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Tourmenter

Définitions de « tourmenter »

Trésor de la Langue Française informatisé

TOURMENTER, verbe trans.

A. − Empl. trans.
1. Vieilli ou littér.
a) Soumettre à des tourments. Synon. supplicier, torturer.On l'a si horriblement tourmenté, qu'il en est mort (Ac.).
b)
α) Maltraiter physiquement. Synon. brutaliser, martyriser.Des enfants qui tourmentaient un chat mouillé s'arrêtèrent pour voir passer une voiture (Goncourt, R. Mauperin, 1864, p. 295).
Au part. passé. Un silence de dimanche. Pourtant, Toby-Chien ne dort pas, tourmenté par les mouches et par un déjeuner pesant (Colette, Dialog. bêtes, 1905, p. 7).
β) Faire souffrir. La faim, la maladie, la soif le tourmente; être tourmenté d'une migraine perpétuelle. J'ai mal dormi... J'ai fait des rêves atroces... C'est la bile qui me tourmente (Labiche, Misanthr. et Auv., 1852, 2, p. 137).Il a été l'année dernière aux eaux d'Aix, en Savoie, et en quinze jours il s'est guéri de douleurs qui le tourmentaient depuis six ans (Flaub., Corresp., 1874, p. 172).
c) Au fig. Faire endurer des souffrances morales.
α) Donner de la peine, du tracas, inquiéter vivement. Tourmenter l'âme, le cœur de qqn; être tourmenté de remords, par les remords. Ta lettre me tourmente bien cruellement (Hugo, Lettres fiancée, 1820, p. 23).Son mince visage se crispa sous une étreinte subite à l'idée de revoir le craintif Ensénat qui allait encore le tourmenter avec ses alarmes et ses avertissements (Chardonne, Épithal., 1921, p. 230).
β) Harceler, persécuter. Tourmenter qqn par des taquineries. Quelquefois je désirais qu'il fût heureux et me promettais de ne pas troubler sa tranquillité mais, le plus souvent, je le tourmentais de questions et de reproches. J'étais aigre, insistante, odieuse (Maurois, Climats, 1928, p. 225).Il le tourmentait sans arrêt... Il lui faisait remonter tout exprès, les cinq étages sur la cour pour lui répéter une fois de plus, combien il le trouvait imbécile (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 467).
Absol. Il suffit de guetter (...) la minute (...) où, dans l'âme de chaque spectateur, point l'envie de honnir et de tourmenter, de couvrir de boue ce qu'il a juché au pinacle (Arnoux, Rossignol napol., 1937, p. 40).
γ) Harceler, importuner par une insistance excessive. Tourmenter qqn pour obtenir qqc. Ton petit frère vient de me tourmenter pour aller avec lui à cette exposition de tableaux (Hugo, Lettres fiancée, 1822, p. 160).Quand j'étais enfant, je tourmentais ma mère pour savoir si toutes les planètes étaient habitées (Green, Journal, 1939, p. 165).
2.
a) Agiter violemment. Mer qui tourmente la barque; bateau tourmenté par le roulis. Autour de Bosserville les grands vents tourmentent le ciel et balayent la Lorraine (Barrès, Colline insp., 1913, p. 106).
b) Tordre en tous sens, manier, manipuler sans cesse. Tourmenter un bouton de son vêtement, une mèche de cheveux, son mouchoir, un livre, un papier. Du bout des doigts, je tourmentais mes chaussettes, ce qui est une manie grotesque dont je ne peux me défaire (Duhamel, Confess. min., 1920, p. 41).
3. Vieux
a) Travailler. Tourmenter le bois. J'aimerais mieux coucher au bruit du marteau de mon père, dans l'atelier où il tourmente le cuivre, que parmi les terreurs nocturnes de ton palais (Nodier, Smarra, 1821, p. 95).Les souvenirs se levaient sous ses pas (...) ceux de son adolescence, quand il tint l'aiguillon devant les bœufs, mania la charrue, apprit à « tourmenter la terre » (Pesquidoux, Livre raison, 1928, p. 154).
b) Déjeter, déformer. Synon. gauchir.L'humidité tourmente le bois. La sécheresse tourmente les tonneaux et fait évaporer le vin (Audot, Cuisin. campagne et ville, 1896, p. 541).
4. LITT., BEAUX-ARTS
a)
α) Rendre affecté, alambiqué, par un travail excessif ou une recherche exagérée. Synon. surcharger, tarabiscoter (fam.).Tourmenter son style, ses phrases, son graphisme. Ce peintre tourmente ses tableaux, son dessin (Lar. 19e).
β) Tourmenter la couleur. Frotter la couleur après l'avoir posée sur le tableau; lui faire perdre de sa fraîcheur. (Dict. xixeet xxes.).
b) Interpréter d'une manière forcée, tendancieuse. Synon. torturer.Tourmenter un auteur, un texte (Dict. xixeet xxes.).
B. − Empl. pronom.
1. Vx. S'agiter, se remuer. Tenez-vous en repos, ne vous tourmentez pas tant; il n'a fait que se tourmenter toute la nuit (Ac. 1798-1878). Dominique écoutait impatiemment, et son cheval se tourmentait sous lui comme s'il eût été piqué par les mouches (Fromentin, Dominique, 1863, p. 25).
2. Se faire du/des souci(s), éprouver de l'inquiétude, de l'angoisse, des scrupules. Synon. s'alarmer, se chagriner, s'inquiéter, se soucier, se tracasser, se faire de la bile/des cheveux/du mouron (fam.).Ne vous tourmentez pas pour si peu. Ne te tourmente pas, pauvre chérie, tu te rendras malade! (Flaub., MmeBovary, t. 1, 1857, p. 133):
Madame de Maintenon, en effet, qui, avec son bon esprit, se tourmentait et se lamentait toujours, lui faisait un perpétuel éloge de cette tranquillité naturelle qu'elle enviait, de ce courage mêlé d'aimable humeur... Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 5, 1852, p. 420.
Se tourmenter de/pour.Se tourmenter pour l'avenir. Tu n'as plus à te tourmenter de moi. Aie l'esprit en repos, et pense à ta santé (Balzac, Corresp., 1834, p. 576).Il n'y a que les fous ou les impuissants qui se tourmentent pour l'impossible. L'homme supérieur sait s'arrêter: il sait qu'il a fait ce qu'il est possible de faire (Delacroix, Journal, 1857, p. 40).
Se tourmenter avec/par.Le mieux est de n'y plus penser, car l'esprit se tourmente inutilement par mille suppositions, mille prévoyances, mille craintes, peut-être très vaines (Lamennais, Lettres Cottu, 1823, p. 141).Je suis une bonne Italienne, qui n'aime pas qu'on se tourmente avec le passé. Le présent suffit bien (Rolland, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p. 1475).
3. TECHNOL. [En parlant du bois] Se déjeter, se déformer. Parquet de bois qui se tourmente. Leur bois [des chênes verts] (...) se tourmente et se fend beaucoup en se séchant (Baudrillart, Nouv. manuel forest., t. 1, 1808, p. 137).Un bois d'armoire qui se tourmente et qui craque (Arnoux, Rossignol napol., 1937, p. 97).
Prononc.: [tuʀmɑ ̃te], (il) tourmente [-mɑ ̃:t]. Étymol. et Hist. 1. 1remoit. xiies. trans. « soumettre à des souffrances, des épreuves morales; opprimer, éprouver » (Psautier de Cambridge, éd. Fr. Michel, XXXVII, 8: turmentez sui trop [afflictus sum nimis]); 1176-81 (Chrétien de Troyes, Chevalier au lion, éd. M. Roques, 6545); ca 1200 (Poème moral, éd. A. Bayot, 224: C'eret temptacïons, qui mut lo tormentoit); id. réfl. (ibid., 1628); 1538 part. prés. adj. (Est., s.v. crux, crucians); 2. a) 1130-40 trans. « faire souffrir une vive peine physique » (Wace, Ste Marguerite, éd. E. A. Francis, ms. A, 269: Ma char voil que soit tormentee Por estre m'ame el ciel salvee); 1530 spéc. en parlant d'une maladie (Palsgr., p. 759a); b) ca 1175 « soumettre à la torture » (Benoît de Ste-Maure, Chron. ducs de Normandie, éd. C. Fahlin, 7989: estre vis tormentez, Ars et penduz e desmembrez); 3. a) 1160-74 intrans. « causer, déchaîner les tempêtes » (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, II, 2784: Dieu qui pleut et qui tormente); b) ca 1165 « affronter une tempête » (Benoît de Ste-Maure, Troie, éd. L. Constans, 26866); c) 1176-81 trans. « mettre en mouvement, agiter en tempête, livrer à la tourmente » (Chrétien de Troyes, op. cit., 6515: Ou il ne finiroit ja mes de la fontainne tormanter, Et de plovoir et de vanter); ca 1200 réfl. (1reContinuation de Perceval, éd. W. Roach, mss TVD, 13115: la mer qui se tormentoit); fin xiiies. part. passé adj. (Sone de Nansai, 17243 ds T.-L.: li mers turmentee); 1676 p. ext. technol. « se déjeter (en parlant du bois) » (Félibien); 1788 [couches de roches] tourmentées (Saussure, Voy. Alpes, t. 5, p. 10 ds Littré); d) fin xives. [1468-69 ms. Breslau] intrans. « (du vent) souffler en tempête » (Jean Froissart, Chron., IV, éd. Kervyn de Lettenhove, t. 15, p. 296: les vens qui fort tourmentoient); 4. 1559 réfl. « s'agiter, remuer » (Amyot, trad. Plutarque, Hommes illustres, V, éd. G. Walter, t. 1, 1959, p. 382: [son cheval] se tourmenta tant qu'il jeta le consul la tête devant par terre); 5. notion d'altération a) 1600 « (en parlant de vin) faire travailler, altérer » (Olivier de Serres, Théâtre d'Agriculture, Paris, Jamet Métayer, III, 10, p. 228: Les vins nouveaux tourmentent fort les vieux); b) α) 1676 peint. tourmenter les couleurs (Félibien: c'est lorsqu'en peignant on les manie trop avec le pinceau ou la brosse); 1699 part. passé adj. (R. de Piles, Idée du peintre parfait, p. 53 ds Brunot t. 5, p. 738, note 2); β) 1762, juin architecture bizarre et tourmentée (Lett. de Mariette ds J. Dumesnil, Hist. des amat. franç., I, 205 ds Littré); c) 1748 « vouloir faire dire à un auteur, un texte autre chose que ce qu'ils disent » (Diderot, Essai sur les règnes de Claude et de Néron, I, 52 ds Œuvres, éd. Dieckmann-Varloot, t. 25, 1986, p. 110: tourmenter Tacite pour trouver des torts à Sénèque). Dér. de tourment*; dés. -er. Fréq. abs. littér.: 1 885. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 3 189, b) 2 881; xxes.: a) 2 664, b) 2 148. Bbg. Dumonceaux (P.). Lang. et sensibilité au xviiesiècle... Genève, 1975, pp. 52-56. − Gohin 1903, p. 348.

Wiktionnaire

Verbe - français

tourmenter \tuʁ.mɑ̃.te\ transitif 1er groupe (voir la conjugaison) (pronominal : se tourmenter)

  1. Faire souffrir quelque tourment de corps.
    • On l’a si horriblement tourmenté qu’il en est mort.
    • Au bout de ses bras un peu grêles se tourmentaient deux mains déliées, mais rouges, comme il convient à des mains de jeune fille. — (Anatole France, Le crime de Sylvestre Bonnard, Calmann-Lévy ; réédition Le Livre de Poche, 1967, page 108)
  2. Faire souffrir des douleurs causées par la maladie, par une opération chirurgicale ou par quelque moindre accident.
    • En proie à un violent accès de fièvre, je ne suis guère disposé à admirer le paysage. Je grelotte, je suis tourmenté par une soif ardente, chaque pas de mon cheval martelle ma tête bourdonnante. — (Frédéric Weisgerber, Trois mois de campagne au Maroc : étude géographique de la région parcourue, Paris : Ernest Leroux, 1904, page 133)
    • Il était authentique dans Alençon que le sang tourmentait mademoiselle Cormon ; elle faisait subir ses confidences au chevalier de Valois à qui elle nombrait ses bains de pieds, en combinant avec lui des réfrigérants. — (Honoré de Balzac, La Vieille fille, 1844)
  3. (Figuré) Donner de la peine, des tracas, du souci.
    • Ce qui tourmentait et désolait et retournait le curé de Melotte, c’était le dévergondage des filles et des garçons du pays. — (Louis Pergaud, Le Sermon difficile, dans Les Rustiques, nouvelles villageoises, 1921)
    • Il essaya de se persuader qu’il était à l’aise et en sécurité ; mais bientôt, l’indéfinissable inquiétude de l’animal sociable, abandonné dans la solitude, le tourmenta. — (H. G. Wells, La Guerre dans les airs, 1908, traduction d’Henry-D. Davray et B. Kozakiewicz, Mercure de France, Paris, 1910, page 328 de l’édition de 1921)
    • Au demeurant, sur ce thème, son humeur était variable : être une espèce de rastaquouère, porter un nom à coucher dehors avec un billet de logement, bref être irrémédiablement différent ne le tourmentait pas en permanence ; au contraire, parfois, ça l'amusait. — (Gabriel Matzneff, La lettre au capitaine Brunner, Éditions de la Table Ronde, 2015, chapitre 7)
  4. Importuner beaucoup ; harceler.
    • Comme, parmi les perdrix, il naît un tiers plus de mâles que de femelles, il arrive, dans le temps de la pariade, que plusieurs coqs se disputent la même poule qui, à force d’être tourmentée, déserte souvent le canton; […]. — (Dictionnaire des forêts et des chasses publié par le Journal des Chasseurs, sous la direction de Léon Bertrand, Paris, 1846, page 346)
    • Une question qui n’a guère tourmenté les « vampirologues » est celle de savoir pourquoi le motif vampirique naît en Europe centrale. — (Florent Montaclair, Le vampire dans la littérature romantique française, 1820-1868: textes et documents, Presses Univ. de Franche-Comté, 2010, chapitre 2, page 19)
    • Cet homme me tourmente avec ses visites, ses lettres, ses demandes continuelles.
  5. (Figuré) Remuer quelque chose de façon désordonnée, fourrager.
    • Guillaume était taciturne, et, enfoncé sous la grande cheminée, il tourmentait les tisons avec une agitation singulière. — (George Sand, Jeanne, 1844)
  6. (Pronominal) S’inquiéter.
    • À quoi sert de vous tourmenter si fort ?
    • Il ne faut pas se tourmenter pour si peu de chose.
    • Ne vous tourmentez point de cela, pour cela.
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Littré (1872-1877)

TOURMENTER (tour-man-té) v. a.
  • 1Faire souffrir quelque tourment corporel, quelque supplice. Et depuis tant de temps que nous les tourmentons [les chrétiens], Les a-t-on vus mutins ? les a-t-on vus rebelles ? Corneille, Poly. IV, 6. Jeta dans les prisons ou envoya en exil, ou fit tourmenter cruellement un assez grand nombre de personnes, Fontenelle, Oracl. II, 3.
  • 2Causer de la douleur en parlant d'une maladie ou de tout autre accident. La goutte le tourmente. Nous étions tourmentés de cousins.
  • 3 Fig. Donner des peines d'esprit. Il faut surtout observer de ne pas tourmenter sa tête, Bossuet, Lett. Corn. II. Ce n'est point le présent que je crains, c'est le passé qui me tourmente, Rousseau, Hél. IV, 1. Un désir inquiet tourmentait ma jeunesse, P. Lebrun, Pallas, II, 3. Ô mon fils ! les hommes ont vécu pendant plusieurs siècles dans une ignorance qui ne tourmentait point leur raison, Barthélemy, Anach. ch. 30.

    Absolument. Maudite jalousie ! poursuivit-il, plus cruelle encore pour ceux qui tourmentent que pour ceux qui sont tourmentés ! Hamilton, Gramm. 9.

    Tourmenter sa vie, se donner bien de la peine de corps et d'esprit. Oui, je suis las de tourmenter ma vie, Voltaire, Enf. prof. III, 3.

  • 4Importuner, harceler. Cet homme me tourmente avec ses visites. Ses créanciers le tourmentent. Cessez de tourmenter une âme infortunée, Racine, Mithr. III, 5. Je ne puis croire que vous cherchiez à le tourmenter [J. J. Rousseau] dans sa solitude, où il est déjà assez malheureux par sa santé, par sa pauvreté, et surtout par son caractère, D'Alembert, Lett. à Voltaire, 3 janv. 1765.

    Terme de manége. Tourmenter son cheval, le châtier, ou l'inquiéter mal à propos. Le roi [Louis XIII] prit amitié pour Saint-Simon, à cause… qu'il ne tourmentait pas trop ses chevaux, Tallemant, Louis XII.

  • 5Agiter violemment. La mer tourmenta longtemps notre vaisseau. Ce cheval tourmente son cavalier. Il [le vent] frappe, élève, abaisse et tourmente les ondes, Delille, Trois règn. II.
  • 6Déjeter. La sécheresse dessèche les futailles, les tourmente, et fait transsuder le vin, Genlis, Maison rust. t. III, p. 303, dans POUGENS.
  • 7Forcer. Et, tourmentant sa voix pour appeler son frère, Lui pardonne des yeux et meurt, Gilbert, Mort d'Abel, ch. VII.
  • 8Travailler avec effort. Les champs te prodiguaient leurs tributs volontaires : Il faudra tourmenter un avare terrain, Delille, Parad. perdu, x.
  • 9Tourmenter un auteur, un texte, vouloir leur faire dire autre chose que ce qu'ils disent. Une chose qui me surprend toujours également, c'est l'infatigable et cruel acharnement à tourmenter Tacite pour trouver des torts à Sénèque, Diderot, Cl. et Nér. I, 52.
  • 10 Terme d'art et de littérature. Retravailler de telle façon que l'effort se fasse sentir. L'artiste a tant consulté, si changé, si tourmenté sa composition, que je ne sais plus ce qu'il en reste, Diderot, Salon de 1767, Œuv. t. XIV, p. 121. Boileau a tourmenté cet endroit de son poëme [le Lutrin] ; il avait mis d'abord un horloger à la place du perruquier ; il trouva que le personnage n'était pas assez comique, il changea et ne fit pas mieux, Marmontel, Œuv. t. IX, p. 175.

    Terme de peinture. Tourmenter des couleurs, les frotter après les avoir couchées. Tourmenter un dessin, le surcharger de traits.

  • 11Se tourmenter, v. réfl. Se remuer, s'agiter. Ce cheval se tourmente. Elle [l'âme] se tourmente comme dans un songe ; on veut parler, la voix ne se suit pas…, Bossuet, la Vallière. Les cris redoublés de leur conductrice [poule ayant couvé des canards] qui, du rivage, les rappelle en vain, en s'agitant et se tourmentant comme une mère désolée, Buffon, Ois. t. XVII, p. 215. Le troisième se tourmentant sur sa chaise, cherchant une bonne posture et n'en trouvant point, Diderot, Lett. à Mlle Voland, 17 août 1759.
  • 12Se déjeter. Le bois neuf se tourmente beaucoup. Il est bien difficile d'empêcher que les barreaux ne se tourmentent, quand on les trempe, Brisson, Traité de phys. t. III, p. 248.
  • 13Se donner bien de la peine, s'inquiéter. Voyez comme il est bon de se tourmenter un peu pour avoir des places, Sévigné, 17 janv. 1680. Ceux de Zurich… s'en plaignent [d'un accord sur la cène] à Luther, qui se tourmente beaucoup pour les satisfaire, Bossuet, Var. IV, 29. Elle [l'âme] se tourmente de voir son bien si détaché d'elle-même, si exposé au hasard, si soumis au pouvoir d'autrui, Bossuet, la Vallière. Vous cherchez, prince, à vous tourmenter, Racine, Mithr. II, 6. Pourquoi nous tourmenter de leurs ordres suprêmes [des dieux] ? Racine, Iphig. I, 2. Il n'y a qu'une seule chose au-dessus de leur puissance [de mes ennemis], et dont je les défie : c'est, en se tourmentant de moi, de me forcer à me tourmenter d'eux, Rousseau, Confess. X.

    Se tourmenter à. Qu'on ne se tourmente pas à chercher, comme on a fait jusqu'ici, les articles fondamentaux [de la réforme] ; voici le fondement des fondements [que le pape est l'antechrist], Bossuet, Var. XIII, 10.

    On a dit aussi : se tourmenter de. Quand je me tourmente de vouloir vous inspirer ici la même attention [à votre santé], Sévigné, 22 nov. 1679.

    Se tourmenter qui…, se tourmenter pour savoir qui… Vous vous tourmentez qui aura la première place, Bossuet, Méd. sur l'Év. la Cène, 69e jour.

HISTORIQUE

XIIe s. Tormente ceaus [ceux] qui nos grevent et nos font outraige, Machab. II, 1. Se [je] seüsse de premiers à l'enprendre [la croisade] Que li congiés [départ] me tormentast ensi…, Couci, XXIV. De ce sui au cuer dolente, Que cil [son amant] n'est en cest païs, Que si sovent me tormente, Ke je n'ai ne jeu ne ris, DAME DE FAIELE, dans Couci.

XIIIe s. Joieusement [ils] chevauchent, n'est riens qui les tormente, Berte, CXXXIV. N'aura [il n'y aura] homme en la terre qui de riens vous tormente, ib. CXI. Et Berte rentre el bois dolente et tourmentée, ib. XLVI. Gar que fortune ne t'abate, Comment qu'el te tormente et bate, la Rose, 5902. Lors li ai dit : sachiés, biau sire, Amors durement [beaucoup] me tormente, ib. 2913.

XIVe s. Il ne se muent ou deportent de leur ire, sans ce que ceulx contre lesquels il sont irez soient tormentez ou punis, Oresme, Éth. 129. Et la mer se tourmente, uns grans vens va levant, Baud. de Seb. III, 251.

XVe s. Et disoit que le diable la tourmentoit, et sailloit en l'air, crioit et escumoit, et faisoit moult d'autres merveilles, J. de Troyes, Chron. 1460.

XVIe s. Le remors qui tormente la conscience de Tibere, Montaigne, IV, 62. Il estima que la chose publique seroit moins agitée et moins tourmentée, quand elle seroit affermie et arrestêe avec ces deux cours [de justice], Amyot, Solon, 33. Le sage medecin quelquefois aussi luy donne des medecines qui le travaillent et le tourmentent, pour le guarir, Amyot, Péric. 32. Son cheval s'effraya si estrangement, et se tourmenta tant qu'il jetta le consul la teste devant par terre, Amyot, Fab. v. Estant la mer tourmentée, comme en la saison d'hvver, Amyot, Agés. 67.

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Étymologie de « tourmenter »

Tourment ; provenç. tormentar, turmentar ; espagn. tormentar ; ital. tormentare.

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 Dérivé de tourment, avec le suffixe -er.
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Phonétique du mot « tourmenter »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
tourmenter turmɑ̃te

Fréquence d'apparition du mot « tourmenter » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « tourmenter »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « tourmenter »

  • Quand le présent est si absorbant, qui pourrait se tourmenter de l’avenir ?
    Robert Louis Stevenson — Voyages avec un âne dans les Cévènnes
  • Rien ne sert de se tourmenter d'une chose quand elle est faite, sinon de l'empirer.
    Bonaventure Des Périers — Nouvelles récréations et joyeux devis
  • Deux de mes jours comptés ne me tourmenteront jamais : Hier, déjà oublié, demain, dont je n'ai nulle envie.
    Omar Khayyâm

Traductions du mot « tourmenter »

Langue Traduction
Anglais torment
Espagnol tormento
Italien tormento
Allemand quälen
Chinois 折磨
Arabe عذاب
Portugais tormento
Russe мучение
Japonais 苦しめる
Basque oinazeak
Corse turmentu
Source : Google Translate API

Synonymes de « tourmenter »

Source : synonymes de tourmenter sur lebonsynonyme.fr

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Tourmenter

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