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Obscur

Variantes Singulier Pluriel
Masculin obscur obscurs
Féminin obscure obscures

Définitions de « obscur »

Trésor de la Langue Française informatisé

OBSCUR, -URE, adj.

A. − Qui est sans lumière. Synon. noir, sombre, ténébreux; anton. clair, lumineux.
1. Qui ne répand pas, ne reçoit pas de clarté. Cave, cour, pièce, rue, salle obscure; nuit obscure; ciel obscur; ténèbres obscures. Par une matinée obscure de novembre, à la lueur des douze cierges du catafalque, je lis (Barrès,Cahiers,t.5, 1907, p.219).Un insolite lumignon éclairait un angle généralement obscur de la pièce (Martin du G.,Thib.,Mort père, 1929, p.1252):
1. Le corridor était encore trop obscur pour qu'on pût distinguer son visage; mais quand l'homme arriva à l'escalier, un rayon de lumière du dehors le fit saillir comme une silhouette, et Jean Valjean le vit de dos complètement. Hugo,Misér.,t.1, 1862, p.533.
P. allus. littér. [P. réf. au vers de Corneille, Le Cid, iv, 3: Cette obscure clarté qui tombe des étoiles; v. aussi clarté A 1 a] Nous nous passions fort bien de l'électricité, Pour faire des orgies; On y voyait assez à l'obscure clarté Qui tombe des bougies (Ponchon,Muse cabaret,1920, p.37).
Locutions
PHOT. Chambre obscure. Synon. de chambre noire (v. chambre I C 2 h).P. métaph. Dans la chambre obscure de mon esprit, chaque chose se peignait en couleurs charmantes (Gobineau,Pléiades,1874, p.8).L'homme, (...) en présence d'une peinture, (...) croit voir (...) la réalité dans l'apparence. Ce que ne voit point son oeil, il l'aperçoit au fond de cette chambre obscure qui s'appelle l'imagination (Ch. Blanc, Gramm. arts dessin,1876, p.489).
PHYS., vx. Chaleur obscure. Chaleur émise par un corps porté à haute température, mais qui ne s'accompagne pas d'incandescence. (Dict. xixeet xxes.). Au delà des rayons rouges, existent des rayons infra-rouges, que l'on peut mettre en évidence par leur action thermique (rayons calorifiques obscurs) (Coffignier,Coul. et peint.,1924, p.21).
P. métaph. Comme le spectre solaire, plus ample que les rayons colorés, l'action est à la fois lumière et chaleur obscure (Blondel,Action,1893, p.306).
Les salles obscures. Les salles de cinéma; p. méton., l'industrie cinématographique. Une crise du cinéma qui, avant la fin de 1897, avait fait fermer presque toutes les salles obscures (Sadoul,Cin.,1949, p.26).
Emploi adv. Il fait obscur. Le soir (...) Il faisait obscur: je me suis promis de revenir et de faire ici quelques dessins (Delacroix,Journal,1854, p.249).Je t'ai vu mort, en songe, sur une place de Milan, (...) c'était à midi, en même temps il faisait obscur (Jouve,Paulina,1925, p.164).
Emploi subst. masc. Obscurité. Édouard aussi s'enfiévrait. Dans l'obscur, il griffonnait à tâtons des notes (Adam,Enf. Aust.,1902, p.199).Il s'avance dans l'épaisseur de l'obscur, les mains étendues devant soi, crainte de se heurter (Valéry,Tel quel II,1943, p.56).
2. P. méton. [En parlant d'une couleur] Foncé, peu lumineux, terne. Anton. éclatant, vif.De longs cheveux châtain obscur et bouclés naturellement (Mérimée,Portr. hist. et littér.,1870, p.101).Vers lui arrivait au galop, pourchassé, un petit taureau d'un rouge obscur de cuir patiné (Montherl.,Bestiaires,1926, p.420).
Emploi subst. masc.
PEINT. Parties obscures d'un tableau. Le mieux conservé des ouvrages de Giunta Pisano se trouve dans l'église des Anges à Assise: c'est un Christ peint sur une croix de bois (...) on aperçoit quelques traces de la science des clairs et des obscurs (Stendhal,Hist. peint.,t.1, 1817, p.73).Clair-obscur*.
CHASSE. ,,Faisan au plumage vert très sombre`` (Burn. 1970).
B. − Au fig.
1. Domaine intellectuel.Qui n'est pas clair pour l'esprit, qui est difficile à comprendre, à expliquer. Synon. incompréhensible, inintelligible; anton. clair, limpide.
a) [Qualifie un fait, une situation] Affaire obscure; événement, mal obscur. L'histoire ancienne est obscure par le défaut de documents. Ils abondent dans le moderne (Flaub.,Bouvard,t.1, 1880, p.124).La situation était fort obscure après dix mois de cabinet Poincaré (Aragon,Beaux quart.,1936, p.199):
2. Le passé n'est pas fugace, il reste sur place. (...) ce n'est pas seulement quinze ans après un crime resté obscur qu'un magistrat peut encore trouver les éléments qui serviront à l'éclaircir... Proust,Guermantes 2,1921, p.418.
b) [Qualifie l'activité de l'esprit, une de ses manifestations, en partic. dans le domaine de l'expression écrite ou orale] Idées, paroles, phrases obscures; langage, style obscur; passage, point, texte obscur. Quelle que soit l'interprétation donnée sur ce point à la pensée incertaine et obscure de Marx et de Engels, il importe peu (Jaurès,Ét. soc.,1901, p.xlix).La cybernétique, terme encore obscur au grand public (Schaeffer,Rech. mus. concr.,1952, p.172):
3. ... quand l'homme aborde un sujet obscur dans lequel tout est obscur pour lui ou dans lequel il n'a pour se guider que la lueur trompeuse de quelques notions incertaines, alors l'homme n'a plus de critérium; il va alors réellement de l'inconnu à l'inconnu... Cl. Bernard, Princ. méd. exp.,1878, p.209.
Emploi subst. masc. Quand les poëtes de l'époque classique n'y prennent pas garde, ils deviennent aisément prosaïques et languissants, comme les autres de l'école contraire tendent très-vite, s'ils ne se soignent, au boursouflé, au bigarré ou à l'obscur (Sainte-Beuve,Portr. littér.,t.1, 1844-64, p.236).Un fervent du chef-d'oeuvre de Valéry [La Jeune Parque] a plongé et s'est établi, comme dans une cloche de verre, au plus profond et au plus obscur du poème (Mauriac,Bloc-Notes,1958, p.374).
PHILOS. Idée obscure. ,,Chez Descartes, est obscur tout ce qui s'ajoute à ce que l'esprit saisit directement et dans l'évidence, et qui vient des sens, de l'imagination et de la mémoire. Chez Leibniz, est obscure l'idée qui ne suffit pas à faire reconnaître la chose qu'elle représente; ainsi en va-t-il du souvenir d'un objet vu auparavant, dans la mesure où il n'est pas suffisamment précis pour permettre de le reconnaître au milieu d'autres quand il apparaît à nouveau`` (Thinès-Lemp. 1975):
4. Comme, depuis Descartes, beaucoup de termes dont nous avons ici besoin ont changé de sens, il est nécessaire de rappeler la terminologie de l'École. On y oppose l'idée claire à l'idée obscure. On définit l'idée claire, celle qui distingue son objet de tout autre objet, l'idée obscure [it. ds le texte], celle qui ne le distingue pas ainsi. Théol. cath.t.4, 11920, p.875.
RELIG. Nuit obscure:
5. Le thème favori de saint Jean de la Croix est un état qu'il nomme la «Nuit obscure». La foi exige ou se crée cette nuit, qui doit être l'absence de toute lumière naturelle, et le règne de ces ténèbres que peuvent seules dissiper des lumières toutes surnaturelles. Il lui importe donc, sur toute chose, de s'appliquer à conserver cette précieuse obscurité, à la préserver de toute clarté figurée ou intellectuelle (...). Demeurer dans la Nuit obscure et l'entretenir en soi doit donc consister à ne rien céder à la connaissance ordinaire... Valéry,Variété V,1944, p.166.
c) [P. méton., qualifie une pers., notamment un écrivain, un philosophe] N'être pas assez clair, pour le bon écrivain, c'est être obscur (Renard,Corresp.,1902, p.270):
6. Mallarmé a compris le langage comme s'il l'eût inventé. Cet écrivain si obscur a compris l'instrument de compréhension et de coordination au point de substituer au désir et au dessein naïfs et toujours particuliers des auteurs, l'ambition extraordinaire de concevoir et de dominer le système entier de l'expression verbale. Valéry,Variété III,1936, p.27.
2. Domaine affectif.[Qualifie une réalité abstr., notamment une manifestation de l'esprit hum.] Qui est ou semble être confus, vague; qui ne se manifeste, ne se perçoit pas nettement. Synon. indéfinissable, indistinct, trouble, mystérieux; anton. net, précis.Certitude, menace obscure; instinct, sentiment obscur. Il y a tout au fond de nous un domaine, le plus riche domaine d'aspirations confuses, un domaine obscur, et ces psychologues scientifiques le reconnaissent comme la nappe profonde qui alimente nos pensées claires (Barrès,Pitié églises,1914, p.90).Le romancier anglais Thomas Hardy a peint, dans son célèbre ouvrage Jude l'Obscur, un ouvrier courageux, opprimé et comme meurtri par les obscures chimères de son temps (L. Daudet, Stup. XIXes.,1922, p.236):
7. [Les Juifs] exécraient en lui [le Führer] le furieux démagogue qui faisait de l'antisémitisme le premier point de son programme, et de plus ils le méprisaient, parce que ces intellectuels-nés commettent naturellement l'erreur de ne pas estimer à leurs prix les forces obscures, instinctives, sentimentales, qui ne sont pourtant nulle part plus agissantes qu'en Allemagne. Tharaud,Qd Israël n'est plus roi,1933, p.147.
En partic. [En parlant d'une action gén. néfaste] Qui se prépare secrètement, dans l'ombre. Synon. clandestin, occulte.Menées obscures. Les pêcheurs ramenaient souvent du fond de l'eau quelque cadavre d'Allemand (...) les vases du fleuve ensevelissaient ces vengeances obscures (Maupass.,Contes et nouv.,t.2, Boule de suif, 1880, p.117).
3. Domaine soc.Qui n'est pas connu; qui demeure dans l'ombre. Synon. humble, inconnu; anton. célèbre, fameux, illustre.
a) [Qualifie une chose, une situation] [Le journaliste] rend compte des théâtres dans deux journaux obscurs, quoiqu'il soit assez instruit pour écrire dans les grands journaux (Balzac,Gambara,1837, p.49).Je sentais bien qu'il fallait renoncer pour toujours à la gloire, heureux encore si je pouvais me réfugier dans une obscure médiocrité! (A. France,Vie fleur,1922, p.361).
b) [Qualifie une pers.]
Qui est de basse extraction, de condition sociale modeste. Rougissant de ses obscurs parents, l'avoué fit rester sa mère à Mansle où elle s'était retirée (Balzac,Illus. perdues,1843, p.685).
Qui n'a pas acquis la gloire, la renommée; qui mène une existence effacée. Savant obscur. Omer jugea que cet homme eût pu être tout, et que volontairement il restait un obscur ecclésiastique (Adam,Enf. Aust.,1902, p.206).Ce n'est pas seulement en effet comme un praticien obscur, devenu, à la longue, notoriété européenne, que ses confrères considéraient Cottard (Proust,J. filles en fleurs,1918, p.433):
8. ... la phrase où Gérard se donne à Jenny pour le pauvre et obscur descendant d'un châtelain du Périgord, révèle plus que le souhait naïf de se faire valoir auprès de la femme aimée. Durry,Nerval,1956, p.48.
Emploi subst. Il me semble que les noms de Janvier-Dupont, du colonel Herpin (...) et de Paul Floche ne sont pas baignés d'une lumière éclatante. Vous mêlez les illustres et les obscurs dans l'album (A. France,Pt bonh.,1898, 5, p.514):
9. Et nous, les petits, les obscurs, les sans-grades, Nous qui marchions fourbus, blessés, crottés, malades, Sans espoir de duchés ni de dotations; Nous qui marchions toujours et jamais n'avancions... Rostand,Aiglon,1900, II, 9, p.91.
REM. 1. [Néol. d'aut.] a)
Obscurant, -ante, adj.Qui assombrit, obscurcit. Des arbres blancs, des arbres roses, dans lesquels les aquarellistes japonais n'introduisent même pas les obscurantes ombres de l'Occident (E. de Goncourt, Mais. artiste,t.1, 1881, p.196).
b)
Obscuré, -ée, adj.Devenu, rendu obscur. En face du château complètement obscuré, sauf une chambre de domestique, où il y avait une lumière (Goncourt,Journal,1858, p.479).
c)
Obscurer, verbe trans.Plonger dans l'obscurité. Le chaos redoutable du fond entrait dans le chaos de la nuit, obscurant le public (Goncourt,MmeGervaisais,1869, p.87).
2.
Obscurisme, subst. masc.Recherche délibérée de l'obscurité, de la difficulté intellectuelle (chez un artiste, un écrivain). Ce que Planche reprochait à Sainte-Beuve n'était rien de moins que ce qu'on appelle depuis Fernand Vandérem de l'obscurisme, mais alors que l'obscurisme d'un Mallarmé ou d'un Valéry s'explique par une recherche extrême de l'expression, celui de Sainte-Beuve avait au contraire sa source, du moins s'il faut en croire Planche, dans l'insuffisance de l'élaboration intellectuelle (A. Billy, Sainte-Beuve,1952, p.268 ds Rob. Suppl. 1970).
Prononc. et Orth.: [ɔpsky:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1160 oscur «privé de lumière» (Eneas, 195 ds T.-L.); 2. 1160-74 subst. oscur «l'obscurité» (Wace, Rou, éd. H. Andresen, II, 2304); 1549 l'obscur (Du Bellay, Olive, 100 ds Hug.); 3. ca 1165 «de couleur sombre» (Benoît de Sainte-Maure, Troie, éd. L. Constans, 3564); 1690 subst. «partie sombre d'un tableau» (Fur.). B. 1. 1160-74 «qui est difficile à comprendre» (Wace, Rou, éd. H. Andresen, II, 1264); 1549 subst. «ce qui est inintelligible» (Du Bellay, OEuvres, éd. H. Chamard, I, 142) ; 2. 1662 «qui comprend mal» (Port-Royal, Logique, III, 19 ds Littré); 3. 1559 «inconnu, sans renom» (Amyot, Demosth., 1, ibid.); 1611 «de basse naissance» (Cotgr.). Empr. au lat. obscurus «sombre, ténébreux; difficile à comprendre; inconnu; caché, secret». Fréq. abs. littér.: 6052. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 7450, b) 7994; xxes.: a) 9817, b) 9193.
DÉR.
Obscurateur, subst. masc.,,Enveloppe cylindrique opaque, échancrée ou percée d'un voyant, qu'on met autour d'un tube contenant un liquide, pour en voir la surface`` (Rob. Suppl. 1970; ds Lar. 19eSuppl. 1878, dict. xxes.). [ɔpskyʀatoe:ʀ]. 1reattest. 1878 (Lar. 19eSuppl.); de obscur, suff. -(at)eur2*.
BBG.Greimas (A.-J.). Nouv. dat. Fr. mod. 1952, t.20, p.304 (s.v. obscurant). _ Kristol (A. M.). Color ... Berne, 1978, pp.130-135. _ Vardar Soc. pol. 1973 [1970], p.274 (s.v. obscurant).

Wiktionnaire

Adjectif - français

obscur \ɔp.skyʁ\

  1. Où il y a peu, où il n’y a pas de lumière.
    • Une commère […], m’accueillit et, me poussant dans une pièce quasiment obscure, me confia d’un air canaille : […]. — (Francis Carco, Images cachées, Éditions Albin Michel, Paris, 1928)
    • Le Charme très abondant forme parfois avec la Clématite des fourrés obscurs presque impénétrables. — (Gustave Malcuit, Contributions à l’étude phytosociologique des Vosges méridionales saônoises : les associations végétales de la vallée de la Lanterne, thèse de doctorat, Société d’édition du Nord, 1929, p. 174)
    • Il fait obscur dans cet endroit, ce lieu n’est pas bien éclairé, on n’y voit pas clair.
  2. Sombre, moins clair, moins vif, moins éclatant, plus brun, plus chargé.
    • Couleurs obscures.
    • Bleu obscur.
  3. Qui n’est pas clair ; qui est inintelligible ; qui ne se fait pas comprendre ou se fait difficilement comprendre.
    • Mais tout cela ne renseigne point sur le lignage du Gothique qui demeure obscur, peut-être parce qu’il est très clair. — (Joris-Karl Huysmans, La Cathédrale, Plon-Nourrit, 1915)
    • — J’hallucine, dit Colette. [—]. Quand je raconterai ça aux copines, elles ne voudront jamais me croire.
      — Portenawaque, estima Coline en son obscur langage.
      — (Bernard Suisse, Motus et babouches cousues, Éditions Le Manuscrit, 2005, p. 147)
  4. Qui est peu connu ; qui est caché.
    • Les Lettres à l’Étrangère, […], ces lettres contiennent des aveux, voilés, il est vrai, des histoires obscures, sans doute, mais reconnaissables pour qui connaît un peu l’existence secrète de Balzac. — (Octave Mirbeau La Mort de Balzac, 1907)
    • Naguère, la masse populaire, résignée à sa vie primitive, obscure, souvent sordide, n’avait point conscience d’être malheureuse. — (Ludovic Naudeau, La France se regarde : le Problème de la natalité, Librairie Hachette, Paris, 1931)
    • Par ailleurs, Apple décide parfois de déprécier une fonction et la supprimer du système. J'ai par exemple un client qui utilise une fonction assez obscure de macOS mais très pratique : les comptes externes, qui permettent de délocaliser le dossier de départ d'un utilisateur sur un autre disque pour ensuite l'utiliser sur un autre Mac. — (Florian Innocente, Témoignages : les pros ne se précipitent pas sur les mises à jour de macOS, MacGeneration, 26 septembre 2018 → lire en ligne)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

OBSCUR, URE. adj.
Où il y a peu, où il n'y a pas de lumière. Lieu obscur. Chambre obscure. Prison obscure. Forêt obscure. Nuit obscure. Temps obscur. Il fait obscur, Le temps est sombre. Il fait obscur dans cet endroit, Ce lieu n'est pas bien éclairé, on n'y voit pas clair. Chambre obscure. Voyez, au mot NOIR, Chambre noire.

OBSCUR, en parlant de Couleurs, signifie Qui est moins clair, moins vif, moins éclatant, plus brun, plus chargé. Couleurs obscures. Bleu obscur. Clair-obscur. Voyez CLAIR-OBSCUR.

OBSCUR signifie au figuré Qui n'est pas clair, intelligible, qui ne se fait pas comprendre, ou se fait difficilement comprendre. Discours obscur. Livre fort obscur. Passage, terme obscur. En termes obscurs. Cet auteur est obscur, affecte d'être obscur. Les oracles étaient obscurs.

OBSCUR signifie aussi Qui est peu connu, caché. C'est un homme obscur. Il mène une vie obscure. État obscur. Condition obscure. Mérite obscur. Vertu obscure. Cet homme est d'une naissance, d'une famille obscure, est né de parents obscurs.

Littré (1872-1877)

OBSCUR (ob-skur', sku-r'. Au XVIe siècle, on prononçait oscur, d'après Bèze) adj.
  • 1Où il n'y a point de lumière. Une nuit obscure. Cette obscure clarté qui tombe des étoiles, Corneille, Cid, IV, 3. Fumée obscure, Rotrou, Herc. mour. III, 4. Par un chemin obscur une esclave me guide, Racine, Bajaz. I, 1.

    Il fait obscur, le jour a peu de lumière.

    Il fait obscur en cet endroit, ce lieu n'est pas bien éclairé, on n'y voit pas bien clair.

    Chaleur obscure, chaleur sans aucune lumière, comme celle qui est donnée par un boulet chauffé à deux ou trois cents degrés. Pour reconnaître les effets de la chaleur obscure, c'est-à-dire de la chaleur privée de lumière, de flamme, et du feu libre, autant qu'il est possible, j'ai fait quelques expériences en grand, dont les résultats m'ont paru très intéressants, Buffon, Hist. min. Introd. Œuv. t. VII, p. 98.

    Chambre obscure, voyez, au mot NOIR, CHAMBRE NOIRE.

    S. m. L'obscur, ce qui est privé de clarté. C'est ainsi que la peinture divise en grandes masses ses clairs et ses obscurs, Montesquieu, Goût, variété.

    Fig. Que le poëte se ménage avec soin des passages du clair à l'obscur, du gracieux au terrible ; mais que cette variété soit harmonieuse, et qu'elle ne prenne jamais rien sur l'analogie du lieu de la scène avec l'action qui doit s'y passer, Marmontel, Élém. de litt. t. VI, p. 457, dans POUGENS.

    Clair-obscur, voy. CLAIR-OBSCUR.

  • 2En parlant de couleurs, de teintes, foncé, plus brun, plus chargé. Couleur obscure. Le reste du dessous du corps est d'une couleur jaunâtre, variée de taches longitudinales d'un vert obscur, Buffon, Ois. t. XIII, p. 152.

    Terme de peinture. Dont la couleur participe plus du brun que du clair. Tableau obscur. Ton obscur.

    Fig. Il se dit de l'apparence, de la figure qui est sans vivacité. La tête mal faite, les oreilles placées bas, des yeux trop petits et couverts, l'air obscur, les mouvements gauches, toute la figure ignoble, informe, un cri qui paraît machinal, Buffon, Quadrup. t. II, p. 231.

  • 3 Fig. Qui n'est pas bien marqué. Et bien qu'en ses douceurs mon déplaisir se noie, Je ne passe de l'une à l'autre extrémité Qu'avec un reste obscur d'esprit inquiété, Corneille, Oth. V, 7.
  • 4Qui n'est pas bien intelligible, qui se fait difficilement comprendre. J'évite d'être long et je deviens obscur, Boileau, Art p. I. Selon que votre idée est plus ou moins obscure, L'expression la suit ou moins nette ou plus pure, Boileau, ib. I. …Vous croyez dans vos rimes obscures Aux Saumaises futurs préparer des tortures, Boileau, Sat. IX. Il a fait assembler ceux qui savent le mieux Lire en un songe obscur les volontés des cieux, Racine, Esth. II, 1. Il n'y a point, dans toute l'antiquité, d'histoire plus obscure, ni plus incertaine que celle des premiers rois d'Égypte, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. I, p. 114, dans POUGENS. Les affaires n'eurent jamais rien d'obscur que M. de Villeroi n'éclaircît, Massillon, Orais. Villeroi. Quand il [Malebranche] a voulu développer cette grande vérité, que tout est en Dieu, tous les lecteurs ont dit que le commentaire est plus obscur que le texte, Voltaire, Philos. tout est en Dieu. Je n'aurais point percé les ténèbres frivoles D'un vain sens déguisé sous d'obscures paroles, Voltaire, Œdipe, II, 3. Non, non : chercher ainsi l'obscure vérité, C'est usurper les droits de la divinité, Voltaire, ib. IV, 1. Les remords de Cassandre et ses obscurs discours, Voltaire, Olympie, I, 3. Le vrai moyen d'écrire d'une manière obscure, c'est de ne faire qu'une phrase où il en faut plusieurs, ou d'en faire plusieurs où il n'en faut qu'une, Condillac, Art d'écr. III, 3. L'étude opiniâtre des obscurs livres de Rameau, Rousseau, Conf. V.

    Glose d'Orléans, plus obscure que le texte, se dit d'une chose qu'on a rendue plus obscure, plus difficile, à force de la commenter, de l'expliquer (locution prise de l'ancienne école de droit d'Orléans et de ses disputes).

    Obscur, qui ne comprend pas très bien. Les esprits des hommes sont ordinairement faibles et obscurs, Port-Royal, logiq. III, 1.

  • 5Qui appartient aux classes inférieures et sans renom de la société. Osmin : Ce palais est tout plein…Acomat : Oui, d'esclaves obscurs Nourris loin de la guerre, à l'ombre de ses murs, Racine, Bajaz. IV, 7. Dans le vulgaire obscur si le sort l'a placé [un enfant], Racine, Athal. II, 5. Je suis un homme de lettres, et je n'ai jamais rien publié ; ainsi je suis plus obscur que beaucoup de mes confrères qui ont écrit, Voltaire, Lett. écrite sous le nom de l'abbé Bigex, 30 avril 1769. Mais c'est peu qu'indignés d'un honteux esclavage, Des mécontents obscurs soient pour nous déclarés, Delavigne, Vêpr. sicil. I, 1.

    Cet homme est d'une naissance, d'une famille obscure, est né de parents obscurs, c'est-à-dire il n'est pas né dans une classe distinguée. Virgile naquit dans un village nommé Andes, près de Mantoue, de parents fort obscurs, sous le consulat de Cn. Pompeius Magnus et de M. Licinius Crassus, Rollin, Hist. anc. t. XII, p. 86, dans POUGENS.

    Les obscurs, en italien gli oscuri, nom que prennent les membres d'une académie de Lucques.

    Il se dit des choses, dans un sens analogue. Mon cœur libre d'ailleurs, sans craindre les murmures, Peut brûler à son choix dans des flammes obscures, Racine, Bérén. III, 1. Vous, dont j'ai pu laisser vieillir l'ambition Dans les honneurs obscurs de quelque légion, Racine, Brit. I, 2. Heureux qui, satisfait de son humble fortune,… Vit dans l'état obscur où les dieux l'ont caché ! Racine, Iph. I, 1. Il n'y a point de vertu, quelque obscure qu'elle soit, qui ne soit utile et nécessaire au bonheur de la société, Condillac, Ét. hist. III, 4.

  • 6Qui est sans renom, sans gloire. Voudrais-je, de la terre inutile fardeau… Attendre chez mon père une obscure vieillesse ? Racine, Iph. I, 2. Montrez-moi seulement dans vos mœurs des traces légères de pénitence ; quoi ! les lois de l'Église ? mais elles ne regardent plus les personnes d'un certain rang, et l'usage en a presque fait des devoirs obscurs et populaires, Massillon, Carême, Élus. Ni souffrir que l'amour, remplissant ce grand cœur, Enchaînât près de moi votre obscure valeur, Voltaire, Œdipe, II, 3. À travers tant d'écueils les dieux qui m'ont sauvé, Au plus obscur trépas ne m'ont point réservé, La Fosse, Marius à Mint. II, 1.
  • 7Inconnu, caché. L'obscur avenir. Et les siècles obscurs devant moi se découvrent, Racine, Athal. III, 7.

SYNONYME

OBSCUR, SOMBRE. Obscur dit plus que sombre : un jour est sombre, une nuit est obscure.

HISTORIQUE

XIIe s. Lieu oscur, Ronc. 147. La merciz m'est tant obscure Que je ne la puis veoir, Couci, IV. E quant il s'en ala la nuit en l'oscur seir [soir], Th. le mart. 52.

XIIIe s. Et la nuis estoit mout et hideuse et oscure, Berte, XLII. El [Beauté] ne fu oscure ne brune, Ains fu clere comme la lune, la Rose, 999.

XIVe s. Ce n'est pas chose non manifeste ou obscure, que l'en ne doit pas rendre ou faire à tous unes meismes choses, Oresme, Eth. 261. Garin, poure homme, sourt, malade de maladies obscures [épilepsie], desquelles il chiet [tombe] souvent soubdainement, Du Cange, morbus.

XVIe s. Maistre et remettre, aussi cueurs et obscurs, Ce sont beaux mots : mais en rithme ils sont durs, Marot, II, 208. Il ne faisoit pas si obscur que l'on ne veist du tout goutte, Amyot, Pompée, 49. Ville obscure et de peu de renommée, Amyot, Démosth. 1. Appele ne representa pas sa naïfve couleur, ains le feit brun et plus obscur qu'il n'estoit au visage, Amyot, Alex. 6. Eslever en haut d'un mouvement obscur [insensible], Paré, I, 28. Un son grave et obscur, Paré, IV, 10. Au fon d'enfer va pleurer tes ennuis, Parmy l'obscur des eternelles nuicts, Du Bellay, J. II, 32, verso. L'obscur m'est jour ; le jour m'est une nuit, Ronsard, 80.

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Étymologie de « obscur »

(Date à préciser) Du latin obscurus.
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Picard, oscur ; du lat. obscurus, de ob, et scurus, qui n'existe pas, mais que l'on conjecture, comme nom d'agent, de la même racine qui a donné scutum, bouclier ; ob-scu-rus signifierait recouvrant tout autour ; comparez le sanscrit sku, couvrir.

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Phonétique du mot « obscur »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
obscur ɔpskyr

Fréquence d'apparition du mot « obscur » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « obscur »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « obscur »

  • Que le poète obscur persévère dans son obscurité, s'il veut trouver la lumière.
    Jean Paulhan — In préface des Contes de Noël Devaulx Cercle du livre précieux
  • Confluent des deux sourires versl’enfant – une roue de ma ferveurle bagage de sang des créaturesincarnées dans les légendes physiques- vit les cils agiles des orages se troublentla pluie tombe sous les ciseaux ducoiffeur obscur – de grandes alluresnageant sous les arpèges disparatesdans la sève des machines l’herbepousse autour des yeux aigusici le partage de nos caressesmordues et parties avec les flotss’offre au jugement des heuresséparées par le méridien des cheveluresmidi sonne dans nos mainsles piments des plaisirs humains.
    Tristan Tzara — « Hirondelle végétale »
  • Disons-le hardiment, philosopher c'est expliquer […] le clair par l'obscur, clarum per obscurius.
    Jules Lagneau — In Revue philosophique février 1880
  • La cathédrale, comme la plaine, comme la forêt, a son atmosphère, son parfum, sa lumière, son clair obscur, ses ombres.
    Emile Mâle
  • Dans le clair-obscur, le silence est encore le meilleur interprète des âmes.
    Paul Javor — Sa raison de vivre
  • Les vérités de l'obscur ne se formulent pas.
    Pierre Fournier, dit Pierre Gascar — L'Arche, Gallimard
  • Les hommes sont ainsi faits qu'ils croient plus volontiers ce qui leur semble obscur.
    Tacite — Histoires
  • Ne confondez pas le sombre avec l'obscur. L'obscur accepte l'idée de bonheur ; le sombre accepte l'idée de grandeur.
    Victor Hugo — Philosophie prose
  • Le style, c’est l’homme ; quand le style est obscur, il faut déjà s’inquiéter.
    André Comte-Sponville — Evene.fr - Janvier 2007
  • La plus belle destinée : avoir du génie et être obscur.
    Jules Barbey d’Aurevilly — Pensées détachées
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Traductions du mot « obscur »

Langue Traduction
Anglais obscure
Espagnol oscuro
Italien oscuro
Allemand obskur
Chinois 朦胧
Arabe غامض
Portugais obscurecer
Russe затенить
Japonais あいまい
Basque ilundu
Corse oscura
Source : Google Translate API

Synonymes de « obscur »

Source : synonymes de obscur sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « obscur »

Combien de points fait le mot obscur au Scrabble ?

Nombre de points du mot obscur au scrabble : 10 points

Obscur

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