et les formesDes nuages baignés dans l’occident vermeil,Et, quand l’ombre succède à la mort du soleil,M’éloigner encor plus par quelque agreste rueDont l’ornière rappelle un sillon de charrue,Gagner les champs pierreux, sans songer au départ,Et m’asseoir, les cheveux au vent, sur le rempart.Au loin, dans la lueur blême du crépuscule,L’amphithéâtre noir des collines recule,Et, tout au fond du val profond et solennelParis pousse à mes pieds son soupir éternel.Le sombre azur du ciel s’épaissit. Je commenceA distinguer des bruits dans ce murmure immense,Et je puis, écoutant, rêveur et plein d’émoi,Le vent du soir froissant les herbes près de moi,Et parmi le chaos des ombres débordantes,Le sifflet douloureux des machines stridentes,Ou l’aboiement d’un chien, ou le cri d’un enfant,Ou le sanglot d’un orgue au lointain s’étouffant,Ou le tintement clair d’une tardive enclume,Voir la nuit qui s’étoile et Paris qui s’allume François Coppée — « Un pâle enfant du vieux Paris »
— Comme il est gentil ! il est déjà galant, il a un petit œil pour les femmes : il tient de son oncle. Ce sera un parfait gentleman, ajouta-t-elle en serrant les dents pour donner à la phrase un accent légèrement britannique. Est-ce qu’il ne pourrait pas venir une fois prendre a cup of tea, comme disent nos voisins les Anglais ; il n’aurait qu’à m’envoyer un « bleu » le matin. Marcel Proust — Du côté de chez Swann